Russie. Un réfugié tchétchène victime d’une disparition forcée après avoir été illégalement expulsé de Pologne

Amnesty International demande aux autorités russes de révéler immédiatement où se trouve Azamat Baïdouïev, un réfugié tchétchène qui a été expulsé vers la Russie par la Pologne le 31 août et a été soumis à une disparition forcée le lendemain.

D’après des témoins, vers minuit le 1er septembre, plusieurs dizaines d’hommes armés portant des insignes du Service fédéral de sécurité et du ministère de l’Intérieur se sont rendus à l’endroit où logeait Azamat Baïdouïev dans le village de Chalaji et l’ont emmené dans un lieu inconnu, sans fournir d’explication. Sa famille n’a pas été informée de son sort et de l’endroit où il est détenu.

Il serait difficilement possible d’illustrer de manière plus éloquente la raison pour laquelle il est dangereux de renvoyer des réfugiés tchétchènes en Russie.

Denis Krivocheïev, directeur adjoint du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International

« Il serait difficilement possible d’illustrer de manière plus éloquente la raison pour laquelle il est dangereux de renvoyer des réfugiés tchétchènes en Russie. Quelques heures après son arrivée dans le pays, des hommes armés sont venus chercher Azamat Baïdouïev chez lui et l’ont emmené dans un lieu inconnu. Nous demandons aux autorités russes de révéler immédiatement ce qu’il est advenu d’Azamat Baïdouïev et où il est détenu et de veiller à ce que ses droits humains soient pleinement respectés », a déclaré Denis Krivocheïev, directeur adjoint du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

« En renvoyant Azamat Baïdouïev vers un pays où sa vie et sa sécurité sont menacées, le gouvernement polonais a clairement manqué à ses obligations internationales. Ces événements effrayants s’inscrivent dans le cadre d’une pratique bien connue de violations des droits humains en Tchétchénie : il y a tout juste deux jours, 15 pays ont demandé qu’une enquête soit ouverte sur les persécutions systématiques, la torture, les disparitions forcées et les exécutions extrajudiciaires en Tchétchénie.

« Nous demandons aux autorités russes de libérer immédiatement Azamat Baïdouïev et de lui permettre de retrouver sa famille, à moins qu’il ne soit raisonnablement soupçonné d’avoir commis une infraction reconnue par la loi. »

Le 30 août, 15 membres de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ont déclenché le mécanisme de Vienne, pour demander la vérité sur les graves atteintes aux droits humains commises en Tchétchénie et l’ouverture d’enquêtes efficaces. La délégation de l’OSCE a évoqué des « actions inquiétantes des autorités tchétchènes contre des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre réelle ou supposée, ainsi que contre des défenseur-e-s des droits humains, des avocat-e-s, des médias indépendants et des organisations de la société civile, entre autres. »

Complément d’information

D’après des informations fournies par les médias, Azamat Baïdouïev avait obtenu l’asile en Pologne en 2007, mais était parti en Belgique car il ne se sentait plus en sécurité en Pologne. En 2017, les autorités belges l’ont arrêté pour sa participation présumée à des projets d’actes terroristes. Il n’a cependant jamais été inculpé et a été expulsé vers la Pologne. Quelques mois plus tard, le 9 avril 2018, les autorités polonaises ont placé Azamat Baïdouïev en détention dans un centre pour migrants en situation irrégulière en instance d’éloignement, et l’ont expulsé vers la Russie le 31 août. Le même jour, il a pris un vol de Moscou à Grozny, la capitale tchétchène, puis s’est rendu en voiture au village de Chalaji, où vit sa famille.