L’État colombien ne doit pas se servir des mesures mises en place en réponse à la pandémie de COVID-19 comme prétexte pour affaiblir ou supprimer la protection dont bénéficient les défenseur·e·s des droits humains et les dirigeant·e·s de la société civile, a déclaré Amnesty International le 26 mars 2020.
« La Colombie est l’un des pays les plus meurtriers au monde pour les défenseur·e·s des droits humains et les dirigeant·e·s de la société civile qui, dans le contexte de la crise de COVID-19, sont exposés à des risques accrus. En raison des restrictions imposées pour endiguer la pandémie, les mesures de protection mises en place par l’État sont réduites ; ils ne peuvent plus continuer de se déplacer d’un endroit à un autre pour leur sécurité et leurs agresseurs savent que les forces de sécurité se concentrent sur des problèmes liés à la pandémie, a déclaré Erika Guevara-Rosas, directrice du programme Amériques à Amnesty International.
La Colombie est l’un des pays les plus meurtriers au monde pour les défenseur·e·s des droits humains et les dirigeant·e·s de la société civile qui, dans le contexte de la crise de COVID-19, sont exposés à des risques accrus.
Erika Guevara-Rosas, directrice du programme Amériques à Amnesty International
« Les autorités colombiennes ne doivent pas laisser les défenseur·e·s des droits humains subir des attaques et des menaces. L’État se doit de maintenir ses programmes de protection et de développer des stratégies de protection collective pour les communautés à risque, tout en mettant en œuvre des mesures de prévention pour contenir l’épidémie de COVID-19. »
Amnesty International a reçu des informations selon lesquelles les mesures de protection accordées par l’Unité nationale de protection à deux défenseurs au moins ont été limitées ces derniers jours. Le premier, en raison de la réduction du nombre de ses gardes du corps, a été contraint de se réfugier dans la clandestinité par peur d’être attaqué par les groupes armés qui le menacent en raison de son travail en faveur des droits humains. Le second ne bénéficie plus de patrouilles nocturnes, ce qui l’expose à des risques d’attaques.
Le 24 mars, Amnesty International a publié une série de recommandations aux États des Amériques afin que leurs réponses à la COVID-19 respectent leurs obligations internationales en termes de droits humains. Les experts de l’ONU ont également fait savoir aux États que les mesures prises dans le cadre de la pandémie ne devaient pas servir à réduire au silence les défenseur·e·s des droits humains.
Au cours de la semaine dernière, au moins six dirigeant·e·s de la société civile et défenseur·e·s des droits humains ont été tués en Colombie. Le 19 mars, Ivo Humberto Bracamonte Quiroz, conseiller de Puerto Santander et directeur du site d’informations en ligne NPS, a été tué alors qu’il faisait de l’exercice dans le quartier de Beltranía, à Puerto Santander.
Le 19 mars également, trois hommes armés ont tué Marco Rivadeneira, dirigeant des communautés de petits paysans (campesino) dans le département du Putumayo et membre de la Table ronde nationale de garanties (Mesa Nacional de Garantías). Ils l’ont embarqué lors d’une réunion de petits paysans dans le quartier de Nueva Granada, à Puerto Asís.
Le même jour, Angel Ovidio Quintero Gonzalez, dirigeant de la société civile et président du conseil de la municipalité de San Francisco, dans le département d’Antioquia, a lui aussi été assassiné. Le maire de San Francisco a annoncé qu’Angel Ovidio Quintero Gonzalez avait été la cible de tirs et, bien qu’il soit parvenu à s’enfuir, son corps a été retrouvé quelques heures plus tard dans un fleuve.
Les autorités colombiennes ne doivent pas laisser les défenseur·e·s des droits humains subir des attaques et des menaces. L’État se doit de maintenir ses programmes de protection et de développer des stratégies de protection collective pour les communautés à risque, tout en mettant en œuvre des mesures de prévention pour contenir l’épidémie de COVID-19.
Erika Guevara-Rosas
Le 24 mars, l’Organisation régionale indigène du Valle del Cauca (ORIVAC) a signalé que deux leaders indigènes de la communauté Embera, Omar et Ernesto Guasiruma, ont été tués dans une zone rurale de la municipalité de Bolivar alors qu’ils se trouvaient chez eux, conformément à la quarantaine décrétée par le gouvernement. L’ORIVAC a aussi indiqué que deux membres de la même famille ont été blessés lors de l’attaque.
Carlota Isabel Salinas Péres, dirigeante de l’ONG Organisation populaire de femmes (Organización Femenina Popular, OFP), a également été assassinée le 24 mars dans la municipalité de San Pablo, dans le département de Bolivar. Vers 20 heures, des hommes armés sont arrivés chez elle, dans le quartier de Guarigua, et l’ont abattue. Son compagnon est porté disparu depuis.