Une juge américaine ordonne la libération d’un jeune détenu de Guantánamo

Aux États-Unis, une juge d’un tribunal de district a ordonné mardi 28 juillet la libération de Mohammed Jawad, un ressortissant afghan détenu depuis six ans et demi par les autorités américaines à Guantánamo. Elle a cependant retardé de trois semaines sa libération afin que le gouvernement puisse présenter son rapport au Congrès conformément à une récente loi.

Mohammed Jawad est détenu à Guantánamo depuis le début de l’année 2003. Il a été arrêté à Kaboul en décembre 2002 après une attaque à la grenade qui a blessé deux soldats américains et leur interprète afghan. Il a été soumis à des techniques d’interrogatoire et à des conditions de détention cruelles en Afghanistan et à Guantánamo, et il n’a pu avoir accès à un avocat que cinq ans après son incarcération. En décembre 2003, il a tenté de se suicider, ayant apparemment été poussé à bout par la façon dont il était traité en détention.

La juge de district Ellen Segal Huvelle a ordonné la libération de Mohammed Jawad à compter du 21 août. Elle a également ordonné au gouvernement de le traiter « avec humanité ». Cependant, contrairement à ce que demandaient les avocats du jeune homme, elle ne s’est pas opposée à ce qu’il soit encagoulé ou entravé lors de son transfert hors de Guantánamo.

La décision de justice ordonnant sa libération intervient trois ans et demi après le premier recours contestant la légalité de la détention de Mohammed Jawad déposé auprès d’un tribunal fédéral de district. Il n’avait pas plus de dix-sept ans lorsqu’il a été placé en détention à Kaboul ; les autorités afghanes affirment pour leur part qu’il était alors âgé de douze ans. Les États-Unis n’ont pas tenu compte du jeune âge de Mohammed Jawad au moment de son arrestation, contrairement à ce que prévoit le droit international.

Malgré cette décision judiciaire, la libération de Mohammed Jawad n’est pas garantie. Les chefs d’inculpation retenus contre lui en 2008 en vue d’un procès devant une commission militaire ont été abandonnés le 31 juillet 2009, mais le ministère de la Justice américain s’est réservé la possibilité de l’inculper et de le transférer aux États-Unis afin qu’il soit jugé devant un tribunal fédéral. La judge Huvelle, qui avait au début du mois admonesté le gouvernement en raison de sa conduite dans cette affaire, qu’elle a qualifié de « scandaleuse », a averti qu’une telle initiative se heurterait à d’importants obstacles.

Actuellement, 229 personnes sont toujours détenues à Guantánamo – 95 % du total recensé au moment de l’investiture du nouveau président des États-Unis, le 20 janvier de cette année. De plus, treize mois et demi après que la Cour suprême des États-Unis a décidé que les détenus avaient droit à une audience « dans les meilleurs délais » afin de contester la légalité de leur détention, de telles audiences n’ont eu lieu que dans un petit nombre de cas. Dans cinq cas, des juges fédéraux ont confirmé la légalité de la détention, et dans 29 autres cas, des juges ont estimé que la détention était illégale et ordonné la libération des détenus.

Vingt de ces 29 personnes sont cependant toujours en détention, dans certains cas plusieurs mois après que la justice a ordonné leur libération. Ils attendent que les négociations diplomatiques relatives à leur transfert aboutissent, ou que le gouvernement américain change de politique et cesse de refuser que ceux pour lesquels il n’existe actuellement aucune autre solution soient relâchés aux États-Unis.