Zimbabwe : des milliers de personnes risquent d’être expulsées de leur logement et d’être privées de leur étal sur les marchés

Quelque 200 habitants d’un bidonville de Gunhill, une banlieue de Harare (Zimbabwe), risquent d’être expulsés de force sans avoir été prévenus suffisamment à l’avance ni consultés, en l’absence de toute procédure en bonne et due forme. Plusieurs milliers de commerçants informels de la capitale du Zimbabwe pourraient également voir leurs étals démantelés de force sur les marchés.

La majorité des personnes concernées sont des femmes aux revenus modestes dont le principal moyen de subsistance est la vente de fruits, de légumes et d’autres marchandises sur des étals de marchés tels que Mbare Musika et Mupedzanhamo à Harare.

En juillet 2009, le maire adjoint de Harare a déclaré que les autorités municipales envisageaient d’expulser les occupants des « installations et marchés illégaux afin de rétablir l’ordre ». Il a affirmé que les personnes concernées posaient un risque sanitaire et violaient les arrêtés municipaux.

Amnesty International a accusé le conseil municipal d’être insensible aux souffrances de la population pauvre de la ville qui se bat pour survivre dans des conditions économiques très difficiles.

« L’interdiction totale de vendre des marchandises faite aux personnes sans emploi empêche celles-ci de gagner leur vie et enfreint leur droit au travail. Au Zimbabwe, le taux officiel de chômage dépasserait les 90 %. La grande majorité de la population urbaine, en particulier les femmes, survit grâce à des activités informelles. Les autorités municipales doivent se garder de prendre des mesures enfonçant ces personnes encore plus profondément dans la pauvreté », a ajouté Amy Agnew, adjointe de recherche et d’action sur le Zimbabwe à Amnesty International.

« Depuis 2005, Amnesty International a recensé des cas de vendeurs des rues et de marchands informels ayant subi le harcèlement répété de policiers municipaux à Harare pour avoir fait du commerce à des emplacements ” non désignés “. Ils ont vu leurs marchandises confisquées et ont été contraints de payer une amende », a ajouté Amy Agnew.

« Il faut que le maire de Harare suspende immédiatement toutes les procédures d’expulsions massives en cours qui concernent des quartiers informels, ainsi que les mesures de répression visant les vendeurs des rues dans cette ville. Le conseil municipal doit, en particulier, prévenir les personnes concernées dans un délai suffisant et raisonnable avant toute expulsion et veiller à ce que nul ne devienne sans domicile ou vulnérable à d’autres atteintes aux droits humains des suites d’une expulsion.

« Lorsque les personnes concernées ne peuvent pas subvenir à leurs besoins, les autorités municipales doivent prendre toutes les mesures nécessaires, au maximum de leurs ressources disponibles, afin qu’elles puissent disposer d’une solution de relogement adaptée, d’un site de réinstallation ou d’un accès à des terres productives, selon les cas. »

Amnesty International a déclaré que la plupart des personnes menacées d’une expulsion forcée étaient des victimes de l’opération Murambatsvina [Éliminer les déchets], également connue sous l’appellation officielle Opération Rétablir l’ordre. Ce programme d’expulsions massives lancé par les autorités zimbabwéennes en 2005 a jeté à la rue et privé de leurs moyens d’existence environ 700 000 personnes.

Quatre ans plus tard, le gouvernement n’a toujours pas pris de mesures efficaces pour remédier à la situation des victimes de cette opération, si bien que nombre d’entre elles risquent encore d’être expulsées de leur domicile ou de leur commerce informel.