France. Le placement en garde à vue d’une journaliste vise à couvrir une forme de « complicité dans de graves atteintes aux droits humains »

En réaction au placement en garde à vue de la journaliste d’investigation Ariane Lavrilleux, qui a travaillé sur des documents ayant fuité selon lesquels des renseignements français ont été utilisés pour cibler des civil·e·s en Égypte, la secrétaire générale d’Amnesty International Agnès Callamard, a déclaré :

« Il est très inquiétant que, presque deux ans après les révélations selon lesquelles la France se serait rendue complice de l’exécution extrajudiciaire de centaines de personnes en Égypte, ce soit la journaliste qui a révélé au grand jour ces atrocités, et non les responsables de ces actes, qui se retrouve dans le collimateur.

« Cette affaire ne se résume pas au fait de museler une journaliste en particulier et de menacer la confidentialité de ses sources ; ces actions s’inscrivent dans une offensive plus vaste, quasi systématique, contre les journalistes d’intérêt public qui s’efforcent de faire la lumière sur les actions opaques des services de renseignement français.

« Les corps retrouvés à la frontière entre l’Égypte et la Lybie mettent en lumière des secrets bien gardés de la France et mettent en évidence une pratique macabre et secrète qui pointe la complicité française dans de graves atteintes aux droits humains perpétrées par des régimes violents dans la région. »

Complément d’information

La journaliste Ariane Lavrilleux a rédigé un article qui dévoile que les renseignements français ont été détournés par l’Égypte pour cibler des passeurs à la frontière libyenne et tuer des civil·e·s. Elle a découvert qu’au moins 19 bombardements auraient eu lieu contre des civils entre 2016 et 2018 en lien avec les renseignements donnés par la France au Caire.

La perquisition effectuée au domicile d’Ariane Lavrilleux et son placement en garde à vue sont liés à cinq affaires : l’opération Sirli en Égypte, la vente de 30 avions Rafale à l’Égypte, les armes livrées à la Russie jusqu’en 2020, la vente de 150 000 missiles à l’Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, et les transferts d’armes illicites depuis les Émirats arabes unis vers la Libye.

La secrétaire générale d’Amnesty International a été interviewée par l’équipe de Disclose afin de présenter le bilan de l’Égypte en termes de droits humains et de discuter des normes juridiques internationales qu’aurait violées la France.

Le droit à la liberté d’expression protège les journalistes et ceux-ci ne doivent pas être pris pour cibles au motif qu’ils dévoilent des informations d’intérêt public, telles que les révélations faites par Ariane Lavrilleux.

Voir l’article de Disclose Vente d’armes : l’État français traque nos sources et sa vidéo sur l’opération Sirli Operation Sirli : France’s complicity in state crimes in Egypt (disclose.ngo)

Un rassemblement est organisé aujourd’hui, mercredi 20 septembre, à 18h30, Place de la République à Paris.