synthèse
Le 30 août 2023, des militaires congolais ont réprimé avec brutalité une manifestation organisée par un groupe politique et religieux à Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) ; ils ont tué au moins 56 personnes selon les chiffres officiels, en ont blessé plus de 80 et en ont arrêté plus de 150. Ce groupe du nom de Foi naturelle judaïque messianique vers les nations – Testament de la puissance de la parole (FNJMN), dont les adeptes se désignent eux-mêmes par le terme « Wazalendo » ou « Messiatha », réclamait le départ de la Mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO). Au lendemain du massacre, les autorités ont minimisé le nombre de morts et rejeté la faute sur les victimes, qu’elles ont décrites comme des « bandits armés, drogués, manipulés, à la solde du M23/RDF », faisant référence au groupe armé appelé Mouvement du 23 mars (M23), actif dans la province du Nord-Kivu, où se situe la ville de Goma, et soutenu par les Forces rwandaises de défense (RDF). Face au tollé public déclenché par l’apparition de vidéos du massacre sur les réseaux sociaux, et à la suite des affirmations selon lesquelles le nombre de morts était plus élevé qu’elles ne l’avaient initialement reconnu, les autorités ont admis que les forces de sécurité avaient tué plusieurs dizaines de personnes. Cependant, elles ont soutenu que les forces de sécurité étaient intervenues pour rétablir l’ordre, et déclaré que les adeptes du groupe avaient semé la violence en premier, attaquant la police et lapidant à mort un policier. En conséquence, six agents ont été arrêtés et jugés par un tribunal militaire à Goma. Début octobre 2023, quatre d’entre eux, dont un commandant de l’armée, ont été déclarés coupables de meurtre et de tentative de meurtre.
Entre septembre 2023 et octobre 2024, Amnesty International a enquêté sur le massacre en examinant les scènes de crime, en interrogeant plus de 70 personnes – dont des personnes ayant survécu à l’attaque, des témoins et des responsables, et en analysant des dossiers judiciaires et des documents officiels confidentiels. Le Laboratoire de preuves du programme Réaction aux crises d’Amnesty International a vérifié des dizaines de vidéos et de photos du massacre ainsi que des images satellite pour corroborer les conclusions. Amnesty International a pu reconstituer la succession temporelle et spatiale exacte des événements et a identifié trois officiers de l’armée qui devraient faire l’objet d’une enquête individuelle et, s’il existe suffisamment de preuves, être poursuivis pour les homicides et autres crimes de droit international qui ont été commis. Parmi ces personnes figurent : le lieutenant-général Constant Ndima, qui, en tant que gouverneur et commandant des opérations militaires du Nord-Kivu au moment du massacre, a ordonné aux forces de sécurité de planifier les opérations qui ont conduit au massacre et n’a pris aucune mesure à l’encontre des responsables ; Le colonel Mike Mikombe Kalamba, commandant de la Brigade interarmes (BIA) de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu, dont l’entière responsabilité ne paraît pas avoir été établie lors du procès de Goma ; et le major Peter Kabwe Ngandu, commandant du bataillon des forces spéciales à Goma, qui a semblé diriger personnellement l’opération à la station de radio des Wazalendo, où plusieurs membres du groupe ont été tués, blessés ou arrêtés, et qui était présent lors de la fusillade de masse au « temple »[1], où des dizaines d’autres adeptes ont été tués. Il a également supervisé le chargement des corps et des personnes blessées par les soldats des forces spéciales dans des camions.
Entre juillet et octobre 2024, Amnesty International a écrit à plusieurs responsables de la RDC et des Nations unies dont le président de la République, le ministre de la Défense, le procureur général militaire et le secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, pour leur faire part de la synthèse de ses principales conclusions et solliciter leur réaction ou commentaires. L’organisation a également écrit aux trois officiers de l’armée cités dans ce rapport pour leur responsabilité individuelle. Au moment de la rédaction, Amnesty International avait reçu et tenu compte dans le rapport des réponses du secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, de l’ancien gouverneur militaire du Nord-Kivu Constant Ndima, et de l’ancien commandant de la BIA dans le Nord-Kivu Mike Mikombe, qui sont disponibles en annexe. D’autres responsables et le troisième officier de l’armée impliqué, le major Peter Kabwe, n’ont pas répondu aux demandes d’Amnesty International.
Opération Keba
Lors des précédentes manifestations qui se sont déroulées entre juin et août 2023 à Goma, sans incident notable, le dirigeant des Wazalendo, Efraimu Bisimwa, a annoncé qu’une manifestation majeure était prévue le 30 août 2023 pour exiger le départ de la MONUSCO et des autres forces étrangères, les accusant d’« occuper la RDC contre la volonté des ancêtres congolais ». Conformément au droit congolais, il a écrit au maire de Goma le 19 août 2023 pour déclarer officiellement la manifestation prévue.
Le 21 août 2023, la cheffe du bureau de la MONUSCO à Goma a écrit au gouverneur militaire du Nord-Kivu, le lieutenant-général Constant Ndima, pour exprimer les inquiétudes de l’Organisation des Nations unies (ONU) au sujet de la manifestation prévue et demander son interdiction, « au vu de son caractère haineux et violent ». Elle a transmis une copie de ce message au maire de la ville. Deux jours plus tard, le maire de Goma – qui, depuis l’introduction de l’« état de siège » en mai 2021, est un officier de police en activité – a publié une déclaration interdisant la manifestation, au motif que l’association FNJMN (Wazalendo) n’avait pas de statut légal pour fonctionner, même si elle avait organisé des manifestations similaires sans entrave au cours des trois mois précédents. Le 25 août 2023, en sa capacité de commandant des opérations militaires du Nord-Kivu, le gouverneur a envoyé un télégramme aux unités de l’armée et de la police sous son autorité, leur ordonnant de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la ville et les infrastructures de la MONUSCO. Amnesty International a obtenu les plans opérationnels élaborés par la police et l’armée en réponse aux instructions du gouverneur. L’un de ces plans, baptisé « opération Keba » (« Attention », en lingala), a été élaboré par le commandant de la Brigade interarmes de la Garde républicaine, qui comprend les forces spéciales. C’est cette force qui sera au cœur du massacre.
Folie Meurtrière
Le 30 août vers 3 heures du matin, une unité commando, dirigée semble-t-il par le major Peter Kabwe Ngandu, commandant du bataillon des forces spéciales à Goma, a effectué une première opération à la station de radio des Wazalendo, située dans le quartier Kyeshero, dans le nord-ouest de la ville de Goma. Des soldats ont fait irruption dans la station de radio, où ils ont arrêté 12 personnes, dont le dirigeant des Wazalendo, et saisi des émetteurs et d’autres équipements. Ils ont attaché les personnes arrêtées et les ont escortées jusque dans la rue, où des camionettes de l’armée étaient garées. Là, ils ont ouvert le feu sur un groupe comprenant les 12 personnes qui se trouvaient dans la station de radio et d’autres qui s’étaient rassemblées après avoir entendu parler de l’opération, tuant six personnes et en blessant au moins 10. Parmi les personnes tuées figure Tabita Fabiola, une journaliste de 44 ans, et l’un des agents de sécurité arrêtés à l’intérieur du bâtiment. Le dirigeant des Wazalendo, Efraimu Bisimwa, et cinq autres personnes ayant survécu à la fusillade, ont été arrêtées et conduites au siège de la Garde républicaine, à l’aéroport de Goma, où elles ont subi des actes de torture et d’autres mauvais traitements.
Pendant ce temps, à deux rues de là, une patrouille de police avait tiré sur des adeptes Wazalendo qui se dirigeaient vers la station de radio, tuant l’un d’eux. Certains des adeptes ont capturé un officier à court de munitions et l’ont ramené à leur temple. Vers 6 heures du matin, la police a tiré sur un autre groupe d’adeptes Wazalendo alors qu’ils quittaient le temple, tuant l’un des fils d’Efraimu Bisimwa, Uwezo Milele. Après cet événement, un groupe d’adeptes Wazalendo a lapidé le policier capturé.
Des soldats congolais, principalement des forces spéciales de la Garde républicaine, se sont déployés massivement autour du temple à 7 heures du matin, alors que des centaines d’adeptes Wazalendo se rassemblaient dans une rue à proximité. Pendant environ une demi-heure, deux officiers de la 34e région militaire ont essayé de convaincre le groupe de cesser sa marche. Vers 7 h 30, le commandant de la BIA de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu, le colonel Mike Mikombe Kalamba, a brusquement mis fin aux discussions. Selon cinq témoins, et notamment les deux soldats de la 34e région militaire, il a ordonné à ses hommes d’ouvrir le feu. Des images vérifiées par Amnesty International montrent des explosions probablement dues à des balles tirées vers la foule, des soldats ramassant des corps, les traînant et les chargeant dans des camions de l’armée. Selon des témoins, des militaires sont restés dans le secteur pendant plusieurs heures, nettoyant des flaques de sang, collectant des restes humains et arrêtant des adeptes Wazalendo, des passant·e·s et des habitant·e·s. Avant de quitter la zone, ils ont pillé le temple et l’ont réduit en cendres.
Bilan Incertain, Corps Malmenés
Les autorités affirment que 56 civil·e·s ont été tués. On ignore si ce chiffre inclut les personnes ayant succombé à leurs blessures dans les jours qui ont suivi. Amnesty International a reçu des informations concordantes selon lesquelles au moins 10 personnes, dont une femme et son enfant de quatre ans, auraient été vues pour la dernière fois au temple des Wazalendo le 30 août et n’ont plus donné de nouvelles depuis cette date. Un rapport confidentiel des Nations unies consulté par Amnesty International a établi le nombre de morts à 102 : 90 hommes, huit femmes et quatre garçons, sans compter les 80 blessés. Aucun militaire n’a été tué ni blessé. Amnesty International n’a trouvé aucune preuve que les adeptes Wazalendo étaient armés, pas plus que les tribunaux militaires, qui ont rendu deux jugements en relation avec le massacre.
Pendant 15 jours, les autorités ont empêché les familles d’accéder aux corps pour les identifier ou les inhumer dignement. Les corps sont restés entassés à l’hôpital militaire de Goma, certains à l’air libre. Lorsqu’ils ont été enterrés trois semaines plus tard, ils étaient dans un état de décomposition avancée. Aucune enquête balistique ni autopsie n’a été réalisée dans le cadre des investigations promises par les autorités. Aucun échantillon d’ADN n’a été prélevé pour pouvoir identifier 27 corps officiellement inconnus. Un homme ayant identifié le corps en décomposition de son neveu a déclaré : « C’est comme s’ils l’avaient tué une seconde fois. »
Une Justice Déficiente
Entre le 1er septembre et le 10 octobre, les autorités ont organisé deux procès distincts devant les tribunaux militaires de Goma : celui de 116 adeptes Wazalendo et d’autres personnes, accusés de l’homicide du policier et d’insurrection ; et celui de six membres de la Garde républicaine, dont deux officiers de haut rang, accusés d’avoir tué et blessé des adeptes. Bien qu’un officier et trois soldats aient été déclarés coupables de ces meurtres, Amnesty International a constaté que l’enquête avait été hâtive et incomplète. Le procès des adeptes Wazalendo, y compris les poursuites collectives engagées à leur encontre pour l’homicide du policier, était également loin d’être conforme aux normes d’équité.
Ce rapport révèle que le massacre du 30 août est le résultat d’une série d’actions délibérées des autorités, à la suite d’une demande explicite qui leur a été adressée par la MONUSCO en vue d’« interdire » la manifestation. Le massacre n’a pas découlé d’une bévue de la part de quelques soldats qui seraient intervenus de manière inattendue à la suite du lynchage d’un policier par des adeptes Wazalendo, comme l’affirment les autorités.
En reconstituant les événements des 29 et 30 août 2023, le rapport montre que les soldats ont effectué la première opération visant les membres du mouvement Wazalendo vers 3 heures du matin à la station de radio, tuant au moins six personnes et en arrêtant d’autres, dont le dirigeant des Wazalendo. C’est cette opération qui a déclenché la capture d’un policier vers 4 heures du matin par un groupe de membres du mouvement Wazalendo, et sa lapidation vers 6 heures du matin.
L’opération contre les manifestant·e·s s’est déroulée sur fond d’affirmations injustifiées selon lesquelles la FNJMN (Wazalendo) n’était pas une organisation enregistrée et ses activités devaient donc être restreintes. Les autorités ont avancé ce motif pour interdire à titre préventif la manifestation, au mépris des normes relatives aux réunions pacifiques.
Les forces de sécurité et de défense congolaises n’auraient pas dû être déployées pour assurer le maintien de l’ordre lors de la manifestation, car ce rôle devrait être réservé aux responsables de l’application des lois formés à cet effet. L’utilisation d’armes à feu ne peut être justifiée qu’en dernier recours face à une menace imminente de mort ou de blessure grave. Les soldats ont délibérément tué des dizaines de personnes, à la fois dans les heures qui ont précédé la manifestation et au cours de celle-ci, en violation des normes internationales relatives aux droits humains, y compris celles régissant l’utilisation des armes à feu.
Ces homicides doivent être considérés dans le contexte des attaques généralisées et/ou systématiques contre la population civile du Nord-Kivu et d’autres parties de l’est de la RDC par les forces gouvernementales et des groupes armés. Par conséquent, ils pourraient constituer le crime contre l’humanité de meurtre. La situation en RDC fait l’objet d’une enquête du Bureau du procureur de la Cour pénale internationale[2], dans le cadre de laquelle ce dernier a récemment décidé d’accorder la « priorité » aux « crimes présumés relevant du Statut de Rome commis dans la province du Nord-Kivu depuis janvier 2022 »[3].
Appels Clés
Comme le montre ce rapport, le massacre du 30 août 2023 à Goma était une opération bien préparée, menée principalement par la Garde républicaine, à la suite d’une demande de la MONUSCO d’une « intervention ferme afin d’éviter toute menace contre nos bases et notre personnel » et d’une interdiction de la manifestation « au vu de son caractère haineux et violent ». Le droit de manifester pacifiquement est garanti par le droit congolais et plusieurs instruments internationaux ratifiés par la RDC. De même, le droit à la vie, le droit de ne pas être soumis à la torture et tous les autres droits violés dans le contexte du massacre du 30 août à Goma et dans les environs sont protégés par le droit international. Les victimes de ces crimes odieux ont le droit d’obtenir vérité et justice. Elles ne doivent pas être punies collectivement.
Amnesty International appelle le président Félix Tshisekedi à suspendre immédiatement le général Constant Ndima et le major Peter Kabwe de l’armée congolaise, le temps qu’une enquête soit menée. Le colonel Mike Mikombe, qui était le commandant de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu à l’époque et qui a été condamné dans le cadre des homicides en question, devrait également faire l’objet d’une enquête plus approfondie et, s’il existe des preuves suffisantes contre lui, être poursuivi pour ses autres actes, y compris la torture et les autres mauvais traitements infligés aux adeptes Wazalendo, ainsi que sa responsabilité éventuelle en tant que supérieur hiérarchique. Les autorités de la RDC doivent rouvrir les enquêtes sur ce massacre, conformément aux normes régionales et internationales, afin d’établir la vérité et d’amener toutes les personnes impliquées à rendre des comptes. Le président Félix Tshisekedi devrait en outre prendre des mesures urgentes pour préciser les circonstances exceptionnelles dans lesquelles la Garde républicaine peut participer aux activités d’application des lois, conformément aux normes internationales. Enfin, le président doit lever l’« état de siège » dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri et, avec le Parlement, prendre des mesures urgentes pour limiter la participation de l’armée aux missions de maintien de l’ordre. Quant au Bureau du procureur de la CPI, il devrait envisager de se pencher sur les homicides perpétrés le 30 août 2023 à Goma dans le cadre de l’enquête sur la situation dans l’est de la RDC.
La demande de la MONUSCO aux autorités congolaises s’agissant d’interdire la manifestation des Wazalendo n’a pas suffisamment mis l’accent sur l’idée que les rassemblements devaient être présumés pacifiques (en l’absence de preuves irréfutables du contraire) ni sur les obligations de l’État de faciliter et de protéger le rassemblement. Cette demande a fourni le contexte immédiat dans lequel les autorités congolaises ont violé le droit de réunion pacifique protégé par le droit international relatif aux droits humains. La déclaration de la MONUSCO juste après le massacre était également lacunaire car elle semblait justifier la réponse des autorités à la manifestation et rejeter la faute sur les organisateurs. Elle indiquait que la manifestation n’avait pas été autorisée – ce qui n’est pas requis par le droit de la RDC, ajoutant que l’armée et la police avaient agi « conformément à leur responsabilité première en matière de sécurité » dans le but « d’empêcher la tenue d’une manifestation qui s’annonçait violente, de l’aveu même de ses organisateurs ». Amnesty International appelle le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) à enquêter rapidement sur le rôle joué par la MONUSCO et ses responsables dans les événements qui ont conduit au massacre.
Méthodologie
Le rapport se fonde sur une enquête approfondie menée par Amnesty International entre septembre 2023 et octobre 2024, comprenant plus de 70 entretiens, qui a permis de reconstituer le déroulement des événements grâce aux dizaines de photos, vidéos et documents analysés, dont des documents confidentiels du gouvernement et des Nations unies et des dossiers judiciaires.
À partir du 30 août, le Laboratoire de preuves du programme Réaction aux crises d’Amnesty International a vérifié au moins 80 photos et vidéos du massacre et des événements connexes. Associés à l’imagerie satellite, aux visites sur le terrain et aux témoignages oculaires, ces éléments ont permis de reconstituer la succession temporelle et spatiale des événements.
Une équipe d’Amnesty International s’est rendue à Goma entre le 22 septembre et le 1er octobre 2023, où elle a mené des recherches et 59 entretiens, dont 42 individuellement et les autres sous la forme de discussions en groupe. Douze entretiens supplémentaires ont été réalisés par un partenaire de recherche basé à Goma ainsi que par appel vocal entre le 30 août et le 30 novembre 2023. Des victimes, des témoins oculaires, des proches de victimes, des professionnel·le·s de la santé, des avocat·e·s de la défense et de victimes, des procureurs militaires, des fonctionnaires des Nations unies, des membres du personnel de morgues et de cimetières, des journalistes, des spécialistes militaires et d’autres personnes dont le témoignage présente un intérêt ont été interrogés, principalement en swahili et en français. Parmi les personnes interrogées, il y avait 11 femmes.
Amnesty International a analysé une centaine de pages de dossiers judiciaires, de documents officiels, ainsi que de rapports confidentiels des autorités congolaises et de la MONUSCO. L’équipe de recherche a également analysé des enregistrements audio et vidéo d’audiences tenues dans le cadre des procès en première instance des Wazalendo devant le tribunal militaire de garnison de Goma, ainsi que celui de quatre militaires du rang et de deux officiers de la Garde républicaine devant la Cour militaire du Nord-Kivu. Les procès en appel, qui étaient en attente au moment de la publication, sortent du cadre du présent rapport.
En juillet 2024, Amnesty International a écrit à plusieurs responsables de la RDC et des Nations unies dont le président de la République, le ministre de la Défense, le ministre de l’Intérieur, le ministre de la Justice, le procureur général militaire et le secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, pour leur faire part de la synthèse de ses principales conclusions et solliciter leur réaction ou commentaires. L’organisation a également écrit aux trois officiers de l’armée cités dans ce rapport pour leur responsabilité individuelle. Au moment de la publication, Amnesty International avait reçu des réponses du secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, de l’ancien gouverneur militaire du Nord-Kivu, Constant Ndima, et de l’ancien commandant de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu, Mike Mikombe. Amnesty International a examiné leurs réponses, qui sont en annexe du présent rapport, et a mis à jour ses conclusions en conséquence.
Contexte du massacre
Conflit Armé, Intervention Étrangère et Soulèvement Populaire
La MONUSCO, déployée depuis 1999[4], a souvent été incapable de protéger les civil·e·s contre les attaques des groupes armés, y compris le M23, et parfois de l’armée congolaise elle-même[5].
Lorsqu’il est arrivé au pouvoir en 2019, le président de la RDC, Félix Tshisekedi, s’est engagé à améliorer la sécurité et la protection de la population civile dans l’est de la RDC[6]. Optant pour une approche essentiellement militariste, il a donné un rôle plus important à l’armée congolaise et a sollicité des interventions militaires de pays de la région, tout en critiquant la MONUSCO et en poussant à son retrait[7]. Il a déclaré l’« état de siège » (similaire à l’état d’urgence) dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu en mai 2021, conférant des pouvoirs d’exception à l’armée et à la police, au motif que cela permettrait de restaurer rapidement la sécurité[8]. La mesure a été continuellement étendue et utilisée par l’armée et la police pour porter atteinte aux droits humains[9]. Plus tard dans l’année, le gouvernement de Félix Tshisekedi a autorisé l’intervention de l’armée ougandaise dans certaines parties du Nord-Kivu et de l’Ituri[10] et, en juin 2022, celle de la Force régionale de la Communauté de l’Afrique de l’Est (EACRF)[11]. En mai 2023, après avoir critiqué l’échec de l’EACRF[12], il a demandé l’intervention de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), qui a déployée ses forces dans le Nord-Kivu en décembre 2023[13].
Le gouvernement de la RDC a ouvertement mobilisé des groupes armés locaux[14] et recouru à des sociétés militaires privées[15] pour aider l’armée depuis 2023, sur fond de propos belliqueux persistants entre la RDC et le Rwanda. Les autorités congolaises accusent le Rwanda d’agression et de contribution au financement des rebelles du M23[16]. Ces derniers occupent des parties de la province du Nord-Kivu depuis novembre 2021, malgré les efforts régionaux et internationaux de désarmement[17].
Face à l’insécurité qui persiste en dépit des interventions de l’ONU et des forces régionales, la population manifeste régulièrement contre la présence de ces forces. Lors des manifestations anti-MONUSCO qui ont eu lieu à Goma et dans d’autres villes en juillet 2022, les forces de sécurité ont tué au moins 32 personnes, tandis que quatre casques bleus de l’ONU ont été tués par des manifestant·e·s, selon le gouvernement[18].
C’est dans ce contexte que la FNJMN est née, début 2023. Bien que les déclarations et les actions du groupe politique et religieux aient commencé à être largement diffusées vers juin 2023, celui-ci était légalement enregistré en tant qu’association à but non lucratif et opérait à Goma depuis 2019, selon des documents officiels d’immatriculation qu’Amnesty International a pu consulter et de membres du groupe.[19]. Il prône le retour aux pratiques spirituelles traditionnelles congolaises et africaines et le « rejet de l’impérialisme sous toutes ses formes »[20]. Ses membres sont appelés Wazalendo, ce qui signifie « patriotes » en swahili[21]. Avant sa manifestation prévue le 30 août 2023, le groupe a organisé trois manifestations pacifiques à Goma les 30 juin, 30 juillet et 2 août 2023[22]. Ces manifestations, dont au moins deux au siège de la MONUSCO, se sont déroulées sans violence[23].
Projets de Manifestation et Réaction des Autorités
Lors de précédentes manifestations en juin et en juillet, Efraimu Bisimwa, le dirigeant des Wazalendo, avait annoncé une « manifestation majeure pour le 30 août » afin d’exiger le départ de la MONUSCO. Pendant des semaines, il a répété cet appel sur les stations de radio locales, les réseaux sociaux et lors des réunions cultuelles du groupe, incitant ses adeptes et le public à y participer[24]. Conformément au droit congolais, il a écrit au maire de Goma le 19 août pour déclarer officiellement la manifestation prévue[25]. Il a indiqué : « Comme d’habitude, ce sera une marche silencieuse et pacifique. Nous quitterons notre temple pour nous rendre au siège de la MONUSCO. Nos ancêtres nous protégeront de tous ceux qui pourraient être tentés de nous attaquer[26]. »
Demande de la MONUSCO d’Interdire les Manifestations
Le 21 août, la cheffe du bureau de la MONUSCO à Goma a écrit au gouverneur du Nord-Kivu, le lieutenant-général Constant Ndima, pour exprimer des inquiétudes au sujet de la manifestation prévue et lui demander de l’empêcher[27]. La lettre indiquait : « L’appel [des Wazalendo] est sans équivoque et constitue une incitation claire à la violence contre la MONUSCO mais aussi les autorités si elles venaient à s’imposer contre cette mobilisation […]. Nous restons préoccupés par les motivations qui animent ces “Wazalendo”, et la FNJMN en particulier, ainsi que les risques sécuritaires que leurs agissements pourraient avoir non seulement contre nos bases et notre personnel, mais aussi contre les services de sécurité congolais et les autorités en place[28]. » Dans ce qui semble être une référence implicite au conflit avec le M23 et aux tensions de la RDC avec le Rwanda, elle a poursuivi en mentionnant « une manipulation » qui pourrait provoquer « une instabilité et vulnérabilité qu’il sera difficile de contenir à un moment où vos propres efforts visent à endiguer l’insécurité et à anticiper les menaces dans la province »[29]. La lettre demandait l’« intervention ferme » du gouverneur auprès des Wazalendo « afin d’éviter toute menace contre nos bases et notre personnel » et l’exhortait à interdire la manifestation « au vu de son caractère haineux et violent »[30].
Le gouverneur a ensuite répondu à la cheffe du bureau de la MONUSCO à Goma le 28 août, l’assurant avoir transmis des ordres aux forces de sécurité pour la « prise de dispositions nécessaires » en vue de répondre à sa demande[31].
En réponse aux conclusions et aux questions d’Amnesty International, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix des Nations unies a déclaré que la demande de la MONUSCO aux autorités d’interdire la manifestation faisait suite à des échanges d’informations avec les autorités, qui indiquaient que « les actions prévues pour le 30 août présentaient des risques importants tant pour les casques bleus que pour les résidentes et résidents de Goma »[32]. Il a indiqué que « les communications de la Mission ont souligné la nécessité que les autorités congolaises répondent de manière proactive à ces préoccupations afin d’éviter toute perte de vie ; et ont été présentées dans le cadre d’un dialogue régulier, soulignant l’importance de respecter les droits humains tout en évitant les restrictions indues aux libertés d’expression et de réunion pacifique »[33]. Il a également souligné : « Parmi les exemples notables, citons : une lettre datée du 30 juin de M. Bisimwa, chef de la Foi Naturelle Judaïque Messianique vers les Nations (FNJMN), adressée au Président Félix Tshisekedi, incitant à la violence contre la MONUSCO et d’autres agences des Nations Unies ; une communication publique de la FNJMN le 18 juillet au maire de Goma réitérant son intention d’ériger une statue de Patrice Lumumba sur le terrain de la base logistique de la Mission à Goma ; des manifestations organisées par la FNJMN les 30 et 31 juillet devant la base logistique de la Mission ; la diffusion de messages hostiles ciblant la MONUSCO diffusés le 2 août sur la radio communautaire de la FNJMN, Uwezo wa Neno ; ainsi que des messages affiliés aux Wazalendo et à la FNJMN diffusés sur les réseaux sociaux appelant à une campagne généralisée contre la MONUSCO à partir du 30 août »[34]. Amnesty International a examiné la plupart des déclarations et messages transmis par la FNMJN avant le 30 août 2023, y compris la lettre d’Efraimu Bisimwa au président Félix Tshisekedi du 30 juin, sa lettre au maire de Goma du 18 juillet ainsi que plusieurs publications sur les réseaux sociaux, mais n’a trouvé aucun élément indiquant une incitation à la violence. Le 11 octobre 2024, Amnesty International a envoyé une lettre de suivi au secrétaire général adjoint au maintien des opérations de paix des Nations unies, demandant des informations supplémentaires à l’appui de ses affirmations[35]. La lettre réitérait les questions restées sans réponse concernant les évaluations entreprises par la MONUSCO, le cas échéant, pour déterminer si et comment les risques identifiés auraient pu être atténués sans recourir à une interdiction pure et simple de la manifestation prévue, et en ce qui concerne les conséquences possibles de demander aux autorités congolaises d’interdire la manifestation. Amnesty International a en outre réitéré sa question sur les raisons pour lesquelles l’ONU n’a pas publié les conclusions de ses propres enquêtes sur ces événements. Au moment de la publication du présent rapport, l’ONU n’avait pas répondu à ces demandes complémentaires.
Interdiction Préventive
Le 23 août, le maire de Goma a publié un communiqué annonçant que la manifestation du 30 août prévue par les Wazalendo avait été interdite en raison du statut d’enregistrement du groupe[36]. Plusieurs lettres ont suivi entre ce dernier et le dirigeant des Wazalendo, et des copies ont été envoyées à d’autres autorités, dont le gouverneur. Dans ses lettres, le maire a affirmé que la manifestation avait été interdite parce que les Wazalendo n’étaient pas légalement enregistrés en tant qu’association à but non lucratif et en raison de l’« état de siège »[37]. Cependant, Efraimu Bisimwa a fourni la preuve que la FNJMN était légalement enregistrée en tant qu’association à but non lucratif depuis 2019 et a insisté pour que la manifestation se déroule comme prévu[38]. Quoi qu’il en soit, l’interdiction de la manifestation par les autorités au motif du statut d’enregistrement des Wazalendo n’était pas justifiée[39].
Lors d’un entretien avec Amnesty International, Efraimu Bisimwa a déclaré qu’ils étaient parvenus à un compromis après qu’un responsable de la police était allé les voir et les avait exhortés à annuler la manifestation[40]. Il a indiqué :
« Le 28 août dans la soirée, le colonel Thierry est arrivé à notre temple vers 16 heures. Il était venu jusqu’à nous grâce à notre disciple, Mama Deborah, qui est proche de lui. Nous avons eu une réunion de trois heures avec lui, lors de laquelle il a essayé de nous convaincre de ne pas tenir la manifestation le 30 août. Je lui ai dit que les adeptes étaient largement mobilisés et qu’il serait extrêmement difficile de ne rien faire ce jour-là. En fin de compte, j’ai suggéré qu’en tant que commandant de police il envoie quelques policiers escorter une petite délégation qui irait transmettre notre message aux autorités le 30 août. C’était le compromis sur lequel nous nous sommes arrêtés. Le colonel Thierry s’est même assis avec nous autour du feu lorsque nous avons quitté le temple. Il a participé à certains de nos rituels, disant qu’il était aussi le fils d’un chef traditionnel. Il a même bu le kasiksi [une bière locale à base de bananes] avec nous, ce qui scelle un pacte. Pour nous, cela signifiait que l’accord avait été conclu et scellé par toutes les parties[41]. »
Plan Opérationnel
Pendant ce temps, à la demande du gouverneur, l’armée était en train de planifier et de monter une opération contre les Wazalendo. Dans un message officiel (télégramme) envoyé aux unités de l’armée et de la police sous son commandement le 25 août, en sa qualité de commandant des opérations militaires, le lieutenant-général Ndima décrivait le mouvement Wazalendo comme « un groupe de pression pro-terroriste M23/RDF » et dont le but est de « semer les troubles dans la ville de Goma afin de faciliter l’infiltration ennemie »[42]. Il leur a ordonné de « prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les installations de la MONUSCO et Goma »[43]. Parmi les personnes auxquelles une copie du message a été envoyée figuraient le ministre de la Défense, le chef d’état-major des armées et le chef de la maison militaire du chef de l’État.
Conformément au message du gouverneur, la 34e région militaire a émis un ordre opérationnel le 28 août à toutes les unités de l’armée à Goma, y compris la BIA de la Garde républicaine[44]. L’ordre précisait ce qui suit : « Selon les informations en notre possession, le groupe de pression prétendu Wazalendo, qui se comporte de plus en plus comme supplétif du mouvement M23-RDF, projette une marche ce 30 août 2023 dans la ville de Goma pour exiger le départ de la MONUSCO, tout en semant des troubles afin de faciliter l’infiltration ennemie dans la ville[45]. »
L’ordre opérationnel qualifiait les Wazalendo de groupe de pression s’engageant dans une marche. Les instructions étaient de « sécuriser et défendre en permanence la ville de Goma en renforçant le contrôle de la zone militaire, protéger les installations de la MONUSCO et disperser les manifestant·e·s »[46]. Alors que l’ordre rappelait que les règles d’engagement et de comportement sont strictes, notamment qu’il est interdit d’utiliser des armes à feu « sauf en cas de légitime défense »[47], les instructions ne reconnaissaient pas le droit de réunion pacifique et n’y faisaient pas référence, pas plus qu’elles ne reflétaient l’obligation des forces de l’ordre de protéger et de faciliter l’exercice de ce droit.
En annexe à l’ordre, chacune des unités concernées, y compris la BIA de la Garde républicaine, a reçu des instructions précises en trois phases correspondant aux 28, 29 et 30 août[48]. Dans la phase finale (30 août), leur mission était la suivante : « poursuivre l’ennemi », « détruire les éléments ennemis isolés », « consolider la zone » et « se réorganiser »[49].
En réponse à l’ordre opérationnel, le 29 août, le commandant de la Brigade interarmes de la Garde républicaine, le colonel Mike Mikombe Kalamba, a transmis un « ordre de mouvement routier », portant le nom de code Keba[50], aux unités sous son commandement direct, y compris aux forces spéciales d’élite[51], comportant la même allégation de « collusion entre le mouvement Wazalendo et le M23 ainsi que les Forces rwandaises de défense » et précisant avoir été rédigé sur « ordre/autorisation de l’échelon supérieur »[52]. Comme indiqué dans le document, l’objectif de la BIA était d’« effectuer une marche de dissuasion motorisée dans les artères principales de la ville de Goma » le 30 août entre 4 heures et 11 h 30 et « étouffer dans l’œuf la tentative du groupe de pression messianique [de semer le chaos] ». L’ordre rappelait certes l’interdiction d’utiliser des armes à feu, mais il comprenait des exceptions plus générales, à savoir que cette interdiction s’appliquait « sauf sur ordre ou en cas de légitime défense »[53].
Le 28 août, la police a également émis un « ordre de service détaillé »[54] à l’intention de ses propres unités mais, selon le maire de Goma (également officier de police dans le cadre de l’« état de siège »), cet ordre de service n’a pas été mis en œuvre « parce que l’armée avait pris les choses en main »[55].
30 Août : le Massacre
« Une fois que nous avions réalisé qu’il s’agissait de militaires de l’armée congolaise, nous n’étions plus très inquiets. Nous avons pensé qu’ils voudraient peut-être nous arrêter, mais nous n’aurions jamais pensé qu’ils étaient venus pour nous tuer. »
Une personne ayant survécu à l’attaque de la station de radio Uwezo wa Neno des Wazalendo.
Des adeptes Wazalendo enregistraient des émissions de radio au premier étage d’un petit bâtiment en tôle ondulée sur l’avenue principale du district de Kyeshero. Leur dirigeant, Efraimu Bisimwa, un assistant de celui-ci, le directeur de la radio, un technicien de radio, une journaliste et quatre invitées passaient la nuit précédant la manifestation à la station de radio. Trois agents de sécurité civils assuraient la sécurité devant le bâtiment.
3 h 30 : Homicides Illégaux
Au milieu de la nuit, cinq soldats des forces spéciales ont arrêté les agents de sécurité des Wazalendo, ont enfoncé les portes, sont entrés dans le bâtiment et ont arrêté toutes les personnes qui s’y trouvaient, leur attachant les mains dans le dos avec un pagne. Les militaires ont saisi des équipements, de l’argent et d’autres objets à la radio avant de conduire les personnes arrêtées à l’extérieur[56].
Le directeur de la radio a décrit la descente à Amnesty International :
« Je travaillais au premier étage, dans mon bureau. Les cinq femmes étaient au studio, pendant que le visionnaire [Efraimu Bisimwa] se reposait dans une pièce au rez-de-chaussée en attendant l’heure de son émission, qui devait commencer à quatre heures du matin. J’ai entendu les portes en train d’être enfoncées. Nous avons pensé que nous étions attaqués par des voleurs, ce qui est assez commun à Goma. J’ai dit aux femmes de venir dans mon bureau. Quatre d’entre elles sont venues, mais la journaliste, Tabita, est restée dans le studio pour essayer d’informer les auditeurs de la radio de l’attaque. Elles se sont cachées derrière la porte de mon bureau. Rapidement, les assaillants ont pénétré dans la salle de rédaction. C’est à ce moment-là que nous avons réalisé qu’il s’agissait de militaires congolais. Ils sont entrés dans le studio, ont arrêté Tabita et l’ont conduite dans la salle de rédaction juste devant mon bureau. Puis ils ont sorti les quatre femmes de mon bureau. Ils ont déchiré les vêtements de Tabita et s’en sont servis pour attacher les mains des quatre autres femmes dans leur dos. L’un des militaires, qui semblait être le responsable, est entré dans mon bureau et a pointé un pistolet sur moi. Contrairement aux autres, il ne portait pas de cagoule et avait seulement un pistolet. Il a dit : “Si tu bouges, je te tue.” Il m’a demandé, en swahili : “Où est l’émetteur radio ?” Je n’ai rien dit. Il a répété la question. Puis il a dit aux militaires en lingala : “Mokonzi alobi tozua nionso tokozua awa” [le chef a dit de prendre tout ce qu’on trouve]. Il m’a giflé fort et a déchiré ma chemise. Ils m’ont frappé comme un porc. Depuis la pièce où se trouvaient les émetteurs, un militaire qui avait continué de chercher a crié aux autres en lingala : “radio mobimba eza awa” [tous les équipements de radio sont là]. Ils m’ont emmené aussi et, après avoir déchiré ma chemise, s’en sont servi pour m’attacher les mains dans le dos. Puis ils nous ont tous les six poussés dans la petite cage d’escalier vers le rez-de-chaussée, où Efraimu, également dévêtu de sa chemise, les mains attachées dans le dos, attendait, surveillé par quatre autres soldats. Les trois agents de sécurité étaient attachés devant le bâtiment. J’ai appris plus tard que, pendant ce temps, le technicien de radio qui se trouvait dans la pièce avec l’émetteur s’était enfui par la fenêtre avant qu’ils puissent l’arrêter[57]. »
Il a déclaré que les soldats avaient ensuite débranché les câbles et emmené l’émetteur radio au rez-de-chaussée.[58] « Ils ont aussi pris un émetteur TV tout neuf, qui n’avait pas encore été installé, ainsi que d’autres équipements », a-t-il déclaré. « Ils ont littéralement tout pris, y compris nos téléphones, une grosse somme d’argent et des documents se trouvant sur les tables ou dans l’imprimante. »[59] Amnesty International s’est entretenue séparément avec deux des quatre femmes[60], ainsi qu’avec Efraimu Bisimwa.[61] Tous ont corroboré cette version des événements.
Pendant ce temps, des adeptes Wazalendo s’étaient réunis au temple, deux kilomètres plus loin, avant la manifestation prévue. Après avoir été informées de l’attaque contre la station de radio, certaines personnes s’y sont précipitées pour essayer d’empêcher l’arrestation de leur dirigeant. À environ deux rues de la station de radio, elles ont été interceptées par la police.[62] Un membre du groupe a déclaré : « Nous étions environ 70 adeptes Wazalendo. Nous avions quitté le temple, où nous organisions une veillée, après avoir entendu que notre station de radio avait été attaquée. Lorsque nous avons atteint le carrefour Pancarte Sida[63], nous avons vu six agents de police. Ils criaient : “Bango wana” [“Ils arrivent” en lingala], et ils ont immédiatement commencé à nous tirer dessus. L’un d’entre nous, Jean-Claude Rusina, est mort sur le coup. Le groupe s’est séparé en plus petits groupes, et un groupe, dont je faisais partie, a emmené Jean-Claude à l’hôpital CBCA. Là, des soldats des forces spéciales nous ont tiré dessus, tuant la personne qui portait Jean-Claude et en blessant deux autres[64]. »
L’oncle de Jean-Claude a déclaré à Amnesty International : « Vers cinq heures du matin, la femme de Jean-Claude m’a appelé pour me dire que, d’après un ami de son mari, il avait été blessé dans les fusillades visant les adeptes Wazalendo. Je me suis immédiatement précipité pour trouver les amis de Jean-Claude. Ils m’ont dit que Jean-Claude n’avait pas été blessé, mais tué. Ils ont dit que les militaires avaient pris son corps et l’avaient emmené vers une destination inconnue[65]. »
Après avoir été interceptés par la police, les adeptes Wazalendo se sont séparés en plus petits groupes. L’un des groupes a enlevé un policier et l’a emmené vers le temple.[66] Un autre groupe est arrivé à la station de radio alors que les soldats des forces spéciales conduisaient les personnes arrêtées hors du bâtiment.[67] « Des jeunes ont essayé de me détacher alors que les soldats nous emmenaient hors du bâtiment », se souvient Efraimu Bisimwa. « Je leur ai demandé de se calmer et de laisser les soldats faire leur travail, et ils ont obéi[68]. »
Six personnes ayant survécu à l’attaque, dont quatre qui se trouvaient dans le bâtiment pendant la descente, ont déclaré à Amnesty International qu’elles allaient traverser la rue pour monter à bord des véhicules lorsque des tirs ont commencé. Six personnes ont été tuées et 10 autres blessées[69].
« Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, mais pendant que nous traversions la route, les soldats ont commencé à tirer en rafale », se souvient l’une des personnes ayant échappé à la fusillade. « Tabita, qui était juste à côté de moi, est tombée en premier. Je suis tombée à côté d’elle, dans son sang. J’ai entendu une voix dire, en français : “Arrêtez de tirer !”. Les tirs se sont arrêtés[70]. »
Parmi les personnes tuées figurent la journaliste de 44 ans Tabita Fabiola, l’un des agents de sécurité et quatre adeptes Wazalendo qui s’étaient rendus à la station de radio.[71] D’après des personnes ayant survécu à la fusillade, au moins trois camionnettes militaires étaient garées devant la station de radio au moment de la fusillade : une sur la gauche (côté ouest) et deux de l’autre côté, à environ quatre mètres du portail.[72] Amnesty International a constaté des traces semblant correspondre à des impacts de balles sur le portail de la station de radio et sur les portes métalliques des commerces voisins.
Depuis son lit d’hôpital, montrant des cicatrices récentes sur son cou et ses côtes, un adepte Wazalendo ayant été grievement blessé dans la fusillade a déclaré : « J’ai été touché par trois balles : une au cou, une du côté droit des côtes et une dans le dos. »[73] Il s’était précipité depuis le temple après avoir été informé de l’attaque. « C’est par la grâce de Dieu et des ancêtres que j’ai survécu », a-t-il déclaré[74].
Efraimu Bisimwa a déclaré que lui et cinq autres adeptes Wazalendo avaient été poussés dans deux camionnettes de l’autre côté de la rue, qui sont parties immédiatement, laissant la Garde républicaine ramasser les mort·e·s et les blessé·e·s[75].
Cinq témoins, dont quatre personnes ayant survécu à l’attaque, ont déclaré à Amnesty International qu’une fois les soldats partis, les habitant·e·s avaient aidé les personnes blessées à se rendre à l’hôpital, qui se trouvait à 100 mètres, et avaient regroupé six corps près de la station de radio.[76] Vers cinq heures du matin, un groupe de soldats est arrivé à bord d’un véhicule de l’armée et a emmené les corps à l’hôpital militaire de Goma.[77] Un représentant de Congo Protection a déclaré à Amnesty International que les deux camionnettes à bord desquelles avaient été emmenés Efraimu Bisimwa et cinq autres adeptes Wazalendo depuis la station de radio faisaient partie de leur patrouille commune avec des soldats de la 34ème région militaire. « Nos soldats, qui faisaient partie d’une patrouille conjointe avec la 34ème région militaire, sont arrivés à la station de radio peu avant la fusillade. Lorsque les tirs ont commencé, les forces spéciales ont embarqué six personnes arrêtées dans des véhicules de la patrouille conjointe. La patrouille est partie et est allée attendre au rond-point ULPGL [à environ un kilomètre au sud de la station de radio]. Peu après, la Garde républicaine est arrivée avec son propre véhicule et a pris en charge Efraimu Bisimwa et les autres adeptes Wazalendo[78].
Les Responsables
Cinq personnes ayant survécu aux attaques et deux témoins vivant près de la station de radio ont décrit les soldats responsables de l’attaque comme des « Hiboux », un terme familier employé pour parler des soldats des forces spéciales de la Garde républicaine. Une voisine qui a déclaré avoir vu des soldats passer sur le toit des bâtiments pour atteindre la radio a déclaré : « Il était environ trois heures du matin. J’ai été réveillée par des bruits de pas sur les toits dans le quartier. J’ai d’abord cru que c’était un chat ou un chien qui était monté sur le toit. Mais le poids semblait considérable, faisant bouger le toit et la maison entière. J’ai décidé de me lever pour voir ce que c’était. En regardant par la fenêtre, j’ai vu un soldat sauter du toit et rouler au sol, puis un autre, puis un troisième […], j’en ai compté quatre en tout. Ils portaient des treillis militaires et des bottes plutôt blanches[79]. »
Une personne ayant survécu à l’attaque a déclaré : « Je les ai très bien vus. Ils portaient des treillis verts et des bottes claires. Ils portaient également des casques avec un système de communication comme ceux des Hiboux et avaient des armes sophistiquées. »[80] Une autre personne ayant survécu à l’attaque a déclaré : « Ils avaient tous la tête complètement couverte [avec des cagoules], sauf l’un d’eux qui semblait être leur commandant, car il donnait des ordres aux autres. Celui-là avait aussi un pistolet et utilisait un talkie-walkie. »[81] Trois autres personnes ayant survécu à l’attaque ont corroboré cette description[82].
Un membre du personnel de Congo Protection qui est arrivé à la station de radio cette nuit-là dans le cadre de ce qu’il a qualifié de « patrouille mixte avec les militaires de la 34ème région militaire et des agents de la police[83] » a déclaré que des membres de Congo Protection avaient parlé avec des soldats des forces spéciales en intervention sur les lieux :
« Comme d’habitude, le chef d’équipe, qui est un officier de l’armée congolaise, prenait les ordres du quartier général de la 34ème région militaire. Cette nuit-là, vers 3 heures du matin, le convoi de la patrouille mixte avait reçu l’ordre de se rendre à l’hôpital CBCA [situé à environ 100 mètres de la station de radio], sans savoir ce qui se passait là-bas. En y arrivant, ils ont trouvé la Force spéciale en pleine opération dans un enclos non loin de l’hôpital. Ce qu’ils y faisaient ne nous regarde pas, mais ils y étaient. Ils sont repartis lorsque la fusillade a commencé ; ils ne voulaient pas être mêlés au désordre[84]. »
Attaque Contre le Temple des Wazalendo
« Il y avait des dizaines de corps dans la rue, juste devant chez nous. Des hommes, des femmes, des enfants. Je pense que je ne me remettrai jamais de ce que j’ai vu ce jour-là. »
« Bora » (son nom a été modifié), 22 ans, survivante et témoin.
Le 30 août marque la fin d’une période de trois mois, entre juin et août, nommée Thelathini-Thelathini, pendant laquelle les adeptes Wazalendo jeûnent de manière intermittente et prient « pour une réelle indépendance ». Avant la célébration et les autres activités prévues pour la journée, des centaines d’adeptes Wazalendo de toute la région s’étaient réunis à Goma et avaient organisé une veillée au temple.
6 h : Fusillade et Lapidation au Temple
Le fils ainé d’Efraimu Bisimwa, Uwezo Milele, 19 ans, participait à la veillée cette nuit-là. Après avoir été informé des événements à la station de radio, il a décidé de s’y rendre avec d’autres adeptes Wazalendo. Mais alors que le groupe quittait le temple, il a été attaqué par la police, d’après quatre témoins[85].
« Nous avons croisé des policiers d’un commissariat à proximité. Ils ont commencé à nous tirer dessus sans explication », a déclaré l’un des témoins. « Uwezo a été touché à la tête et est tombé. Des gens sont arrivés en courant du temple et du quartier pour voir ce qui s’était passé, alors que les policiers s’enfuyaient. Quand nous avons réalisé qu’Uwezo respirait encore, nous l’avons soulevé et l’avons ramené au temple, pendant que nous cherchions un moyen de le conduire à l’hôpital. Mais il est mort dans nos bras[86]. »
Cinq témoins de la zone autour du temple ont déclaré que la foule avait sorti le policier de l’endroit où il était détenu depuis son enlèvement plus tôt et l’avait conduit près du corps d’Uwezo. Là, des gens de la foule ont commencé à lui asséner des coups de pied et à le lapider[87].
Le Laboratoire de preuves du programme Réaction aux crises d’Amnesty International a confirmé que l’heure et le lieu où ont été filmées deux vidéos correspondent aux témoignages sur les événements : la première vidéo[88], filmée vers six heures du matin dans une rue près du temple, montre Uwezo au sol, respirant toujours, mais avec une blessure par balle à la tête. Une foule l’entoure ensuite et le porte. Une deuxième vidéo[89], filmée devant le temple peu après la première, montre Uwezo allongé au sol, inanimé. Près de lui, un homme portant un pantalon bleu marine et un t-shirt blanc est également au sol. Il est entouré par une foule qui lui assène des coups de pied et lui lance des pierres.
7 h : Des Soldats Arrivent Sur le Lieu de la Manifestation
Le colonel Yves Rubenga, commandant du quartier général de l’état-major à la 34ème Région militaire, et le colonel Franck Mutunda, chef des renseignements militaires, ont déclaré à la Cour militaire du Nord-Kivu qu’ils étaient arrivés au temple des Wazalendo vers sept heures du matin, accompagnés de leurs escortes.[90] Peu après, ils ont été rejoints par des soldats des forces spéciales de la Garde républicaine. Le colonel Mike Mikombe Kalamba a déclaré que ses unités avaient été convoquées sur place par le colonel Mutunda, car la zone « ne faisait pas partie de l’itinéraire de la patrouille de dissuasion de la Garde républicaine[91]. »
Des témoins ont indiqué à Amnesty International que l’armée avait complètement assiégé le quartier.[92] « C’était impressionnant. C’était comme dans les films. Ils sont arrivés avec des véhicules de combat, des jumelles, des casques et des tireurs d’élite portant des armes que nous n’avions jamais vues. Ils se sont placés tout autour du temple, dans les rues, sur leurs véhicules et certains même sur les toits. Ils pilotaient des drones dans le ciel », a déclaré un témoin.[93] Dans la rue à environ 80 mètres du temple, des adeptes Wazalendo qui avaient commencé à manifester se sont retrouvés face à des dizaines de soldats. Un adepte Wazalendo qui se trouvait sur les lieux a déclaré à Amnesty International : « Nous avons été bloqués par des soldats dans la rue, non loin du temple, alors que nous avions commencé à manifester pacifiquement. Un agent a ramassé des pierres, les a alignées devant nous et nous a dit que c’était la ligne rouge à ne pas franchir. Il nous a demandé de nommer quatre personnes pour s’entretenir avec eux, ce que nous avons fait[94]. »
Deux vidéos[95] authentifiées par Amnesty International montrent des délégué·e·s Wazalendo s’entretenant avec le colonel Yves Rubenga, commandant du quartier général de l’état-major à la 34ème Région militaire, et le colonel Franck Mutunda, chef des renseignements militaires. Le major Peter Kabwe observe en arrière-plan. D’après les discussions entendues, les délégué·e·s semblent penser que les hommes portant des équipements tactiques sont membres des troupes de la Communauté de l’Afrique de l’Est ou de la MONUSCO. Les responsables les rassurent en leur disant qu’il s’agit de militaires de l’armée congolaise. Un adepte Wazalendo fait remarquer que leur groupe ne porte pas d’armes alors que les soldats sont lourdement armés. La vidéo se termine sur le colonel Mike Mikombe Kalamba, commandant de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu, interrompant la conversation.
Une autre vidéo[96] authentifiée par le Laboratoire de preuves du programme Réaction aux crises d’Amnesty International semble montrer le moment suivant la discussion. Trois des officiers identifiés dans la vidéo précédente se trouvent devant les manifestant·e·s, avec les délégué·e·s Wazalendo qui s’adressent à la foule. Les officiers et les délégué·e·s Wazalendo sont entourés de membres de la Garde républicaine portant des bérets rouges, de membres des forces spéciales de la Garde républicaine portant des casques et des équipements tactiques et de membres de la 34ème Région militaire portant des bérets verts.
7 h 30 : Fusillade de Masse
Lors d’entretiens distincts avec Amnesty International, quatre témoins, dont trois voisin·e·s n’ayant aucun lien avec le mouvement Wazalendo, ont décrit les événements qui ont suivi. L’une des témoins a déclaré : « Les discussions entre les adeptes Wazalendo et les officiers de l’armée se poursuivaient. J’étais à côté de notre maison, comme de nombreuses autres personnes, nous observions. Soudain, le commandant de la Garde républicaine est arrivé. Il a chassé les autres officiers, puis a ordonné à ses soldats d’ouvrir le feu. Les balles ont commencé à siffler. J’ai couru me cacher dans la maison[97]. »
Le colonel Yves Rubenga et le colonel Franck Mutunda ont déclaré à la Cour militaire du Nord-Kivu que le colonel Mike Mikombe Kalamba les avait chassés de l’endroit où ils s’entretenaient avec les adeptes Wazalendo, puis avait ordonné aux soldats sous son commandement de tirer.[98] « Il a ordonné de tirer et ses soldats ont ouvert le feu sur la foule », a déclaré le colonel Rubenga au tribunal.[99] Le colonel Mike Mikombe a nié avoir ordonné la fusillade[100].
En plus de ses réfutations au tribunal, le colonel Mike Mikombe a déclaré à Amnesty International : « Il est vrai que je me suis impatienté. J’ai dit à Franck et Yves “On s’en va”, parce que c’était eux qui m’avaient demandé de venir. Pour moi, c’était une perte de temps, surtout étant donné que ce n’était pas sur l’itinéraire de la BIA. Je voulais poursuivre la dissuasion de la manifestation comme prévu. Franck ne voulait pas m’écouter, donc j’ai décidé de retourner à mon véhicule. Alors que je m’éloignais, j’ai entendu les coups de feu. J’ai spontanément levé les mains et j’ai crié “Arrêtez de tirer, arrêtez de tirer !” Je n’ai pas donné l’ordre de tirer. Je ne sais pas qui a donné l’ordre[101]. »
Une vidéo authentifiée par Amnesty International montre la fusillade à l’endroit exact où, quelques instants auparavant, des délégué·e·s Wazalendo non armés se tenaient avec des responsables militaires qui discutaient avec d’autres manifestant·e·s. Le bruit des tirs indique que plusieurs armes ont tiré simultanément.
Comme le démontrent les vidéos analysées par Amnesty International, que corroborent des témoignages, les soldats des forces spéciales ont commencé à tirer sur la foule alors que les manifestant·e·s ne portaient aucun objet destiné à servir d’arme et ne représentaient aucun danger pour les soldats ou la vie d’autres personnes. Lorsque le tribunal a demandé aux trois officiers si les adeptes Wazalendo étaient armés ou si les soldats pouvaient avoir agi en légitime défense, ils ont confirmé que les adeptes Wazalendo n’étaient pas armés et étaient non violents[102], « au moins à ce moment précis[103] ».
Une personne ayant survécu à la fusillade a déclaré à Amnesty International : « Nos délégué·e·s ont été les premiers à être abattus d’une balle dans le dos. Nous nous sommes couchés au sol, pensant que les soldats arrêteraient de tirer. Mais nous avons réalisé qu’ils nous visaient toujours. Je me suis levé et j’ai commencé à courir pour me sauver. De nombreuses personnes ont été tuées ou blessées en essayant de s’enfuir. J’ai eu de la chance, je ne sais pas comment je m’en suis sorti[104]. »
Des témoins ont décrit la terrible scène avec le sifflement des balles, des soldats suivant des victimes dans des logements, les mares de sang et les bouts de chair au sol dans la rue et sur les murs[105].
Bora (son nom a été modifié), 22 ans, une habitante qui se trouvait près de la scène de la fusillade, a déclaré :
« Il y avait des corps partout. Certaines personnes appelaient à l’aide, mais il n’y avait personne pour les aider. Un jeune homme était étendu devant notre balcon, touché à la tête. Mon neveu de cinq ans a été touché au pelvis alors qu’il se cachait dans un couloir près de la pièce où je me cachais. Je suis la seule personne de notre maison à ne pas avoir été blessée[106]. »
« Notre maison se trouve juste dans la rue où ces Wazalendo étaient face aux soldats », a déclaré une autre témoin. « Mon mari et moi regardions par la fenêtre. Lorsque les soldats ont commencé à tirer, nous nous sommes couchés au sol. Par chance, personne dans notre maison n’a été tué ou blessé. Après, nous avons vu qu’il y avait des dizaines de corps dans la rue, juste devant chez nous. Des hommes, des femmes, des enfants. J’ai survécu à la guerre, j’ai vécu tellement de choses. Mais je n’avais jamais rien vu de tel. Je pense que je ne me remettrai jamais de ce que j’ai vu ce jour-là. »[107]
Sur l’une des maisons dans la rue où a eu lieu la fusillade, la plupart étant faites de planches, Amnesty International a dénombré 23 impacts de balles sur un seul des murs. Certaines des personnes tuées, blessées et arrêtées étaient des voisin·e·s ou des passant·e·s n’ayant aucun lien avec le mouvement Wazalendo[108].
Une autre témoin a déclaré : « Je ne sais même pas comment décrire la scène. La terrible odeur des bouts de chair et du sang en décomposition a imprégné le quartier pendant plusieurs jours[109]. »
Après la fusillade, des vidéos[110] authentifiées par Amnesty International montrent des soldats ramassant des dépouilles et des personnes blessées, les trainant le long de la route et les chargeant dans des camions militaires.
Des témoins ont déclaré que des soldats leur avaient ordonné de venir les aider à porter les dépouilles :
« Une femme et un jeune garçon qui s’étaient réfugiés dans notre maison ont été abattus. Il y avait des dizaines de corps dans la rue ici. Des femmes, des enfants, des hommes. Le jeune garçon était mort sur le coup, mais la femme, bien qu’éventrée, respirait toujours. Lorsque les tirs ont semblé se calmer, je suis sortie voir l’un des soldats dans la rue et je lui ai dit qu’il y avait deux personnes touchées dans notre maison. Il m’a demandé de lui montrer. Puis il m’a forcée à l’aider à les soulever. D’abord, nous avons soulevé le corps du jeune garçon et l’avons lancé sur un tas d’autres corps dans la rue. Puis nous sommes revenus pour la femme. J’ai dit au soldat : “Je crois qu’elle est vivante.” Il a répondu : “Soulève et tais-toi.” Nous l’avons jetée près de la pile de corps dans la rue aussi. Quand je suis revenue à la maison, j’ai remarqué que mon neveu de cinq ans avait aussi été touché par une balle et était couché dans son sang au sol. Il respirait toujours. J’ai décidé de l’emmener à l’hôpital. Mais comme la route était pleine de soldats et de dépouilles, j’ai décidé de passer par-dessus le mur de pierre et par les maisons pour aller à l’hôpital. Je suis finalement arrivée à l’hôpital CBCA. Sur la route, j’ai vu le corps d’un homme avec des dreadlocks qui avait aussi été tué. Mon neveu est toujours à l’hôpital, mais j’espère qu’il survivra[111]. »
9 h : Les Corps et les Personnes Arrêtées Sont Emmenés
Des agents ont été filmés à un kilomètre du temple des Wazalendo, après qu’ils avaient entassé des corps et des détenu·e·s dans des camions. Une vidéo[112] authentifiée par Amnesty International montre une camionnette militaire transportant des soldats de l’armée régulière, reconnaissables à leurs treillis et leurs bérets verts.[113] La camionnette est suivie de deux camions militaires : le premier transportant des dizaines de personnes arrêtées, assises les unes à côté des autres sous la surveillance de six soldats de la Garde républicaine[114], et le second transportant des corps surveillés par six ou sept autres soldats de la Garde républicaine. Alors que le convoi passe, une personne dit en swahili : « Regarde les corps, regarde les corps. » Une autre voix ajoute : « Regarde, il y a tellement de corps[115] ! »
10 h : Pillage et Incendie du Temple
Sur le lieu de la fusillade, des officiers auraient pris les effets personnels d’adeptes Wazalendo, avant d’incendier leur temple. Une vidéo[116] authentifiée par Amnesty International montre des soldats des forces spéciales portant des instruments de musique et une chèvre. Une autre vidéo[117] montre des officiers fouillant un groupe d’hommes assis près du temple. Dans cette même vidéo, une voix dit en lingala : « Cette église doit être détruite. »[118] Une personne derrière la caméra ajoute : « Nous sommes ici au temple des Wazalendo avec le maire de Goma[119]. »
À 10 h, le temple des Wazalendo était en flammes, d’après une vidéo[120] authentifiée par Amnesty International. Des images satellites prises à 10 h 30 suggèrent également un incendie à cet endroit.
Comparaissant à titre de témoin devant la Cour militaire du Nord-Kivu lors du procès de six soldats de la Garde républicaine, le commissaire de police et maire par intérim de Goma, Faustin Kapend Kamand, a dans un premier temps nié avoir été au temple des Wazalendo.[121] Plus tard, lorsque la vidéo évoquée ci-dessus a été diffusée au tribunal, il a admis qu’il se trouvait au temple vers 10 heures le 30 août et que c’était lui que l’on entendait dire que l’église devait être détruite. Le maire a cependant nié avoir ordonné l’incendie du temple[122].
Nombre de Morts et Personnes Disparues
« Mon beau-frère était là-bas. On le voit sur les vidéos, il échange pacifiquement avec les soldats. Mais nous ne l’avons trouvé ni parmi les détenus, ni parmi les blessés à l’hôpital, ni même parmi les morts. »
« Riziki » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), 36 ans, belle-sœur d’une personne portée disparue depuis le massacre.
Le nombre officiel de morts a évolué au fil du temps. Le 30 août au matin, le bureau du gouverneur a publié un communiqué de presse selon lequel un agent de police aurait été lapidé et six adeptes Wazalendo auraient été tués, « quelques-uns blessés et 158 arrêtés ».[123] Le 31 août, un rapport interne de l’armée cité par l’Agence France-Presse avançait un bilan beaucoup plus lourd : 48 manifestant·e·s « neutralisé » (c’est-à-dire « tués » dans le jargon de la sécurité), un agent de police « lynché », 75 manifestant·e·s blessés et « environ 168 personnes arrêtées ».[124] Quelques heures après la divulgation de ce rapport à la presse, le gouvernement congolais a publié un communiqué de presse indiquant que 43 personnes étaient mortes, que 56 personnes avaient été blessées et que 158 avaient été arrêtées. D’après les archives du tribunal militaire, au 18 septembre, lorsque l’inhumation officielle a eu lieu, 56 personnes étaient comptabilisées comme mortes dans le cadre des événements du 30 août, sans compter l’agent de police[125] et leurs corps étaient répartis comme suit dans les trois hôpitaux suivants :
- 43 corps à l’hôpital militaire de Goma, dont 29 officiellement identifiés et 14 non identifiés ;
- quatre corps à l’hôpital Heal Africa ;
- neuf corps à l’hôpital CBCA Ndosho.
Cependant, sur le site d’inhumation, Amnesty International n’a constaté que 54 tombes.[126] Interrogé sur cette incohérence lors d’un entretien avec Amnesty International, le procureur militaire a déclaré qu’il avait été informé que certaines dépouilles avaient été directement remises aux familles par les hôpitaux et qu’il enquêtait à ce sujet[127].
Un rapport confidentiel du Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l’Homme qu’Amnesty International a consulté établit le nombre de morts à 102 au 11 octobre : 90 hommes, huit femmes et quatre garçons[128].
Ce Que les Blessures Révèlent Des Fusillades de Masse
Amnesty International a analysé des rapports médicaux de trois hôpitaux de Goma concernant ces événements, couvrant 84 cas de blessures par balle, dont 28 comprenant de brèves descriptions des blessures.[129] Ils suggèrent que les soldats ont visé les parties vitales des corps des victimes, les touchant à la tête, aux bras, à l’abdomen, au thorax et dans le dos. L’hôpital local Heal Africa, spécialisé dans le traitement des blessures graves, a admis sept des personnes les plus grièvement blessées qui avaient été transférées de l’hôpital militaire de Goma.[130] Son rapport évoque le cas de Mathene Busala, une femme enceinte d’un âge indéterminé qui a été admise avec plusieurs blessures par arme à feu, notamment un hémothorax (accumulation de sang entre le poumon et la paroi thoracique), une plaie ouverte à l’abdomen et une fracture du pelvis. « Elle est décédée pendant la rédaction du présent rapport », indique le rapport.[131] Le cas de Muhindo Buroko, un homme de 53 ans admis en soins intensifs à l’hôpital Heal Africa avec un « traumatisme ouvert de la poitrine par arme à feu avec hémothorax massif » est également évoqué.[132] Le 1er septembre au soir, les hôpitaux avaient confirmé la mort de neuf personnes des suites de leurs blessures et trois personnes étaient en soins intensifs[133].
Personnes Portées Disparues
Amnesty International s’est également entretenue avec les proches de cinq des dix personnes dont on ignore le sort depuis les événements du 30 août.[134] Parmi ces personnes figure Antoinette (son nom de famille n’est pas révélé pour des raisons de sécurité), 38 ans, ainsi que sa fille de quatre ans, Francine. La belle-sœur d’Antoinette a déclaré à Amnesty International : « Le 29 août au matin, [Antoinette] est arrivée à Goma avec son bébé, après avoir pris le bateau depuis le village de Buhozi, pour participer à la célébration des Wazalendo prévue le 30 août 2023. Je suis allée la voir au port parce qu’elle m’avait dit au téléphone qu’elle avait un colis de nourriture du village pour moi. Après m’avoir donné le colis, elle est partie au temple, promettant de venir rendre visite à ma famille après la journée de festivités. Elle n’est jamais revenue et n’est jamais retournée au village. Nous nous sommes rendus dans des morgues, des centres de détention et des hôpitaux, mais nous ne l’avons jamais trouvée. »[135] Wamba est le grand frère d’Antoinette. Il a déclaré : « Elle avait quatre enfants et son mari est mort récemment. Je ne sais toujours pas quoi dire à mes petits neveux. La famille ne sait pas comment faire son deuil. Les autorités ne nous disent rien du tout[136]. »
Une autre personne dont le proche est porté disparu a déclaré :
« Mon beau-frère de 20 ans, Rodrigue Busimwa, vivait avec moi. Fervent adepte Wazalendo, il chantait même dans une de leurs chorales. Il dormait dans leur temple depuis quatre nuits pour préparer la grande célébration du 30 août. Mais il n’est pas revenu depuis. Nous ne l’avons trouvé ni parmi les détenus, ni parmi les blessés à l’hôpital, ni même parmi les morts. »[137] Shabantu Kasisi, 28 ans, était l’un des délégué·e·s Wazalendo qui s’était entretenu avec les officiers de l’armée et, d’après plusieurs témoins, il a été parmi les premières personnes abattues lors de la fusillade de masse. Sa sœur et deux témoins l’ont identifié formellement sur une vidéo liée à la fusillade au temple des Wazalendo.[138] Montrant un homme portant un t-shirt noir et s’entretenant pacifiquement avec les soldats, sa sœur a déclaré à Amnesty International : « C’est lui. Regardez comme il calmait les autres manifestant·e·s. Pourquoi l’ont-ils tué ? Qu’est-il arrivé à son corps ? J’ai tant de questions, mais qui y répondra ? Ma mère refuse d’accepter que Shabantu est mort, tant qu’elle n’aura pas vu son corps de ses propres yeux. J’ai peur qu’elle meure d’angoisse[139]. »
L’épouse d’un autre homme porté disparu a déclaré qu’elle avait vu, dans l’une des vidéos, le corps de son époux trainé dans la rue par des soldats après la fusillade. Elle a expliqué être allée dans toutes les morgues de Goma pour essayer de trouver son corps, en vain.[140] D’après l’un de leurs avocats, les autorités n’ont presque rien fait lors du procès des soldats pour traiter les déclarations faisant état de personnes et de dépouilles disparues[141].
Des Corps Abandonnés Jusqu’à la Décomposition
D’après la Cour militaire du Nord-Kivu, les corps de 43 victimes ont été conduits à la morgue de l’hôpital militaire le 30 août. Des témoins ont déclaré à Amnesty International qu’au moins 42 dépouilles avaient été empilées et enveloppées dans des bâches, où elles sont restées au moins deux semaines, en plein soleil ou sous la pluie[142].
Une personne travaillant à la morgue a déclaré :
« La morgue de l’hôpital a une capacité de 15 corps seulement, et elle était déjà pleine. Tout ce que nous pouvions faire c’était les embaumer régulièrement avec du formaldéhyde et espérer qu’ils seraient vite enterrés[143]. »
Dans un premier temps, les autorités militaires ont empêché les proches des personnes tuées de voir leurs dépouilles et d’essayer d’identifier leurs proches, et ne leur ont pas permis d’emmener les dépouilles pour se recueillir et procéder aux obsèques avec leur famille. Un homme qui a réussi à voir les dépouilles le 30 août grâce à une connaissance de sa famille dans l’armée a décrit la situation :
« Les corps étaient empilés les uns sur les autres sur une bâche, comme des sacs poubelle. Deux personnes travaillant à la morgue ont aidé à enlever les corps du dessus et les ont mis sur le côté. J’ai reconnu mon neveu au t-shirt rouge et au jean qu’il portait. Une balle avait percé son dos et explosé sa poitrine. Son visage était plissé, mais intact. Je les ai remerciés et je suis allé informer la famille que nous pouvions commencer le deuil[144]. »
Presque deux semaines après le massacre, les autorités ont enfin autorisé les familles à identifier leurs proches.[145] Il était alors trop tard, les corps étant déjà en décomposition puisqu’ils n’avaient pas été correctement préservés. Quatre personnes qui ont vu les dépouilles ont déclaré à Amnesty International que l’odeur était insupportable et que l’identification était presque impossible.
Un avocat qui accompagnait un de ses clients pour l’identification a déclaré : « Ils avaient gonflé ; la peau était devenue blanchâtre, c’était insupportable rien que de s’en approcher[146]. »
L’homme qui avait pu voir le corps de son neveu le 30 août y est retourné pour essayer d’identifier son neveu, car son corps n’avait pas été étiqueté. Il a déclaré :
« Cette fois, les corps étaient enveloppés dans des sacs mortuaires individuels et placés en ligne sur les bâches. Des personnes travaillant à la morgue orientaient les gens, ouvrant un sac après l’autre jusqu’à trouver la personne recherchée. L’odeur était insupportable, mais je me suis armé de courage et me suis résigné. Jean-Claude n’était plus le même. Je ne l’ai reconnu que par la taille de sa barbe et sa ceinture. Le reste était complètement méconnaissable. J’ai éclaté en sanglots[147]. »
De nombreux proches des personnes tuées n’ont pas été autorisés à identifier et à enterrer leurs proches avec dignité et dans le respect de leurs croyances. Les corps des personnes tuées ont été trainés au sol, empilés dans un camion sans ménagement et abandonnés jusqu’à la décomposition dans une cour d’hôpital pendant trois semaines, au grand désespoir de leurs familles.
Enterrements Indignes
Plusieurs tentatives d’adeptes Wazalendo et de groupes de la société civile de Goma d’organiser des cérémonies d’obsèques ont été interdites ou violemment dispersées. Par exemple, le 1er septembre, une cérémonie d’obsèques organisée près du Stade de l’Unité par des personnes endeuillées a été dispersée par la police, qui a frappés les participant·e·s avec des matraques et a eu recours à du gaz lacrymogène, a blessé deux personnes et a arrêté arbitrairement le militant Josué Kabanza.[148] Il a été libéré sans inculpation le 4 septembre, après des manifestations organisées par d’autres militant·e·s[149].
Le 18 septembre, le gouvernement a décidé de procéder à l’enterrement de 56 personnes dont la mort avait été officiellement enregistrée.[150] Les proches de six victimes ont confié à Amnesty International qu’ils n’avaient été ni consultés ni même informés à l’avance. Un homme dont le frère figure parmi les personnes tuées et identifiées a déclaré : « Le dimanche matin, j’ai entendu un communiqué du maire de Goma à la radio qui demandait aux familles de se rendre à l’hôpital militaire le lendemain matin pour l’enterrement des adeptes Wazalendo. Ils n’ont même pas eu le courage de nous appeler ou de nous envoyer un message. Certains proches de victimes voulaient assister à l’enterrement, mais n’ont pas pu, car ils n’avaient pas eu les informations au préalable. »[151] Les personnes arrêtées n’ont pas été autorisées à se recueillir pour pleurer leurs proches, malgré les demandes formulées par leurs avocat·e·s[152].
Efraimu Bisimwa, dont le fils et la fille ont été tués lors du massacre[153], a déclaré : « Ils ne nous ont même pas permis d’organiser l’enterrement conformément à nos propres rites, à nos croyances. »[154] Pour lui, l’enterrement était « une insulte » à la foi de la plupart des victimes, qui étaient membres du groupe religieux Foi naturelle messianique judaïque pour les Nations (FNJMN).[155] « Est-il pire souffrance que d’être empêché d’enterrer ses propres enfants par les personnes qui les ont tués », a-t-il demandé[156].
Une femme dont le mari et le fils ont été tués et qui n’a pas pu se recueillir pour faire son deuil ou assister à leur inhumation a déclaré : « Il n’y a pas de mots pour décrire ce que je ressens. Je préférerais mourir aussi. »[157] Dans une déclaration, les avocats des victimes ont dénoncé un « manque criant de considération pour les morts et leurs familles[158]. »
Torture et Autres Mauvais Traitements
« Alors que nous avions les bras attachés dans le dos, les soldats nous ont, à plusieurs reprises, soulevés aussi haut que possible avant de nous laisser retomber au sol. »
Efraimu Bisimwa, dirigeant des Wazalendo, 8 octobre 2023.
Au moins 11 personnes ont subi des actes de torture physique avant et pendant les homicides commis à la station de radio des Wazalendo.[159] De nombreuses autres ont été torturées ou soumises à d’autres traitements cruels, inhumains et dégradants au temple des Wazalendo et dans ses environs.
Habamungu Rwihimba « Kimbangu » (son nom Wazalendo), âgé de 34 ans, a été détenu par des soldats des forces spéciales/de la Garde républicaine sur leur base aérienne de Goma après avoir été arrêté à la station de radio avec cinq autres personnes. Il a déclaré : « Quand nous sommes arrivés, ils nous ont couchés sur le sol et nous ont versé de l’eau dessus à plusieurs reprises. Je m’étais laissé pousser les cheveux, un soldat les a coupés par poignées avec un couteau militaire. “Vous devez savoir beaucoup de choses”, répétait-il en tenant mes cheveux d’une main et en les coupant de l’autre. Ils ont dit que je devais leur dire tout ce que je savais sur les 750 dollars des États-Unis que chacun d’entre nous aurait reçus du Rwanda, sinon ils me tueraient. Je leur ai dit que je n’avais pas reçu d’argent[160]. »
Efraimu Bisimwa a également été arrêté à la station de radio par des soldats des forces spéciales/de la Garde républicaine, qui, apparemment, ne savaient pas au départ qu’il était le dirigeant du groupe. Il a déclaré que les soldats les avaient frappés et humiliés à la base aérienne de Goma : « Alors que nous avions les bras attachés dans le dos, les soldats nous ont, à plusieurs reprises, soulevés aussi haut que possible avant de nous laisser retomber au sol. Ils se sont relayés pour demander à tout le monde où se trouvait notre dirigeant. Les autres ont répondu que le dirigeant n’était pas avec nous, de peur qu’il ne m’arrive quelque chose de grave. Quand la torture est devenue insupportable, je leur ai dit que c’était moi[161]. »
Des vidéos[162] authentifiées par Amnesty International montrent que des soldats ont brutalisé et humilié des adeptes Wazalendo et d’autres personnes qu’ils avaient arrêtées dans le temple et ses alentours après la fusillade. Les vidéos montrent des dizaines d’hommes dépouillés de leurs chemises et de leurs chaussures, des enfants visiblement effrayés, des femmes portant des bébés et des personnes âgées, entourés de soldats des forces spéciales criant et les poussant. Dans l’une des vidéos, un soldat attrape l’un des détenus torse nu par la ceinture et appelle les autres soldats. Il attrape un objet rituel (un morceau de bois ou de cuir semble-t-il) du haut du pantalon de l’homme et l’agite, demandant à l’homme abasourdi : “C’est censé résister aux balles ? Est-ce que je devrais te tirer dessus et voir ce qui se passe[163] ?” »
Réaction de la communauté internationale
Le massacre a suscité plusieurs réactions de la part d’acteurs internationaux, notamment de la MONUSCO, du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, de la Communauté de l’Afrique de l’Est, de l’Union européenne (UE) et de l’ambassade des États-Unis à Kinshasa.
Dans une déclaration publiée le 31 août 2023, l’envoyée spéciale en RDC du secrétaire général des Nations unies, qui est également la responsable de la MONUSCO, a déclaré qu’elle « regrette profondément que la manifestation interdite ait occasionné la mort de civils, de policiers et de membres des forces armées congolaises ainsi que plusieurs blessés. »[164] Semblant justifier l’intervention et le recours à la force par l’armée et la police, la déclaration de la MONUSCO insistait sur le fait que les forces de défense et de sécurité congolaises avaient agi « conformément à leur responsabilité première » et « tenté d’empêcher la tenue de cette manifestation qui s’annonçait violente, de l’aveu même de ses organisateurs ».[165] Le gouvernement américain, par l’intermédiaire de son ambassade à Kinshasa, a semblé se faire l’écho à la réaction édulcorée de la MONUSCO, exprimant ses regrets pour « les pertes en vies humaines résultant des récents affrontements à Goma » et saluant la réponse du gouvernement de la RDC.[166] La réaction du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme a été beaucoup plus ferme du point de vue des droits humains. Avertissant que le nombre de morts pourrait être plus élevé, le HCDH a appelé les autorités à veiller à ce qu’une « enquête approfondie, efficace et impartiale » soit menée.[167] « Une telle enquête doit également examiner de manière exhaustive l’usage de la force par les forces de sécurité. Les responsables des violations doivent être amenés à répondre de leurs actes, quelle que soit leur affiliation[168] ».
Le secrétaire général de la Communauté de l’Afrique de l’Est a « déploré » la mort de civil·e·s « dans un contexte de troubles » et a engagé le gouvernement congolais à mener une enquête indépendante sur les événements.[169] L’Union européenne a également réagi, condamnant « l’usage excessif et disproportionné de la force qui a entraîné la mort d’une cinquantaine de personnes et fait de nombreux blessés » et ajoutant attendre que l’enquête ouverte par les autorités congolaises identifie rapidement les responsables et que ces derniers répondent de leurs actes[170].
Début septembre 2023, le Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme, qui relève de la MONUSCO et du HCDH, a mené sa propre enquête sur ces événements, d’après un rapport confidentiel qu’Amnesty International a consulté mi-octobre. Les conclusions préliminaires du Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme indiquaient un bilan bien plus lourd que le bilan officiel : « La mission a conclu que, pendant l’opération des FARDC-PNC, 102 personnes (90 hommes, huit femmes et quatre garçons) ont été victimes d’exécutions extrajudiciaires, et 80 autres personnes (66 hommes, neuf femmes, quatre garçons et une fille) ont été blessées. »[171] L’enquête de l’ONU a également conclu que plusieurs unités de défense et de sécurité, dont « une unité de la Garde républicaine », avaient été impliquées dans l’opération. Au moment de la rédaction du présent rapport, le Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme n’avait toujours pas rendu ses conclusions publiques.
Une JUSTICE déficiente
« Justice… Mais quelle justice ! Tout cela n’était qu’une opération de communication visant à dissiper la pression et à pouvoir dire à quiconque évoque cette affaire : l’officier responsable [a été] puni et justice a été rendue. »
Un avocat des victimes.
Des Personnes Ayant Survécu Aux Attaques Maintenant Sur le Banc des Accusés
Le 30 août, alors que les autorités se félicitaient « d’avoir déjoué un complot contre Goma », elles annonçaient avoir arrêté 158 personnes qualifiées de « bandits armés, drogués, à la solde des terroristes du M23 et du Rwanda ».[172] Deux jours plus tard, 13 personnes ont été libérées, et 145 autres, dont 29 enfants, ont été présentées au Tribunal militaire de garnison de Goma et accusées de « participation à un mouvement insurrectionnel », « conspiration criminelle » et « meurtre[173] ».
Les 29 enfants ont été pris en charge par le système judiciaire pour mineur·e·s, qui a abandonné les poursuites et les a libérés mi-septembre. Parallèlement, 116 adultes, dont 102 hommes et 14 femmes, étaient toujours en détention dans l’attente de leur procès.[174] Le 9 octobre, le Tribunal militaire de garnison de Goma a déclaré 64 de ces personnes coupables de « participation à un mouvement insurrectionnel », « meurtre » et « tentative de meurtre » d’agents de police. Le tribunal a condamné Efraimu Bisimwa et trois autres dirigeants des Wazalendo à mort, et 60 adeptes Wazalendo ont été condamnés à 10 à 20 ans de prison.[175] Le tribunal a acquitté 52 personnes, qui ont ensuite été libérées de prison[176].
Le tribunal a poursuivi les 116 adeptes Wazalendo, dont 64 ont été déclarés coupables de « participation à un mouvement insurrectionnel » uniquement parce qu’ils appartenaient au groupe religieux et politique ou parce qu’ils avaient planifié la manifestation du 30 août, qui était censée être pacifique, ou y avaient participé. Le tribunal a considéré que le fait de passer la nuit au temple des Wazalendo alors que la manifestation du 30 août avait été interdite par le maire de Goma constituait la preuve de la participation à un mouvement insurrectionnel.[177] Pourtant, lors du procès des officiers et des soldats pour les homicides de manifestant·e·s, la Cour militaire du Nord-Kivu a rejeté les allégations des officiers selon lesquelles les adeptes Wazalendo étaient armés ou avaient utilisé l’arme qu’ils avaient prise à un agent de police, rejetant ainsi toute allégation de résistance ou d’action armée pouvant constituer une insurrection[178].
Concernant les accusations de « participation criminelle » à l’homicide d’un agent de police, le jugement du tribunal militaire de garnison de Goma n’a pas démontré dans quelle mesure chacune des 64 personnes condamnées avaient participé à la lapidation du policier et n’a fourni aucun élément de preuve en ce sens.[179] Il est impossible que toutes ces personnes, voire la moindre d’entre elles, aient participé individuellement à la lapidation du policier. Par conséquent, pour au moins certaines de ces personnes, leur seul crime était d’être adeptes Wazalendo ou d’être perçues comme telles, d’avoir participé à la manifestation et/ou de s’être trouvées sur le chemin des soldats lors de la répression. Un habitant de Nyabushongo qui a été témoin d’actes d’intimidation et d’arrestations arbitraires par des soldats des forces spéciales dans son quartier après le massacre a déclaré à Amnesty International : « Après la fusillade, les Hiboux [soldats des forces spéciales] sont entrés dans les magasins et les maisons du quartier, confisquant les smartphones et arrêtant des gens, en particulier des hommes. C’était comme si, pour eux, tout le monde dans le quartier était Wazalendo, et c’était un crime.[180] Je les ai vus arrêter quatre jeunes hommes dans un magasin. Ils en ont libéré trois, mais ils ont emmené le quatrième, et il est toujours en prison. »[181] Ces propos ont été corroborés par le Tribunal militaire de garnison de Goma, qui a conclu qu’au moins 52 des 116 personnes poursuivies avaient été arrêtées par des soldats en dehors de toute manifestation. Cela comprenait des cas où des personnes avaient été appréhendées à leur domicile et dans des magasins.[182] Pourtant, le tribunal a déclaré que bien que de nombreuses personnes n’aient pas participé directement à la lapidation du policier, elles devaient l’avoir encouragée ou approuvée par leur présence sur la scène du crime. Le tribunal a par conséquent déclaré ces personnes coupables.[183] Concernant la condamnation pour « tentative de meurtre », le tribunal s’est appuyé uniquement sur les témoignages de trois policiers affirmant qu’ils avaient été attaqués et blessés par un groupe d’adeptes Wazalendo alors qu’ils patrouillaient à pied, au moment où leur collègue avait été enlevé, emmené au temple des Wazalendo, et plus tard lapidé.[184] Ils ont identifié deux adeptes Wazalendo qui, d’après eux, faisaient partie du groupe qui les avait attaqués.[185] Aucun autre élément de preuve n’a été présenté pour appuyer ces allégations, et, surtout, pour déterminer la responsabilité individuelle de chaque personne accusée.
Amnesty International considère que le Tribunal militaire de garnison de Goma n’a pas suffisamment démontré que les 64 personnes déclarées coupables avaient individuellement participé au meurtre du policier Kipapa Safari ou étaient même présentes lorsqu’il a été lapidé. Par ailleurs, les civil·e·s ne doivent jamais être jugés par des tribunaux militaires.[186] Ces personnes doivent être libérées immédiatement ou rejugées dans le cadre de procès conformes aux normes d’équité, devant des tribunaux civils compétents et sans recours à la peine de mort.
Ces procédures judiciaires contre les personnes rescapées du massacre du 30 août semblent être une tentative du système de justice militaire de tenir le dirigeant et les adeptes Wazalendo responsables en premier lieu des violences qui ont eu lieu à Goma le 30 août et de leurs conséquences, et non pas une tentative de véritablement mener une enquête et de poursuivre les personnes responsables de la lapidation du policier.
L’un de leurs avocats a résumé ce que les poursuites dont ces personnes font l’objet signifiaient pour elles :
« Ce sont les survivants d’un carnage. Plus ou moins la moitié d’entre eux étaient des passants, des voisins, et d’autres personnes qui n’avaient rien à voir avec les Wazalendo. [Nombre d’entre eux ont été] torturés pendant ou après leur arrestation. Une femme [a été] complètement déshabillée. Les blessés [n’ont pas été] soignés. [De nombreuses personnes] ont perdu un membre de famille au cours du massacre. Bisimwa lui-même a perdu deux de ses enfants. Pourtant, ce sont eux qu’on a trainés devant la justice, traités de terroristes, et humiliés. Pire, ils sont jugés par la même armée qui les avait attaqués, et avec l’assistance de la MONUSCO contre laquelle ils voulaient manifester. Pensez-vous que ceci puisse être qualifié de justice[187] ? »
Les personnes déclarées coupables ont fait appel de leur condamnation et leur procès devant la Cour militaire du Nord-Kivu s’est ouvert le 29 décembre 2023. Au moment de la rédaction du présent rapport, le procès en appel était toujours en cours.
Obligation de Rendre des Comptes des Responsables
Alors que le procès des adeptes Wazalendo était en cours, de nombreuses personnes ont dénoncé la volonté affichée des autorités d’arrêter et de traduire en justice les personnes ayant survécu au massacre plutôt que d’amener l’armée à rendre des comptes.[188] Ce n’est que cinq jours après le massacre et en raison de la pression publique croissante que les autorités ont pris des mesures en vue d’assurer la justice et l’obligation de rendre des comptes. Le 3 septembre, le gouvernement[189] a annoncé que six membres de la Garde républicaine, dont le commandant de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu et son adjoint, avaient été arrêtés et seraient traduits en justice.[190] Par ailleurs, le gouvernement a annoncé que le gouverneur et chef des opérations militaires du Nord-Kivu, le général Constant Ndima, avait été « rappelé immédiatement à Kinshasa pour consultation » et que deux policiers de Goma avaient été suspendus et rappelés à Kinshasa[191].
Le procès des deux officiers et des quatre soldats de la Garde républicaine s’est tenu devant la Cour militaire du Nord-Kivu, à Goma, du 4 septembre au 3 octobre 2023. Ils étaient inculpés de crimes de guerre par meurtre et de désobéissance aux ordres.[192] Le 2 octobre, le tribunal a rendu sa décision. Le commandant de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu, le colonel Mike Mikombe Kalamba, a été déclaré coupable et condamné à mort pour « meurtre », « tentative de meurtre » et « destruction d’armement ». Il a également été écarté des forces armées.[193] Le commandant du régiment des forces spéciales et un soldat ont été acquittés et trois autres soldats ont été condamnés à 10 ans d’emprisonnement pour « meurtre » et « tentative de meurtre ».[194] Le tribunal a par ailleurs reconnu 109 personnes comme victimes et a condamné Mike Mikombe et les trois soldats à leur verser au total l’équivalent de 100 000 dollars des États-Unis à titre de réparation[195] (917 dollars des États-Unis par personne en moyenne). Le tribunal n’a cependant pas reconnu le mouvement FNMJM/Wazalendo en tant qu’entité juridique pouvant saisir un tribunal, ni en tant que victime. [196] Le tribunal a également rejeté la demande de réparations d’Efraimu Bisimwa pour « immoralité[197] ».
Les enquêtes menées par les autorités sur le meurtre du policer et les homicides illégaux des adeptes Wazalendo ont été entachées de graves irrégularités[198] :
- Aucun·e enquêteur·trice n’a été envoyé sur les lieux de la fusillade pour recueillir des preuves.[199] De l’aveu même du procureur militaire, aucune enquête balistique ou autopsie n’a été menée (bien que la RDC ait des capacités limitées dans ce domaine, un responsable de l’ONU a déclaré à Amnesty International que l’organisation avait proposé de fournir une assistance technique, mais que les autorités ne semblaient pas intéressées).[200] Le procureur militaire a déclaré : « Nous n’avons pas sollicité d’assistance de l’ONU pour les autopsies, mais en avons demandé pour l’enquête balistique. Je crois qu’ils ont envoyé un expert de Kinshasa – je l’ai aperçu ici – mais malheureusement, j’ai rencontré beaucoup d’obstacles, et nous n’avons pas pu nous rencontrer. »[201] Amnesty International estime que l’enquête n’a pas permis d’identifier toutes les personnes qui auraient dû faire l’objet d’une enquête pour leur éventuelle responsabilité.
- L’enquête n’a pas non plus permis de déterminer les noms, âges, genres et adresses des 56 personnes officiellement reconnues comme décédées et d’identifier les membres de leur famille. Certaines victimes sont par ailleurs encore portées disparues. Ces insuffisances dans l’enquête ont empêché plusieurs familles de participer au procès pour obtenir justice pour leurs proches ou demander réparation.
- Dans l’ensemble du procès des officiers et soldats de la Garde républicaine, seules six victimes ont été appelées à témoigner, contre 33 demandes des avocats des victimes.[202] Un avocat représentant les victimes a déclaré que « chaque témoin pouvait apporter de nouvelles informations ou une nouvelle perspective dans l’intérêt de la vérité et de la justice, mais après avoir entendu six témoins seulement, le tribunal a déclaré être “suffisamment éclairé” et a refusé d’appeler d’autres témoins[203]. »
- Bien que les victimes aient fait appel de la décision du tribunal dans l’affaire des six membres de la Garde républicaine, leur droit de faire appel a été entravé, car la juridiction de deuxième instance (la Haute Cour militaire) se trouve très loin et siège à 2 000 kilomètres de Goma, à Kinshasa.[204] Les victimes et leur avocat principal ont déclaré à Amnesty International qu’il ne leur serait peut-être pas possible de se rendre à Kinshasa pour prendre part au procès en appel et ont exprimé leur crainte que les injustices dont ils ont fait l’objet ne soient jamais traitées.[205] Le 25 octobre 2023, le comité des victimes a écrit au président de la cour d’appel militaire, demandant officiellement que le procès en appel se tienne exceptionnellement à Goma, afin d’assurer son efficacité.[206] Aucune réponse ne leur était parvenue au moment de la rédaction du présent rapport[207], et le procès en appel se poursuivait à Kinshasa.
- Restriction des droits de la défense dans le procès des officiers et soldats de l’armée : sur les 12 témoins cités par la défense, seuls trois ont comparu devant le tribunal.[208] Le tribunal a rejeté à au moins trois reprises les demandes des victimes et des avocats de la défense de citer le gouverneur Constant Ndima à comparaître devant le tribunal, même en tant que témoin.[209] Un avocat de la défense dans le procès des adeptes Wazalendo a déclaré : « Justice… Mais quelle justice ! Tout cela n’était qu’une opération de communication visant à dissiper la pression et à pouvoir dire à quiconque évoque cette affaire : l’officier responsable [a été] puni et justice a été rendue. En pendant ce temps, de nombreuses familles ignorent toujours où se trouvent leurs proches, une station de radio critique a été réduite au silence, une église a été réduite en cendres et des dizaines de personnes innocentes croupissent en prison[210]. »
Analyse Juridique
« Les citoyens ont le droit de s’exprimer librement et de se réunir pacifiquement, y compris lorsqu’il s’agit de protester contre les Nations unies et d’autres acteurs. Les autorités doivent faciliter le droit au rassemblement pacifique. »
Ravina Shamdasani, porte-parole du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, à propos du massacre commis par l’armée et la police le 30 août 2023 à Goma (1er septembre 2023).
Les autorités congolaises doivent respecter, protéger et concrétiser les droits humains en toutes circonstances, aussi bien pendant un conflit armé qu’en temps de paix. Bien qu’un soi-disant « état de siège » ait été déclaré publiquement dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri en mai 2021, les États parties ne sont autorisés à déroger à certaines dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) que si la proclamation de l’état d’urgence réunit certaines conditions. Il faut notamment que les circonstances soient notifiées par écrit au secrétaire général des Nations unies[211] – une condition expresse à laquelle les autorités de la RDC ne se sont pas conformées.
L’« état de siège » a été prolongé au mépris du droit international relatif aux droits humains et des normes connexes, comme l’a démontré Amnesty International[212]. Il octroie des pouvoirs excessifs à l’armée, notamment en restreignant les libertés civiles et en rendant possible le jugement de civils par des tribunaux militaires[213]. Comme l’a signalé le Comité des droits de l’homme des Nations unies, même si l’« état de siège » avait été proclamé en bonne et due forme, il fallait encore que les mesures adoptées par les autorités soient rendues strictement nécessaires par la situation, en tenant compte du principe de proportionnalité[214]. En outre, nombre des droits qui, comme le montre le présent rapport, ont été violés, notamment le droit à la vie et l’interdiction de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, sont des droits auxquels il ne peut être dérogé, en vertu du droit international[215] ainsi que de la Constitution de la RDC[216]. La RDC est également partie à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (la Charte de Banjul), qui n’autorise aucune dérogation aux droits qui y sont énoncés.
Les autorités ont des obligations au regard du droit international relatif aux droits humains, notamment au titre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques[217] et des Protocoles facultatifs s’y rapportant[218], de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (la Convention contre la torture)[219] et de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (la Charte de Banjul[220]). Ces instruments garantissent, entre autres, les droits humains suivants :
- Droit à la vie – L’article 6.1 du PIDCP dispose : « Le droit à la vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être protégé par la loi. Nul ne peut être arbitrairement privé de la vie[221]. » On peut lire à l’article 4 de la Charte de Banjul : « La personne humaine est inviolable. Tout être humain a droit au respect de sa vie et à l’intégrité physique et morale de sa personne. Nul ne peut être privé arbitrairement de ce droit[222]. » Les Principes des Nations unies relatifs à la prévention efficace des exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires et aux moyens d’enquêter efficacement sur ces exécutions[223] et la version révisée du Manuel des Nations Unies sur la prévention des exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires et les moyens d’enquête sur ces exécutions (le Protocole du Minnesota)[224] apportent des précisions sur les obligations des États à cet égard.
- Droit à la dignité et droit de ne pas être soumis à la torture ni à d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants – La torture correspond à « tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, lorsqu’une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite[225]. » L’interdiction de la torture, qui est au centre de la Convention contre la torture, est également énoncée à l’article 7 du PIDCP et à l’article 5 de la Charte de Banjul. Il s’agit d’un principe de jus cogens du droit international coutumier. La Convention contre la torture souligne qu’« [a]ucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception, ne peut être invoquée pour justifier la torture. » Le Code de conduite des Nations unies pour les responsables de l’application des lois précise en outre : « Aucun responsable de l’application des lois ne peut infliger, susciter ou tolérer un acte de torture ou quelque autre peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant, ni ne peut invoquer un ordre de ses supérieurs ou des circonstances exceptionnelles telles qu’un état de guerre ou une menace de guerre, une menace contre la sécurité nationale, l’instabilité politique intérieure ou tout autre état d’exception pour justifier la torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants[226]. » En lien avec l’interdiction de la torture et des autres formes de mauvais traitements, l’article 5 de la Charte de Banjul souligne que « [t]out individu a droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine[227] ». Le droit de chaque personne à la dignité et à être « traitée avec humanité » est également garanti par l’article 10 du PIDCP[228].
- Peine de mort – Amnesty International s’oppose en toutes circonstances à la peine capitale, car elle constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit, ainsi qu’une violation du droit à la vie. Dans sa résolution CHPR/Res.544 (LXXIII), la Commission africaine exhorte également les États à « prendre des mesures visant l’abolition de la peine de mort », y compris la ratification du Deuxième Protocole facultatif se rapportant au PIDCP, visant à abolir la peine de mort[229]. En mars 2024, alors que l’application de la peine de mort était suspendue depuis 20 ans, le gouvernement congolais a rétabli les exécutions pour une série d’infractions, notamment pour « association de malfaiteurs » et « participation à un mouvement insurrectionnel ». Amnesty International a appelé les autorités à renoncer immédiatement à la reprise des exécutions et à instaurer un moratoire officiel sur toutes les exécutions, en vue d’abolir définitivement la peine capitale[230].
- Interdiction des disparitions forcées – En 2007, la RDC a signé la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. À ce titre, le pays est tenu de s’abstenir de tout acte qui serait contraire à l’objet et au but du traité jusqu’à ce qu’il manifeste son intention de ne pas le ratifier[231]. Certes, la RDC a accepté les recommandations l’invitant à ratifier la Convention[232], mais elle ne les a pas encore appliquées. La disparition forcée est définie à l’article 2 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées comme « l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi ». L’article 12(2) de la Convention dispose : « Lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une personne a été victime d’une disparition forcée, les autorités visées au paragraphe 1 du présent article ouvrent une enquête, même si aucune plainte n’a été officiellement déposée. »
- Liberté de pensée, de conscience et de religion[233], liberté d’opinion et d’expression[234] et liberté d’association[235] et de réunion pacifique[236] – Les États sont tenus de protéger les droits à la liberté de pensée, de conscience et de religion (en effet, aucune dérogation à l’article 18 du PIDCP n’est autorisée par l’article 4[2] du PIDCP) et à la liberté d’expression – même concernant des propos qui pourraient être jugés profondément offensants par de nombreuses personnes[237]. La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a déclaré : « La liberté d’expression ne devrait pas être restreinte pour des raisons d’ordre public ou de sécurité nationale, à moins qu’il n’existe un risque réel de menace imminente d’un intérêt légitime et un lien causal direct entre la menace et l’expression[238]. » Le droit de s’associer librement avec d’autres (aux termes de l’article 22 du PIDCP et de l’article 10 de la Charte de Banjul) protège le regroupement volontaire de personnes ayant pour intérêt commun de créer ou de rejoindre une association. De leur côté, les associations doivent être en mesure de déterminer librement leurs objets et leurs activités, et les associations informelles ne doivent pas « être punies, ni pénalisées en droit ou en fait au motif qu’elles ne jouissent pas d’un statut officiel[239] ». Le droit à la liberté de réunion pacifique (reconnu par l’article 21 du PIDCP et l’article 11 de la Charte de Banjul) est un droit individuel exercé collectivement qui protège le rassemblement non violent de personnes dans certains buts précis[240]. Ces réunions peuvent, par exemple, permettre d’exprimer ou de transmettre un message controversé, d’affirmer l’identité d’un groupe, et/ou avoir des objectifs culturels ou religieux[241].En outre, le terme « pacifique » s’entend comme concept englobant tout comportement qui irrite ou offense ainsi que tout comportement qui entrave, ralentit ou bloque temporairement les activités de tierces parties. Les actes de violence isolés ne signifient pas qu’un rassemblement dans son ensemble n’est pas pacifique[242]. Les États sont tenus de s’abstenir de toute ingérence injustifiée concernant ces droits et de protéger et faciliter leur exercice.
- Droit à la liberté et à la sécurité de sa personne – L’article 9 du PIDCP dispose : « Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n’est pour des motifs et conformément à la procédure prévus par la loi. Tout individu arrêté sera informé, au moment de son arrestation, des raisons de cette arrestation et recevra notification, dans le plus court délai, de toute accusation portée contre lui. Tout individu arrêté ou détenu du chef d’une infraction pénale sera traduit dans le plus court délai devant un juge ou une autre autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires, et devra être jugé dans un délai raisonnable ou libéré. » L’article 6 de la Charte de Banjul protège également le droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Le Comité des droits de l’homme a souligné que l’adjectif « arbitraire » n’était pas synonyme de « contraire à la loi », mais devait « recevoir une interprétation plus large, intégrant le caractère inapproprié, l’injustice, le manque de prévisibilité et le non-respect des garanties judiciaires, ainsi que les principes du caractère raisonnable, de la nécessité et de la proportionnalité[243] ».
- Droit à la vérité, à la justice et à des réparations – Toute personne dont les droits humains ont été violés a le droit de connaître la vérité, d’obtenir justice et de recevoir des réparations effectives, qui englobent la restitution, l’indemnisation, la réadaptation, la satisfaction et des garanties de non-répétition. L’article 7 de la Charte de Banjul dispose : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. » S’agissant des victimes de violations flagrantes du droit international relatif aux droits humains, telles que celles exposées dans le présent rapport, les Principes fondamentaux des Nations unies concernant le droit à un recours et à réparation précisent les obligations des États à cet égard, notamment leur obligation « [d]’enquêter de manière efficace, rapide, exhaustive et impartiale sur les violations et de prendre, le cas échéant, des mesures contre les personnes qui en seraient responsables[244] ». « Les victimes devraient être traitées avec humanité ainsi que dans le respect de leur dignité et de leurs droits humains, et des mesures appropriées devraient être prises pour assurer leur sécurité, leur bien-être physique et psychologique et la protection de leur vie privée, de même que ceux de leur famille. L’État devrait veiller à ce que sa législation interne, dans la mesure du possible, permette aux victimes de violences ou de traumatismes de bénéficier d’une sollicitude et de soins particuliers, afin de leur éviter de nouveaux traumatismes au cours des procédures judiciaires et administratives destinées à assurer justice et réparation[245]. »
- Droit à un procès équitable – Le droit à l’égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable est inscrit, entre autres, dans le PIDCP (articles 14 et 15) et dans la Charte de Banjul (article 7). L’article 14 du PIDCP dispose : « Tous sont égaux devant les tribunaux et les cours de justice. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil[246] ». Les Nations unies comme la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission africaine) ont élaboré des normes relatives au droit à un procès équitable[247]. La Commission africaine souligne : « Les tribunaux militaires ne peuvent, en aucune circonstance, juger des civils[248]. »
Principales Normes Internationales Relatives au Maintien de l’Ordre Lors de Rassemblements et à l’Usage de la Force par les Responsables de l’Application des Lois
Les pouvoirs publics doivent protéger et faciliter les rassemblements pacifiques. Les autorités doivent supposer qu’un rassemblement sera pacifique à moins qu’un élément crédible et convaincant prouve le contraire. Si une intervention des forces de l’ordre s’avère nécessaire, le maintien de l’ordre lors d’un rassemblement doit être planifié et l’opération doit être menée de telle sorte que le rassemblement puisse se dérouler comme prévu par ses organisateurs, mais aussi dans le souci de limiter les risques de blessures. Comme l’a souligné le Comité des droits de l’homme :
« Le plan devrait fournir le détail des instructions données à toutes les forces et unités chargées du maintien de l’ordre, de l’équipement dont elles disposeront et de leur déploiement. […] Les autorités chargées du maintien de l’ordre devraient aussi établir des plans d’urgence et des protocoles de formation […]. Les autorités chargées du maintien de l’ordre devraient aussi établir des plans d’urgence et des protocoles de formation en ce qui concerne notamment l’encadrement des réunions dont les autorités n’ont pas reçu notification à l’avance et qui pourraient causer des troubles à l’ordre public. Les forces de l’ordre devraient s’employer à désamorcer les situations susceptibles d’entraîner des violences. Elles sont tenues d’utiliser toutes les méthodes non violentes et d’adresser un avertissement préalable avant de faire usage de la force si celle-ci devient absolument nécessaire, sauf s’il est manifeste que les méthodes non violentes comme l’avertissement préalable seraient inefficaces. Tout recours à la force doit impérativement s’inscrire dans le respect des principes fondamentaux de légalité, de nécessité, de proportionnalité, de précaution et de non-discrimination […], et ceux qui font usage de la force doivent systématiquement en rendre compte[249]. »
De nombreux instruments internationaux et régionaux, notamment des rapports des procédures spéciales des Nations unies concernées, précisent les normes régissant l’usage de la force en ce qui concerne le maintien de l’ordre dans les rassemblements[250].Parmi les normes pertinentes, citons notamment le Code de conduite des Nations unies pour les responsables de l’application des lois (1979[251]), les Principes de base des Nations unies sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois (1990[252]), les Lignes directrices des Nations Unies basées sur les droits de l’homme portant sur l’utilisation des armes à létalité réduite dans le cadre de l’application des lois(2020[253]),le rapport Manifester librement et en toute sécurité. Le maintien de l’ordre dans les rassemblements impliquant des enfants de l’UNICEF (2023) et les Lignes directrices de la Commission africaine pour le maintien de l’ordre lors des réunions en Afrique (2017).
Le Comité des droits de l’homme a énoncé les grands principes visant à garantir le plein exercice du droit à la liberté de réunion pacifique, qui sont, entre autres :
- La présomption en faveur du caractère pacifique des réunions, et la reconnaissance du fait que « les actes de violence sporadiques perpétrés par certains participants ne doivent pas être attribués aux autres participants, aux organisateurs ou au rassemblement lui-même[254] ».
- Le droit d’organiser une réunion pacifique sans devoir en demander l’autorisation ou être soumis à un processus de notification fastidieux[255] : « Devoir demander l’autorisation des autorités met à mal le principe selon lequel le droit de réunion pacifique est un droit fondamental. Les systèmes de notification qui impliquent que ceux qui ont l’intention d’organiser une réunion pacifique sont tenus d’en informer les autorités à l’avance et de fournir certains détails importants sont autorisés dans la mesure nécessaire pour aider les autorités à faciliter le bon déroulement des réunions pacifiques et à protéger les droits d’autrui[256]. »
- Concernant le maintien de l’ordre pendant les réunions[257] : « Ne devraient être déployés pour maintenir l’ordre dans les rassemblements que des agents des forces de l’ordre qui ont été formés à l’encadrement des réunions, y compris aux normes relatives aux droits de l’homme pertinentes. […] Les forces militaires ne devraient pas être utilisées pour maintenir l’ordre dans les rassemblements, mais si elles sont déployées en appui, à titre exceptionnel et de façon temporaire, elles doivent avoir reçu une formation aux droits de l’homme appropriée et agir dans le respect des mêmes règles et normes internationales que celles qui s’appliquent aux forces de police[258]. »
Ces normes clés doivent être incorporées et reprises intégralement dans la législation et les politiques internes de la RDC[259]. Comme l’a souligné le Comité des droits de l’homme, « [l]es États parties [au PIDCP] sont censés prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir toute privation arbitraire de la vie par leurs agents de maintien de l’ordre, y compris les soldats chargés de missions de maintien de l’ordre. Ces mesures comprennent l’établissement d’une législation appropriée relative au contrôle de l’utilisation de la force létale par les agents du maintien de l’ordre, la mise en place de procédures visant à garantir que les opérations de maintien de l’ordre soient correctement planifiées compte tenu de la nécessité de réduire au minimum le risque qu’elles représentent pour la vie humaine, le signalement obligatoire et l’analyse des incidents mortels et autres incidents mettant la vie en danger et la conduite obligatoire d’enquêtes sur ces incidents ainsi que la mise à disposition des forces responsables de la lutte antiémeute de moyens moins meurtriers efficaces, complétés par des équipements de protection appropriés qui évitent le recours à la force létale[260]… »
En outre, il ne doit pas être fait appel aux forces militaires pour gérer les réunions. Les lignes directrices de la Commission africaine soulignent :
« En règle générale, le personnel militaire ne devrait pas être déployé pour le maintien de l’ordre lors des réunions et ne doit être utilisé qu’en cas de circonstances exceptionnelles et uniquement en cas de nécessité absolue. Le personnel militaire déployé dans le cadre d’opérations liées à des réunions doit être subordonné et sous le commandement des autorités de Police ; il doit être formé et être soumis aux normes régionales et internationales des droits de l’homme, ainsi qu’à toute politique, ligne directrice et code éthique concernant le maintien de l’ordre au niveau national il doit disposer de toutes les instructions…[261] »
Crimes de Droit International et Autres Violations des Droits Humains
Crimes Contre l’Humanité
Amnesty International considère que ce massacre doit être replacé dans le contexte du conflit armé qui sévit dans l’est de la RDC depuis les années 1990. De nombreuses violations du droit international humanitaire et relatif aux droits humains ont été perpétrées dans ce cadre par toutes les parties au conflit, se traduisant par des attaques contre la population civile, en particulier dans les régions de l’Ituri, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, à l’est du pays. Ces éléments ont conduit le Bureau du procureur de la Cour pénale internationale (CPI) à ouvrir une enquête portant essentiellement sur « les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité qui auraient été commis principalement dans l’est du pays, dans la région de l’Ituri et les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, depuis le 1er juillet 2002 » (le Bureau du procureur a cependant reconnu que des crimes présumés avaient été signalés depuis les années 1990, mais la Cour n’a exercé sa compétence qu’à partir du 1er juillet 2002[262]). Depuis, plusieurs membres de groupes armés ont été poursuivis par la CPI pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, et trois d’entre eux ont été déclarés coupables. Toutefois, la CPI n’a pas encore engagé de poursuites concernant les crimes commis par l’armée. Plus récemment, le Bureau du procureur a annoncé sa décision de « renouveler les efforts d’enquête en RDC »[263]. Le Bureau du procureur a déclaré : « […] les derniers épisodes de violence dans la province du Nord-Kivu sont liés à des schémas récurrents de violence et d’hostilités qui sévissent dans la région depuis au moins le 1er juillet 2002, date à laquelle la Cour a commencé à exercer sa compétence en RDC »[264].
Amnesty International estime que le massacre du 30 août pourrait constituer un crime contre l’humanité s’inscrivant dans le cadre de l’attaque généralisée ou systématique menée par l’armée contre des civils dans l’est de la RDC.
Ce massacre a été perpétré principalement par la Garde républicaine, une unité de l’armée congolaise. La justice militaire congolaise elle-même a inculpé certains officiers et soldats pour crimes contre l’humanité. Bien qu’ils n’aient pas été reconnus coupables de ces chefs d’accusation, Amnesty International a déjà relevé des irrégularités dans l’enquête et le procès.
Le Statut de Rome définit à l’article 7 les crimes contre l’humanité comme des actes interdits « commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque[265] ». Le meurtre, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation ou le transfert forcé de population, la torture, le viol, les disparitions forcées et d’autres crimes peuvent être constitutifs de crimes contre l’humanité. Les crimes contre l’humanité « sont parmi les crimes les plus graves qui concernent l’ensemble de la communauté internationale [et] engagent la responsabilité pénale individuelle[266] ». La RDC est partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale depuis 2002 et a incorporé des dispositions du Statut de Rome dans son droit interne[267]. L’article 222 du Code pénal ordinaire donne une définition du crime contre l’humanité et de ses éléments identique à celle de l’article 7 du Statut de Rome.
Dans les paragraphes qui suivent, nous nous proposons d’examiner tout d’abord les éléments du crime figurant dans le chapeau de l’article, à savoir (i) l’existence d’une attaque menée contre une population en application d’une politique étatique et (ii) le caractère généralisé ou systématique de l’attaque. Nous aborderons ensuite sur l’argument selon lequel les crimes du 30 août sont constitutifs de crimes contre l’humanité en tant que (iii) meurtres (iv) commis dans le contexte et en connaissance des éléments figurant dans le chapeau de l’article (lien et connaissance).
Éléments figurant dans le chapeau de l’article : attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile
Une attaque contre une population civile, critère nécessaire à la qualification de crime contre l’humanité, désigne un comportement qui consiste en la commission multiple d’actes visés au paragraphe 1 de l’article 7 du Statut de Rome, par exemple, entre autres, des meurtres et des viols[268], ayant pour cible principale la population civile[269]. Les Éléments des crimes du Statut de Rome précisent que cette attaque doit être menée « en application ou dans la poursuite de la politique d’un État ou d’une organisation ayant pour but une telle attaque[270] », de sorte que les actes commis de manière fortuite ou isolée ne sauraient être poursuivis sous la qualification de crimes contre l’humanité. Un crime contre l’humanité peut être commis en temps de paix ou pendant un conflit armé, et une attaque peut comporter plusieurs actes constitutifs de crimes (parmi ceux énumérés à l’article 7[1] du Statut de Rome) contre la population civile.
Amnesty International estime qu’une attaque obéissant à une politique étatique est commise par l’armée congolaise et ses alliés dans l’est de la RDC depuis les années 1990. Cette attaque se caractérise par la commission de multiples homicides et viols dirigés contre la population civile au fil des années, comme l’ont établi les Nations unies et plusieurs organisations de la société civile[271].
Les juridictions internationales ont établi des lignes directrices indiquant comment démontrer l’existence d’une politique étatique. Dans l’affaire Bemba, par exemple, la Chambre de première instance de la CPI a expliqué : « [L]a “politique” n’a pas besoin d’être énoncée de façon formelle et [elle] peut se déduire de divers facteurs qui, ensemble, permettent d’établir son existence. Il peut s’agir i) du fait que l’attaque a été planifiée, dirigée ou organisée ; ii) d’un modèle récurrent de violences ; iii) du recours à des ressources publiques ou privées pour appliquer cette politique ; iv) de l’implication de l’État ou de forces organisées dans la commission des crimes ; v) de déclarations, d’instructions ou de documentation attribuable à l’État ou à l’organisation qui légitime ou encourage la commission des crimes ; et/ou vi) une motivation sous‑jacente[272]. »
En l’espèce, plusieurs éléments indiquent que l’attaque contre la population civile est menée en application d’une politique étatique, notamment le caractère récurrent et répété des homicides au fil de nombreuses années, le fait qu’ils aient été perpétrés de manière coordonnée (par des unités travaillant ensemble et non des individus isolés), souvent directement par les forces de l’État ou par des groupes armés associées aux forces de l’État ou soutenues par celles-ci, et le fait que les auteurs de ces actes n’aient pour la plupart jamais été poursuivis[273]. Au vu de ces éléments, il est peu probable que ces actes aient été commis de manière fortuite et isolée. Au contraire, l’État tolère vraisemblablement ces actes en ne faisant rien pour les arrêter et pour punir leurs auteurs, voire les soutient, les couvre ou en fait la promotion, comme dans le cas des homicides décrits dans le présent rapport[274].
Deuxièmement, l’attaque susmentionnée pourrait être généralisée et/ou systématique. Le terme « généralisée » renvoie « au fait que l’attaque a été menée sur une grande échelle et au nombre de victimes qu’elle a faites[275] » et « systématique » au « caractère organisé des actes de violence et à l’improbabilité de leur caractère fortuit[276] ». Bien qu’une attaque contre une population civile impliquant la commission de crimes contre l’humanité doive être soit généralisée, soit systématique, sans nécessairement regrouper ces deux critères, des attaques généralisées composées de plusieurs épisodes successifs dénotent souvent un caractère systématique, dans la mesure où elles s’inscrivent dans le cadre d’une politique d’un État ou d’une organisation, ce qui atteste en tant que tel de la nature organisée (et non fortuite) des actes constitutifs de l’attaque. C’est l’attaque globale contre la population civile, et non chaque acte interdit, qui doit être généralisée ou systématique.
De l’avis d’Amnesty International, il est probable que les nombreux homicides et viols commis[277] par les forces de l’État et leurs alliés contre des civils dans les provinces de l’est de la RDC depuis les années 1990 soient généralisés et/ou systématiques. Depuis 1996, les attaques directement dirigées contre la population civile dans les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l’Ituri ont entraîné la mort de dizaines de milliers de personnes, auxquelles s’ajoutent des centaines de milliers d’autres personnes ayant subi des violences sexuelles, y compris des viols, dans le cadre de ces attaques[278]. Des homicides et des viols ont été commis au cours de plus d’un millier d’épisodes répétés sur une longue période de près de 30 ans. Ces homicides ont été perpétrés selon des modalités similaires, prenant généralement la forme de tirs visant directement des personnes, de bombardements aveugles, d’incendies et d’agressions au couteau.
Même en envisageant l’attaque de manière isolée, sans tenir compte des actes illégaux régulièrement perpétrés depuis les années 1990 par les forces de l’État et leurs alliés contre des civils, on peut considérer que les massacres, la torture et autres mauvais traitements, et la détention arbitraire de manifestant·e·s Wazalendo et d’autres civil·e·s le 30 août et pendant les semaines suivantes constituent en tant que tels une attaque généralisée ou systématique. Le 30 août à Goma, les forces de défense et de sécurité ont tué en différents endroits de la ville entre 50 et 100 personnes[279], toutes incontestablement civiles[280], ce qui peut en tant que tel satisfaire au critère d’attaque « généralisée ». En outre, les homicides semblent systématiques, et non fortuits, puisque l’armée et la police ont ciblé les victimes alors qu’elles ne représentaient aucune menace. La torture subie par certain·e·s manifestant·e·s, l’arrestation arbitraire de 116 manifestant·e·s et les disparitions forcées peuvent tous relever de l’attaque menée par l’État.
Actes sous-jacents : homicides commis dans le cadre de cette attaque
Amnesty International a établi que, le 30 août à Goma, l’armée avait tué des dizaines de personnes de manière délibérée et illégale. Ces homicides sont décrits plus en détail dans la section « Homicides illégaux » ci-après, ainsi que dans le chapitre précédent.
Amnesty International estime que ces homicides de Goma ont probablement été perpétrés dans le cadre de l’attaque généralisée et systématique contre la population civile[281]. Pour déterminer si le lien requis existe, on peut tenir compte de différents facteurs, notamment les similitudes entre les actes en cause et les actes survenus dans le cadre de l’attaque, la nature des faits et des circonstances entourant les actes de l’accusé, la proximité temporelle et géographique des actes avec l’attaque, et les buts et conséquences des actes, y compris la manière dont ils sont associés à l’attaque ou à la politique dans le cadre de laquelle l’attaque a été menée[282].
Il existe en effet un lien clair entre ces homicides et l’attaque généralisée et persistante de l’État contre la population civile de l’est de la RDC. Les homicides du 30 août ont été commis à Goma, la principale ville de la province du Nord-Kivu, dans l’est de la RDC, à savoir la zone géographique où le conflit armé et les attaques contre la population civile se poursuivent. Ces homicides ont été commis selon des modalités correspondant aux pratiques employées généralement par l’armée pour cibler et tuer des membres de la population civile, lesquels sont parfois pris pour cibles parce qu’ils sont perçus comme hostiles au gouvernement ou associés à des parties adverses dans le cadre du conflit armé. En outre, depuis la planification de l’opération jusqu’aux déclarations faites après les meurtres, les commandants militaires impliqués dans ces homicides ont eux-mêmes établi un lien très explicite entre ces faits et le conflit armé en cours, y compris en affirmant à plusieurs reprises que les personnes qu’ils avaient tuées étaient liées à leurs « ennemis » dans le cadre du conflit armé[283].
De l’avis d’Amnesty International, il y a lieu de mener une enquête plus approfondie pour déterminer si le crime contre l’humanité de meurtre a été commis le 30 août à Goma et dans les environs, en tenant compte de la gravité et de l’ampleur des faits survenus ce jour-là et les semaines suivantes, et en gardant à l’esprit que des crimes similaires sont régulièrement commis en toute impunité depuis des années par les forces gouvernementales dans l’est de la RDC.
Exécutions Extrajudiciaires et Autres Homicides Illégaux
Les exécutions extrajudiciaires sont des homicides commis délibérément et en toute illégalité par des agents de l’État ou par des personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement des autorités de l’État. Bien qu’il puisse être parfois difficile d’établir avec certitude que les éléments minimaux à fournir pour prouver une exécution extrajudiciaire ont été réunis s’agissant de l’intention spécifique de tuer et/ou de l’autorisation ou l’acquiescement de l’État, les faits présentés ici, qui s’appuient sur des témoignages directs de victimes, de témoins oculaires et d’auteurs, démontrent de manière convaincante qu’il s’agissait d’homicides délibérés commis par des soldats appliquant des ordres sans équivoque de hauts responsables.
Il ressort clairement des faits relatés dans les chapitres 1 et 2 que les homicides ont été perpétrés par des soldats dans le cadre d’une opération de maintien de l’ordre public élaborée minutieusement et planifiée à l’avance qui ciblait les adeptes Wazalendo ou toute personne perçue comme telle, avec la volonté déclarée de « prendre toutes dispositions [pour] sécuriser [les] installations [de la] MONUSCO [et] déployer des dispositifs sécuritaires dans [la] ville [de] Goma», y compris « poursuivre l’ennemi » et « détruire les éléments ennemis isolés ». Le plan opérationnel prévoyait le déploiement de troupes d’élite des forces spéciales, lesquelles étaient apparemment aux commandes ce jour-là et disposaient d’armes de type militaire. D’après des récits de témoins, la vérification des images et des rapports médicaux, il semble que les personnes qui ont été tuées ont succombé à des tirs à bout portant, notamment à la tête, dans le dos ou à l’abdomen.
D’autres éléments montrent que ces homicides ont été perpétrés sur ordre de l’État ou, à tout le moins, avec son assentiment. On peut notamment citer les moyens et les unités déployés, les instructions données, le nombre de morts élevé, les tentatives de minimisation du nombre de morts, les corps apparemment disparus et le fait que les autorités n’aient pas mené d’enquêtes balistiques ni d’autopsies. Les déclarations des hauts responsables et fonctionnaires viennent corroborer cette conclusion – comme indiqué à la section 3.3, le gouverneur a affirmé que l’armée avait agi « professionnellement » pour « neutraliser […] les fauteurs de troubles » ; le commandant de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu s’est vanté que les forces spéciales avaient « opéré avec détermination » et avaient réussi à « étouffer dans l’œuf la tentative [des Wazalendo de s’emparer de Goma] » ; et un fonctionnaire a déclaré : « nous avons éliminé l’ennemi, tel que décrit dans l’ordre opérationnel ».
- Le 30 août, entre 3 h 30 et 4 h 30, des soldats ont tué au moins six personnes devant la station de radio des Wazalendo. Ils les ont abattus sans raison apparente et sans exposer leurs motifs, alors qu’ils procédaient à l’arrestation des personnes se trouvant dans la station de radio (voir section 2.1 « 3 h 30 :homicides illégaux »).
- Vers 4 heures du matin, le même jour, des policiers ont tiré sur un groupe d’adeptes Wazalendo qui se dirigeaient pacifiquement vers la station de radio après avoir entendu parler de l’opération. Jean-Claude Rusina, 35 ans, a été tué et deux autres personnes ont été blessées. Un peu plus tard, des soldats ont tiré sur les blessés et sur les personnes qui essayaient de les conduire à l’hôpital, tuant au moins une personne de plus.
- Vers 6 heures du matin, des policiers ont tué Uwezo Milele, un jeune homme de 19 ans. Ils l’ont abattu alors qu’il marchait pacifiquement dans la rue (voir section 2.2 « 6 h :Fusillade et lapidation au temple »).
- Entre 7 heures et 8 heures, alors que la manifestation était sur le point de commencer, des soldats ont tiré sur la foule. Ils n’avaient pas besoin de se protéger ou de protéger des tiers contre une menace imminente de mort ou de blessure grave. Ils ont tiré sur des personnes en l’absence de tout danger. Dans certains cas, ils ont également pris en chasse les manifestant·e·s qui s’enfuyaient, les ont retrouvés et les ont tués là où ils avaient trouvé refuge (voir section 2.2 « 7 h 30 :fusillade de masse»).
Selon les Nations unies, les soldats ont tué illégalement plus de 102 personnes[284]. Nombre de ces homicides pourraient également constituer des exécutions extrajudiciaires.
Ces homicides illégaux portent atteinte au droit à la vie. Les autorités de la RDC ont l’obligation d’enquêter sur ces homicides et, lorsqu’il existe des preuves, de poursuivre et de juger les responsables dans le cadre de procès équitables devant des tribunaux compétents, indépendants et impartiaux[285].
Violations du Droit d’Association et de Réunion Pacifique, en Particulier Recours Excessif à la Force, Usage d’Armes à Feu et Déploiement de Personnel Militaire
L’un des facteurs importants de la situation (avant le déploiement essentiellement militaire contre les manifestant·e·s) était la remise en cause injustifiée du statut d’enregistrement de la FNJMN. Ce motif a ensuite été avancé pour interdire la manifestation à titre préventif. Pourtant, les autorités ne doivent pas obliger les associations à s’enregistrer pour qu’elles puissent exister ou fonctionner librement. En tout état de cause, le droit à la liberté de réunion pacifique s’applique également aux associations non enregistrées[286], et les autorités ont l’obligation positive d’en protéger et d’en favoriser l’exercice.
Ce droit de réunion pacifique ne peut être limité que si cela est nécessaire et, même alors, seulement de manière proportionnée et dans la poursuite d’un but légitime, tel que la protection de l’ordre public ou de la sécurité publique. Un simple risque hypothétique de trouble à l’ordre public ne répond pas à ces critères. Dans ces conditions, les affirmations de la MONUSCO (exposées dans le présent rapport) selon lesquelles la manifestation prévue était susceptible d’échapper à tout contrôle ou qu’elle aurait pu présenter un caractère « haineux et violent » ne sauraient, sans autres preuves, constituer une base suffisante justifiant la demande d’interdiction pure et simple de cette manifestation formulée par la Mission auprès des autorités congolaises (voir la synthèse « opération Keba[287] »). La possibilité qu’une réunion pacifique provoque des réactions hostiles de la part d’autres personnes n’enlève rien à sa nature pacifique[288]. L’interdiction d’un rassemblement est une mesure de dernier recours et les autorités devraient toujours chercher à appliquer des mesures moins intrusives avant de recourir à une interdiction pure et simple[289]. En ce sens, l’interdiction par les autorités de la manifestation des Wazalendo (voir section 1.2 « Interdiction préventive ») et des cérémonies d’obsèques (voir section 2.3 « Enterrements indignes ») constitue une violation de leur droit de manifester pacifiquement. Par ailleurs, même lorsque le comportement d’une personne la place hors du champ de protection du droit à la liberté de réunion pacifique (par exemple si elle a un comportement violent), elle conserve néanmoins les autres droits qu’elle tient de la Charte de Banjul et des autres traités ratifiés par la RDC[290]. La mort par lapidation d’un policier aux mains de certain·e·s manifestant·e·s ne justifiait en aucun cas la répression brutale exercée par l’armée contre tou·te·s les manifestant·e·s, et encore moins le massacre, les blessures par balle, la torture et les autres mauvais traitements infligés par les forces de l’ordre (voir section 2.2). Celles-ci auraient dû s’efforcer de disperser les personnes parmi la foule qui s’en prenaient au policier, en faisant, si nécessaire, usage de la force de manière progressive et proportionnée, et en faisant la distinction entre les manifestant·e·s/passant·e·s pacifiques et les personnes directement impliquées dans la lapidation.
La MONUSCO n’aurait pas dû demander aux autorités d’imposer une interdiction de la manifestation à titre préventif. Elle aurait plutôt dû insister sur le fait que cette manifestation devait être présumée pacifique et souligner l’obligation qu’ont les autorités de planifier et de mener les opérations de maintien de l’ordre de manière à faciliter le rassemblement, de désamorcer toute situation susceptible d’entraîner des violences, d’utiliser tous les moyens non violents possibles et d’éviter le recours à la force sauf en cas d’absolue nécessité (dans le respect des principes de légalité, de nécessité, de proportionnalité, de précaution et de non-discrimination) et de ne pas déployer l’armée pour maintenir l’ordre lors de rassemblements.
Les forces de sécurité et de défense congolaises n’auraient pas dû être déployées pour assurer le maintien de l’ordre lors de la manifestation, car ce rôle devrait être réservé aux responsables de l’application des lois formés à cet effet. En outre, les armes à feu ne sont pas un outil adapté au maintien de l’ordre lors des rassemblements et leur utilisation ne peut être justifiée qu’en dernier recours face à une menace imminente de mort ou de blessure grave – des conditions qui n’étaient pas réunies selon les éléments relatifs à la manifestation recensés dans le présent rapport.
Torture et Autres Mauvais Traitements
Des membres de la Garde républicaine ont infligé à 12 personnes des actes de torture et d’autres mauvais traitements après les avoir arrêtées à la station de radio des Wazalendo (voir section 2.4). Les victimes ont été attachées, frappées et menacées avec une arme. Certaines ont été soulevées pour les laisser retomber au sol, à titre de sanction ou pour leur extorquer des informations. Les soldats ont également arrêté et placé en détention plus de 150 autres personnes, dont des dizaines d’enfants, et ont infligé à beaucoup d’entre elles des traitements dégradants ou humiliants. Les hommes se sont vu retirer leurs chaussures et leur chemise et ont été frappés et humiliés simplement parce qu’ils étaient des adeptes Wazalendo ou perçus comme tels.
De tels actes sont contraires au droit international, qui interdit la torture et les autres mauvais traitements. Les autorités congolaises doivent veiller à ce qu’aucune personne arrêtée ou détenue ne soit soumise à la torture ou à d’autres mauvais traitements et elles doivent enquêter sur les cas dans lesquels des actes de torture auraient été commis, en vue de poursuivre les responsables dans le cadre de procès équitables.
Arrestations et Détentions Arbitraires Massives
Plus de 150 personnes, dont au moins 29 enfants, ont été arbitrairement arrêtées et détenues à la suite de l’opération de répression menée par l’armée et la police contre les adeptes Wazalendo (voir section 2.5 « Des personnes ayant survécu aux attaques maintenant sur le banc des accusés »). Si certaines ont été libérées dans les jours et les semaines qui ont suivi, notamment les enfants, 116 personnes ont été poursuivies et jugées sur la base d’accusations infondées. Finalement, 64 personnes ont été condamnées pour « participation à un mouvement insurrectionnel », uniquement en raison de leur appartenance présumée au groupe politique et religieux Wazalendo, ainsi que pour « meurtre » et « tentative de meurtre » d’agents de police, sans que le tribunal ait démontré leur responsabilité individuelle, comme il est tenu de le faire en matière pénale (voir section 2.5 « Des personnes ayant survécu aux attaques maintenant sur le banc des accusés »).
Il s’agit là d’une violation de leur droit de ne pas être arrêté·e ou détenu·e arbitrairement, ainsi que de leur droit à un procès équitable. L’appel étant en cours dans cette affaire, les autorités doivent abandonner les charges de « participation à un mouvement insurrectionnel » qui pèsent sur ces 64 personnes et libérer toutes celles dont la responsabilité individuelle dans la mort par lapidation du policier ne peut être établie de manière incontestable et équitable.
Disparitions Forcées
Comme le montre ce rapport (voir section 2.3 « Personnes portées disparues »), au moins dix personnes semblent avoir été victimes de disparition forcée en lien avec les faits survenus le 30 août à Goma et dans les environs, tandis que plusieurs dizaines de corps de personnes présumées mortes n’ont pas été retrouvés.
La RDC a signé en 2007 la Convention contre les disparitions forcées et, bien qu’elle ne l’ait pas encore ratifiée[291], les cas de disparitions forcées recensés dans le présent rapport enfreignent non seulement son obligation de ne pas aller à l’encontre de l’objet de la Convention, mais aussi toute une série d’autres obligations de l’État en vertu du droit international. La disparition forcée viole le droit de la personne disparue à la reconnaissance de sa personnalité juridique, son droit à la liberté et à la sécurité et son droit de ne pas être soumise à la torture ni à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, tels que protégés par le PIDCP, la Charte de Banjul et la Convention contre la torture. Elle peut aussi violer le droit à la vie, ou le mettre gravement en danger. Les autorités de la RDC doivent fournir sans délai aux proches de ces personnes des informations sur le sort qui leur a été réservé ou l’endroit où elles se trouvent et, selon les circonstances, mener une enquête et poursuivre les responsables.
Violations du Droit à la Dignité et à un Traitement Humain
Les corps de dizaines de personnes tuées le 30 août ont été traînés au sol et entassés dans un camion, sans recevoir les soins nécessaires, puis présentés dans des conditions inimaginables aux familles, qui n’ont souvent pas pu identifier leurs proches (voir section 2.3 « Des corps abandonnés jusqu’à la décomposition »). Ces personnes avaient droit à ce que leur corps soit traité avec soin et respect et à ce qu’il soit correctement préservé jusqu’à l’enterrement. Leurs familles n’auraient pas dû vivre l’expérience inhumaine de voir les dépouilles de leurs proches dans un état de putréfaction.
Les autorités ont organisé un enterrement collectif pour toutes les personnes ayant selon elles été tuées le 30 août. Les familles n’ont pas été autorisées à organiser elles-mêmes les enterrements selon leurs souhaits et leurs croyances, et certaines n’ont pas pu assister à l’enterrement, parce qu’elles n’ont pas été informées qu’il avait lieu ou parce qu’elles étaient en détention à ce moment-là (voir section 2.3 « Enterrements indignes »). Le traitement réservé aux dépouilles et aux familles des défunt·e·s a porté atteinte à leur droit à la dignité et à un traitement humain, consacré par l’article 5 de la Charte de Banjul et l’article 10 du PIDCP.
Absence de Vérité et de Justice
Bien que la cour militaire du Nord-Kivu ait jugé six membres de la Garde républicaine entre le 4 septembre et le 2 octobre, Amnesty International considère que ce procès ne suffit pas à fournir à toutes les victimes et survivant·e·s des événements du 30 août la vérité et la justice qui leur sont dues. Toute la vérité n’a pas pu être établie sur les faits, en raison d’enquêtes incomplètes et précipitées qui n’ont pas permis de rendre pleinement compte de tous les crimes et préjudices subis ou de l’ensemble des responsabilités pénales individuelles, notamment celles des personnes qui ont donné les ordres (voir section 3.3). Le procès s’est également déroulé devant une juridiction militaire, une pratique à laquelle s’opposent Amnesty International et les directives de la Commission africaine en cas de crimes commis contre la population civile. Les enquêtes doivent être reprises depuis le début de sorte que, dès lors qu’il existe suffisamment de preuves, tous les responsables, y compris les supérieurs hiérarchiques, soient poursuivis et jugés devant des tribunaux civils compétents, indépendants et impartiaux.
Par ailleurs, seules 109 victimes (parties civiles) ont été reconnues dans le cadre du procès. Compte tenu du nombre de morts (56) et de blessés (75) officiellement enregistrés, les victimes susceptibles de demander réparation – qu’il s’agisse de victimes directes ou de leurs proches – sont beaucoup plus nombreuses. Amnesty International s’est entretenue avec plusieurs victimes qui n’ont pas pu participer au procès, être reconnues comme victimes ou recevoir une indemnisation. La demande d’Efraimu Bisimwa, qui souhaitait être reconnu comme victime, a été rejetée par le tribunal au motif qu’il avait appelé à la manifestation et qu’il était donc responsable de ce qui s’était produit, en dépit du fait que deux de ses enfants aient été tués illégalement et qu’il ait subi des actes de torture et d’autres mauvais traitements (voir section 2.4). Quant au versement des sommes dues aux personnes auxquelles le tribunal a octroyé une indemnisation financière[292], il est entièrement tributaire de la solvabilité des quatre soldats qui ont été condamnés. Il est donc fortement à craindre que les victimes ne reçoivent pas les réparations auxquelles elles ont droit. En définitive, aux termes du droit international relatif aux droits humains, il incombe à l’État de veiller à ce que toutes les victimes obtiennent justice et des réparations adéquates.
Responsibilities Individuelles
Les homicides illégaux, dont certains pourraient constituer des exécutions extrajudiciaires, recensés dans le présent rapport ont été perpétrés par les forces spéciales et les unités de police de la Garde républicaine. L’opération menée dans la station de radio des Wazalendo par les forces spéciales de la Garde républicaine a conduit à l’homicide illégal d’au moins six personnes, a fait de nombreux blessés et a entraîné 11 cas de torture et d’autres formes de mauvais traitements (voir section 2.4). Les forces spéciales ont également procédé à une fusillade de masse au temple des Wazalendo qui a coûté la vie à au moins 42 morts et en a blessé plusieurs dizaines d’autres. Elles étaient responsables de la manipulation des corps et des blessés. Les policiers ont tué au moins deux adeptes Wazalendo (Jean-Claude Rusina et Uwezo Milele) et ont blessé de très nombreuses personnes (voir les sections 2.3 et 3.2). En tout, selon les autorités, les membres de la Garde républicaine et de la police ont tué au moins 56 personnes (au moins 102 personnes selon les Nations unies), en ont blessé plus de 80 et ont soumis un grand nombre de personnes à des disparitions forcées. Ils ont infligé des tortures et d’autres formes de mauvais traitements à des dizaines de personnes et ont arbitrairement arrêté et détenu plus de 150 personnes.
La Garde républicaine, une unité de l’armée congolaise placée sous l’autorité directe du président, est chargée de protéger le président, sa famille et les biens présidentiels[293]. Elle a été mobilisée le 30 août, car, selon la loi congolaise, l’armée, y compris la Garde républicaine, peut participer aux opérations de maintien de l’ordre aux côtés de la police.[294] Lors d’une insurrection, d’un état de siège ou d’un état d’urgence, comme c’est le cas au Nord-Kivu depuis mai 2021, la loi prévoit que les forces armées prennent le pas sur la police dans les opérations de maintien de l’ordre[295].
La police nationale congolaise est un service public chargé, entre autres, de la sécurité publique, de la sécurité des personnes et de leurs biens, ainsi que du maintien et du rétablissement de l’ordre public[296]. En l’espèce, la police avait émis un « ordre de service » distinct pour le maintien et le rétablissement de l’ordre lié à la manifestation prévue par Wazalendo, et avait été déployée le 30 août[297].
Lieutenant-Général Constant Ndima Kongba
Le général Constant Ndima Kongba détenait des pouvoirs politiques et administratifs en tant que « gouverneur militaire » et commandant des opérations militaires du Nord-Kivu[298]. Pendant « l’état de siège, le gouverneur a les pleins pouvoirs de gestion, de police et de maintien de l’ordre dans la province. Il décide sur toutes les questions, sauf celles qui relèvent de la compétence des autorités nationales[299]. » Comme il exerce cette double fonction de gouverneur et de chef des opérations militaires du Nord-Kivu, tous les commandants de la police et de l’armée de la province, y compris ceux des forces spéciales et de la BIA de la Garde républicaine, sont sous son autorité. Dans un message officiel (« télégramme ») adressé aux commandants de l’armée et de la police placés sous ses ordres, le général Constant Ndima a affirmé que les adeptes de la FNJMN (Wazalendo) constituaient une grave menace pour Goma et leur a ordonné de « prendre toutes dispositions [pour] sécuriser [les] installations [de la] MONUSCO » et déployer une opération de sécurité dans la ville[300].
À la suite de ce message, la 34e région militaire a émis un « ordre opérationnel » détaillé le 28 août et lui a transmis[301]. Par la suite, le commandant de la Brigade interarmes (BIA) de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu a élaboré et publié le plan opérationnel Keba le 29 août 2023 pour « étouffer dans l’œuf » la manifestation prévue par la FNJMN en organisant une « patrouille de dissuasion motorisée » sur les routes principales de Goma[302], et a mis le gouverneur Constant Ndima en copie. La police a adressé un ordre de service à toutes les unités de police à Goma et dans les environs, en mettant également le gouverneur en copie[303]. Il apparaît donc que ces unités militaires et policières ont émis des instructions visant à mettre en œuvre le « télégramme » de Constant Ndima et l’ont tenu informé des préparatifs de l’opération.
Le 30 août, les forces spéciales de la Garde républicaine et d’autres unités de l’armée et de la police ont perpétré de nombreux crimes dans le cadre des opérations susmentionnées. Ils ont tué illégalement plusieurs dizaines de personnes et en ont blessé des quantités d’autres, ont soumis certaines personnes à la torture ou à d’autres mauvais traitements, ont arrêté arbitrairement plus d’une centaine de personnes, ont saccagé leur station de radio et pillé et incendié leur temple (voir section 2.2 : « 10 heures :Pillage et incendie du temple »)
Constant Ndima a eu connaissance des crimes commis immédiatement après leur commission, et peut-être même pendant. Il a admis avoir patrouillé dans la ville ce matin-là et avoir vu « six corps » de personnes tuées en lien avec les faits. Selon deux journalistes qui l’accompagnaient, sa visite a eu lieu vers 9 heures du matin le 30 août, alors que l’intervention de l’armée au temple des Wazalendo était toujours en cours[304]. Le colonel Mike Mikombe, commandant de la BIA dans le Nord-Kivu, et le colonel Yves Rubenga, commandant du quartier général de l’état-major à la 34e région militaire, qui étaient présents au temple des Wazalendo avant, pendant et après la fusillade de masse, ont déclaré à Amnesty International qu’ils avaient parlé au téléphone avec le gouverneur juste après la fusillade et lui avaient dit que des soldats avaient ouvert le feu, faisant 42 morts[305]. D’après le colonel Mikombe, Constant Ndima Kongba leur aurait dit de « récupérer ces corps et de les emmener à l’hôpital militaire[306] ». Une dépêche confidentielle des services de renseignement du secteur opérationnel Sukola II, également sous l’autorité du lieutenant-général, dont le contenu a été divulgué officieusement, faisait état de 48 morts et 75 blessés dès le matin du 31 août[307]. En outre, la nouvelle et les images des fusillades de masse à la station de radio et au temple des Wazalendo ont été rapidement et largement diffusées sur les réseaux sociaux à partir du 30 août au matin. Ces éléments démontrent que Constant Ndima savait ou aurait dû savoir que les forces de défense et de sécurité avaient tué des dizaines de personnes.
En tant qu’autorité militaire suprême dans la province, à laquelle les commandants de l’opération rendaient compte, il avait la responsabilité de prévenir et de punir de telles infractions. À la connaissance d’Amnesty International, il n’a pris aucune mesure pour les prévenir ou y mettre fin, ni tenté d’enquêter sur les homicides, d’identifier les responsables présumés et de les amener à rendre des comptes dès qu’il a été informé de la commission de ces infractions. Constant Ndima a au contraire justifié publiquement les actes commis par les forces de sécurité contre les adeptes Wazalendo alors qu’il ne pouvait pas, à ce moment-là, ignorer les infractions perpétrées pendant l’opération, et il s’en est attribué le crédit. Quelques heures après la fusillade au temple des Wazalendo, plusieurs de ses agents, dont son porte-parole, le lieutenant-colonel Guillaume Ndjike, ont été vus avec des officiers de l’armée, y compris ceux qui venaient de perpétrer le massacre, en train de présenter à la presse des détenus appartenant au mouvement Wazalendo, dévêtus, roués de coups et désignés comme responsables des violences[308]. Plus tard dans la journée, ses services ont publié un communiqué de presse félicitant les forces de défense et de sécurité d’avoir « stoppé professionnellement les aventures de ces fauteurs [de] troubles jouant le jeu de l’agresseur M23/RDC[309] ». Dans une interview accordée à la radio-télévision nationale dans la matinée du 31 août, Constant Ndima a justifié l’intervention de l’armée et son recours à la force meurtrière, affirmant à tort qu’elle avait été provoquée par des manifestant·e·s « armés » qui « ont attaqué les forces de sécurité en premier lieu[310] ».
En réponse aux conclusions d’Amnesty International, Constant Ndima a déclaré : « rien a été démontré ou prouvé que j’avais donné l’ordre à qui que ce soit de tirer sur la population (mes administrés), rien a été démontré au Cours de l’instruction ou au cours des audiences publiques que j’avais intimé l’ordre ou encore donné une instruction pour la réalisation de ces évènements malheureux en ma qualité de gouveneur et chargé des opérations militaires au Nord Kivu. […] Dire je n’avais pas réagi, c’est faux et c’est contre la vérité, car en ma qualité de l’Autorité Provinciale j’avais ordonné en toute urgence et avec fermeté à la justice militaire d’ouvrir des enquêtes et de procéder aux arrestations de tous les suspects sans distinction et auteurs présumés de ces évènements, ce qui fut fait »[311]. Il a ajouté qu’il avait aussitôt dressé un rapport de circonstance à la hiérarchie en toute urgence, raison de la descente d’une grande équipe gouvernementale à Goma le 2 septembre 2023[312].
Il n’a pas répondu à plusieurs des questions d’Amnesty International, en particulier en ce qui concerne ses actions spécifiques dans la période qui a précédé le massacre, y compris son message officiel qui a incité les opérations militaires, sa connaissance du massacre tel qu’il s’est déroulé et sa justification par la suite, ou ses messages de félicitations aux forces de défense et de sécurité alors qu’il était au courant de leurs actions illégales. En outre, il n’a fourni aucune preuve à l’appui de ses affirmations selon lesquelles il aurait ordonné des enquêtes et des arrestations immédiatement après le massacre, et Amnesty International n’a pas non plus été en mesure de trouver des preuves à l’appui de ces affirmations. Bien qu’il ait indiqué que depuis mai 2024, il avait comparu devant la Haute Cour militaire à Kinshasa en tant que témoin dans le procès en appel des officiers de l’armée condamnés par la Cour militaire du Nord-Kivu, à la connaissance d’Amnesty International, le fait d’être appelé à témoigner ne prouve pas que son rôle dans les événements ait fait l’objet d’enquêtes ou de procédures judiciaires. Le 11 novembre 2024, Amnesty International lui a adressé une lettre de suivi demandant des informations complémentaires, restée sans réponse au moment de la publication.
Amnesty International estime que Constant Ndima devrait faire l’objet d’une enquête et, si suffisamment de preuves sont réunies, être poursuivi devant des tribunaux civils sans encourir la peine de mort ; au minimum, il devrait faire l’objet d’une enquête concernant sa responsabilité pénale en tant que commandant n’ayant su prévenir les crimes commis par les forces de l’armée et de la police le 30 août à Goma, enquêter sur ceux-ci et punir les responsables.
Colonel Mike Mikombe Kalamba
Le colonel Mike Mikombe Kalamba était le commandant de la Brigade interarmes (BIA) dans le Nord-Kivu : tous les soldats de cette unité d’élite, y compris des forces spéciales de la Garde républicaine, lui rendaient compte. Dans le contexte de la guerre en cours entre l’armée congolaise et les rebelles du M23 soutenus par le Rwanda dans le Nord-Kivu, il a déclaré à Amnesty International que la mission principale de sa brigade était « de défendre la ville de Goma et ses environs en cas d’infiltration ennemie ou d’attaque[313] ». À la suite du message officiel envoyé par le gouverneur (télégramme) et de l’ordre opérationnel émis par la 34e région militaire, il a personnellement mis au point et supervisé l’exécution de l’opération Keba[314].
Selon les dossiers de la cour militaire du Nord-Kivu, Mike Mikombe a envoyé un SMS le 30 août à 3 h 02 au commandant du 19e régiment de la Garde républicaine (sous l’autorité duquel se trouve le 192e bataillon des forces spéciales du Major Peter Kabwe) pour lui indiquer l’emplacement de la station de radio des Wazalendo.[315] Cela suggère que Mike Mikombe était au moins au courant de l’attaque des forces spéciales contre la station de radio de la FNJMN, au cours de laquelle des personnes ont été tuées et d’autres blessées, torturées ou détenues arbitrairement, quelques heures avant les incidents au temple des Wazalendo.
Lorsque les forces spéciales sous son autorité ont tiré sur la foule avec des armes tactiques le 30 août, Mike Mikombe était sans aucun doute présent et tout indique qu’il a ordonné à ses forces d’ouvrir le feu. Sa présence est confirmée par deux vidéos qu’Amnesty International a vérifiées et par plusieurs témoignages, dont le sien (voir chapitre 2 « 30 août :le massacre »). Malgré la présence d’au moins deux autres officiers de son grade (colonel) sur place, il s’est comporté de fait comme l’officier responsable le plus haut gradé et a été considéré comme tel. Par exemple, dans une vidéo vérifiée par Amnesty International, on le voit crier sur les autres colonels et leur ordonner de cesser le dialogue, ce qu’ils ont fait[316]. Selon les témoignages de plusieurs personnes, dont quatre qui se sont exprimées pendant le procès[317] et trois témoins oculaires interrogés par Amnesty International, il a donné l’ordre d’ouvrir le feu[318]. Les forces spéciales ont alors tiré sur des manifestant·e·s qui étaient en train de s’enfuir, tuant plusieurs dizaines de personnes non armées et faisant de nombreux blessés, très probablement avec l’accord de leur commandant, Mike Mikombe, qui a lui-même admis qu’il se trouvait à proximité[319].
Le lendemain, dans un rapport remis au commandant général de la Garde républicaine à propos de ces événements, Mike Mikombe s’est attribué le mérite des actions des forces spéciales, se targuant qu’elles avaient « défendu la ville de Goma avec dextérité et détermination » et « réussi à étouffer dans l’œuf les tentatives odieuses perpétrées par ladite secte[320] ». Il a ajouté : « Aucun incident n’a été observé pendant la marche [de dissuasion de la BIA] sauf quelques dégâts matériels et humains commis par les adeptes de la secte mystico-religieuse[321]. »
Les forces spéciales sous l’autorité de Mike Mikombe ont également commis des crimes à d’autres moments de la journée, notamment des homicides illégaux lors de l’opération à la station de radio des Wazalendo et des actes de torture à l’encontre des personnes qu’elles avaient arrêtées (voir section 2.4).
Le colonel Mikombe a été poursuivi pour certaines de ces infractions devant la cour militaire du Nord-Kivu. Le 2 octobre, la cour militaire du Nord-Kivu l’a déclaré coupable de « meurtre » et de « tentative de meurtre », en tant qu’autorité ayant exercé le commandement effectif des troupes lors du massacre du temple des Wazalendo, ainsi que de « destruction d’armements[322] ». Le colonel Mikombe a été condamné à mort, peine à laquelle Amnesty International s’oppose en toutes circonstances. Il a fait appel de la décision.
En réponse aux conclusions d’Amnesty International, Mike Mikombe, par l’intermédiaire de son avocat, a déclaré que l’objectif de l’opération Keba, sous son commandement, n’était pas d’étouffer la manifestation des Wazalendo dans l’œuf, mais « préserver la ville de Goma de toute attaque ennemie »[323]. Il a affirmé que l’opération avait pour but de « protéger la ville de Goma » et d’entreprendre « une patrouille dissuasive à travers la ville (…) aux fins de dissuader toute incursion ennemie ». Il a déclaré qu’il s’était retrouvé au sanctuaire des adeptes de Wazalendo « par un simple concours de circonstance » après avoir été interpellé par un autre colonel lui ayant demandé de l’accompagner à un endroit où les adeptes de Wazalendo auraient enlevé un policier. Comme cette enquête l’a montré, l’enlèvement et la lapidation du policier ont eu lieu à la suite des actions de la Garde républicaine, notamment leur attaque nocturne contre la station de radio de la FNJMN, et non l’inverse. En ce qui concerne l’ordre d’ouvrir le feu, il a déclaré que sa première réaction en entendant les coups de feu était « Qui a tiré, qui a tiré ? Arrêtez de tirer, arrêtez de tirer ! », une affirmation qu’Amnesty International n’a pas été en mesure de vérifier. Il a en outre déclaré : « Dans son arrêt, au terme de l’instruction, la Cour Militaire du Nord Kivu est d’avis avec nous que le Colonel Mike KALAMBA MIKOMBE n’a pas donné d’ordre de tirer et encore il n’a pas tiré »[324]. C’est en partie incorrect. En effet, la Cour militaire du Nord-Kivu n’a pas conclu que Mike Mikombe avait tiré, mais elle a établi que Mike Mikombe était la personne qui avait donné l’ordre de tirer, ce qui est conforme à ce qu’Amnesty International a documenté[325].
Amnesty International estime que le procès en première instance de Mike Mikombe n’a pas suffi à établir la vérité en ce qui concerne l’ensemble des infractions dont il pourrait être tenu responsable au motif qu’il les a ordonnés et/ou du fait de sa responsabilité en tant que commandant. Son procès en appel, ou les enquêtes et procédures ultérieures, doivent garantir qu’il fasse l’objet d’une enquête pour tous les homicides et disparitions qui ont été perpétrés lors de la manifestation, et éventuellement pour sa responsabilité de commandement dans les crimes commis par ses troupes à la station de radio des Wazalendo, y compris les homicides illégaux, les actes de torture et les autres mauvais traitements. Il doit être jugé par un tribunal civil, compétent et impartial, qui fera respecter ses droits de la défense et exclura le recours à la peine de mort.
Major Peter Kabwe Ngandu
Le major Peter Kabwe Ngandu est le commandant du bataillon des forces spéciales à Goma. Il supervisait un bataillon des forces spéciales à Goma et était placé sous l’autorité du commandant du régiment des forces spéciales, qui lui-même rendait compte au colonel Mikombe.
Amnesty International a recueilli de solides éléments de preuve attestant que le major Peter Kabwe, commandant du bataillon des forces spéciales à Goma, a participé en personne à l’opération, et semble l’avoir dirigée. D’après l’analyse des images de l’attaque contre le temple des Wazalendo (voir section 2.2 « Attaque contre le temple des Wazalendo »), un militaire semblait commander les forces spéciales. L’individu ne portait pas de cagoule et a été vu portant un pistolet, ce qui concorde avec les témoignages recueillis. Grâce à des entretiens supplémentaires, notamment avec trois spécialistes de la Garde républicaine et de sa chaîne de commandement, ainsi qu’à des renseignements obtenus à partir d’informations disponibles en libre accès, Amnesty International a établi qu’il s’agissait du major Peter Kabwe, commandant du 192e bataillon des forces spéciales de la BIA de la Garde républicaine à Goma[326]. Trois témoins oculaires l’ont identifié à partir des images[327]. L’un d’eux a déclaré : « C’est l’homme avec un pistolet qui a découvert où je me cachais, dans l’une des salles, et qui m’a fait rejoindre les autres personnes arrêtées, là où elles étaient assises. Il nous a dit en swahili : “Vous êtes là ! Vous prétendez ne pas mourir, c’est ce que nous allons voir aujourd’hui[328].” » Une autre personne a dit : « Nous avons passé pas mal de temps avec lui et ses hommes avant qu’ils ne nous emmènent dehors. Il m’a giflé pendant qu’il nous interrogeait. Je n’ai absolument aucun doute, c’est lui[329]. »
Un représentant d’une autre société de sécurité privée qui travaillait avec l’armée congolaise a déclaré à Amnesty International qu’un commandant des forces spéciales avait revendiqué la responsabilité de l’opération dans les locaux de la station de radio : « Il m’a dit : “Nous avons éliminé l’ennemi, tel que décrit dans l’ordre opérationnel.’’ Il était fier comme s’il avait sauvé Goma[330]. »Tout semble indiquer qu’il dirigeait l’opération menée par les forces spéciales à la station de radio des Wazalendo vers 3 heures du matin le 30 août, au cours de laquelle six homicides illégaux ont été commis, de nombreuses personnes ont été blessées (voir section 2.1 « Attaque contre la station de radio des Wazalendo ») et 11 personnes ont été arrêtées arbitrairement et soumises à des actes de torture ou d’autres mauvais traitements. Des témoins oculaires présents à la station de radio des Wazalendo ont déclaré qu’il donnait des ordres à d’autres soldats et qu’il semblait rendre compte des événements à quelqu’un au moyen d’un dispositif de communication militaire (voir section 2.1 « Attaque contre la station de radio des Wazalendo »). À partir d’entretiens supplémentaires, notamment avec trois spécialistes de la Garde républicaine et de sa chaîne de commandement[331], ainsi que de renseignements obtenus à partir d’informations disponibles en libre accès, Amnesty International a établi qu’il s’agissait du Major Peter Kabwe Ngandu, le commandant du bataillon des forces spéciales à Goma[332]. Des témoins oculaires présents à la station de radio l’ont identifié sur l’enregistrement vidéo comme étant l’officier sans cagoule qui semblait diriger l’opération plus tôt dans la journée.
Trois vidéos[333] vérifiées par Amnesty International montrent également qu’il était présent plus tard dans la journée, avec son commandant de brigade, le colonel Mike Mikombe, lorsque des soldats ont tiré sur des manifestant·e·s, puis qu’il a supervisé le ramassage et le chargement des corps des victimes et des personnes blessées dans les camions de la Garde républicaine. Au moment de la publication du présent rapport, le major Peter Kabwe n’avait pas répondu aux conclusions d’Amnesty International, qui lui ont été détaillées dans une lettre datant du 26 juillet 2024[334].
Amnesty International estime que le major Kabwe Ngandu devrait faire l’objet d’une enquête et, s’il existe des preuves suffisantes, être poursuivi par une juridiction civile indépendante et impartiale, sans recours possible à la peine de mort, au moins pour sa participation directe aux arrestations arbitraires et aux actes de torture et autres mauvais traitements commis lors de l’opération à la station de radio le 30 août. Des investigations plus approfondies sur son éventuelle implication dans des homicides illégaux commis pendant l’opération et la manifestation et/ou dans la dissimulation de ces faits sont nécessaires. Dans l’attente d’une enquête et d’éventuelles poursuites, il devrait être suspendu du commandement des forces spéciales et de toute autre fonction au sein des forces de défense et de sécurité congolaises.
Conclusion et recommandations
Le massacre perpétré à Goma le 30 août, principalement par les forces spéciales, n’était pas un accident ni une bévue. Il a fait suite à une opération planifiée par les autorités militaires congolaises. Il a été rendu possible par le recours à des pouvoirs abusifs accordés illégalement à l’armée dans le cadre de l’« état de siège » prolongé et reflète la tendance des autorités congolaises à militariser leurs réactions face aux risques de sécurité réels ou supposés.
Le contexte immédiat du massacre a été l’interdiction de la manifestation des Wazalendo – une ligne de conduite expressément préconisée par la MONUSCO. Cette intervention, appelant à l’interdiction de la manifestation, a montré un mépris fondamental pour les normes internationales en matière de droits humains que l’ONU est censée promouvoir. Les Wazalendo avaient déjà organisé des manifestations pacifiques, notamment contre la MONUSCO, entre juin et août 2023. Amnesty International n’a trouvé aucune preuve documentée à l’appui des affirmations, y compris de la part des Nations unies, selon lesquelles les dirigeants des Wazalendo ont incité ou visaient à semer la violence. Plutôt que d’exhorter les autorités à interdire la manifestation en question, la MONUSCO aurait dû présumer qu’elle serait pacifique et souligner les obligations des autorités de planifier et de mener l’opération de maintien de l’ordre de manière à faciliter le rassemblement, de désamorcer toute situation susceptible d’entraîner des violences, d’utiliser tous les moyens non violents possibles, d’éviter le recours à la force sauf en cas d’absolue nécessité (dans le respect des principes de légalité, de nécessité, de proportionnalité, de précaution et de non-discrimination) et de ne pas déployer l’armée pour maintenir l’ordre lors de rassemblements.
Les tirs délibérés et généralisés de l’armée sur les manifestant·e·s le 30 août ont donné lieu aux homicides illégaux d’au moins 56 personnes en moins de six heures, selon les autorités (102 selon un rapport confidentiel de l’ONU) et pourraient constituer un crime contre l’humanité.
Après le massacre, les autorités ont commencé par féliciter l’armée, en minimisant le nombre de morts, en diabolisant les victimes et en punissant les personnes survivantes (détention arbitraire et poursuites injustes). Elles ont également empêché les familles des victimes d’organiser les enterrements de leurs proches, et parfois même d’y assister.
Le procès de plusieurs militaires qui s’est déroulé à Goma entre le 4 septembre et le 2 octobre 2023, à la suite d’un tollé dans l’opinion publique, a abouti à la condamnation d’un commandant et de trois soldats pour meurtre (entre autres chefs d’accusation), mais les enquêtes étaient incomplètes et n’ont pas permis à toutes les victimes d’être reconnues ni amené tous les auteurs présumés à rendre des comptes.
Ce n’est pas la première fois que l’armée congolaise prend pour cible la population civile qu’elle est censée protéger et commet des crimes odieux à son encontre. Les autorités doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir efficacement l’obligation de rendre des comptes et la justice, afin d’éviter que de tels actes ne se reproduisent.
Les recommandations d’Amnesty International sont les suivantes :
Au Président de la République :
- Suspendre immédiatement le général Constant Ndima et le major Peter Kabwe Ngandu de l’armée congolaise, le temps qu’une enquête soit menée.
- Publier un décret présidentiel interdisant officiellement l’intervention de la Garde républicaine, y compris des forces spéciales, dans les opérations de maintien de l’ordre, en précisant les circonstances exceptionnelles dans lesquelles les forces armées, et notamment la Garde républicaine, pourraient intervenir dans ces opérations en soutien à la police, ainsi que les procédures à suivre dans ces cas, conformément aux normes internationales.
Au Gouvernement :
- Réhabiliter la station de radio et le temple des Wazalendo et veiller à ce que les adeptes puissent exercer leurs droits à la liberté de religion et de réunion pacifique sans entrave injustifiée.
- Renoncer immédiatement à toute reprise des exécutions de personnes sous le coup d’une sentence capitale, y compris celles condamnées à la suite du massacre du 30 août 2023 à Goma, et instaurer un moratoire officiel sur les exécutions en vue d’abolir la peine de mort.
Aux Autorités Judiciaires :
- En l’absence de preuves, libérer immédiatement les personnes condamnées pour la lapidation du policier, ou organiser un nouveau procès conforme aux normes d’équité devant un tribunal civil.
- Rouvrir les enquêtes sur tous les homicides, y compris la lapidation d’un policier et les homicides illégaux de plusieurs dizaines de manifestant·e·s, disparitions forcées, blessures et autres crimes commis le 30 août à Goma, afin de remédier aux irrégularités des premières investigations et de faire en sorte que toutes les victimes soient identifiées et que les responsables présumés soient traduits en justice dans le cadre de procès équitables devant des tribunaux compétents, indépendants et impartiaux, excluant le recours à la peine de mort. Pour cela, des enquêtes devront être menées sur le lieutenant-général Constant Ndima pour sa responsabilité présumée en tant que commandant, sur le colonel Mike Mikombe pour sa responsabilité en tant qu’auteur et en tant que commandant pour les crimes qui lui sont imputés, et sur le major Peter Kabwe Ngandu pour ses crimes présumés. S’il existe suffisamment de preuves, des poursuites devront être engagées contre eux. Lorsque cela est nécessaire, demander le soutien technique de l’ONU, notamment du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme.
- Révéler ce qu’il est advenu des victimes de disparitions forcées.
- Défendre le droit de toutes les victimes à des réparations suffisantes, effectives et rapides pour le préjudice subi.
Au Parlement :
- Abroger les dispositions de la loi régissant les forces armées qui donnent à l’armée le pouvoir d’intervenir dans les opérations d’application des lois en temps de paix et renforcer le contrôle juridique et parlementaire de leurs interventions, y compris en temps de guerre, d’insurrection, d’état d’urgence et d’état de siège, conformément aux normes internationales en vigueur.
- Abroger toutes les dispositions légales permettant aux tribunaux militaires de poursuivre des civil·e·s ou de juger des crimes de droit international, en toutes circonstances. Donner compétence exclusive aux tribunaux ordinaires pour enquêter sur les crimes de droit international et en poursuivre les responsables présumés, conformément aux normes internationales, et leur fournir les ressources appropriées pour s’acquitter de cette tâche.
- Adopter une résolution appelant le gouvernement à instaurer un moratoire sur les exécutions de personnes condamnées à mort, quelles que soient les circonstances, en attendant l’abolition de la peine capitale en droit.
- Envisager de toute urgence d’adopter une loi abolissant la peine de mort en toutes circonstances.
Au Département des Opérations de Paix de l’ONU :
- Lancer rapidement une enquête indépendante sur le rôle joué par la MONUSCO et ses responsables dans les événements qui ont conduit au massacre du 30 août 2023 à Goma et en rendre les conclusions publiques.
- Fournir des garanties en ce qui concerne la reddition de comptes et la non-répétition.
Au HCDH et au BCNUDH :
- Fournir une assistance technique aux fins de nouvelles enquêtes complètes devant des tribunaux compétents, indépendants et impartiaux, y compris une expertise médico-légale et balistique, ainsi qu’une identification post-mortem.
- Terminer ou actualiser rapidement, selon le cas, l’enquête sur le massacre perpétré par l’armée le 30 août 2023 à Goma et rendre publiques ses conclusions et recommandations.
Aux Partenaires Internationaux de la RDC :
- Appeler publiquement les autorités de la RDC à enquêter rapidement et efficacement sur le massacre du 30 août à Goma et à amener tous les responsables présumés à rendre des comptes, notamment en enquêtant sur le général Constant Ndima et le major Peter Kabwe et en poursuivant l’enquête sur le colonel Mike Mikombe.
- Soutenir les efforts des autorités congolaises en faveur de la justice et de la reddition de comptes pour les crimes de droit international et les autres violations des droits humains commis en RDC, notamment les démarches visant à apporter la vérité, la justice et des réparations aux victimes du massacre de Goma, ainsi que les garanties de non-répétition, notamment des réformes juridiques et politiques concernant le droit de manifester pacifiquement, le maintien de l’ordre lors des rassemblements et le droit à un procès équitable.
- Lorsque l’occasion se présente et le cas échéant, envisager d’enquêter sur les personnes soupçonnées d’être responsables de crimes contre l’humanité ou d’autres crimes de droit international commis en RDC et les poursuivre, en vertu du principe de compétence universelle.
Au Bureau du Procureur de la CPI :
- Envisager de se pencher sur les homicides perpétrés le 30 août 2023 à Goma dans le cadre de l’enquête en cours sur la situation dans l’est de la RDC.
Notes de Bas de Page
Annexes disponibles sur le PDF
[1] « Temple » (ou « hekalu ») est le terme utilisé par les membres du mouvement Wazalendo pour désigner leur lieu de rassemblement et de culte – un grand hangar en tôle ondulée, situé dans le secteur de Nyabushongo, à la périphérie de la ville de Goma.
[2] Communiqué de presse du Bureau du procureur de la Cour pénale internationale, « Le Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale ouvre sa première enquête », 23 juin 2004, https://www.icc-cpi.int/fr/news/icc-le-bureau-du-procureur-de-la-cour-penale-internationale-ouvre-sa-premiere-enquete ; page web de la CPI sur la situation en RDC, https://www.icc-cpi.int/fr/drc.
[3] Bureau du procureur, communiqué de presse, « Déclaration du Procureur de la Cour pénale internationale, Karim A.A. Khan KC relative à la réactivation des enquêtes dans la situation en République Démocratique du Congo », 14 octobre 2024, https://www.icc-cpi.int/fr/news/declaration-du-procureur-de-la-cour-penale-internationale-karim-aa-khan-kc-relative-la
[4] La mission s’appelait initialement MONUC (Mission des Nations unies en République démocratique du Congo). Elle a été renommée MONUSCO en juillet 2010. Pour de plus amples informations, voir : MONUSCO, « Historique », monusco.unmissions.org/historique (consulté le 10 novembre 2023).
[5] Pour en savoir plus sur le conflit armé dans l’est de la RDC, voir : Jason K. Stearns, The War That Doesn’t Say Its Name: The Unending Conflict in the Congo, Oxford et Princeton, 2021.
[6] Voir, par exemple : Deutsche Welle, « Félix Tshisekedi promet la fin des violences dans l’est », 2 juillet 2019, dw.com/fr/rdc-f%C3%A9lix-tshisekedi-promet-la-fin-des-violences-dans-lest/a-49448130
[7] Les appels répétés du gouvernement congolais en faveur du retrait de la mission de l’ONU remonte aux années 2010, sous le régime de Joseph Kabila. Voir, par exemple : Al Jazeera, « Kabila wants MONUC out of DRC », 4 janvier 2010, aljazeera.com/news/2010/1/4/kabila-wants-monuc-out-of-drc ; African Quarters, « Kabila says MONUSCO inactive, call for withdrawal from DR Congo », 28 septembre 2018, africanquarters.com/kabila-says-monusco-inactive-call-for-withdrawal-from-dr-congo/ ; Congo’s Kabila tells UN to withdraw troops, 27 septembre 2018, rfi.fr/en/africa/20180926-Congo-Joseph-Kabila-UN-withdraw-troops-elections.
La pression s’est maintenue et même accrue après la prise de pouvoir de Félix Tshisekedi en janvier 2019. Voir également : ONU, Rapport du Secrétaire général, S/2020/1150, 30 novembre 2020, press.un.org/en/2020/sc14374.doc.htm ; Voir également : Joshua Walker and Jason Stearns, « Peacekeeping on shifting political sands », New York University’s Center on International Cooperation, cic.nyu.edu/resources/what-will-come-after-monusco/
[8] Amnesty International, RDC. La justice et les libertés en état de siège au Nord-Kivu et en Ituri (Index AI : AFR 62/5495/2022), 10 mai 2022, amnesty.org/fr/documents/afr62/5495/2022/fr/
[9] Amnesty International, RDC. Les autorités doivent lever l’« état de siège » sans plus attendre, 3 mai 2023, amnesty.org/fr/latest/news/2023/05/drc-authorities-must-end-state-of-siege/
[10] Voir, par exemple : Congo Research Group et Ebuteli, « Uganda’s Operation Shujaa in the DRC : Fighting the ADF or Securing Economic Interests?”, 14 juin 2022, cic.nyu.edu/resources/ugandas-operation-shujaa-in-the-democratic-republic-of-congo-fighting-the-adf-or-securing-economic-interests/
[11] Voice of America, « East African Community Agrees to Deploy Troops to Stabilize DRC », 21 juin 2022, voanews.com/a/east-african-community-agrees-to-deploy-troops-to-stabilize-drc/6626718.html
[12] Africa Intelligence, « DRC: Disillusioned with EAC Regional Force, Kinshasa turns to SADC », 3 mai 2023, africaintelligence.com/central-africa/2023/05/03/disillusioned-with-eac-regional-force-kinshasa-turns-to-sadc,109951317-art ; Bloomberg, « Southern Africa Bloc Agrees to Send Troops to Eastern Congo », 8 mai 2023, bloomberg.com/news/articles/2023-05-08/southern-africa-bloc-agrees-to-send-troops-to-eastern-congo?leadSource=uverify%20wall
[13] Communauté de développement de l’Afrique australe, « Deployment of the SADC Mission in the Democratic Republic of Congo », 4 janvier 2024, sadc.int/latest-news/deployment-sadc-mission-democratic-republic-congo
[14] En mars 2023, le gouvernement a présenté un projet de loi établissant une « réserve de défense armée », qui comprendrait, entre autres, « des volontaires civils prêts à défendre le pays contre l’agression », voir actualite.cd/2023/04/21/loi-instituant-la-reserve-armee-de-la-defense-en-rdc-pour-claudel-lubaya-ce-texte-va. Depuis lors, plusieurs responsables du gouvernement et de l’armée ont publiquement reconnu que l’armée congolaise travaillait avec ces soi-disant groupes d’autodéfense, en particulier pour contrer le M23 et l’armée rwandaise dans le Nord-Kivu. Voir, par exemple : Muhisa Kahangavale, « North Kivu/Wazalendo/FARDC: Muhindo Nzangi échange avec la presse à Goma », 6 mars 2023, youtube.com/watch?v=4OZsHTRdrVA, du début jusqu’à 2 minutes. Dans un rapport au Conseil de sécurité en avril 2023, le Secrétaire général de l’ONU s’est dit préoccupé par ces faits nouveaux, voir : Politico.cd, « RDC : l’ONU craint que le phénomène Wazalendo contribue à un nouveau cycle de violences », 15 août 2023, politico.cd/la-rdc-a-la-une/2023/08/15/rdc-lonu-craint-que-le-phenomene-wazalendo-contribue-a-un-nouveau-cycle-de-violences.html/138108/
[15] Voir, par exemple : Africa Intelligence, « Foreign Private Military Contractors Flood into North Kivu », 6 janvier 2023, africaintelligence.com/central-africa/2023/01/06/foreign-private-military-contractors-flood-into-north-kivu,109879278-eve
[16] Voir, par exemple : International Crisis Group, « A Dangerous Escalation in the Great Lakes », 27 janvier 2023, crisisgroup.org/africa/great-lakes/democratic-republic-congo-rwanda/dangerous-escalation-great-lakes. Le M23 est l’un des principaux groupes armés. Il prétend défendre les droits de la communauté tutsi congolaise, confrontée à des discriminations et à d’autres difficultés en RDC, en particulier à la suite du génocide de 1994 au Rwanda et de l’afflux de millions de personnes réfugiées hutus de ce pays dans l’ex-Zaïre. Il a accusé les autorités de la RDC de ne pas avoir mis en œuvre les accords de paix précédents, qui prévoyaient, entre autres, le démantèlement des rebelles hutus rwandais dans l’est de la RDC et le retour en toute sécurité des Tutsis congolais des pays voisins, y compris le Rwanda. Le groupe M23 a recommencé ses attaques dans le Nord-Kivu en novembre 2021, avec l’appui du Rwanda, selon plusieurs rapports de l’ONU. Il a depuis pris le contrôle de plusieurs villes autour de Goma.
[17] Voir, par exemple : ONU Info, « DR Congo: Guterres Urges M23 Rebels to Respect Tuesday Ceasefire Agreement », 6 mars 2023, news.un.org/en/story/2023/03/1134242
[18] La Croix, « RDC : 36 morts, nouveau bilan officiel des manifestations anti-ONU dans l’est », 2 août 2022, la-croix.com/RDC-36-morts-nouveau-bilan-officiel-manifestations-anti-ONU-est-2022-08-02-1301227343
[19] Ministère de la Justice, Accusé de réception F.92/42.219 du 9 avril 2021 délivré à la suite du décret provincial 01/427/CAB/GP-NK/2019 du 21 juin 2019 portant autorisation provisoire du fonctionnement d’une association à but non lucratif dénommée Foi naturelle judaïque messianique – Testament de la puissance de la parole (FNJMN), copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[20] Entretien en personne avec Efraimu Bisimwa, dirigeant des Wazalendo, 8 octobre 2023, Goma.
[21] À ne pas confondre avec les groupes armés portant un nom similaire (voir le glossaire et la section 1.1, ci-dessus).
[22] Entretiens menés séparément en personne avec deux journalistes qui ont couvert les manifestations pacifiques précédentes des Wazalendo, 23-24 septembre 2023, Goma. Entretien en personne avec un groupe d’adeptes Wazalendo, 24 septembre 2023, Goma.
[23] Entretiens menés séparément en personne avec deux journalistes qui ont couvert les manifestations pacifiques précédentes des Wazalendo, 23-24 septembre 2023, Goma. Entretien en personne avec un groupe d’adeptes Wazalendo, 24 septembre 2023, Goma.
[24] Voir, par exemple : mc3310jeremie, publication sur TikTok : « Réaction marche de Wazalendo », 29 août 2023, tiktok.com/@mc3310jeremie/video/7272746986988637446?_r=1&_t=8hay8ZGMbZ7
[25] Efraimu Bisimwa, dirigeant des Wazalendo, Goma, Lettre au maire de la ville sur « la poursuite de la lutte pour l’indépendance totale du Kongo et de l’Afrique et le départ effectif de certaines missions de l’ONU opérant en RDC », 19 août 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International. Le droit congolais en vigueur ne fixe pas de période de préavis écrit pour les manifestations pacifiques. Toutefois, dans la pratique, un préavis doit être donné trois jours à l’avance, aux termes d’un décret de 1999. Ce décret est devenu obsolète avec l’adoption de la Constitution actuelle en février 2006, mais n’a toujours pas été remplacé.
[26] Efraimu Bisimwa, dirigeant des Wazalendo, Déclaration sur la manifestation du 30 août à Goma, 23 août 2023, enregistrement vidéo figurant dans les archives d’Amnesty International.
[27] Leila Bourhil, cheffe du bureau de la MONUSCO à Goma, Lettre au gouverneur du Nord-Kivu, manifestation, 21 août 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[28] Leila Bourhil, cheffe du bureau de la MONUSCO à Goma, Lettre au gouverneur du Nord-Kivu, 21 août 2023, en annexe.
[29] Leila Bourhil, cheffe du bureau de la MONUSCO à Goma, Lettre au gouverneur du Nord-Kivu, 21 août 2023 (op. cit.).
[30] Leila Bourhil, cheffe du bureau de la MONUSCO à Goma, Lettre au gouverneur du Nord-Kivu, 21 août 2023 (op. cit.).
[31] Gouverneur du Nord-Kivu, Lettre à la cheffe du bureau de la MONUSCO à Goma (01/1282/CAB/GP-NK/2023), 28 août 2023, en annexe.
[32] Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, New York, lettre à Amnesty International, 15 août 2024, en annexe.
[33] Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, lettre à Amnesty International (op. cit.).
[34] Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, lettre à Amnesty International (op. cit.).
[35] Amnesty International, lettre au secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, 11 octobre 2024, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[36] Communiqué de presse 3072/33/JO38/M-G/2023 du maire de Goma, 23 août 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[37] Kapend Kamand Faustin (commissaire principal de la police), maire par intérim de Goma, Lettres adressées au chef de la FNJMN, Efraimu Bisimwa, 25 et 28 août 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[38] Efraimu Bisimwa, dirigeant des Wazalendo, Lettre de réponse au maire de Goma, 25 août 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[39] Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), Lignes directrices sur la liberté d’association et de réunion en Afrique, 21 septembre 2017, § 11 et 67, achpr.au.int/index.php/fr/soft-law/guidelines-freedom-association-and-assembly-africa
[40] Entretien en personne avec Efraimu Bisimwa, dirigeant des Wazalendo, 8 octobre 2023, Goma.
[41] Entretien en personne avec Efraimu Bisimwa, dirigeant des Wazalendo, 8 octobre 2023, Goma.
[42] Message officiel du gouverneur du Nord-Kivu (op. cit.).
[43] Message officiel du gouverneur du Nord-Kivu (op. cit.).
[44] Département des opérations de la 34e région militaire, « Ordre opérationnel 0734/029/EM 34 Rgn Mil/Dir Ops/23 », 28 août 2023, en annexe.
[45] Département des opérations de la 34e région militaire, « Ordre opérationnel » (op. cit.).
[46] Département des opérations de la 34e région militaire, « Ordre opérationnel » (op. cit.).
[47] Département des opérations de la 34e région militaire, « Ordre opérationnel » (op. cit.).
[48] Phase 1 : 28 août (« renforcement des patrouilles de jour et de nuit ») ; Phase 2 : 28-29 août (« localiser l’ennemi, occuper les points chauds et les zones stratégiques », etc.) ; Phase 3 : 30 août (« affronter l’ennemi, détruire les éléments ennemis isolés », etc.).
[49] Département des opérations de la 34e région militaire, « Ordre opérationnel » (op. cit.).
[50] Ordre de mouvement routier de la BIA de la Garde républicaine 319 019/PR/GR/BIA-GR/EMS8/23, 29 août 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International. En lingala, keba signifie « attention », « soyez prudent » ou « avertissement ». Keba est le nom de code du plan élaboré par le commandant de la BIA de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu, le colonel Mike Mikombe Kalamba, dans le but déclaré d’« étouffer dans l’œuf » la manifestation prévue par les Wazalendo le 30 août 2023 à Goma, selon des dossiers confidentiels obtenus par Amnesty International.
[51] Africa Intelligence, « DRC: Beni Tal Security trains and equips Tshisekedi’s Republican Guard », 27 juillet 2023, africaintelligence.com/central-africa/2023/07/27/beni-tal-security-trains-and-equips-tshisekedi-s-republican-guard,110007947-art
[52] Ordre de mouvement routier de la BIA de la Garde républicaine 319 019/PR/GR/BIA-GR/EMS8/23, 29 août 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[53] Ordre de mouvement routier de la BIA de la Garde républicaine (op. cit.).
[54] Commissariat provincial du Nord-Kivu, Ordre de service 103/351/049/PNC/CP NK/COORD POL ADM/DSP/2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[55] Audience publique du maire de Goma devant la Cour militaire du Nord-Kivu, 12 septembre 2023, enregistrement figurant dans les archives d’Amnesty International.
[56] Entretiens menés séparément en personne avec quatre personnes ayant survécu à l’attaque, 24 septembre et 8 octobre 2023, Goma.
[57] Entretien en personne avec « Busara » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), un survivant, 24 septembre 2023, Goma.
[58] Entretien en personne avec « Busara », un survivant, 24 septembre 2023, Goma.
[59] Entretien en personne avec « Busara », un survivant, 24 septembre 2023, Goma.
[60] Entretiens menés séparément en personne avec « Mapendo » et « Furaha » (leurs noms ont été modifiés pour des raisons de sécurité), deux femmes ayant survécu aux homicides à la station de radio, 24 septembre 2023, Goma.
[61] Entretien en personne avec Efraimu Bisimwa, dirigeant des Wazalendo, 8 octobre 2023, Goma.
[62] Entretiens menés séparément en personne et par visioconférence avec deux adeptes Wazalendo, 30 septembre et 7 octobre 2023, Goma.
[63] Pancarte Sida est une intersection sur la route RN2 (localement connue sous le nom de route Goma-Sake).
[64] Entretien téléphonique avec Mugugu, adepte Wazalendo ayant échappé à la fusillade à l’intersection de Pancarte Sida, 10 novembre 2023.
[65] Entretien en personne avec « Paul » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), un membre de la famille de la victime, 28 septembre 2023, Goma.
[66] Entretien téléphonique avec Mugugu, adepte Wazalendo ayant échappé à la fusillade à l’intersection de Pancarte Sida, 10 novembre 2023. Ce policier a par la suite été lapidé (voir section 2.2 « Attaque contre le temple des Wazalendo »).
[67] Entretien en personne avec « Mapendo » et « Furaha » (leurs noms ont été modifiés pour des raisons de sécurité), qui ont survécu à l’attaque, 24 novembre 2023, Goma.
[68] Entretien en personne avec Efraimu Bisimwa, dirigeant des Wazalendo, 8 octobre 2023, Goma.
[69] Entretiens menés séparément en personne avec six personnes ayant survécu à la fusillade à la station de radio des Wazalendo, 24-25 septembre 2023, Goma.
[70] Entretien en personne avec « Busara », un survivant, 24 septembre 2023, Goma.
[71] Entretiens menés séparément en personne avec six personnes ayant survécu à la fusillade à la station de radio des Wazalendo, 24-25 septembre 2023, Goma.
[72] Entretiens menés séparément en personne avec six personnes ayant survécu à la fusillade à la station de radio des Wazalendo, 24-25 septembre 2023, Goma.
[73] Entretien en personne avec « Ismaël » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), un survivant, 8 octobre 2023, Goma.
[74] Entretien en personne avec « Ismaël », un survivant, 8 octobre 2023, Goma.
[75] Entretien en personne avec Efraimu Bisimwa, dirigeant des Wazalendo, 8 octobre 2023, Goma.
[76] Entretiens menés séparément en personne avec cinq témoins, 24 septembre 2023, Goma.
[77] Entretiens menés séparément en personne avec cinq témoins, 24 septembre 2023, Goma.
[78] Entretien en personne avec un représentant de Congo protection, une société de sécurité privée, 1er octobre 2023, Goma.
[79] Entretien par téléphone avec « Jeanne » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), 6 septembre 2023, Goma. Les soldats des forces spéciales portent généralement des bottes couleur crème, qui peuvent sembler blanches, surtout par rapport aux bottes en cuir noires que les unités ordinaires de l’armée et de la police congolaises portent généralement.
[80] Entretien en personne avec « Mapendo » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), une survivante, 24 septembre 2023, Goma.
[81] Entretien en personne avec « Busara », un survivant, 24 septembre 2023, Goma.
[82] Entretiens menés séparément en personne avec les personnes ayant survécu à la descente à la station de radio des Wazalendo, 24-28 septembre 2023, Goma.
[83] Entretien par téléphone avec un membre du personnel de la société de sécurité privée Congo Protection, 1er octobre 2023.
[84] Entretien en personne avec un représentant de Congo protection, une société de sécurité privée, 1er octobre 2023, Goma.
[85] Entretiens menés séparément en personne avec quatre témoins, 24-25 septembre 2023, Goma.
[86] Entretiens menés séparément en personne avec quatre témoins, 24-25 septembre 2023, Goma.
[87] Entretiens en personne avec un groupe d’adeptes Wazalendo, 24 septembre 2023, Goma.
[88] Vidéo fournie par une messagerie chiffrée, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[89] Vidéo publiée sur la plateforme X le 1er septembre 2023, à 8 h 31 h TU, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[90] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, audience du 8 septembre 2023, enregistrements figurant dans les archives d’Amnesty International.
[91] Entretien en personne avec le colonel Mike Mikombe, commandant de la BIA de la Garde républicaine dans le Nord-Kivu, 1er octobre 2023, Goma.
[92] Entretien en personne avec « Mado » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), un témoin, 24 septembre 2023, Goma.
[93] Entretien avec un témoin, 24 septembre 2023, Goma.
[94] Entretien téléphonique avec Amani Bwinja, adepte Wazalendo, 7 novembre 2023.
[95] Vidéos fournies par une messagerie chiffrée, figurant dans les archives d’Amnesty International.
[96] Vidéo fournie par une messagerie chiffrée, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[97] Entretien en personne avec « Bora » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), témoin n’ayant aucun lien avec le mouvement Wazalendo, 24 septembre 2023, Goma.
[98] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, témoignages du colonel Franck Mutunda et du colonel Yves Rubenga, 9 septembre 2023, enregistrements audio figurant dans les archives d’Amnesty International.
[99] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, témoignages du colonel Yves Rubenga, 9 et 12 septembre 2023, enregistrements figurant dans les archives d’Amnesty International.
[100] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, témoignage du colonel Mike Mikombe devant la Cour militaire du Nord-Kivu, audience publique du 12 septembre 2023, enregistrement figurant dans les archives d’Amnesty International.
[101] Entretien avec Mike Mikombe Kalamba, 1er octobre 2023, Goma.
[102] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, témoignages du colonel Yves Rubenga, du colonel Franck Mutunda et du colonel Mike Mikombe, 9 et 12 septembre 2023, enregistrements figurant dans les archives d’Amnesty International.
[103] Témoignage du Colonel Franck Mutunda devant le tribunal militaire de Goma, 9 septembre 2023, document figurant dans les archives d’Amnesty International.
[104] Entretien téléphonique avec Amani Bwinja, 7 novembre 2023.
[105] Entretiens menés séparément en personne avec quatre témoins, 24 et 26 septembre 2023, Goma.
[106] Entretien en personne avec « Bora » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), 24 septembre 2023, Goma.
[107] Entretien avec [identité non révélée], 24 septembre 2023, Goma.
[108] Entretiens menés séparément en personne avec deux témoins, 24 septembre 2023, Goma.
[109] Entretien en personne avec « Zaina » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), témoin habitant la rue où a eu lieu la fusillade, 24 septembre 2024, Goma.
[110] Vidéos, publication sur X, 31 août 2023, 7 h 55 TU et 10 h 2 TU ; 1er septembre 2023, 10 h 19 TU et 12 h 15 TU, respectivement,
twitter.com/StanysBujakera/status/1697156188092113119; twitter.com/krusanga/status/1697188158956290114;
twitter.com/StanysBujakera/status/1697554807177834883; twitter.com/kivuresidence/status/1697584023604691453
[111] Entretien en personne avec « Bora » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), 24 septembre 2023, Goma.
[112] Vidéo fournie par une messagerie chiffrée, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[113] Témoignant devant la Cour militaire du Nord-Kivu le 14 septembre, le colonel Yves Rubenga, commandant du quartier général de l’état-major à la 34ème Région militaire, a déclaré qu’il s’agissait en effet du véhicule dans lequel il se trouvait avec ses escortes. Il a déclaré qu’il avait dû escorter les camions de la Garde républicaine afin de leur ouvrir la voie, pour qu’ils transportent les dépouilles de la zone de Nyabushongo, car des personnes en colère leur lançaient des pierres et essayaient de bloquer les routes. Enregistrement de son témoignage, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[114] Reconnaissables à leurs bérets rouges, contrairement aux soldats de l’armée congolaise régulière qui portent des bérets verts.
[115] Vidéo fournie par une messagerie chiffrée, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[116] Vidéo publiée sur Facebook le 6 septembre 2023, à 16 h 29 TU, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International, https://fb.watch/ocXWgWdPSH/
[117] Vidéo fournie par une messagerie chiffrée, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[118] Vidéo fournie par une messagerie chiffrée, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[119] Vidéo fournie par une messagerie chiffrée, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[120] Vidéo fournie par une messagerie chiffrée, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[121] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, témoignage du maire par intérim de Goma, Faustin Kapend Kamand, 9 septembre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[122] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, témoignage du maire par intérim de Goma, Faustin Kapend Kamand, 11 septembre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[123] Province du Nord-Kivu, Déclaration du porte-parole du gouverneur, « Communiqué officiel N° 01/0024/CAB/PP/23 », 30 août 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[124] The East African, “48 Killed In East DR Congo Anti-UN Rally Crackdown”, 31 août 2023, theeastafrican.co.ke/tea/news/east-africa/48-killed-in-east-dr-congo-anti-un-rally-crackdown-4354724,
[125] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, résumé de la décision de justice, 16 septembre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[126] Visite sur le terrain d’Amnesty International, cimetière de Makao, 29 septembre 2023.
[127] Entretien en personne avec Michel Kachil, procureur militaire supérieur du Nord-Kivu, 30 septembre 2023, Goma.
[128] Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme, “Note on the preliminary findings of the UNJHRO investigation on the 30 August incidents in Goma”, dernière mise à jour le 11 octobre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[129] Heal Africa, « Rapport d’expertise médicolégale: réquisition numéro: AMS/NK/0403/2023 », 1er septembre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International ; Hôpital militaire de Goma, « Blessés post balistiques des événements du 30/08/2023 », 31 août 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International ; Centre Hospitalier Bethesda, « Liste des blessés par balles en date du 30/08/2023 », 1er septembre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[130] Entretien en personne avec Michel Kachil, procureur militaire supérieur du Nord-Kivu, 30 septembre 2023, Goma.
[131] Heal Africa, « Rapport d’expertise médicolégale: réquisition numéro: AMS/NK/0403/2023 » (op. cit.).
[132] Heal Africa, « Rapport d’expertise médicolégale: réquisition numéro: AMS/NK/0403/2023 » (op. cit.).
[133] Compilation d’Amnesty International basée sur les rapports médicaux précédemment cités de l’hôpital Heal Africa, du Centre Hospitalier Bethesda et de l’hôpital militaire régional de Goma.
[134] Entretiens en personne menés séparément avec les proches de cinq personnes disparues, 28 septembre et 10 novembre 2023, Goma.
[135] Entretien en personne avec Nabintu (son nom de famille n’est pas révélé pour des raisons de sécurité), 27 septembre 2023, Goma.
[136] Entretien en personne avec Wamba (son nom de famille n’est pas révélé pour des raisons de sécurité), 28 septembre 2023, Goma.
[137] Entretien avec [identité non révélée], 29 septembre 2023, Goma.
[138] Entretiens en personne menés séparément avec la sœur de la victime et deux adeptes Wazalendo qui étaient présents avant et pendant la fusillade, 27 et 28 septembre 2023, Goma.
[139] Entretien en personne avec « Nsimire » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), 28 septembre 2023, Goma.
[140] Entretien en personne avec « Feza », proche d’une victime, 29 septembre 2023, Goma.
[141] Entretien avec l’avocat des victimes, Mathieu Mugisho, 29 septembre 2023, Goma.
[142] Entretiens en personne et par téléphone avec trois proches de victimes et deux avocats des victimes qui ont réussi à voir les dépouilles à l’hôpital militaire de Goma, 24-30 septembre 2023.
[143] Entretien en personne avec deux personnes travaillant à la morgue, 29 septembre 2023, hôpital militaire de Goma.
[144] Entretien en personne avec « Paul » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), un membre de la famille d’une victime, 28 septembre 2023, Goma.
[145] Début-septembre, la délégation gouvernementale qui s’est rendue à Goma après le massacre a publié une déclaration encourageant les gens à aller aider à identifier leurs proches et ami·e·s. Ce n’est cependant que le 12 septembre que le tribunal militaire de Goma a pris la décision officielle d’autoriser les familles à voir les dépouilles.
[146] Entretien en personne avec un avocat des victimes, 23 septembre 2023, Goma.
[147] Entretien en personne avec « Paul » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), un membre de la famille d’une victime, 28 septembre 2023, Goma.
[148] Entretien téléphonique avec Josué Kabanza, un militant, 12 octobre 2023.
[149] Entretien téléphonique avec Josué Kabanza, un militant, 12 octobre 2023.
[150] 7 Sur 7, « Goma : le gouvernement force pour inhumer les victimes du carnage du 30 août, les familles et avocats s’opposent », 18 septembre 2023, 7sur7.cd/2023/09/18/goma-le-gouvernement-force-pour-inhumer-les-victimes-du-carnage-du-30-aout-les-familles.
[151] Entretien en personne avec Martin Cubaka, frère d’une victime, 27 septembre 2023, Goma.
[152] Sud Express Media, « Les avocats des parties civiles s’opposent à l’enterrement des victimes du 30 août », 18 septembre 2023, sudexpressmedia.com/index.php/securite/2023/09/18/les-avocats-des-parties-civiles-sopposent-lenterrement-des-victimes-du-30-aout.
[153] En plus d’Uwezo Milele, qui est mort de ses blessures par balle, la fille de 22 ans d’Efraimu Bisimwa, Aimérance Bisimwa, était parmi les personnes tuées par les soldats des forces spéciales lors de la fusillade dans la rue près du temple.
[154] Entretien en personne avec Efraimu Bisimwa, 8 octobre 2023, Goma.
[155] Entretien en personne avec Efraimu Bisimwa, 8 octobre 2023, Goma.
[156] Entretien en personne avec Efraimu Bisimwa, 8 octobre 2023, Goma.
[157] Entretien en personne avec « Shukuru » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), un adepte Wazalendo qui a été détenu, 29 octobre 2023, Goma.
[158] Collectif d’avocats des victimes, « Les parties civiles dans l’affaire des massacres de Goma (RP173/023) expriment leur indignation », 18 septembre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[159] Entretiens menés séparément en personne avec des victimes, 24-29 septembre 2023, Goma.
[160] Entretien en personne avec Habamungu Rwihimbi « Kimbangu », une victime, 26 septembre 2023, Goma.
[161] Entretien en personne avec Efraimu Bisimwa, 8 octobre 2023, Goma.
[162] Vidéos fournies par une messagerie chiffrée, figurant dans les archives d’Amnesty International.
[163] Vidéo fournie par une messagerie chiffrée, figurant dans les archives d’Amnesty International.
[164] MONUSCO, Communiqué de presse, « La MONUSCO déplore qu’une manifestation non autorisée à Goma occasionne de lourdes pertes en vies humaines », 31 août 2023, https://monusco.unmissions.org/sites/default/files/cp-la_monusco_deplore_quune_manifestation_non_autorisee_a_goma_occasionne_des_pertes_en_vies_humaines.pdf.
[165] MONUSCO, Communiqué de presse, op. cit.
[166]Ambassade des États-Unis à Kinshasa, publication sur X : « L’ambassade des États-Unis regrette les pertes en vies humaines résultant des récents affrontements à Goma. Nous saluons le soutien du gouvernement de la RDC à l’ouverture d’une enquête sur ces événements et son appel au calme », 1er septembre 2023, https://twitter.com/usembkinshasa/status/1697568540851626262?s=46
[167] HCDH, « RDC : Meurtres lors d’une manifestation à Goma », 1er septembre 2023, https://www.ohchr.org/fr/press-briefing-notes/2023/09/drc-killings-demonstration-goma.
[168] HCDH, « RDC : Meurtres lors d’une manifestation à Goma », op. cit.
[169] Communauté de l’Afrique de l’Est, Bureau du secrétaire général, “The East African Community Secretary General’s Statement on Loss of Lives Amidst Unrest in Goma, Democratic Republic of Congo on 30 August 2023”, 3 septembre 2023, https://www.eac.int/statements/2866-statement-on-loss-of-lives-amidst-unrest-in-goma,-democratic-republic-of-congo-on-30-august-2023
[170] Union européenne, Service européen pour l’action extérieure, « République Démocratique du Congo : Déclaration de la Porte-Parole concernant l’usage excessif de la force lors d’une manifestation à Goma » 1er septembre 2023, https://www.eeas.europa.eu/eeas/r%C3%A9publique-d%C3%A9mocratique-du-congo-d%C3%A9claration-de-la-porte-parole-concernant-lusage-excessif-de-la_und_en.
[171] Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme, “Note on the preliminary findings of the UNJHRO investigation on the 30 August incidents in Goma”, op. cit.
[172] Porte-parole du gouvernement du Nord-Kivu, conférence de presse du 30 août 2023 à Goma, disponible via le lien : youtube.com/watch?v=0lsfF6emDlQ
Entretien avec Paul Amisi, procureur militaire de la garnison de Goma, 27 septembre 2023, [173]Goma.
[174] Entretien téléphonique avec Olivier Balume, avocat de la défense, 11 octobre 2023.
[175] Tribunal militaire de garnison de Goma, Procureur militaire c. Bisimwa et autres, jugement, 9 octobre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[176] Entretien téléphonique avec Olivier Balume, avocat de la défense des adeptes Wazalendo, Goma, 11 octobre 2023.
[177] Tribunal militaire de garnison de Goma, Procureur militaire c. Bisimwa et autres, jugement, op. cit., p. 53
[178] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, op. cit., jugement, pages 18-19.
[179] Tribunal militaire de garnison de Goma, Procureur militaire c. Bisimwa et autres, jugement, op. cit.
[180] Singulier de Wazalendo en swahili.
[181] Entretien en personne avec Régis Bahati, un témoin, 26 septembre 2023, Goma.
[182] Tribunal militaire de garnison de Goma, Procureur militaire c. Bisimwa et autres, jugement, op. cit., p. 58-59.
[183] Tribunal militaire de garnison de Goma, Procureur militaire c. Bisimwa et autres, op. cit., p. 55.
[184] Tribunal militaire de garnison de Goma, Procureur militaire c. Bisimwa et autres, op. cit., p. 45.
[185] Tribunal militaire de garnison de Goma, Procureur militaire c. Bisimwa et autres, op. cit., p. 56.
[186] Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique, 2003, Principe G.
[187] Entretien téléphonique avec Olivier Balume, avocat de la défense des adeptes Wazalendo, Goma, 11 octobre 2023.
[188] De nombreuses personnes sur le terrain et sur les réseaux sociaux ont dénoncé fermement la volonté affichée des autorités de poursuivre en justice les personnes ayant survécu au massacre, tout en ne prenant manifestement aucune mesure pour amener l’armée à rendre des comptes. Voir par exemple : Jean-Baptiste Kasekwa (procureur militaire de Goma), « Carnage du 30/8/2023 à Goma : Question écrite à Monsieur le Premier ministre, Chef du Gouvernement », (AN/JBK/10/023), 2 septembre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International ; La Prunelle RDC, « Tuerie des civils non armés à Goma: à son tour la LUCHA exige des poursuites judiciaires contre le Constant Ndima », 1er septembre 2023, laprunellerdc.cd/tuerie-des-civils-non-armes-a-goma-a-son-tour-la-lucha-exige-des-poursuites-judiciaires-contre-le-constant-ndima/; RFI, « RDC : la colère ne retombe pas à Goma, 4 jours après la répression sanglante d’une manifestation », 3 septembre 2023, rfi.fr/fr/afrique/20230903-rdc-chape-de-col%C3%A8re-%C3%A0-goma-quatre-jours-apr%C3%A8s-la-r%C3%A9pression-sanglante-d-une-manifestation.
[189] Par l’intermédiaire de la délégation gouvernementale de haut niveau déployée à Goma du 2 au 4 septembre, composée du ministre de l’Intérieur (chef de délégation), du ministre de la Défense, du ministre des Droits humains, du vice-ministre de la Justice et de l’auditeur général des forces armées.
[190] Déclaration du chef de la délégation gouvernementale de haut niveau à Goma, Peter Kazadi, 3 septembre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[191] Déclaration du chef de la délégation gouvernementale de haut niveau à Goma, Peter Kazadi, 3 septembre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[192] Le 18 septembre, le président Félix Tshisekedi a nommé le général-major Peter Chirimwami gouverneur par intérim du Nord-Kivu, remplaçant de fait Constant Ndima. Cependant, à la connaissance d’Amnesty International, Constant Ndima n’a pas encore fait l’objet d’une enquête ou de poursuites pénales ou disciplinaires en lien avec le massacre du 30 août à Goma.
[193] Mike Mikombe Kalamba a fait appel de sa condamnation. Selon ses avocats, il a été transféré de la prison de Goma vers une autre prison de Kinshasa, la capitale, mi-octobre, dans l’attente de son procès en appel.
[194] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, jugement, (op. cit).
[195] La somme en francs congolais : 272 millions. Calcul de l’équivalence en dollars des États-Unis basé sur un taux de change de 1 USD pour 2 680 francs congolais, le 30 novembre 2023, sur le convertisseur de devises XE.
[196] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, jugement, (op. cit).
[197] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, jugement, (op. cit).
[198] Voir également la section 3.1. « Cadre juridique ».
[199] Entretien en personne avec Michel Kachil, procureur militaire supérieur du Nord-Kivu, 30 septembre 2023, Goma.
[200] Entretien avec un représentant de l’ONU basé à Goma, 26 septembre 2023, Goma.
[201] Entretien en personne avec Michel Kachil, procureur militaire supérieur du Nord-Kivu, 30 septembre 2023, Goma.
[202] Amnesty International a constaté que les autorités judiciaires militaires ont pris des mesures pour garantir la protection de l’identité, au moins pendant les audiences publiques, des victimes qui le souhaitaient.
[203] Entretien téléphonique avec Mathieu Musho, avocat principal des victimes, 8 novembre 2023.
[204] La plupart des victimes sont issues de familles dont les revenus sont faibles. Un vol aller-retour pour Kinshasa coûte à lui seul environ 400 USD par personne, et l’avion est le seul moyen viable de faire le voyage.
[205] Entretiens en personne menés séparément avec un avocat des victimes, et un groupe de familles de victimes, 28 septembre 2023, Goma.
[206] Victimes du massacre du 30 août à Goma (Comité de coordination), lettre au président de la Haute Cour militaire, 25 octobre 2023, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.
[207] Entretiens téléphoniques menés séparément avec trois membres du Comité de coordination des victimes, 6 décembre 2023.
[208] Entretien en personne avec un avocat de la défense de Mike Mikombe Kalamba et d’autres, 30 septembre 2023, Goma.
[209] Entretien en personne avec un avocat principal des victimes, 30 septembre 2023, Goma.
[210] Entretien téléphonique avec « Evariste » (son nom a été modifié pour des raisons de sécurité), avocat de la défense et spécialiste des droits humains, 24 octobre 2023.
[211] PIDCP, article 4. Comité des droits de l’homme des Nations unies, Observation générale n° 29 : Article 4 (Dérogations en période d’état d’urgence).
[212] Amnesty International, RDC. La justice et les libertés en état de siège au Nord-Kivu et en Ituri (op. cit.), p. 8-12 ; Amnesty International, RDC. Les autorités doivent lever l’« état de siège » sans plus attendre, 8 mai 2023, amnesty.org/fr/latest/news/2023/05/drc-authorities-must-end-state-of-siege/.
213 Amnesty International, RDC. La justice et les libertés en état de siège au Nord-Kivu et en Ituri (op. cit.)
214 Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 29 : Article 4 (Dérogations en période d’état d’urgence), 24 juillet 2001, doc. ONU CCPR/C/21/Rev.1/Add.11, § 2-4 ; Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 37 sur le droit de réunion pacifique, 17 septembre 2020, doc. ONU CCPR/C/GC/37, § 96.
[215] Par exemple : PIDCP, article 4.2 : « La disposition précédente n’autorise aucune dérogation aux articles 6 [droit à la vie], 7 [interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants] » L’article 2.2 de la Convention contre la torture dispose : « Aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception, ne peut être invoquée pour justifier la torture. »
216 RDC, Constitution de la République démocratique du Congo, 2006 (telle que modifiée en janvier 2011), article 61 (https://www.leganet.cd/Legislation/JO/2011/JOS.05.02.2011.pdf)
[217] Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), ratifié par la RDC en 1976.
[218] Premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, portant création du Comité des droits de l’homme des Nations unies, ratifié par la RDC en 1976. La RDC n’a pas encore ratifié le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort.
[219] Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Convention contre la torture), ratifiée par la RDC en 1996.
220 Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (la Charte de Banjul), ratifiée par la RDC en 1987.
221 PIDCP, Article 6.1.
222 Charte de Banjul, Article 4.
[223] Conseil économique et social des Nations unies, résolution 1989/65 (op. cit.).
[224] OHCHR, Version révisée du Manuel des Nations Unies sur la prévention des exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires et les moyens d’enquête sur ces exécutions (le Protocole du Minnesota), 2016, https://www.ohchr.org/sites/default/files/Documents/Publications/MinnesotaProtocol_FR.pdf.
[225] Convention contre la torture (op. cit.), article 1.1.
226 Code de conduite des Nations unies pour les responsables de l’application des lois, article 5.
[227] Charte de Banjul, article 5.
[228] PIDCP, article 10.
[229] Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Commission africaine), résolution CHPR/Res.544 LXXIII : Résolution sur la peine de mort et l’interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée le 12 décembre 2022, achpr.au.int/fr/adopted-resolutions/544-resolution-sur-la-peine-de-mort-et-linterdiction-de-la-torture-et-des
[230] Amnesty International, RDC. La reprise des exécutions témoigne d’un mépris total pour les droits humains », 15 mars 2024, amnesty.org/fr/latest/news/2024/03/drc-reinstating-executions-shows-a-callous-disregard-for-human-rights/.
[231] Convention de Vienne sur le droit des traités, article 18.
[232] Rapport du Groupe de travail sur l’Examen périodique universel :République démocratique du Congo, doc. ONU A/HRC/27/5, 29 avril 2014, § 133.2 et 133.3, https://www.ohchr.org/fr/hr-bodies/upr/cd-index.
[233] Charte de Banjul, article 8 ; PIDCP, article 18.
[234] Charte de Banjul, article 9 ; PIDCP, article 19.
[235] Charte de Banjul, article 10 ; PIDCP, article 22.
[236] Charte de Banjul, article 11 ; PIDCP, article 21.
[237] Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 34, § 11.
238 ommission africaine des droits de l’homme et des peuples, Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique, résolution ACHPR/Res.62(XXXII)02 adoptée le 22 octobre 2023, XIII(2).
239 Commission africaine, Directives sur la liberté d’association et de réunion en Afrique, 21 septembre 2017, § 1 et 11.
[240] Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 37 sur le droit de réunion pacifique, 17 septembre 2020, doc. ONU CCPR/C/GC/37, § 4.
241 Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 37 sur le droit de réunion pacifique, 17 septembre 2020, doc. ONU CCPR/C/GC/37, § 7 et 12.
242 Commission africaine, Directives sur la liberté d’association et de réunion en Afrique, 21 septembre 2017, § 70 ; Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 37 sur le droit de réunion pacifique, 17 septembre 2020, doc. ONU CCPR/C/GC/37, § 15-20.
[243] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 35 sur l’article 9 (liberté et sécurité de la personne), 16 décembre 2014, doc. ONU CCPR/C/GC/35.
244 Résolution 60/146 de l’Assemblée générale des Nations unies, Principes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations flagrantes du droit international relatif aux droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire (Principes fondamentaux des Nations unies concernant le droit à un recours et à réparation), adoptée le 15 décembre 2005, doc. ONU A/RES/60/147, principe II(3)(b). Le Protocole du Minnesota dispose également : « Les personnes dont les droits ont été violés ont droit à un recours effectif et à une pleine réparation. Les proches d’une personne décédée par suite de la commission d’un acte illégal ont droit à un accès équitable et véritable à la justice ; à une réparation adéquate, effective et rapide ; à la reconnaissance de la personnalité juridique ; et à un accès aux informations pertinentes concernant les violations et aux mécanismes établis pour amener les responsables à rendre compte de leurs actes. » (Protocole du Minnesota [op. cit.], § 10).
[245] Principes fondamentaux des Nations unies concernant le droit à un recours et à réparation (op. cit.), principe VI(10). Aux fins des Principes fondamentaux des Nations unies, le terme « victimes » s’entend selon la définition donnée au principe V(8).
[246] PIDCP, article 14(1).
247 Comité des droits de l’homme, Observation générale no 32 : Article 14 (Droit à l’égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable, 23 août 2007, doc. ONU CCPR/C/GC/32 ; HCDH, Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature, ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/basic-principles-independence-judiciary; Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Commission africaine), Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique, adoptés le 29 mai 2003, achpr.au.int/fr/node/879/.
[248] Commission africaine, Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique (op. cit.), section L(c).
[249] Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 37, § 76-78. Voir également, Amnesty International, L’usage de la force. Lignes directrices pour la mise en œuvre des Principes de base des Nations unies sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois, août 2015, https://www.amnesty.nl/content/uploads/2015/09/ainl_l_usage_de_la_force_fr.pdf?x56589, p. 17-20.
[250] Voir par exemple : Nations unies, Rapport du Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association, Pratiques optimales relatives au droit de réunion pacifique, 21 mai 2012, doc. ONU A/HRC/20/27 ; Nations unies, Rapport du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Protection du droit à la vie dans le contexte des opérations de maintien de l’ordre : la nécessité d’une réforme des législations nationales, 1er avril 2014, doc. ONU A/HRC/26/36 ; Nations unies, Rapport conjoint du Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association et du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, De la bonne gestion des rassemblements, 4 février 2016,.doc. ONU A/HRC/31/66.
[251] Résolution 34/169 de l’Assemblée générale des Nations unies, Code de conduite pour les responsables de l’application des lois, adoptée le 17 décembre 1979, doc. ONU A/RES/34/169.
[252] HCDH, Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois, adoptés le 7 septembre 1990, https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/basic-principles-use-force-and-firearms-law-enforcement.
[253] Lignes directrices des Nations Unies basées sur les droits de l’homme portant sur l’utilisation des armes à létalité réduite dans le cadre de l’application des lois, 2020, https://www.ohchr.org/fr/publications/united-nations-human-rights-guidance-less-lethal-weapons-law-enforcement.
[254] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 37 (op. cit.), § 17.
255 Commission africaine, Le maintien de l’ordre lors des réunions en Afrique, adopté le 4 mars 2017, https://achpr.au.int/fr/soft-law/lignes-directrices-pour-le-maintien-de-lordre-par-les-agents-charges-de-lappli.
[256] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 37 (op. cit.), § 17.
[257] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 37 (op. cit.), § 70-73.
[258] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 37 (op. cit.), § 70.
[259] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 37 (op. cit.), § 80-81.
[260] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 37, § 80.
[261] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 37, § 78. Voir également : Amnesty International, RDC. Analyse juridique de la législation de la République Démocratique du Congo sur le droit à la liberté de manifestation pacifique (op. cit.).
[262] Comité des droits de l’homme, Observation générale no 36, Article 6 : droit à la vie, 3 septembre 2019, doc. ONU CCPR/C/GC/36, § 13.
[263] Commission africaine, Le maintien de l’ordre lors des réunions en Afrique (op. cit.), § 3(2) ; Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 37, § 80.
[264] Communiqué de presse du Bureau du procureur de la Cour pénale internationale, « Le Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale ouvre sa première enquête », 23 juin 2004, https://www.icc-cpi.int/fr/news/icc-le-bureau-du-procureur-de-la-cour-penale-internationale-ouvre-sa-premiere-enquete ; page web de la CPI sur la situation en RDC, https://www.icc-cpi.int/fr/drc.
[265] Bureau du procureur, « Déclaration du Procureur de la Cour pénale internationale, Karim A.A. Khan KC relative à la réactivation des enquêtes dans la situation en République Démocratique du Congo », 14 octobre 2024, https://www.icc-cpi.int/fr/news/declaration-du-procureur-de-la-cour-penale-internationale-karim-aa-khan-kc-relative-la
[266] Bureau du procureur, « Déclaration du Procureur de la Cour pénale internationale, Karim A.A. Khan KC relative à la réactivation des enquêtes dans la situation en République Démocratique du Congo » (op. cit.).
[267] Actualité CD, “Tragédie de Goma : Deux officiers supérieurs et quatre soldats comparaissent, notamment pour crime contre l’humanité par meurtre”, 5 septembre 2023, actualite.cd/2023/09/05/tragedie-de-goma-deux-officiers-superieurs-et-quatre-soldats-comparaissentnotamment
[268] ICC, Statut de Rome de la Cour pénale internationale (Statut de Rome), article 7
[269] CPI, Éléments des crimes, mai 2020, icc-cpi.int/sites/default/files/Publications/Elements-of-Crimes.pdf, Introduction à l’article 7.
[270] Le Statut de Rome a d’abord été partiellement repris dans le Code pénal militaire en novembre 2002. En 2015, le Code pénal ordinaire a également été modifié de manière à y incorporer les crimes visés par Statut de Rome. Voir Patryk Labuda, “Applying and ‘misapplying’ the Rome Statute in the Democratic Republic of Congo”, in Christian De Vos et autres (sous la direction de), Contested Justice : The Politics and Practice of International Criminal Court Interventions, Cambridge University Press, 2015, p. 408-431.
[271] Éléments des crimes, Introduction à l’article 7, § 3 ; CPI, Chambre de première instance II, Jugement rendu dans l’affaire Katanga, affaire n° ICC-01/04-01/07, 7 mars 2014, § 1101 ; Tribunal pénal international pour le Rwanda, Chambre de première instance II, Jugement rendu dans l’affaire Kayishema et al., affaire n° ICTR-95-1-T, 21 mars 1999, § 122 ;
[272] CPI, Chambre de première instance III, Jugement rendu dans l’affaire Bemba, affaire n° ICC-01/05-01/08-3343, 21 mars 2016, § 154 ; CPI, Chambre de première instance II, Jugement rendu dans l’affaire Katanga, affaire n° ICC-01/04-01/07, 7 mars 2014, § 1103 – 1105 ; Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), Chambre d’appel, Jugement rendu dans l’affaire Kunarac et al., affaire n° IT-96-23 et IT-96-23/1-A, 12 juin 2002, § 91.
[273] CPI, Éléments des crimes (op. cit.), Introduction à l’article 7(3). Voir également : CPI, Chambre de première instance III, Jugement rendu dans l’affaire Bemba, affaire n° ICC-01/05-01/08-3343, 21 mars 2016, § 159 ; La notion de « politique » signifie que « l’État ou l’organisation favorise ou encourage activement une attaque contre une population civile. [Cependant,] le Statut ne prévoit pas qu’il faille démontrer qu’un “motif” ou un “objet” sous‑tend la politique consistant à attaquer la population civile ».
[274] Entre 1993 et 2003, des milliers d’homicides et d’autres atrocités de masse, perpétrés notamment par les forces armées gouvernementales et des groupes armés soutenus par le gouvernement, ont été commis en RDC, en particulier dans les provinces de l’est du pays, comme l’a montré le HCDH : HCDH, Rapport du Projet Mapping concernant les violations les plus graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire de la République démocratique du Congo, octobre 2010, https://www.ohchr.org/sites/default/files/Documents/Countries/CD/DRC_MAPPING_REPORT_FINAL_FR.pdf. En novembre 2012, des soldats de l’armée congolaise ont violé au moins 76 femmes et commis d’autres crimes graves dans la ville de Minova et les villages environnants, comme l’a mis en évidence Human Rights Watch (HRW) dans son rapport La justice en procès. Enseignements tirés de l’affaire des viols de Minova en République démocratique du Congo, 1er octobre 2015 (voir chapitre I « Contexte »), https://www.hrw.org/fr/report/2015/10/01/la-justice-en-proces/enseignements-tires-de-laffaire-des-viols-de-minova-en. Entre 2017 et 2019, dans le territoire de Djugu (province de l’Ituri), l’armée congolaise et plusieurs groupes armés ont tué illégalement 701 personnes, en ont blessé 169 autres et ont infligé des violences sexuelles à 142 personnes, des faits qui pourraient s’apparenter à des crimes contre l’humanité, comme l’a démontré le Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme (UNJHRO) dans le rapport : HCDH-MONUSCO, Rapport public sur les conflits en territoire de Djugu, province de l’Ituri, décembre 2017 à septembre 2019, janvier 2020, https://www.ohchr.org/sites/default/files/Documents/Countries/RDC/RDCRapportpublicDjugu.pdf. En juin 2011, d’anciens membres d’un groupe armé qui avaient été intégrés à l’armée congolaise ont attaqué le village de Nyakiele, dans la province du Sud-Kivu, où ils ont violé 121 femmes et soumis d’autres habitant·e·s à un traitement cruel et dégradant, comme l’a montré une mission d’évaluation conjointe des Nations unies (UN News, “UN team confirms mass rapes occurred in remote villages in eastern DR Congo”, 1er juillet 2011, un.org/en/story/2011/07/380302) ; des membres de l’armée congolaise ont tué quelque 47 civil·e·s, ont infligé des violences sexuelles à 27 femmes et 22 enfants, et ont arrêté arbitrairement 126 personnes au cours d’une opération militaire contre le groupe armé des Forces démocratiques alliées (ADF) dans le territoire de Beni (Nord-Kivu), comme l’a établi le Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme (UNJHRO), qui a indiqué que ces crimes, tout comme ceux commis par les combattants de l’ADF, pourraient constituer des crimes contre l’humanité : HDCH, ”Human rights: Widespread attacks in DR Congo may amount to crimes against humanity”, 2 février 2021, news.un.org/en/story/2021/02/1083582. Voir également les nombreux rapports du Groupe d’experts des Nations unies sur la RDC, qui ont fait état d’homicides et de viols, entre autres crimes, notamment ceux commis en RDC depuis 2004 par les forces de l’État et les groupes armés qui leur sont affiliés, par exemple : Conseil de sécurité des Nations unies, Comité des sanctions concernant la RDC, Rapport à mi-parcours du Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo, 30 décembre 2023 (doc. ONU S/2023/990), § 54 et annexes pertinentes ; Rapport final du 13 juin 2023 (doc. ONU S/2023/431), § 129-130 ; Rapport final du 14 juin 2022 (doc. ONU S/2022/479), § 130-140. Rapport final du 10 juin 2021 (doc. ONU S/2021/560), § 113-120 ; Rapport final du 7 juin 2019 (doc. ONU S/2019/469), § 53 et 55 ;
[275] CPI, Chambre de première instance III, Jugement rendu dans l’affaire Bemba, affaire n° ICC-01/05-01/08-3343, 21 mars 2016, § 160. Voir également CPI, Chambre de première instance II, Jugement rendu dans l’affaire Katanga, affaire n° ICC-01/04-01/07, 7 mars 2014, § 1109 : « L’existence d’une politique d’un État ou d’une organisation pourra donc, dans la plupart des cas, être déduite, notamment, du constat de la répétition d’actes réalisés selon la même logique, de l’existence d’activités préparatoires ou encore de mobilisations collectives orchestrées et coordonnées par cet État ou cette organisation. » ; CPI, Chambre préliminaire II, Décision relative à la confirmation des charges dans l’affaire Bemba, affaire n° ICC-01/05-01/08-424, 15 juin 2009, § 81 : « La condition tenant à “la politique d’un État ou d’une organisation” exige que l’attaque ait été organisée selon un modèle régulier. […] Cette politique n’a pas besoin d’être énoncée de façon formelle. Cette condition est donc remplie par une attaque planifiée, dirigée ou organisée, et non par une attaque constituée d’actes de violence spontanés ou isolés. » ; CPI, Chambre préliminaire I, Décision relative à la confirmation des charges portées contre Laurent Gbagbo, affaire n° ICC-02/11-01/11-656-Red, 12 juin 2014, § 215.
[276] Voir, par exemple, Amnesty International, République démocratique du Congo. Il est temps que justice soit rendue. La République démocratique du Congo a besoin d’une nouvelle stratégie en matière de justice (Index AI : AFR 62/006/2011), 10 août 2011, https://www.amnesty.org/fr/documents/afr62/006/2011/fr/
[277] Les meurtres du 30 août à Goma ont été perpétrés avec le soutien de l’État, comme en témoignent les moyens et les unités déployés, les instructions données par certains commandants, les tentatives de minimisation du nombre de morts, les corps apparemment disparus, le fait que les autorités n’aient pas mené d’enquêtes balistiques ni d’autopsies et les déclarations faites ultérieurement par les autorités qui se félicitaient de ces crimes ou les niaient. Voir la section ci-après consacrée aux « Homicides illégaux ».
[278] CPI, Chambre préliminaire III, Décision relative à l’autorisation d’ouverture d’une enquête dans le cadre de la situation en République de Côte d’Ivoire, affaire n° ICC-02/11-14, 3 octobre 2011, § 53 : « L’appréciation de cet élément ne doit pas répondre à des critères exclusivement quantitatifs ou géographiques, mais être effectuée sur la base des faits. En conséquence, on peut considérer comme généralisée une attaque résultant de “l’effet cumulé d’une série d’actes inhumains ou [de] l’effet singulier d’un acte inhumain d’une ampleur extraordinaire”. » Voir également CPI, Chambre de première instance IX, Jugement rendu dans l’affaire Ongwen (en anglais), affaire n° ICC-02/04-01/05, 4 février 2021, § 2681 ; CPI, Chambre de première instance III, Jugement rendu dans l’affaire Bemba, affaire n° ICC-01/05-01/08-3343, 21 mars 2016, § 163 ; CPI, Chambre de première instance II, Jugement rendu dans l’affaire Katanga, affaire n° ICC-01/04-01/07, 7 mars 2014, § 1123 ; CPI, Chambre préliminaire I, Décision relative à la confirmation des charges portées contre Laurent Gbagbo, affaire n° ICC-02/11-01/11-656-Red, 12 juin 2014, § 222. TPIY, Chambre de première instance III, Jugement dans l’affaire Kordić et al., affaire n° IT-95-14/2-T, 26 février 2001, § 179.
[279] CPI, Chambre de première instance IX, Jugement rendu dans l’affaire Ongwen (en anglais), affaire n° ICC-02/04-01/05, 4 février 2021, § 2682 ; CPI, Chambre de première instance II, Jugement rendu dans l’affaire Katanga, affaire n° ICC-01/04-01/07, 7 mars 2014, § 1123 ; Tribunal spécial pour la Sierra Leone, Chambre de première instance II, Jugement rendu dans l’affaire Taylor, affaire n° SCSL-03-01-T, 18 mars 2012, § 553 ; CPI, Chambre préliminaire III, Décision relative à l’autorisation d’ouverture d’une enquête dans le cadre de la situation en République de Côte d’Ivoire, affaire n° ICC-02/11-14, 3 octobre 2011, § 54 ; TPIY, Chambre de première instance II, Jugement dans l’affaire Kunarac et al., affaire n° IT-96-23-T& IT-96-23/1-T, 22 février 2001, § 429.
[280] Voir note de bas de page 269 ci-dessus.
[281] Les chiffres estimés par Amnesty International se fondent principalement sur les rapports des Nations unies portant sur les attaques menées contre des civils par l’armée congolaise et ses groupes armés affiliés, qui ont entraîné des homicides et des viols à grande échelle entre 1996 et 2023.
[282] Voir section 2.2 « Attaque contre le temple des Wazalendo ». En quelques minutes, des dizaines de personnes ont été tuées et de nombreuses autres blessées. Parmi celles qui n’avaient pas été tuées sur place, certaines ont été traquées. D’autres ont succombé à leurs blessures à l’hôpital. Amnesty International estime que le bilan atteint plus de 100 victimes au total.
[283] Voir chapitre 2 « 30 août : le massacre ».Bien que les autorités aient accusé ces manifestant·e·s de représenter une menace pour la sécurité, les autorités comme les forces de défense savaient dès la phase de préparation de l’opération qu’il s’agissait de civil·e·s, comme en témoignent les termes utilisés dans les instructions écrites émises dans le cadre de cette opération. Cela s’est vérifié pendant les faits, au cours desquels ils ont pu observer que les manifestant·e·s étaient pacifiques et non armés.
[284] Ce critère ne s’applique pas si on considère que les actes sous-jacents, en l’espèce les meurtres du 30 août, constituent l’attaque elle-même. Il n’est pas nécessaire de prouver qu’une attaque séparée contre les mêmes civil·e·s, dans le cadre de laquelle les homicides auraient été commis, a eu lieu. Voir TPIR, Chambre de première instance, Jugement dans l’affaire Akayesu, note 29, § 581
[285] CPI, Chambre de première instance IX, Jugement rendu dans l’affaire Ongwen, affaire n° ICC-02/04-01/05, 4 février 2021, § 2688 (traduction non officielle) : « Pour apprécier un lien de ce type, il convient de tenir dûment compte des caractéristiques, des buts, de la nature et des conséquences des actes concernés » ; CPI, Chambre de première instance VI, Jugement rendu dans l’affaire Ntaganda, affaire n° ICC-01/04-02/06, 8 juillet 2019, § 696 ; CPI, Chambre de première instance III, Jugement rendu dans l’affaire Bemba, affaire n° ICC-01/05-01/08-3343, 21 mars 2016, § 165 ; TPIY, Chambre de première instance, Jugement dans l’affaire Tadic, note 29, § 629-633.
[286] Voir section 1.2 « Projets de manifestation et réaction des autorités ».
[287] UNJHRO, “Note on the preliminary findings of the UNJHRO investigation on the 30 August incidents in Goma” (op. cit.)
[288] Concernant l’obligation d’enquêter, voir : HCDH, Protocole du Minnesota relatif aux enquêtes sur les décès résultant potentiellement d’actes illégaux, 2016 : version révisée du Manuel des Nations Unies sur la prévention des exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires et les moyens d’enquête sur ces exécutions, janvier 2016, https://www.ohchr.org/sites/default/files/Documents/Publications/MinnesotaProtocol_FR.pdf.
[289] Commission africaine, Directives sur la liberté d’association et de réunion en Afrique, 21 septembre 2017, achpr.au.int/index.php/en/soft-law/guidelines-freedom-association-and-assembly-africa, § 11 et 67.
[290] Commission africaine, Directives sur la liberté d’association et de réunion en Afrique, 21 septembre 2017 (op. cit.), § 11 et 67.
[291] Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 37 (op. cit.), § 27
[292] Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 37 (op. cit.), § 37 et 52.
[293] Comité des droits de l’homme, Observation générale n° 37 (op. cit.), § 9.
[294] Rapport du Groupe de travail sur l’Examen périodique universel : République démocratique du Congo, 29 avril 2014, doc. ONU A/HRC/27/5, recommandations 133(2)-133(3).
[295] Le tribunal a ordonné une indemnisation financière de (100 000 dollars des États-Unis) à 109 victimes reconnues, soit un montant moyen de 917 dollars par personne.
[296] RDC, Loi organique n° 11-012 portant organisation et fonctionnement des forces armées, 2011, https://www.droitcongolais.info/files/412.08.11-Loi-du-11-aout-2011.pdf, article 114 ; RDC, Ordonnance n° 13-063 portant organisation et fonctionnement de la garde républicaine, https://www.droitcongolais.info/files/412.06.13.8-Ordonnance-du-17-juin-2013_garde-republicaine.pdf, articles 2 et 3.
[297] RDC, Loi organique n° 11-012 portant organisation et fonctionnement des forces armées (op. cit.), article 7 ; RDC, Ordonnance n° 13-063 portant organisation et fonctionnement de la garde républicaine (op. cit.), article 4.
[298] RDC, Loi organique n° 11-012 portant organisation et fonctionnement des forces armées (op. cit.), article 7 ; RDC, Loi organique portant organisation et fonctionnement de la police nationale congolaise, article 81(1)-(2).
[299] RDC, Loi organique portant organisation et fonctionnement de la police nationale congolaise, article 2(1).
[300] Police nationale congolaise (Commissariat du Nord-Kivu, Département de la sécurité publique), Ordre de service 103/351/049/PNC/CP NK/COORD POL ADM/DSP/2023, « Couverture sécuritaire avant, pendant et après les menaces des Wazalendo contre la MONUSCO dans la ville de Goma et ses environs », 29 août 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[301] RDC, Ordonnance portant mesures d’application de l’état de siège sur une partie du territoire de la République démocratique du Congo, 3 mai 2021, article 5.
[302] RDC, Ordonnance portant mesures d’application de l’état de siège sur une partie du territoire de la République démocratique du Congo, 3 mai 2021, article 5.
[303] Ndima Kongba Constant (lieutenant-général), gouverneur du Nord-Kivu, Télégramme 01/393/GP-NK/COMDT OPS/CCCO/23 (op. cit.).
[304] Département des opérations de la 34e région militaire, Ordre opérationnel 0734/029/EM 34 Rgn Mil/Dir Ops/23 (op. cit.)
[305] Garde républicaine/BIA, Ordre de mouvement routier 319 019/PR/GR/BIA-GR/EMS8/23, 29 août 2023 (op. cit.).
[306] Police nationale congolaise, Ordre de service, 29 août 2023 (op. cit.).
[307] Entretiens téléphoniques menés séparément avec deux journalistes qui ont couvert les suites du massacre, 10 octobre 2023
[308] Entretien en personne avec le colonel Mike Mikombe, commandant de la BIA dans le Nord-Kivu, 1er octobre 2023, Goma ; entretien téléphonique avec le colonel Yves Rubenga, commandant du quartier général de l’état-major à la 34e région militaire, 29 novembre 2023.
[309] Entretien en personne avec le colonel Mike Mikombe, commandant de la BIA dans le Nord-Kivu, 1er octobre 2023, Goma.
[310] Opération Sukola II, dépêche quotidienne des services de renseignement militaire (confidentiel), 31 août 2023, Goma, copie conservée dans les archives d’Amnesty International. Voir : The East African, “48 Killed In East DR Congo Anti-UN Rally Crackdown” (op. cit.).
[311] Gouvernorat du Nord-Kivu, publication Facebook, « Le Gouverneur Lieutenant-Général Constant Ndima rassure de l’accalmie et demande à la population de vaquer librement à ses occupations », 30 août 2023, facebook.com/share/p/UGzjdFkuNWuqeybm/?mibextid=WC7FNe.
[312] Gouvernorat du Nord-Kivu, publication Facebook, « Le Gouverneur Lieutenant-Général Constant Ndima rassure de l’accalmie et demande à la population de vaquer librement à ses occupations », 30 août 2023 (op. cit.).
[313] Radio Télévision Nationale Congolaise (RTNC), « Goma : le gouvernement établit le bilan des manifestations », 31 août 2023, youtube.com/watch?v=GJ2CHQar0Fk.
[314] Constant Ndima Kongba, droit de réponse à Amnesty International, 26 août 2024, en annexe.[
[315] Constant Ndima Kongba, droit de réponse à Amnesty International (op. cit.).
[316] Entretien en personne avec le colonel Mike Mikombe, commandant de la BIA dans le Nord-Kivu, 1er octobre 2023, Goma.
[317] BIA, Ordre de mouvement routier, 29 août 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[318] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres (op. cit.), jugement, enregistrement audio conservé dans les archives d’Amnesty International.
[319] Vidéo reçue par message crypté, copie conservée dans les archives d’Amnesty International. Selon des dossiers judiciaires et des témoins oculaires, il a également ordonné aux soldats de la Garde républicaine de désarmer le chef des renseignements militaires de la 34e région militaire, également colonel de l’armée, afin de l’éloigner de la zone de protestation, autre élément qui témoigne du rang qu’il occupait dans les faits.
[320] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, témoignages du colonel Yves Rubenga et du colonel Franck Mutunda et de deux victimes dont l’anonymat a été préservé (op. cit.).
[321] Entretiens menés séparément en personne avec trois habitant·e·s de Nyabushongo qui étaient présents sur les lieux avant la fusillade de masse, 24-28 septembre 2023.
[322] Entretien en personne avec le colonel Mike Mikombe, 1er octobre 2023, Goma.
[323] BIA, Rapport circonstancié, 31 août 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[324] BIA, Rapport circonstancié, (op. cit.).
[325] Cour militaire de la garnison de Goma, Procureur militaire c. Mikombe et autres, jugement, RP N° 173/023, 2 octobre 2023, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[326] Léon Mbiya Malanza, avocat principal du colonel Mike Mikombe, droit de réponse aux conclusions d’Amnesty International, 20 août 2024, en annexe.
[327] Léon Mbiya Malanza, avocat principal du colonel Mike Mikombe, droit de réponse à Amnesty International (op. cit).
[328] Cour militaire du Nord-Kivu, Procureur militaire c. Mikombe et autres, jugement, op. cit., page 13/26.
[329] Entretiens téléphoniques menés séparément avec deux militaires de l’armée congolaise, deux journalistes, deux représentants des Nations unies et un représentant d’une société de sécurité privée, 24-26 octobre 2023.
[330] Entretiens menés séparément en personne avec trois témoins, 7 novembre 2023, Goma.
[331] Entretien en personne avec un témoin, 7 novembre 2023, Goma.
[332] Entretien en personne avec un témoin, 7 novembre 2023, Goma.
[333] Entretien en personne avec un représentant d’une société de sécurité privée (le nom n’est pas mentionné pour des raisons de sécurité), 27 septembre 2023, Goma.
[334] Entretiens menés séparément, en personne et par téléphone, avec trois experts militaires, 28 septembre-7 novembre 2023.
[335] Entretiens téléphoniques menés séparément avec deux militaires de l’armée congolaise, deux journalistes, deux représentants des Nations unies et un représentant d’une société de sécurité privée, 24-26 octobre 2023
[336] Vidéos montrant en partie le déroulement des événements autour du temple des Wazalendo avant, pendant et après les meurtres, copie conservée dans les archives d’Amnesty International.
[337] Amnesty International, lettre au major Peter Kabwe Ngandu, 26 juillet 2024, pièce figurant dans les archives d’Amnesty International.