Mozambique. L’inquiétude grandit pour des observateurs électoraux transférés dans une nouvelle prison

Amnesty International a appris que 18 observateurs électoraux mozambicains, hommes et femmes, détenus au secret depuis un mois, avaient été transférés secrètement dans une autre prison durant la nuit du 17 au 18 novembre 2019. Ce transfert suscite de graves craintes pour leur sécurité. Ces 18 personnes ont été arrêtées alors qu’elles surveillaient le déroulement des élections du 15 octobre 2019. Les autorités les ont transférées d’une prison du district de Guijá à une autre située dans le district de Xai-Xai sans en informer leurs avocats ni leurs familles. 

Le maintien de ce groupe d'observateurs et observatrices électoraux en détention arbitraire est une mascarade.

Deprose Muchena, directeur régional pour l'Afrique australe à Amnesty International

« Le maintien de ce groupe d’observateurs et observatrices électoraux en détention arbitraire est une mascarade. Ces personnes ont passé plus d’un mois dans des cellules surpeuplées, sans avoir le droit de consulter un avocat ni d’entrer en contact avec leur famille, simplement pour avoir fait leur travail », a déclaré Deprose Muchena, directeur régional pour l’Afrique australe à Amnesty International.

« Leur transfert dans une prison située à 154 kilomètres de la première est très inquiétant et semble constituer une tentative délibérée, de la part des autorités, de brouiller les pistes quant à l’endroit où se trouvent ces détenu·e·s et à la manière dont ils sont traités. En les éloignant autant, elles les isolent encore plus de leurs familles et de leurs avocats. Nous appelons les autorités mozambicaines à libérer immédiatement et sans condition ces 18 observateurs et observatrices électoraux. »

Ces personnes ont passé plus d'un mois dans des cellules surpeuplées, sans avoir le droit de consulter un avocat ni d'entrer en contact avec leur famille, simplement pour avoir fait leur travail.

Deprose Muchena, Amnesty International

Au lendemain des élections municipales qui se sont tenues au Mozambique en octobre 2018, des responsables de la société civile, des défenseur·e·s des droits humains, des militant·e·s, des organismes religieux et des médias ont été la cible d’actes de harcèlement et de manœuvres d’intimidation. Certains ont notamment reçu des menaces de mort pour avoir surveillé et diffusé les résultats après le scrutin. La détention d’observateurs électoraux s’inscrit dans une tendance croissante à la répression des droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association et à la restriction de la liberté de la presse au Mozambique.

Les observateurs et observatrices électoraux qui ont été arrêtés appartiennent au parti d’opposition Nouvelle Démocratie (ND), l’un des partis qui s’est présenté aux élections provinciales dans le district de Chókwè (province de Gaza). Ils ont été arrêtés dans le district de Chókwè alors qu’ils surveillaient le déroulement du scrutin lors des élections générales du 15 octobre 2019. Accusés d’avoir falsifié leurs accréditations d’observateurs électoraux, ils ont été interpelés dans différents bureaux de vote.

La police les a ensuite conduits à la prison du district voisin de Guijá, où ils sont restés détenus jusqu’au 17 novembre. Selon des sources qui ont pu entrer en contact avec eux, ils ont été détenus au secret, interrogés en l’absence de tout avocat, privés de visites, y compris de leur famille, et soumis à des interrogatoires visant à leur faire avouer des actes illicites. Un mois après leur arrestation, ils ne sont toujours inculpés d’aucune infraction pénale.

Ils ont été enfermés dans des cellules extrêmement surpeuplées et contraints de faire toutes leurs ablutions dans leur cellule. Six d’entre eux sont des étudiants qui manquent les cours et risquent de rater leurs examens finaux et de perdre leur année universitaire. Sept sont des pères ou des mères de famille, qui se retrouvent privés du droit de voir leurs enfants et leurs conjoint·e·s.

« Il n’existe aucun motif juridique justifiant le maintien en détention de ces 18 personnes, qui sont incarcérées uniquement pour avoir fait leur travail. Elles n’auraient jamais dû passer ne serait-ce qu’une seule nuit derrière les barreaux et elles doivent être libérées immédiatement et sans condition », a déclaré Deprose Muchena.

« Les autorités mozambicaines doivent ouvrir l’espace civique et cesser de traiter les droits humains avec mépris. »