Troy Davis bénéficie d’un sursis

Troy Davis s’est vu accorder un sursis moins de deux heures avant l’heure prévue pour son exécution par injection létale dans l’État de Géorgie. Il est dans le couloir de la mort depuis dix-sept ans, ayant été déclaré coupable d’un meurtre qu’il a cependant toujours nié avoir commis.

La Cour suprême des États-Unis a accordé le sursis afin de pouvoir se réunir lundi 29 septembre pour décider si elle examinera ou non l’appel de Troy Davis contre la décision rendue en mars 2008 par la Cour suprême de l’État de Géorgie , qui avait refusé par quatre voix contre trois qu’il bénéficie d’un nouveau procès ou d’une audience lors de laquelle il aurait pu faire valoir des éléments de preuve apparus après sa condamnation.

La présidente de la Cour suprême de Géorgie a, avec deux autres juges de cette instance, exprimé une opinion dissidente, déclarant notamment : « Dans cette affaire, presque tous les témoins ayant désigné Davis comme le tireur au procès se sont aujourd’hui déclarés incapables de le faire avec certitude. Trois personnes ont indiqué que Sylvester Coles avait avoué être le tireur.

« Selon deux témoins, contrairement à ce qu’il avait déclaré lors du procès, Sylvester Coles était en possession d’un pistolet immédiatement après le meurtre. Un autre témoin a fourni une description des événements qui pourrait désigner Sylvester Coles comme le tueur. »

Selon la présidente, « l’effet collectif de tous les nouveaux témoignages dans l’affaire Davis, s’ils venaient à être jugés crédibles par le tribunal dans le cadre d’une audience, mettrait en évidence la probabilité qu’un nouveau jury pourrait raisonnablement mettre en doute la culpabilité de Davis, ou tout au moins douter suffisamment pour refuser de prononcer la peine capitale ».

En 1991, Troy Davis a été déclaré coupable du meurtre de Mark Allen MacPhail, un policier âgé de vingt-sept ans qui a été abattu dans le parking d’un fast-food Burger King à Savannah, en Géorgie, aux premières heures du 19 août 1989. Troy Davis a également été déclaré coupable d’avoir agressé Larry Young, un sans-abri attaqué juste avant que le policier ne soit tué.

Lors du procès, Troy Davis a reconnu s’être trouvé sur les lieux au moment de la fusillade, mais il a nié avoir agressé Larry Young ou tiré sur l’agent MacPhail. Il n’existe aucune preuve matérielle contre lui et l’arme du crime n’a jamais été retrouvée.

Les éléments à charge reposaient entièrement sur les déclarations de témoins. Au cours des années qui ont suivi son procès, la plupart des témoins de l’accusation sont revenus sur leur témoignage ou se sont contredits dans des déclarations sous serment. De plus, un témoignage recueilli après le procès indique que c’est un autre homme qui a tiré sur le policier.

Le sursis restera en vigueur jusqu’à ce que la Cour suprême des Etats-Unis décide ou non d’examiner l’appel. Dans la négative, il « prendra fin automatiquement », et l’État de Géorgie pourra alors fixer une nouvelle date d’exécution. Si, en revanche, la Cour suprême accepte d’examiner l’appel, l’exécution sera suspendue jusqu’à sa décision finale.

Aux États-Unis comme dans le reste du monde, des dizaines de milliers de personnes et des organisations ont appelé le pouvoir exécutif à user de son droit de grâce dans l’affaire Troy Davis. Parmi elles figuraient l’ancien président Jimmy Carter, l’archevêque Desmond Tutu, le Pape Benoît XVI, l’Union européenne, le Parlement européen, le Secrétaire général du Conseil de l’Europe, l’ancien directeur du FBI William Sessions, et les membres ou ex-membres du Congrès américain Bob Barr, Carol Moseley Braun et John Lewis. Cette dernière semaine, alors qu’approchait la date prévue pour l’exécution, les médias ont continué de se faire largement l’écho de cette affaire.

Les normes internationales interdisent l’exécution de toute personne dont la culpabilité est mise en doute. Amnesty International est opposée à l’exécution de Troy Davis quelles que soient les circonstances, et indépendamment des questions relatives à la culpabilité ou à l’innocence, comme elle l’est pour tout recours à la peine capitale.