États-Unis : adoption d’une loi historique portant sur la violence sexuelle contre les femmes autochtones

Amnesty International a accueilli avec satisfaction l’adoption par les États-Unis d’une loi sans précédent, qui traite des taux inquiétants d’actes de violence sexuelle commis en toute impunité contre des Amérindiennes et des femmes autochtones de l’Alaska. La Loi tribale sur le maintien de l’ordre, qui a été adoptée par la Chambre des Représentants mercredi 20 juillet, vise à faire face aux problèmes de sécurité publique dans les territoires autochtones.Amnesty International estime que cette loi va renforcer le système de justice pénale en améliorant la coordination et la communication entre les organes fédéraux, étatiques, locaux et tribaux chargés du maintien de l’ordre. « Cette loi historique soutenue par les deux principaux partis aborde des atteintes aux droits humains longtemps négligées qui ont lieu sur les terres indiennes. Il s’agit d’une mesure décisive en vue de lutter contre les principales difficultés qui permettent la multiplication des crimes contre des personnes amérindiennes et autochtones d’Alaska, a déclaré Larry Cox, directeur exécutif de la section américaine d’Amnesty International.« Si elle est correctement appliquée, elle ouvrira la voie au gouvernement américain pour s’attaquer à l’érosion de l’autorité tribale. Avec le temps, elle diminuera les niveaux élevés de viol et fournira enfin un recours efficace aux femmes autochtones qui sont agressées sexuellement. En bref, cette loi devrait réduire l’impunité qui permet aux violeurs de faire des femmes autochtones leurs proies, comme des vautours. »En 2007, Amnesty International États-Unis a abordé cette question dans son rapport intitulé Le labyrinthe de l’injustice : les femmes autochtones sans protection face aux violences sexuelles. Ce document mettait en évidence le nombre disproportionné de viols et d’autres violences sexuelles touchant des femmes amérindiennes ou autochtones de l’Alaska : 2,5 fois plus que chez les femmes non autochtones aux États-Unis.Le labyrinthe complexe des juridictions tribales, étatiques et fédérales permet souvent aux auteurs présumés de ces actes, dont 86 % ne sont pas autochtones, de violer en toute impunité.Dans ce dédale, les autorités doivent établir si le crime a eu lieu sur des terres tribales et si l’auteur présumé était autochtone ou non afin de déterminer quel organe chargé du maintien de l’ordre public est compétent, ce qui leur fait perdre un temps précieux. Il en résulte des enquêtes insuffisantes, voire une absence totale de suite donnée au signalement des faits. « Il est encourageant de voir le Congrès commencer à aborder certaines des questions compliquées de compétence qui se posent sur les terres indiennes, a souligné Sarah Deer, maître assistante à la faculté de droit William Mitchell et consultante auprès d’Amnesty International pour ce rapport. « À cause de l’érosion de l’autorité tribale, les criminels autochtones qui sont jugés par un tribunal tribal ne peuvent être condamnés qu’à un an d’emprisonnement par crime, tandis que les non-autochtones ne peuvent pas être poursuivis du tout. Cette nouvelle loi pose les bases pour donner aux autorités tribales les moyens d’agir plus directement dans les affaires de crime violent.« Quand les victimes savent que leur agresseur sera tenu pour responsable de ses actes, elles sont plus susceptibles de signaler les faits. Il est essentiel de permettre aux membres de la police tribale de protéger leur communauté. » Dans les établissements du Service de santé des Indiens (IHS), le manque d’infirmiers et d’infirmières spécialisés dans les examens consécutifs aux agressions sexuelles, qui procèdent aux examens médicolégaux et recueillent des éléments cruciaux, est également un facteur contribuant à l’absence de poursuites. Ce rapport faisait part des préoccupations d’Amnesty International concernant la rareté des poursuites et le besoin d’informations précises sur les taux de procédures engagées.« À l’heure actuelle, au sein du Service de santé des Indiens, il n’existe aucun protocole normalisé pour les agressions sexuelles, si bien qu’il arrive que des victimes de crimes sexuellement violents ne se voient pas remettre le kit de prélèvement destiné aux cas de viol qui permet de recueillir des preuves cruciales pour poursuivre les auteurs présumés », a ajouté Charon Asetoyer, présidente du conseil consultatif autochtone d’Amnesty International États-Unis.