Pakistan. Les autorités doivent mettre fin à l’impunité des conseils tribaux face à la persistance des crimes « d’honneur »

En réaction à un nouveau crime « d’honneur » dans le district du Kohistan, au Pakistan, dans le cadre duquel l’assassinat d’une femme a été ordonné par un jirga (conseil tribal) à la suite de photos d’elle ayant circulé sur Internet, Nadia Rahman, directrice adjointe des recherches pour l’Asie du Sud à Amnesty International, a déclaré :

« L’absence persistante de mesures prises par le gouvernement du Pakistan pour limiter le pouvoir extrajudiciaire des jirgas, ou conseils tribaux, qui dirigent des systèmes juridiques parallèles perpétuant des violences patriarcales en toute impunité, est extrêmement préoccupante. La Cour suprême pakistanaise a pourtant estimé que le fonctionnement de ces conseils tribaux n’était pas conforme aux obligations internationales du pays découlant de la Déclaration universelle des droits de l’homme, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Les autorités doivent mettre fin à l’impunité pour les violences et abolir les conseils tribaux et les conseils de village qui ordonnent des atrocités telles que les crimes “d’honneur”

Nadia Rahman, directrice adjointe des recherches pour l’Asie du Sud à Amnesty International

« Bien que les crimes “d’honneur” successifs aient donné lieu à des modifications de la législation et suscité l’indignation dans la société, ils se poursuivent sans relâche. Il ne suffit pas d’arrêter des personnes après que ces attaques ont eu lieu. Les autorités doivent mettre fin à l’impunité pour les violences et abolir les conseils tribaux et les conseils de village qui ordonnent des atrocités telles que les crimes “d’honneur”. »

Complément d’information

Une femme de 18 ans a été abattue par son père et son oncle la semaine dernière sur ordre des « anciens » d’un jirga (conseil tribal) au Pakistan. Ce type de crimes « d’honneur » est endémique dans le pays, où 384 cas ont eu lieu au cours de la seule année 2022 selon la Commission des droits humains du Pakistan. Les homicides faisant suite à des photos potentiellement trafiquées des victimes circulant sur les réseaux sociaux qui sont perçues comme une atteinte à « l’honneur de la famille » sont de plus en plus fréquents.

Cependant, les condamnations prononcées dans les affaires de violence fondée sur le genre restent très rares, de l’ordre de 1 à 2,5 % des cas (Fonds des Nations unies pour la population). Dans le district du Kohistan en particulier, plusieurs cas similaires ont eu lieu. En 2011, par exemple, six hommes et femmes ont été assassinés sur ordre du conseil tribal après la diffusion d’une vidéo sur laquelle on les voyait danser. Le frère des victimes a été tué sept ans plus tard parce qu’il avait porté l’affaire devant la justice. La Cour suprême du Pakistan a relevé les faits en 2012, mais l’accusé a été acquitté en 2023 par manque d’éléments à charge.