Europe Et Asie Centrale 2024
Europe de l’Est et Asie centrale
L’agression russe contre l’Ukraine a continué d’occuper le devant de la scène dans cette région en première ligne de l’offensive mondiale menée contre les droits humains. Sur fond de guerre et de pratiques de plus en plus autoritaires, un nombre croissant de pays ont agi de concert pour refuser les obligations qui étaient les leurs en matière de droits fondamentaux et tenter d’affaiblir les institutions nationales et internationales. Celles et ceux qui se battaient pour le respect des droits humains étaient en butte à de nombreuses attaques.
En Ukraine, les violations incessantes du droit international, notamment du droit international humanitaire, par la Russie, qui n’a pas hésité à s’en prendre directement aux infrastructures civiles, ont fait de très nombreuses victimes. Elles ont aussi fortement détérioré les conditions de vie et causé des souffrances de plus en plus vives pour les plus vulnérables, tels que les enfants.
Ces crimes continuaient d’être commis en toute impunité, tout comme ceux perpétrés dans le cadre du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Dans le même temps, de nombreux gouvernements d’Europe de l’Est et d’Asie centrale s’en sont pris sans retenue aux droits fondamentaux, sans qu’il y ait beaucoup d’espoir qu’ils soient un jour amenés à rendre des comptes. La société civile a subi des attaques directes et l’espace dans lequel elle évoluait a rétréci dans bien des pays, où elle était contrainte de fonctionner dans la peur et la clandestinité. Un grand nombre de défenseur·e·s des droits humains ont été emprisonnés ou contraints à l’exil. Des manifestations pacifiques ont eu lieu, bravant une répression d’une violence sans précédent. Malgré le courage d’un grand nombre d’hommes et de femmes, la défense des droits fondamentaux a de toute évidence perdu du terrain.
Les droits relatifs au genre et les droits sexuels et reproductifs ont été particulièrement mis à mal par le recours abusif à des lois censées réprimer l’« extrémisme » ou le « terrorisme » et des discours officiels vantant les « valeurs traditionnelles ». Le travail des observateurs et observatrices, y compris de celles et ceux qui appartenaient à des organisations internationales, est devenu de plus en plus difficile. Signe supplémentaire de l’incapacité des mécanismes nationaux et internationaux à protéger suffisamment les droits humains, la persécution des militant·e·s au-delà des frontières était de plus en plus courante.
La liberté de religion et de conviction a reculé. Certains appareils judiciaires ont été instrumentalisés de manière éhontée pour réprimer la dissidence, et la pratique de la torture et d’autres mauvais traitements restait endémique. Les violences liées au genre se sont multipliées. Le respect des droits des personnes réfugiées ou migrantes a continué de régresser.
La production et la consommation de combustibles fossiles ont augmenté, contribuant à une pollution atmosphérique nocive pour la santé.
Violations du droit international humanitaire
La Russie a continué de s’en prendre systématiquement à des infrastructures civiles et de commettre des crimes de guerre en Ukraine. Les victimes civiles ont été plus nombreuses qu’en 2023. La Russie a poursuivi ses attaques au moyen de missiles et de drones contre des zones habitées. Les conditions de vie de la population ukrainienne, et notamment des personnes les plus fragiles, comme les enfants et les personnes âgées, se sont très fortement détériorées. La destruction ou l’occupation d’infrastructures a affecté jusqu’à 70 % de la capacité de production d’énergie thermique de l’Ukraine, entraînant de fréquentes coupures d’électricité. Des dizaines de prisonnières et de prisonniers de guerre ukrainiens ont été jugés en toute illégalité, en Russie et dans les zones d’Ukraine occupées par celle-ci, pour avoir participé aux hostilités.
La Russie a de son côté déclaré que des centaines de civil·e·s avaient été tués sur son territoire par des frappes ukrainiennes, sans toutefois qu’il ait été possible de vérifier de manière indépendante le nombre des victimes et les circonstances de leur décès.
L’impunité restait la norme pour les atteintes aux droits fondamentaux commises dans le cadre du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan concernant la région du Haut-Karabakh. La Cour européenne des droits de l’homme a estimé que la Russie avait violé plusieurs droits humains, notamment le droit à la vie, en instaurant en Géorgie des frontières et des mesures de contrôle sur les lignes de démarcation des territoires séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud.
Toutes les allégations de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité doivent faire l’objet d’enquêtes impartiales et indépendantes, notamment en vertu du principe de la compétence universelle.
Liberté d’expression
Les voix dissidentes ont été de plus en plus fréquemment réduites au silence par tout un arsenal de mesures répressives : poursuites pour trahison ou mise en danger de la sécurité nationale, stigmatisation des personnes considérées comme des « agents de l’étranger », recours à des lois de lutte contre l’« extrémisme » ou le « terrorisme » ou à des dispositions homophobes sur fond de discours vantant les « valeurs traditionnelles », etc. La répression a frappé aussi bien des défenseur·e·s des droits humains que des artistes, des journalistes, des dramaturges et des juristes.
La « liste des personnes impliquées dans des activités extrémistes » établie par le Bélarus comptait désormais plus de 4 700 noms et le nombre de documents imprimés, diffusés ou publiés en ligne interdits dans ce pays pour « contenu extrémiste » a presque doublé en 2024. En Géorgie, les personnes en désaccord avec le pouvoir ont été la cible d’actes de harcèlement et de violences croissantes. Un grand nombre de militant·e·s et de manifestant·e·s ont été victimes d’agressions brutales de la part d’individus non identifiés qui semblaient, dans certains cas, avoir le soutien des autorités, voire être envoyés par celles-ci.
Au Kirghizistan, des dizaines de journalistes indépendants, de militant·e·s, de blogueurs·euses et de personnes ayant publié des commentaires sur des réseaux sociaux ont été la cible de poursuites judiciaires, manifestement en raison de leur attitude critique. La Moldavie a élargi le champ d’application de sa législation relative à la trahison de manière à ce qu’elle s’applique également en temps de paix. Le Tadjikistan a adopté une loi interdisant les tenues vestimentaires « étrangères à la culture nationale ». Le Code de l’information de l’Ouzbékistan interdisait dans sa dernière version la diffusion d’informations faisant la promotion du « séparatisme » et de l’« extrémisme religieux » ou exprimant un manque de respect à l’égard de l’État.
Liberté d’association
L’espace dans lequel les organisations de la société civile pouvaient s’exprimer s’est réduit et celles-ci ont été stigmatisées et mises en péril. Le Kirghizistan s’est doté d’une loi semblable à celle adoptée depuis des années par la Russie sur les « agents de l’étranger ». Cette loi exigeait que toutes les ONG percevant des financements étrangers et ayant des « activités politiques » (terme qui n’était pas clairement défini) se fassent enregistrer en tant que « représentants étrangers », ce qui a contraint de nombreuses organisations à réduire leurs activités, voire à cesser de fonctionner en tant qu’ONG. De la même manière, pendant l’année, la Géorgie a adopté une Loi sur la transparence de l’influence étrangère, qui obligeait les organisations dont plus de 20 % du financement était d’origine étrangère à se déclarer comme agents sous influence étrangère et à se conformer à des obligations lourdes et intrusives.
En Azerbaïdjan, les ONG et la presse indépendantes étaient toujours en butte à des restrictions arbitraires. Elles se heurtaient notamment à l’impossibilité d’obtenir une reconnaissance officielle et à des obligations de déclaration extrêmement pesantes. Au Tadjikistan, où 700 organisations avaient déjà disparu ces dernières années, les autorités ont continué de fermer des ONG. En Russie, 55 nouvelles organisations, dont des mouvements en faveur des droits des populations autochtones, ont été arbitrairement classées « extrémistes » et 169 nouveaux noms sont venus s’ajouter à la liste des personnes et des organisations étiquetées « agents de l’étranger ».
Liberté de réunion pacifique
L’espace déjà extrêmement réduit consenti aux rassemblements pacifiques s’est encore rétréci sous l’effet de lois répressives et de l’emploi illégal de la force contre des manifestant·e·s. Venant s’ajouter à une répression de la liberté d’association, cette régression n’incitait guère à s’engager en faveur des droits humains – un effet dissuasif qui touchait entre autres les personnes susceptibles de constituer la prochaine génération de dirigeant·e·s.
En Géorgie, la police a non seulement frappé, blessé et appréhendé des centaines de manifestant·e·s, mais elle a également procédé à des perquisitions et à des arrestations de militant·e·s tant à leur domicile que sur leur lieu de travail.
En Russie, des centaines de personnes ont été arrêtées au lendemain de la mort en prison, aussi soudaine que suspecte, d’Alexeï Navalny. Des dizaines d’entre elles ont été sanctionnées administrativement par des amendes et des périodes de détention pour s’être publiquement recueillies en mémoire de cette figure de l’opposition. En Arménie, lors de la vague de contestation des mois d’avril et mai, la police a fait usage à plusieurs reprises d’une force illégale contre des manifestant·e·s qui demandaient la démission du Premier ministre, Nikol Pachinian. Au Kazakhstan, les dispositions juridiques relatives aux rassemblements autorisaient les pouvoirs publics à arrêter des manifestant·e·s longtemps après les faits reprochés.
Les États doivent abolir les lois qui font obstacle à l’exercice des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique et mettre un terme aux pratiques bafouant ces droits. Ils doivent cesser d’invoquer des prétextes pour écraser la dissidence et pour interdire tout débat sur leur bilan en matière de droits humains.
Liberté de religion et de conviction
La liberté de religion et de conviction a reculé dans l’ensemble de l’Europe de l’Est et de l’Asie centrale. L’Ukraine a adopté une loi interdisant « les organisations religieuses dépendant de centres d’influence » situés en Russie. Parallèlement, en Russie, des prêtres orthodoxes ayant exprimé leur opposition à la guerre ont été défroqués ou frappés d’autres sanctions disciplinaires et les autorités ont continué de jeter en prison des témoins de Jéhovah. Au Bélarus, des dignitaires religieux qui ne suivaient pas la ligne politique du gouvernement ont été harcelés ou arrêtés. Au Tadjikistan, la minorité pamirie était toujours victime d’une vaste répression l’empêchant d’exercer son droit de pratiquer sa religion et de préserver sa culture.
Les États doivent mettre en œuvre de véritables réformes juridiques et politiques afin de protéger, défendre et garantir pleinement la liberté de religion et de conviction, sans discrimination.
Torture et autres mauvais traitements
La torture et d’autres formes de mauvais traitements demeuraient endémiques, et les responsables de ces actes jouissaient d’une impunité presque totale.
Une commission d’enquête indépendante de l’ONU a accusé les autorités russes de mener une politique d’État coordonnée de torture de civil·e·s et de prisonniers·ères de guerre ukrainiens. Des rescapé·e·s ont notamment fait état de bastonnades, d’électrochocs, de violences sexuelles, du recours à la privation de sommeil et de simulacres d’exécution. Le Conseil de l’Europe a pris la décision exceptionnelle de dénoncer publiquement le refus de l’Azerbaïdjan de remédier au problème que posait depuis longtemps déjà l’usage fréquent par la police de la torture et d’autres mauvais traitements. Au Bélarus, cinq personnes emprisonnées pour des motifs à caractère politique sont mortes en 2024. D’autres dans le même cas ont été maintenues au secret pendant si longtemps que leur situation constituait de fait une disparition forcée. La plupart des 400 personnes arrêtées en Géorgie pendant les manifestations de novembre et décembre ont déclaré avoir été maltraitées. Des dizaines d’entre elles, qui souffraient de graves blessures, ont dû être hospitalisées, tandis que de nombreuses autres se sont vu refuser toute assistance médicale. Au Tadjikistan, l’état de santé de plusieurs personnes détenues s’est sérieusement dégradé, sans que celles-ci puissent bénéficier de soins médicaux adaptés. C’était notamment le cas de l’avocat et défenseur des droits fondamentaux de la minorité pamirie Manoutchehr Kholiknazarov, injustement emprisonné et que les autorités ont refusé de libérer, malgré les appels internationaux lancés en sa faveur. Au Kazakhstan, les responsabilités n’ont pas été établies pour les nombreux actes de torture que les forces de sécurité étaient accusées d’avoir commis lors de la répression des manifestations de janvier 2022.
Les États doivent agir de toute urgence pour mettre un terme à la torture et aux autres mauvais traitements, en traduisant en justice, dans le cadre de procès équitables, les personnes soupçonnées d’être pénalement responsables de telles pratiques.
Procès inéquitables
Parmi les rares bonnes nouvelles, au Kirghizistan, 22 personnes visées par des accusations motivées par des considérations politiques dans le cadre de l’affaire dite de Kempir-Abad ont été acquittées. Cependant, dans un nombre croissant de pays, le système judiciaire était instrumentalisé pour réprimer la dissidence. Le nombre de condamnations en l’absence des accusé·e·s a augmenté.
Au Bélarus, des opposant·e·s, des défenseur·e·s des droits humains et des avocat·e·s ont été condamnés à de lourdes peines d’emprisonnement. Ainsi, 20 analystes politiques et journalistes liés à la dirigeante de l’opposition Sviatlana Tsikhanouskaya ont été condamnés à des peines allant de 10 à 11 ans et demi d’emprisonnement, pour « crimes contre l’État » et « extrémisme ». En Russie, le nombre de condamnations pour trahison et espionnage a fortement augmenté. En Géorgie, les autorités ont instrumentalisé de manière éhontée le système judiciaire pour réprimer des manifestations hostiles au gouvernement et les tribunaux ont généralement fermé les yeux sur des éléments tendant à prouver que des actes de torture avaient été commis. Au Tadjikistan, des membres de certains groupes d’opposition arbitrairement interdits ont été emprisonnés et leurs avocat·e·s ont été victimes de représailles pour avoir voulu exercer leur métier.
Les autorités doivent garantir les droits à un procès équitable et s’abstenir d’utiliser le système judiciaire de façon abusive pour réprimer la dissidence.
Violences fondées sur le genre
La protection des victimes de violence domestique a été renforcée en Arménie et au Kazakhstan. Ailleurs, toutefois, les violences fondées sur le genre étaient en augmentation. Les autorités ukrainiennes ont signalé une hausse de 80 % des affaires de violence domestique par rapport à 2023. Au Kirghizistan, cette hausse était de 37 %. Au Turkménistan, suite à une modification législative, les tribunaux devaient désormais privilégier la réconciliation des conjoint·e·s dans les affaires de divorce, même en cas de violences conjugales.
Les pouvoirs publics doivent de toute urgence combattre toutes les formes de violences fondées sur le genre et s’attaquer à leurs causes profondes.
Droits des personnes LGBTI
Le respect des droits des personnes LGBTI s’est dégradé à mesure que montaient les discours prônant les « valeurs traditionnelles ».
La Géorgie a adopté une loi sur « les valeurs familiales et la protection des mineurs », qui comportait de nombreuses mesures homophobes et transphobes et qui était manifestement calquée en grande partie sur la législation russe relative à la « propagande gay ». Le Bélarus a mis à jour sa définition de la pornographie pour y inclure les « relations et/ou comportements sexuels non traditionnels ». Une pétition demandant que la « propagande LGBTI » soit érigée en infraction pénale au Kazakhstan a en revanche soulevé de vives protestations et les auditions relatives à cette proposition ont été repoussées.
Les relations sexuelles librement consenties entre hommes constituaient toujours une infraction en Ouzbékistan et au Turkménistan.
Les États doivent abolir les lois, politiques et pratiques discriminatoires à l’égard des personnes LGBTI et dépénaliser les relations sexuelles consenties entre personnes de même sexe.
Droits économiques et sociaux
Les enfants étaient de plus en plus fréquemment privés des conditions indispensables à un développement humain satisfaisant. Ainsi, selon l’UNICEF, 78 % des enfants tadjiks souffraient de pauvreté alimentaire (34 % de pauvreté alimentaire sévère). La moitié de la population du Kirghizistan ne pouvait pas satisfaire ses besoins nutritionnels élémentaires et les enfants étaient particulièrement touchés.
Le droit des enfants de bénéficier d’une éducation de qualité a été bafoué en Russie et dans les territoires ukrainiens occupés par celle-ci, dans la mesure où les programmes scolaires comportaient des cours d’endoctrinement faisant l’apologie de la guerre menée par le pouvoir russe contre l’Ukraine. Toujours en Russie, une nouvelle loi conditionnait l’inscription des enfants de parents migrants dans les établissements scolaires à la réussite d’un examen de langue russe et au fait d’être en situation régulière.
Les États doivent faire en sorte que chacun·e jouisse d’un niveau de vie suffisant et ait accès à une éducation de qualité.
Droits des personnes réfugiées ou migrantes
Le respect des droits des réfugié·e·s et des migrant·e·s a continué de régresser. La perspective d’un retour sûr et digne demeurait nulle pour les plus de 100 000 membres de la population arménienne du Haut-Karabakh réfugiés en Arménie. Au Kazakhstan, des militant·e·s de la République autonome du Karakalpakistan, région appartenant à l’Ouzbékistan, étaient menacés de renvoi forcé vers ce pays, où ils risquaient d’être torturés et condamnés à de lourdes peines d’emprisonnement. Les autorités du Bélarus ont cette année encore forcé des personnes réfugiées et migrantes à passer la frontière avec l’UE. Les pouvoirs publics russes ont tenu un discours hostile aux migrant·e·s et plusieurs régions du pays ont adopté des lois interdisant aux personnes migrantes d’exercer certaines professions.
Les États doivent veiller à ce que toutes les personnes fuyant des persécutions et des atteintes aux droits humains puissent se réfugier en lieu sûr et aient accès à une protection internationale. Ils doivent faire en sorte que nul ne soit renvoyé dans un pays ou un territoire où il court un risque bien réel de subir de graves violations des droits fondamentaux.
Droit à un environnement sain
Pays hôte de la COP29, l’Azerbaïdjan n’a fait progresser la cause de la justice climatique ni au niveau régional, ni au niveau mondial. De nombreux défenseur·e·s des droits humains et militant·e·s azerbaïdjanais n’ont pas été autorisés à participer à la réunion. Les autorités les ont persécutés avant et après la rencontre, instaurant un climat d’autocensure et une surveillance de tous les instants. La production de pétrole et de gaz a encore augmenté, la plupart des pays ne faisant preuve d’aucune volonté de lutter contre le changement climatique ou de réduire leur dépendance à l’égard des combustibles fossiles.
Aggravée par la combustion de carburants fossiles, la pollution atmosphérique a cette année encore eu des effets désastreux pour la santé. Selon une étude de la Banque mondiale, la pollution de l’air était responsable chaque année d’environ 3 000 décès prématurés à Tachkent, la capitale de l’Ouzbékistan.
En Arménie, en Azerbaïdjan et en Géorgie, des personnes qui dénonçaient les dommages causés par l’exploitation de ressources naturelles ont été réduites au silence par les autorités.
Les pays d’Europe de l’Est et d’Asie centrale qui émettent le plus de carbone doivent montrer la voie en matière d’atténuation du changement climatique, notamment en arrêtant de développer et de financer la production de combustibles fossiles. Les États doivent prendre des mesures immédiates pour protéger les populations contre les risques liés au changement climatique et aux conditions météorologiques extrêmes et contre leurs conséquences.
Europe de l’Ouest, centrale et du Sud-Est
La discrimination, le profilage, la stigmatisation et le harcèlement de personnes en fonction de leur identité (race, religion, genre, sexualité) sont autant de sujets qui ont été au cœur de la lutte pour la protection des droits humains et le respect des garanties en la matière. Une forte augmentation des crimes de haine a été signalée.
Des lois censées réprimer le terrorisme formulées en termes vagues et dont le champ était abusivement vaste ont été utilisées pour restreindre la liberté d’expression, d’association et de réunion. La police a fait usage d’une force injustifiée ou excessive contre des manifestant·e·s pacifiques, qui, pour certain·e·s, se sont retrouvés en détention pour des actes de désobéissance civile commis sans violence. Les autorités ont largement eu recours à des technologies de surveillance, qui ont eu un effet dissuasif.
Tout un arsenal de lois hostiles et répressives a été déployé pour décourager et sanctionner les personnes qui entendaient manifester leur solidarité avec les Palestiniens et les Palestiniennes ou dénoncer le génocide commis à Gaza par Israël. La volonté des gouvernements européens de respecter le droit international a été mise à l’épreuve et le résultat laissait à désirer, certains responsables politiques ayant pris des mesures destinées à éviter que l’État d’Israël ait à rendre des comptes. Plusieurs pays ont continué à livrer des armes et des pièces détachées à Israël, contre l’avis de la Cour internationale de justice et d’expert·e·s de l’ONU, qui ont appelé à cesser tous les transferts d’armes à destination de ce pays.
Le contrôle des frontières primait un peu partout sur le respect des droits des réfugié·e·s et des migrant·e·s. La torture et, plus généralement, les mauvais traitements, en particulier sur des personnes migrantes ou en situation de handicap, constituaient toujours un problème inquiétant. Le parcours des personnes souhaitant bénéficier d’une procédure d’affirmation de genre restait semé d’embûches. Les violences fondées sur le genre demeuraient courantes. Il était de plus en plus difficile pour la population de se loger et de bénéficier de la sécurité sociale et de soins de santé. Plusieurs catastrophes aggravées par le changement climatique ont fait d’importants dégâts, en particulier dans le sud de l’Europe.
Discrimination
La discrimination constituait toujours un motif de préoccupation. Les femmes, les personnes noires, arabes ou roms et les autres populations racisées, ainsi que les personnes à faibles revenus, étaient victimes de discriminations directes, avec des conséquences pour leur accès à une protection sociale, à la représentation politique, à l’emploi et à l’éducation. Les actes criminels islamophobes ou hostiles aux immigré·e·s se sont multipliés au lendemain de plusieurs attaques au couteau perpétrées en Allemagne et au Royaume-Uni. La France, comme d’autres pays, a connu une augmentation des infractions à caractère antisémite, islamophobe ou raciste. Au Portugal, la plupart des enquêtes pour crime de haine ont été abandonnées.
La Norvège et la Suisse ont appliqué des méthodes de profilage ethnique discriminatoires. Au Danemark, aux Pays-Bas et en Suède, l’automatisation des systèmes de protection sociale s’est traduite par des pratiques discriminatoires à l’égard des femmes et des personnes racisées ou ayant des revenus modestes. La France a imposé des mesures discriminatoires d’interdiction du port du foulard dans le sport, notamment pendant les Jeux olympiques et paralympiques de Paris.
Le mariage entre personnes de même sexe a été légalisé en Grèce et en République tchèque. Au Royaume-Uni, l’interdiction des thérapies de conversion était en cours d’examen. Toutefois, les personnes LGBTI rencontraient toujours de sérieux problèmes. La reconnaissance du genre à l’état civil restait difficile en Bulgarie et en Serbie et se trouvait dans une impasse en Macédoine du Nord. En Pologne et en Slovaquie, les violences et la discrimination restaient courantes. La Pologne ne disposait d’aucune loi réprimant spécifiquement les crimes de haine. La Turquie a quant à elle de nouveau interdit en toute illégalité des marches des fiertés LGBTI.
Malgré l’existence dans certains pays de programmes locaux d’intégration des Roms, ce groupe était toujours victime de discrimination, de ségrégation et d’exclusion sociale. L’Italie a violé la Charte sociale européenne concernant le droit des Roms au logement. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels [ONU] a dénoncé le racisme structurel dont étaient victimes les Roms en Irlande et en Serbie. La ségrégation des enfants roms pratiquée par la Slovaquie a donné lieu à une plainte de la Commission européenne. Des pratiques similaires continuaient d’avoir cours en Bosnie-Herzégovine, en Bulgarie et en Macédoine du Nord. Les Roms de Croatie et les Roms ukrainiens réfugiés en Roumanie avaient beaucoup de mal à accéder aux services les plus élémentaires.
Les États doivent prendre des mesures sérieuses pour mettre fin à la discrimination systémique dont sont notamment victimes les personnes juives, musulmanes, noires, roms ou LGBTI, ainsi que les migrant·e·s.
Liberté d’expression et de réunion pacifique
Plusieurs pays ont adopté des mesures restreignant la liberté d’expression des personnes qui souhaitaient manifester leur solidarité avec les Palestiniens et les Palestiniennes ou dénoncer le génocide perpétré à Gaza par Israël. L’Allemagne a fait de l’utilisation du slogan « du fleuve jusqu’à la mer » une infraction au Code pénal et des condamnations ont été prononcées à ce titre. Le gouvernement britannique a limité la liberté d’expression à propos de la Palestine, tandis que de nombreuses enquêtes ont été ouvertes pour « glorification du terrorisme » en Espagne et pour « apologie du terrorisme » en France.
L’Espagne a fait un pas en avant en adoptant un Plan d’action pour la démocratie, destiné notamment à réformer la législation restreignant la liberté d’expression. À l’inverse, des procès-bâillons ont eu lieu en Bulgarie et en Serbie, un nouvel organisme chargé de réprimer l’action de la société civile a été mis en place en Hongrie et des personnes qui s’opposaient pacifiquement au pouvoir en Turquie ont cette année encore fait l’objet de poursuites judiciaires.
Le droit de réunion pacifique a fait l’objet de graves attaques, les États stigmatisant et criminalisant de plus en plus les manifestant·e·s non violents, imposant des restrictions injustifiées et punitives et recourant à des moyens de plus en plus répressifs pour étouffer la dissidence. Les personnes qui protestaient contre le génocide du peuple palestinien perpétré par Israël, ainsi que celles qui manifestaient contre l’inaction des gouvernements face au changement climatique, ont été particulièrement prises pour cible.
Quelques avancées positives ont toutefois été enregistrées, comme la reconnaissance du caractère illégal des pouvoirs élargis accordés à la police britannique ou l’acquittement de huit militant·e·s par un tribunal italien, qui a reconnu la légitimité de leur combat contre le changement climatique. Plusieurs États ont malgré tout continué de s’en prendre aux manifestations propalestiniennes ou ayant trait au climat. La France a imposé des restrictions abusives à ces mouvements de contestation et, en Allemagne, en Finlande et en Italie, des cas de recours injustifié ou excessif à la force contre des manifestant·e·s ont été signalés. La Turquie a interdit les manifestations de manière générale. Aux Pays-Bas, des drones et des technologies de reconnaissance faciale ont été utilisés contre des manifestant·e·s pacifiques. En Grèce, en Serbie et en Turquie, la police a fait usage d’une force excessive et/ou procédé à des arrestations arbitraires pendant certaines manifestations.
L’espace au sein duquel chacun et chacune peut exercer ses droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique doit être protégé des mesures abusives prises par les États, quel qu’en soit le prétexte.
Transferts d’armes irresponsables
Plusieurs pays européens ont participé à des transferts d’armes irresponsables. L’Allemagne, la France et la République tchèque ont notamment continué d’exporter des armes vers l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et Israël. En revanche, la société civile du Danemark et du Monténégro s’est élevée contre certains transferts d’armes, les Pays-Bas ont suspendu l’exportation vers Israël de pièces de l’avion de combat F-35 pour des raisons juridiques, et la Belgique et l’Espagne ont suivi les avis d’expert·e·s de l’ONU et de la Cour internationale de justice en suspendant leurs exportations d’armes à destination d’Israël.
Les États doivent arrêter tous les transferts d’armes vers des pays où il existe un risque important que celles-ci soient utilisées pour commettre ou faciliter des atteintes graves aux droits humains.
Droit à la vérité, à la justice et à des réparations
Toujours aux prises avec son histoire coloniale, l’Europe a fait des efforts en vue d’établir la justice et d’offrir réparation pour les crimes de génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité. Un certain nombre de pays ont signé la Convention de Ljubljana-La Haye (2023), qui visait à faire davantage respecter le principe d’obligation de rendre des comptes pour ces crimes. Un tribunal belge a reconnu la responsabilité de l’État pour des crimes contre l’humanité commis au Congo sous le régime colonial et l’a condamné à des réparations.
Des responsables politiques en Bosnie-Herzégovine ont en revanche continué de nier publiquement qu’un génocide ait été commis et de glorifier des criminel·le·s de guerre. La Serbie n’a quant à elle pris aucune mesure crédible pour que tous les responsables de crimes sanctionnés par le droit international aient à rendre compte de leurs actes. Elle a au contraire cherché à édulcorer une résolution de l’ONU concernant le génocide de Srebrenica. En Croatie, la plupart des victimes de violences sexuelles commises en temps de guerre ne bénéficiaient toujours pas du statut donnant droit à certaines prestations sociales. Au Royaume-Uni, la Loi sur les troubles en Irlande du Nord, contestée devant les tribunaux, a été déclarée incompatible avec la Convention européenne des droits de l’homme.
Dans plusieurs pays européens, un certain nombre de responsables gouvernementaux ont soit ouvertement déclaré, soit laissé entendre qu’ils n’appliqueraient pas les mandats d’arrêt décernés par la CPI contre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, et l’ancien ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant.
Toutes les allégations de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide doivent faire l’objet d’enquêtes impartiales et indépendantes, notamment en vertu du principe de la compétence universelle.
Droits des personnes réfugiées ou migrantes
Ni les pays européens ni l’UE n’ont adopté de politique ou d’initiatives destinées à faire passer la vie des réfugié·e·s et des migrant·e·s avant la protection des frontières. Ils n’ont pas non plus pris de mesures crédibles pour que les responsables de violations des droits humains rendent des comptes, pour réduire leur dépendance à l’égard de pays tiers en matière de gestion des migrations ou pour développer des voies permettant de venir en Europe de manière légale et en toute sécurité. L’Italie a essayé de placer en détention en Albanie des demandeurs d’asile secourus en mer, afin que leur demande soit examinée hors de son propre territoire. L’UE a poursuivi sa coopération avec la Tunisie et l’Égypte, malgré les atteintes aux droits humains manifestement perpétrées dans ces deux pays. De nouvelles violences aux frontières ont été signalées, ainsi que des renvois illégaux de personnes depuis la Grèce vers la Turquie, depuis Chypre vers le Liban et depuis la Turquie vers la Syrie, l’Afghanistan et l’Érythrée.
Des ONG et des défenseur·e·s des droits humains ont cette année encore été la cible de mesures visant à criminaliser leur action. En Grèce, les personnes qui apportaient une assistance aux réfugié·e·s et aux migrant·e·s étaient régulièrement poursuivies en justice. Trois procédures spéciales des Nations unies ont exprimé leur préoccupation quant aux restrictions imposées par l’Italie aux activités des défenseur·e·s des droits humains qui sauvaient des vies en mer.
Le respect des droits des réfugié·e·s et des migrant·e·s a régressé dans les pays d’accueil. En Hongrie, les réfugié·e·s ukrainiens ne bénéficiaient plus du soutien de l’État pour se loger, tandis qu’en Belgique et en Irlande des milliers de demandeurs et demandeuses d’asile se sont retrouvés privés d’hébergement.
Les États doivent veiller à ce que toutes les personnes fuyant des persécutions et des atteintes aux droits humains puissent se réfugier en lieu sûr et aient accès à une protection internationale. Ils doivent faire en sorte que nul ne soit renvoyé dans un pays ou un territoire où il court un risque bien réel de subir de graves violations des droits fondamentaux.
Torture et autres mauvais traitements
La torture et les autres formes de mauvais traitements dont étaient victimes des migrant·e·s et des personnes en situation de handicap constituaient toujours un motif de préoccupation. Parmi les mesures positives adoptées cette année, citons la mise en place par la Belgique d’un mécanisme fédéral de prévention et l’annulation par la Hongrie de l’interdiction des contacts physiques entre les détenu·e·s et les personnes qui leur rendaient visite. La Roumanie a quant à elle adopté un plan d’action sur cinq ans destiné à lutter contre les mauvais traitements dans les institutions. Les problèmes de surpopulation et de manque de soins adaptés persistaient néanmoins, dans les prisons albanaises et italiennes par exemple, et des actes de torture auraient été commis en Bulgarie et en Macédoine du Nord.
Les États doivent agir de toute urgence pour mettre fin à la torture et aux autres mauvais traitements et traduire en justice les auteur·e·s présumés de tels actes.
Violences fondées sur le genre
Plusieurs pays ont adopté des mesures législatives destinées à en finir avec l’impunité en matière de violences sexuelles. Les Pays-Bas, la Pologne et la République tchèque ont mis en place une définition du viol s’appuyant sur la notion de consentement. La Croatie a quant à elle fait du féminicide une infraction pénale à part entière.
Les violences fondées sur le genre demeuraient toutefois courantes. La Roumanie a enregistré une augmentation du nombre de cas de violence domestique signalés par rapport aux années précédentes. Le nombre de femmes tuées par leur partenaire restait toujours aussi élevé, notamment en Allemagne, en Bulgarie, en Croatie, en Espagne, en Grèce, en Italie, au Monténégro, au Portugal et en Turquie. Les femmes migrantes, les travailleuses du sexe et les femmes transgenres se heurtaient systématiquement à des obstacles lorsqu’elles tentaient de porter plainte pour des violences sexuelles. En France, les autorités refusaient parfois d’enregistrer leur plainte ou les menaçaient d’expulsion.
Les États doivent mettre un terme à l’impunité pour les violences fondées sur le genre.
Droits sexuels et reproductifs
Certains pays ont pris des mesures destinées à faciliter l’accès à l’avortement. La France est devenue le premier pays au monde à faire de l’avortement une liberté garantie par la Constitution. Plusieurs autres pays ont soutenu des initiatives visant à protéger les personnes enceintes du harcèlement devant les établissements pratiquant l’interruption de grossesse.
L’avortement demeurait néanmoins difficile d’accès dans de nombreux pays, voire constituait toujours une infraction pénale. Andorre interdisait totalement l’interruption volontaire de grossesse, tandis qu’en Pologne les conditions dans lesquelles cette intervention était autorisée étaient extrêmement limitées. À Malte, l’avortement n’était légalement possible que lorsque la vie de la personne enceinte était en danger. En Angleterre et au Pays de Galles, le nombre d’enquêtes et de poursuites visant des femmes accusées d’avoir avorté en dehors du cadre légal a augmenté.
Le refus de prodiguer des soins liés à l’avortement pour des raisons de conscience ou de religion restait un problème préoccupant, notamment en Croatie, en Italie et au Portugal. Il était particulièrement difficile d’interrompre une grossesse dans les zones rurales et économiquement défavorisées de pays comme la Croatie ou la Slovénie.
Les États doivent garantir l’accès à des services complets de santé sexuelle et reproductive, y compris à un avortement sécurisé.
Droits économiques et sociaux
L’accès à la sécurité sociale restait difficile pour beaucoup. En Autriche, les personnes en situation de handicap et les femmes se heurtaient à une certaine stigmatisation, à des obstacles administratifs et à des dispositions juridiques restrictives. En Finlande, les coupes considérables effectuées dans le budget de la sécurité sociale exposaient les personnes dont les revenus étaient déjà faibles au risque de ne plus pouvoir jouir de leur droit à un niveau de vie suffisant. Au Royaume-Uni, l’allocation de base de la sécurité sociale était inférieure au coût des produits courants de première nécessité.
En Espagne et en Italie, le droit à la santé était fragilisé par le manque d’investissements publics dans les infrastructures médicales. En Grèce, des soignant·e·s et des spécialistes de la santé ont cette année encore dénoncé de sérieux dysfonctionnements dans le système national de santé.
Au Royaume-Uni, 4,3 millions d’enfants vivaient dans la pauvreté, un phénomène qui touchait plus particulièrement les enfants et adolescent·e·s noirs ou issus d’autres minorités ethniques. En Italie, 10 % de la population vivait dans une pauvreté absolue.
L’accès au logement restait un problème majeur. En Pologne, la pénurie de logements à un prix accessible avait pour conséquence qu’un grand nombre de personnes vivaient dans des conditions insalubres. En Andorre, des expulsions ont eu lieu en hiver et l’Irlande a enregistré un nombre record de personnes sans abri.
Les États doivent agir sans attendre pour garantir les droits économiques et sociaux de tous et toutes, sans discrimination, notamment en y consacrant les moyens nécessaires et en offrant une protection sociale universelle et complète.
Droit à un environnement sain
Plusieurs pays ont été confrontés à des catastrophes (inondations, feux de forêt, canicules) aggravées par le changement climatique dû aux activités humaines. L’Espagne a connu au mois d’octobre des pluies torrentielles, qui ont provoqué une soudaine montée des eaux et entraîné la mort de 224 personnes. Des températures record attribuées au changement climatique ont provoqué plusieurs décès en Grèce et au Portugal.
Des plafonds d’émissions plus exigeants ont été adoptés en Slovénie. La Croatie prévoyait d’atteindre 75 % d’électricité produite par des énergies renouvelables à l’horizon 2030 et ces énergies étaient en expansion en Hongrie. Au Monténégro, un permis d’exploitation minière a été annulé pour des raisons écologiques. Pourtant, malgré ces avancées, de nombreux pays européens étaient en retard en matière de politique climatique. Dans un jugement qui fera date, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que la Suisse, en raison des carences de sa politique climatique, avait violé le droit à une protection efficace contre les graves effets du changement climatique. Les programmes climatiques de l’Allemagne ont été déclarés insuffisants par la justice, et la politique de la Turquie en la matière a été qualifiée d’extrêmement insuffisante. Les Pays-Bas ont revu à la baisse leur politique climatique, la Norvège a poursuivi ses opérations de prospection de nouveaux gisements de combustibles fossiles, la Grèce a renforcé ses infrastructures gazières et la Belgique a subventionné les énergies fossiles à hauteur de 15,5 milliards d’euros. Lors de la COP29, les pays européens ont fait front pour empêcher la signature d’un accord sur un objectif de financement climatique suffisamment revu à la hausse.
Les États doivent renoncer progressivement mais rapidement à l’utilisation et à la production de combustibles fossiles, dans le cadre d’une transition juste, et mettre un terme à tout financement des combustibles fossiles. Ils doivent en outre augmenter de toute urgence le financement climatique et fournir aux pays à faibles revenus des fonds dédiés supplémentaires destinés à compenser les pertes et préjudices.
Droit au respect de la vie privée
Bien que le Monténégro ait suspendu le recours à des logiciels de reconnaissance faciale et qu’un tribunal français ait estimé que les systèmes d’audiosurveillance assistés par intelligence artificielle étaient manifestement illégaux, l’utilisation en dehors de toute légalité de logiciels et de technologies de reconnaissance faciale constituait toujours un phénomène préoccupant. Les autorités serbes ont utilisé diverses techniques invasives relevant de la criminalistique numérique pour surveiller des militant·e·s et des journalistes indépendants. En Allemagne, la police avait recours à la technologie de la reconnaissance faciale sans qu’un cadre juridique suffisant ait été mis en place. La Cour européenne des droits de l’homme a estimé que la Pologne avait porté atteinte au droit à la vie privée en se livrant à une « surveillance secrète » grâce au logiciel Pegasus. En Hongrie, un tribunal a jugé que l’autorité nationale censée veiller à la protection des données n’avait pas enquêté comme elle l’aurait dû dans le cadre d’une affaire concernant quatre personnes victimes de Pegasus.
Les États doivent arrêter le glissement en cours vers des sociétés de la surveillance.