Dans le quartier de Vindoulou, dans la périphérie de Pointe-Noire, les habitant·e·s tirent depuis longtemps la sonnette d’alarme concernant une usine appartenant à Metssa Congo, filiale du groupe indien Metssa. Cette usine, qui recycle des batteries usagées et des produits industriels contenant du plomb et de l’aluminium, émet chaque jour des fumées dans l’air à proximité des habitations. L’usine est située au milieu du quartier, à 50 mètres à peine d’une école. Les habitant·e·s s’inquiètent pour leur santé : ils n’ont cessé de signaler des maux de tête et de ventre fréquents, ainsi qu’une pollution sonore et des dégradations environnementales causées par les poussières et les fumées. Selon un témoignage : « Les enfants vomissent régulièrement et toussent beaucoup, surtout lorsqu’il y a beaucoup de fumée. » Un enseignant explique : « Les enfants respirent ces fumées, cela leur pique les yeux et la gorge. Parfois, nous devons les sortir de la classe pour leur permettre de mieux respirer et leur donner de l’eau. »
À la suite des plaintes des habitant·e·s, et parce que l’entreprise n’avait pas effectué d’étude d’impact sur l’environnement et ne disposait pas de l’autorisation nécessaire pour mener ses activités, le préfet du Kouilou a ordonné la fermeture de l’usine en août 2020. Durant sa fermeture, l’entreprise a pris à sa charge des examens médicaux réalisés sur des habitant·e·s, mais ne leur a pas transmis les résultats de ces différentes analyses. Metssa Congo déclare que « le gouvernement ne l’a pas autorisée à publier les résultats » de l’enquête sanitaire, mais qu’un audit a confirmé qu’il n’existait « aucun risque sur le long terme pour les personnes vivant à proximité immédiate de l’usine ». L’entreprise soutient avoir communiqué oralement ces résultats aux personnes concernées l’ayant contactée. Le collectif des habitant·e·s réfute cette affirmation.
En novembre 2020, le ministère de l’Environnement a adressé un courrier à l’entreprise, l’autorisant à reprendre ses activités, précisant toutefois qu’elle devait mener à bien les étapes nécessaires pour que le site respecte les normes environnementales dans un délai de trois mois. En somme, le ministère a reconnu que l’entreprise ne possédait ni certificat de conformité environnementale ni autorisation d’ouverture, mais l’a néanmoins autorisée à reprendre ses activités. Aucune information n’a été transmise depuis sur de quelconques mesures prises par l’entreprise pour se mettre en conformité avec les règlementations environnementales.
En mars 2023, à la suite d’une initiative entreprise par un collectif d’habitant·e·s, des échantillons de sang ont été prélevés sur 18 personnes vivant près de l’usine, dont huit enfants. Les analyses ont révélé des concentrations de plomb extrêmement élevées dans le sang de chacune de ces 18 personnes. Il n’existe pas de concentration de plomb dans le sang considérée comme étant sans danger. En revanche, d’après les lignes directrices de l’OMS (Organisation mondiale de la santé), à partir d’une concentration de 50 microgrammes de plomb par litre de sang, des interventions médicales sont nécessaires. Une exposition prolongée au plomb entraîne divers troubles gastro-intestinaux, hématologiques et neurologiques, en particulier chez les jeunes enfants. Or, la concentration en plomb relevée dans le sang des habitant·e·s de Vindoulou, y compris chez un enfant âgé de 14 mois, allait de 263 à 551 microgrammes par litre, soit jusqu’à 11 fois le seuil fixé par l’OMS.
Dans sa réponse à Amnesty International, Metssa Congo nie toute toxicité de ses émissions, mettant en avant le recours à des « équipements de contrôle de pointe ». L’entreprise affirme en outre que la fumée produite proviendrait en fait du fourneau à aluminium et n’aurait aucun lien avec l’activité du fourneau à plomb. L’entreprise déclare également qu’elle dispose de tous les documents requis par la loi pour mener ses activités en République du Congo. Le collectif d’habitant·e·s de Vindoulou a porté plainte en juin 2023 auprès de la haute cour de Pointe-Noire, exigeant l’arrêt des opérations et la relocalisation de l’usine du groupe Metssa, ainsi que des réparations.