Arabie saoudite. L’octroi de grâces ne doit pas s’accompagner de conditions visant à museler les militants

Le décret royal adopté jeudi 29 janvier dans la soirée, qui propose d’accorder une grâce aux prisonniers saoudiens déclarés coupables d’infractions en relation avec les « droits publics », ne sera une avancée dans la bonne direction que si leur libération n’est pas assortie de conditions, a déclaré Amnesty International. L’annonce de ces grâces imminentes s’inscrit dans la série de décrets pris par le nouveau monarque saoudien, le roi Salman, jeudi 29 janvier. « Il est encourageant que les autorités saoudiennes envisagent de libérer des prisonniers politiques dans le cadre de réformes engagées sous le nouveau gouvernement. Cependant, toute libération imposant des conditions sur l’exercice pacifique des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion serait un affront à ces militants qui n’auraient pour commencer jamais dû être emprisonnés », a déclaré Philip Luther, le directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.   Le décret royal de jeudi 29 faisait référence à un communiqué officiel diffusé deux jours plus tôt, précisant qu’il appartiendrait au ministre de l’Intérieur de déterminer l’ampleur et les conditions de la grâce. « Cela revient à confier la garde d’un poulailler à un renard, le ministère de l’Intérieur étant la principale autorité impliquée dans les opérations qui ont visé à faire taire les militants et à les emprisonner », a déclaré Philip Luther. Les autorités saoudiennes ont par le passé proposé d’abandonner les charges retenues contre des militants si ceux-ci présentaient des excuses pour les faits qui leur étaient reprochés et mettaient un terme à leurs activités pourtant légitimes. Cela signifie que les militants en question ont généralement dû cesser leur action et renoncer à leur droit à la liberté d’expression. Amnesty International a appris que des représentants de l’État ont approché des prisonniers d’opinion au cours de la semaine précédant l’annonce afin de leur demander officieusement leur avis au sujet de ces potentielles grâces conditionnelles. « Il serait scandaleux que cette grâce royale soit assortie de la condition que les militants présentent des excuses et signent des déclarations selon lesquelles ils s’engagent à ne pas répéter leurs “infractions”. Les prisonniers d’opinion doivent être libérés immédiatement et sans condition. Une grâce inconditionnelle serait une première étape, mais elle doit être suivie de l’annulation de leur condamnation et de leur déclaration de culpabilité, car ils n’ont rien fait de mal », a déclaré Philip Luther.   Amnesty International a nommé plus de 12 prisonniers d’opinion qui se trouvent derrière les barreaux en Arabie saoudite en raison de leur militantisme pacifique. Ces personnes incluent Raif Badawi, Waleed Abu al Khair, Sheikh Suliaman al Rashudi, Abdullah al Hamid, Mohammed al Qahtani, Abdulaziz al Khodr, Mohammed al Bajadi, Fowzan al Harbi, Abdulrahman al Hamid, Saleh al Ashwan, Omar al Said, Fadhel al Manasif, Loujain al Hathloul et Maysaa al Amoudi.