Malaisie. Le prochain gouvernement doit faire progresser les droits humains

Alors que la Malaisie a été secouée par de fortes turbulences politiques et un déclin de la situation des droits humains, le prochain gouvernement doit faire du respect et de la protection des droits une priorité, a déclaré Amnesty International à la veille des élections nationales prévues les 19 et 20 novembre.

« Les autorités malaisiennes doivent veiller au plein respect des droits humains avant, pendant et après les prochaines élections. Les droits font l’objet d’une offensive renouvelée, les manifestations pacifiques et la liberté d’expression en ligne étant soumises à des restrictions accrues », a déclaré Rachel Chhoa-Howard, chercheuse sur l’Asie du Sud-Est à Amnesty International.

En 2022, la police a enquêté sur les organisateurs de rassemblements publics et porté plainte contre ceux qui expriment des opinions sur la royauté, la race ou la religion, ou se montrent critiques à l’égard des autorités.

« Le prochain gouvernement doit cesser d’utiliser des lois répressives qui ont un effet paralysant et limitent le droit des Malaisien·ne·s de s’exprimer librement en ligne comme hors ligne », a déclaré Rachel Chhoa-Howard.

Le prochain gouvernement doit cesser d’utiliser des lois répressives qui ont un effet paralysant et limitent le droit des Malaisien·ne·s de s’exprimer librement en ligne comme hors ligne

Rachel Chhoa-Howard, chercheuse sur l’Asie du Sud-Est à Amnesty International

Amnesty International a publié un Programme des droits humains qui met en avant huit questions prioritaires que les élus au sein du nouveau gouvernement devront prendre en main.

Outre les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique, ces questions englobent une meilleure protection des personnes réfugiées et migrantes, des enquêtes efficaces et transparentes sur les morts en garde à vue et l’abolition de la peine de mort.

À la veille des élections, il est à noter que le gouvernement a promis d’abolir la peine de mort impérativement prévue par la loi. Bien que des projets de loi aient été déposés au Parlement, les élections ont été déclenchées avant que les amendements puissent être adoptés.

« Le prochain gouvernement doit saisir l’occasion historique d’abolir la peine de mort impérativement prévue par la loi à titre de première étape vers l’abolition totale et présenter des amendements dès qu’il sera élu.

« Ces amendements devront prévoir des peines de substitution conformes aux normes internationales relatives aux droits humains. Parallèlement, il faut engager une révision judiciaire individuelle de chacun des plus de 1 300 cas de condamnation à mort existants. Le moratoire sur les exécutions doit être maintenu, en attendant l’abolition totale. »

La politique inhumaine et les mesures punitives du gouvernement à l’égard des personnes réfugiées et migrantes ont suscité un nouveau tollé, notamment l’expulsion de plus de 2 000 personnes vers le Myanmar en collaboration avec l’armée de ce pays. En parallèle, les autorités malaisiennes maintiennent en détention pour une durée indéterminée des milliers de personnes, dont des réfugié·e·s et des demandeurs·euses d’asile.

« Le nouveau gouvernement doit mettre un terme à toutes les expulsions forcées vers le Myanmar et veiller à ce que les personnes concernées aient la possibilité de déposer une demande d’asile, a déclaré Rachel Chhoa-Howard.

« Le nouveau gouvernement et les nouveaux leaders de la Malaisie doivent adopter une politique cohérente sur le Myanmar, au lieu de se contenter de critiquer l’armée tout en expulsant tranquillement des gens vers un pays qui incarcère régulièrement des milliers de personnes et torture les dissident·e·s. »

Le nouveau gouvernement et les nouveaux leaders de la Malaisie doivent adopter une politique cohérente sur le Myanmar, au lieu de se contenter de critiquer l’armée tout en expulsant tranquillement des gens vers un pays qui incarcère régulièrement des milliers de personnes et torture les dissident·e·s

Rachel Chhoa-Howard, chercheuse sur l’Asie du Sud-Est à Amnesty International

Par ailleurs, Amnesty International engage les autorités à permettre au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) de se rendre sans délai dans les centres de détention. Les personnes qui souhaitent déposer une demande d’asile doivent être libérées et le gouvernement doit collaborer avec le HCR pour mettre fin au système de détention illimitée.

« Sous le prochain gouvernement, le respect des droits des minorités, notamment des personnes migrantes, réfugiées, LGBTI et des peuples autochtones, ne doit pas être la cible d’attaques incessantes, mais faire l’objet d’une attention toute particulière.

« Nous espérons que les nouveaux dirigeant·e·s du pays profiteront de l’occasion pour remettre à plat l’approche actuelle et faire en sorte que tous en Malaisie puissent exercer librement leurs droits fondamentaux. Après une période de négligence, les droits humains doivent figurer au premier rang des priorités du gouvernement. »

Complément d’information

Les élections nationales en Malaisie auront lieu le 19 novembre 2022 et porteront sur 222 sièges parlementaires. Le pays a connu des turbulences politiques considérables depuis deux ans et demie, après l’effondrement de la coalition Pakatan Harapan et les luttes intestines au sein des gouvernements de transition.

Pour les pays du monde entier, Amnesty International publie régulièrement un Programme des droits humains à l’intention des candidats aux élections, afin de mettre en avant les questions qu’elle estime devoir figurer en tête des priorités des dirigeants s’ils sont élus. Elle avait déjà publié un Programme des droits humains pour les candidats aux élections de 2018.