Cameroun. Les membres de la société civile détenus arbitrairement à Garoua doivent être immédiatement libérés

Les autorités camerounaises doivent immédiatement libérer trois sympathisants de l’association Pouvoir au Peuple Camerounais (PPC) et leurs proches, arrêtés et détenus arbitrairement depuis deux semaines, et mettre un terme aux arrestations et détentions arbitraires dans le pays, a déclaré Amnesty International aujourd’hui.

Le 9 septembre, trois sympathisants du PPC, Moustapha Tizi, Mohamadou Ballo et Ibrahim Oumarou, auraient été arrêtés pour avoir porté des t-shirts portant le nom de l’organisation dans la ville de Figuil, située dans le département du Mayo-Louti dans la région du Nord. Hapsatou Issa, la sœur d’un porte-parole du PPC, a également été arrêtée le même jour. Le PPC, une organisation de jeunes fondée en août 2024, appelle à un changement de régime.

« À un an de l’élection présidentielle à laquelle le président Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, envisage de se présenter, les arrestations arbitraires et les détentions de personnes perçues comme critiques à l’égard du régime se multiplient. La visite au Cameroun, début août, du Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, qui a évoqué de ‘vives préoccupations concernant les restrictions à la liberté d’expression et d’association, et le droit à la réunion pacifique’, n’a pas infléchi cette tendance », a déclaré Fabien Offner, chercheur au bureau régional d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale.

Des proches de sympathisants du PPC également arrêtés

Moustapha Tizi, Mohamadou Ballo, Ibrahim Oumarou et Hapsatou Issa ont été transférés à Garoua le 13 septembre. Selon les informations recueillies par Amnesty International, Hapsatou Issa est actuellement détenue à la légion de gendarmerie de la région du Nord, Moustapha Tizi et Mohamadou Ballo à la brigade de recherche de gendarmerie de Garoua 1, et Ibrahim Oumarou à la police judiciaire de Garoua.

Hapsatou Issa a été arrêtée dans la nuit du 9 au 10 septembre à son domicile. Selon sa famille, on lui a dit qu’elle avait été arrêtée parce qu’elle est la sœur d’un porte-parole du PPC actuellement en fuite après avoir reçu des menaces. Le fils d’Hapsatou Issa, venu rendre visite à sa mère détenue pour lui apporter de la nourriture, a également été arrêté et est détenu depuis lors à la brigade de recherche de gendarmerie de Garoua 1.

Les autorités doivent mettre fin à la répression croissante des droits humains.

Fabien Offner, chercheur au bureau régional d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale

« Ces dernières années, quiconque ose critiquer les autorités, qu’il s’agisse d’un défenseur des droits humains, d’un journaliste, d’un militant de la cause anglophone ou d’un manifestant, court le risque d’être arrêté et détenu arbitrairement, torturé et jugé par des tribunaux militaires, en violation des obligations internationales du pays en matière de droits humains. Malheureusement, cette tendance risque de s’accentuer à l’approche de l’élection présidentielle », a déclaré Fabien Offner.

« Les autorités doivent mettre fin à la répression croissante des droits humains, garantir les droits humains de chacun et respecter les obligations internationales du pays en matière de droits humains, notamment au titre de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auxquels le Cameroun est partie. »

Deux activistes arrêtés au cours des derniers mois 

L’activiste camerounais Yves Kibouy Bershu, connu sous le nom de Ramon Cotta, est également détenu arbitrairement depuis son arrestation le 19 juillet 2024 au Gabon, où il vivait. Il a été transféré au Cameroun le 23 juillet sans procédure légale ou diplomatique connue, selon ses avocats. Il est détenu à Yaoundé au Service Central de Recherches Judiciaires du Secrétariat d’État à la Défense. Il n’a pu rencontrer ses avocats qu’un mois après son arrestation. Selon eux, il est inculpé d’acte de terrorisme, insurrection, financement du terrorisme, trafic d’armes et outrage au chef de l’État et aux membres du gouvernement. Les vidéos de Ramon Cotta diffusées sur les réseaux sociaux et consultées par Amnesty International se limitaient principalement à des critiques envers les autorités camerounaises et l’ambassade du Cameroun au Gabon.

Selon ses avocats, Ramon Cotta est susceptible d’avoir été soumis à des tortures et à d’autres mauvais traitements ayant entraîné une paralysie partielle, et d’avoir rencontré des difficultés d’accès aux soins de santé. Cela constituerait une violation des Règles Nelson Mandela pour le traitement des détenus.

Junior Ngombe, coiffeur et activiste de 23 ans, a été détenu arbitrairement du 24 au 31 juillet après avoir dénoncé l’arrestation de Ramon Cotta dans une vidéo visionnée plus de 218 000 fois sur TikTok.