Tchad : en cas de retrait des troupes de l’ONU, les attaques contre les réfugiés du Darfour risquent de se multiplier

Amnesty International a appelé ce jeudi 11 février le gouvernement tchadien à donner le feu vert aux Nations unies pour que les soldats de la force de maintien de la paix de l’ONU puissent continuer à protéger les 250 000 réfugiés du Darfour et les 170 000 personnes déplacées dans l’est du pays.

Le gouvernement demande instamment que la Mission des Nations unies en République centrafricaine et au Tchad (MINURCAT) quitte le Tchad à l’expiration de son mandat, le 15 mars 2010, cette force n’ayant pas, selon lui, atteint les objectifs qui lui avaient été fixés.

« Si la MINURCAT quitte le pays, des centaines de milliers de civils vulnérables seront exposés à une multiplication des attaques des groupes armés d’opposition tchadiens, des milices illégales, des bandes criminelles et des membres des forces de sécurité tchadiennes », a déclaré Tawanda Hondora, directeur adjoint du programme Afrique d’Amnesty International.

Déployée dans l’est du Tchad depuis mars 2008, la MINURCAT a pour mission de protéger et de faciliter la distribution d’aide humanitaire aux centaines de milliers de réfugiés et de personnes déplacées à l’intérieur du pays qui se sont établies dans la région.

S’il s’est effectué à un rythme relativement lent ces deux dernières années, ce déploiement a aujourd’hui atteint, pour la première fois, quelque 70 % du niveau fixé par le Conseil de sécurité des Nations unies, et bénéficie du soutien technique de divers pays.

Les attaques visant le personnel humanitaire et les civils, qui avaient pris des proportions alarmantes au cours des derniers mois de l’année 2009, sont en recul depuis que les soldats de la MINURCAT sont en mesure de patrouiller dans des zones sensibles où il leur était auparavant impossible de se rendre.

« Les autorités tchadiennes ont pour responsabilité et pour devoir de protéger leur propre population et les autres personnes qui vivent sur leur territoire, mais cela fait de nombreuses années qu’elles ne se montrent ni aptes, ni disposées à le faire dans l’est du pays », a souligné Tawanda Hondora.

Dans l’est du Tchad, des violations des droits humains, notamment des viols et des recrutements d’enfants soldats, sont commises dans une impunité quasi-totale par des membres de groupes armés d’opposition tchadiens et soudanais, des bandits et des membres des forces de sécurité tchadiennes.

Amnesty International a déclaré qu’elle craignait aussi que les agences humanitaires qui portent assistance aux réfugiés, aux personnes déplacées et à la population locale dans l’est du Tchad ne soient contraintes à suspendre tout ou partie de leurs programmes en cas de départ de la MINURCAT, car le vide sécuritaire laissé par un retrait de l’ONU rendrait la situation trop dangereuse pour qu’elles puissent poursuivre leurs activités.

« En l’absence d’une force internationale, des centaines de milliers de personnes seraient privées d’une aide humanitaire essentielle et exposées à des dangers accrus.  Le Conseil de sécurité des Nations unies ne doit pas accéder à la requête des autorités tchadiennes tant que le gouvernement n’aura pas prouvé qu’il est apte et disposé à protéger les droits fondamentaux des personnes qui vivent dans l’est du Tchad », a conclu Tawanda Hondora.

En janvier 2010, le gouvernement tchadien a envoyé une note verbale au Conseil de sécurité des Nations unies pour lui demander de ne pas renouveler le mandat de la mission des Nations unies en République centrafricaine et au Tchad.

À la suite de cette requête, le secrétaire général des Nations unies a envoyé une mission d’évaluation technique au Tchad pour discuter de la question avec les autorités tchadiennes.

Les responsables tchadiens qui ont rencontré l’équipe des Nations unies auraient confirmé la volonté du gouvernement que le mandat de la Mission des Nations unies en République centrafricaine et au Tchad (MINURCAT) ne soit pas renouvelé à son expiration le 15 mars 2010.

Le 8 février 2010, lors d’un voyage au Soudan, le président tchadien Idriss Déby Itno a redit que la position de son gouvernement était que la MINURCAT devait quitter le Tchad à l’expiration de son mandat.

La Résolution 1778 du Conseil de sécurité des Nations unies, en date du 25 septembre 2007, met en place une composante militaire et policière au sein de la Mission. La force militaire a été déployée le 15 mars 2008.

La première année, elle a été placée sous le commandement de l’Union européenne. Le commandement de la force militaire a été transféré aux Nations unies à partir du 15 mars 2009.

La MINURCAT a notamment pour mandat de contribuer à la protection des réfugiés, des personnes déplacées et des civils en danger en facilitant la fourniture d’aide humanitaire dans l’est du Tchad et le nord-est de la République centrafricaine.