Le dissident chinois Liu Xiaobo, éminent universitaire, est détenu sans inculpation depuis le 8 décembre dans un lieu inconnu.
Les autorités chinoises l’ont arrêté parce qu’il est l’un des signataires de la Charte 08, un texte demandant des réformes politiques et juridiques. Elles n’ont encore rendue publique aucune information concernant les infractions qui lui sont reprochées, les charges retenues contre lui et le lieu où il se trouve actuellement.
Aux termes de la législation chinoise, Liu Xiaobo peut être maintenu en « résidence surveillée » pour une période maximum de six mois. Tant qu’il se trouve sous ce régime, il ne peut quitter son lieu de résidence ni rencontrer des gens sans autorisation préalable de la police.
Sa famille ignore où il se trouve. Il ne s’est pas entretenu avec un avocat. Il n’a pas le droit d’avoir accès à un juge pour contester les raisons de sa détention, à moins que cette détention ne dépasse la limite des six mois prévue par la loi.
« Le recours à de tels régimes privatifs de liberté, sans arrestation ni inculpation officielles, contre des militants pacifiques est arbitraire et contraire aux normes internationales relatives aux droits humains ; il viole notamment les droits à la liberté, à la sécurité de la personne et à un procès équitable, a déclaré Roseann Rife, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International.
« Bien que prévue par le droit chinois, la “résidence surveillée” est contraire à certains éléments essentiels du droit à un procès équitable aux termes des normes internationales relatives aux droits humains, notamment du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il s’agit en particulier du droit de comparaître dans les meilleurs délais devant un juge ou un représentant des autorités judiciaires et du droit de contester la légalité de sa détention. »
La Charte 08, qui a dans un premier temps été signée par près de 300 universitaires, juristes et responsables chinois, fait des propositions en faveur d’une profonde réforme juridique et politique en Chine, avec pour objectif un système démocratique respectueux des droits humains.
Depuis le lancement de la Charte 08, de nombreux signataires ont été interrogés et harcelés par les autorités chinoises. La Charte 08 est à présent considérée comme une « plate-forme contre-révolutionnaire ». Cela pourrait annoncer un durcissement de l’attitude à l’égard des signataires. Liu Xiaobo est pour l’instant le seul signataire en détention.
Liu Xiaobo a été arrêté à son domicile, à Pékin, deux jours avant la date prévue pour le lancement de la Charte 08, qui devait coïncider avec le soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
On ignore si Liu Xiaobo a été dûment averti de son placement en « résidence surveillée » comme l’exigent des interprétations judiciaires de la procédure pénale. D’après certaines sources en Chine, sa famille ne savait pas depuis quand il avait été placé en « résidence surveillée », et la police a déclaré que les hautes autorités décideraient des charges retenues contre lui une fois l’enquête achevée.
Liu Xiaobo est l’un des dissidents chinois les plus connus. Il a par le passé déjà été arrêté deux fois en raison de ses écrits et de son soutien au mouvement en faveur de la démocratie en 1989 à Pékin, et il a passé plusieurs années derrière les barreaux.
Amnesty International a exhorté les autorités chinoises à libérer immédiatement et sans condition Liu Xiaobo et à mettre un terme aux mesures de harcèlement ciblant les signataires de la Charte 08.
L’organisation a également demandé aux autorités de rendre publique toute information relative à l’arrestation de Liu Xiaobo, et de permettre à ce dernier de consulter l’avocat de son choix.