La Cour suprême de l’État de New York a statué en faveur d’Amnesty International et du projet STOP (Surveillance Technology Oversight Project) dans le cadre de leur action lancée conjointement au titre de l’article 78 et a ordonné au Département de police de la ville de New York (NYPD) de divulguer des milliers d’enregistrements sur la manière dont il s’est procuré et a utilisé les technologies de reconnaissance faciale contre des manifestant·e·s du mouvement Black Lives Matter.
Les New-Yorkaises et les New-Yorkais qui réclament la justice raciale ont le droit de connaître tous les détails de l’utilisation par la police de New York des technologies de reconnaissance faciale pendant les manifestations de Black Lives Matter
Matt Mahmoudi, chercheur sur l’intelligence artificielle et les droits humains à Amnesty International
« Les New-Yorkaises et les New-Yorkais qui réclament la justice raciale ont le droit de connaître tous les détails de l’utilisation par la police de New York des technologies de reconnaissance faciale pendant les manifestations de Black Lives Matter. Ce jugement reconnaît que la police de New York a enfreint la loi en faisant de la rétention d’informations et constitue une étape importante pour l’amener à rendre des comptes s’agissant de l’utilisation de la surveillance discriminatoire. Qu’il ait fallu une action en justice pour y parvenir est un réquisitoire accablant contre le manque de transparence et d’obligation de rendre des comptes de la police de New York vis-à-vis de la population, a déclaré Matt Mahmoudi, chercheur sur l’intelligence artificielle et les droits humains à Amnesty International.
« Interdire la reconnaissance faciale à des fins de surveillance de masse est une première mesure indispensable en vue de lutter contre le maintien de l’ordre raciste à New York. Nous avons tous le droit de manifester pacifiquement sans craindre la surveillance. »
Le 29 juillet, le juge de la Cour suprême de New York Laurence Love a déclaré que la rétention de documents par la police de New York et l’argument selon lequel le volume d’informations ferait peser une charge sur ces services de police avaient été « totalement réfutés » par Amnesty International.
Laurence Love a ordonné à la police de New York de communiquer 2 700 documents et courriels datant du 1er mars au 1er septembre 2020, relatifs à l’acquisition et à l’utilisation de la surveillance par reconnaissance faciale lors des manifestations du mouvement Black Lives Matter, après avoir de nouveau soumis la demande initiale d’Amnesty au titre de la loi sur la liberté d’information (FOIL). Cela permettra à Amnesty International et à STOP d’enquêter de manière approfondie sur l’acquisition et l’utilisation par la police de New York des technologies de reconnaissance faciale dans toute la ville.
« La police de New York a eu tort de surveiller les manifestant·e·s de Black Lives Matter et elle a eu tort de cacher des preuves, a déclaré Albert Fox Cahn, directeur exécutif du projet STOP.
« Elle dissimule systématiquement les moyens qu’elle met en œuvre pour nous surveiller, mais aujourd’hui, c’est terminé. Ce jugement est limpide : la police de New York a enfreint la loi en cachant ses enregistrements. Lorsque la police agit dans l’ombre et viole les lois relatives à la surveillance, il s’agit d’une menace pour la sécurité publique, mais aussi pour la démocratie. J’espère que la police du maire de New York Eric Adams se conformera rapidement à cet ordre. Les habitant·e·s de New York méritent de savoir comment la dissidence politique est contrôlée dans cette ville. Plus important encore, ces dossiers peuvent nous aider à prévenir d’autres abus à l’avenir. »
Complément d’information
En septembre 2020, Amnesty International États-Unis a déposé une demande de documents publics en vertu de la loi sur la liberté d’information (FOIL) de New York afin d’obtenir les documents de la police de New York relatifs à la surveillance des manifestations historiques de Black Lives Matter en 2020. La police de New York a rejeté cette requête, et a ensuite fait appel. En juillet 2021, Amnesty International et S.T.O.P., organisation de défense du droit à la vie privée et des droits civiques, ont annoncé une action en justice contre la police de New York pour son refus de divulguer ses dossiers.
La reconnaissance faciale amplifie la discrimination lors des opérations de maintien de l’ordre et entrave d’exercer librement et en sécurité le droit de se réunir pacifiquement, en agissant comme un outil de surveillance de masse. Les communautés noires et minoritaires risquent beaucoup plus d’être prises pour cible.
En février 2022, de nouvelles recherches menées par Amnesty International et ses partenaires ont révélé que les habitant·e·s de New-York qui vivent dans des quartiers où le risque de contrôle et de fouille (« stop-and-frisk ») par la police est plus élevé sont également plus exposés à la technologie intrusive de reconnaissance faciale. Cette analyse, menée dans le cadre de la campagne mondiale Ban The Scan, démontre que la vaste opération de surveillance du Département de police de la ville de New York affecte particulièrement les personnes déjà ciblées par les contrôles et les fouilles dans les cinq arrondissements de New York. Dans le Bronx, Brooklyn et le Queens, les recherches montrent aussi que plus la proportion d’habitant·e·s non blancs est importante, plus la concentration de caméras de vidéosurveillance compatibles avec la reconnaissance faciale est élevée.
Amnesty International demande l’interdiction totale de l’utilisation, du développement, de la production, de la vente et de l’exportation des technologies de reconnaissance faciale à des fins de surveillance de masse, par les États comme par le secteur privé.