Justice pour la Syrie

Six années de conflit

En Syrie, les manifestations antigouvernementales de mars 2011 ont été suivies de six années d’horreur et de carnage. Les différentes parties au conflit se sont, de façon répétée, rendues coupables d’atteintes aux droits humains, notamment de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. À ce jour, les victimes n’ont toujours pas obtenu justice. Les forces gouvernementales syriennes, avec l’appui de la Russie, ont attaqué et bombardé des civils, faisant des milliers de blessés et de morts. Elles ont imposé un siège durable à des populations civiles, ont soumis des dizaines de milliers de personnes à des disparitions forcées et à des exécutions extrajudiciaires et ont systématiquement torturé ou maltraité les prisonniers, occasionnant d’innombrables décès en détention. Des groupes armés ont assiégé et bombardé aveuglément des zones majoritairement peuplées de civils, et se sont rendus coupables d’enlèvements, de torture et d’exécutions sommaires.

Des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et d’autres atteintes graves aux droits humains sont encore perpétrés à l’heure actuelle en Syrie. Ils ne doivent pas rester impunis. Les victimes et leurs familles ont le droit d’obtenir vérité, réparations et justice.

On m’a battu avec des câbles et obligé à m’agenouiller devant une photo de Bachar el Assad.

Abu al Najem, ancien détenu

Il existe trois options pouvant permettre d’obtenir justice pour la Syrie :

  • Mécanisme international
    Établi en décembre 2016 par l’Assemblée générale des Nations unies afin d’appuyer les enquêtes sur les crimes de droit international les plus graves commis en Syrie depuis mars 2011, avec pour objectif l’ouverture de poursuites judiciaires contre les auteurs de ces crimes

  • Compétence universelle
    Permet aux tribunaux nationaux des États de poursuivre des personnes pour des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis en dehors de leur territoire

  • Cour pénale internationale – PROCESSUS BLOQUÉ
    Permet de poursuivre les auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité si le Conseil de sécurité des Nations unies saisit la Cour pénale internationale de la situation en Syrie. La Russie et la Chine opposent leur veto à cette procédure depuis 2014.

© AMEER ALHALBI/AFP/Getty Images

Mécanisme international

Malgré tout, l’ONU a envoyé un signal positif laissant espérer que les auteurs de ces crimes ne resteront pas impunis : son Assemblée générale a adopté une résolution instaurant un mécanisme d’enquête en Syrie.

L’objectif de ce mécanisme est de traduire en justice toutes les personnes soupçonnées d’avoir perpétré des violations des droits humains ou des crimes de droit international. C’est une occasion immanquable de faire savoir à tous ceux qui ont commis des atrocités en Syrie qu’ils vont devoir répondre de leurs actes. Il est temps de mettre un terme à ce cycle de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et d’impunité. La justice et l’obligation de rendre des comptes sont fondamentales pour asseoir une paix durable en Syrie. Le chemin vers la justice sera peut-être long, mais nous devons agir dès à présent pour veiller à ce que les Nations unies mettent en place un mécanisme international efficace.

Passez à l’action pour aider les Syriens à obtenir justice.

Mesures à prendre pour un mécanisme de l’ONU efficace


  1. Adoption par l’Assemblée générale des Nations unies, en décembre 2016, de la résolution 71/248
    établissant un mécanisme pour la Syrie

  2. Obtention d’un financement suffisant
    du mécanisme de la part des États membres des Nations unies

  3. Constitution d’une équipe compétente, expérimentée et indépendante
    Recrutement d’un-e responsable, d’un-e responsable adjoint-e et de membres d’équipe expérimentés en matière d’information judiciaire internationale, de poursuites judiciaires et d’analyse des preuves

  4. Rédaction de réglementations et de procédures internes complètes et pratiques
    sur des questions telles que l’organisation, la collecte et la sécurisation des informations ; la coopération et le partage des informations ; la confidentialité et la protection des sources

  5. Collecte active d’informations
    Envoi de demandes aux agences gouvernementales, et identification de sources de preuves et de contacts

  6. Overture d’enquêtes indépendantes, impartiales et exhaustives
    Interrogatoires de témoins et enquêtes sur place

  7. Organisation et analyse efficaces et transparentes d’importants volumes d’informations
    Mise en place de bases de données sécurisées et organisées (au format électronique), et analyse des éléments de preuve afin de permettre l’identification des auteurs de crimes (haut placés) et des modes opératoires employés

  8. Activités et comptes rendus transparents
    Préparation des rapports à présenter devant l’Assemblée générale des Nations unies, en veillant à ce que les victimes, les ONG et toutes les parties prenantes participent de façon significative et soient tenues informées

  9. Préparation efficace de dossiers d’accusation complets afin de poursuivre les auteurs de crimes
    Préparation de dossiers à charge sur les crimes de droit international et sur les individus soupçonnés de les avoir commis, en vue d’engager contre ces derniers des procédures judiciaires devant des tribunaux nationaux ou internationaux (au nombre desquels figure ce mécanisme)

  10. Mise en exploitation des données : partager les éléments de preuve et les dossiers, et faciliter leur consultation (dans le respect des garanties et des procédures)

Le coût humain du conflit

+ de 50 %
de la population en Syrie requiert une assistance humanitaire
250 000
personnes ont été tuées, selon l’ONU
4.9 M
de Syriens sont désormais réfugiés à l’étranger

Les autres gouvernements aussi peuvent rendre la justice pour la Syrie

Même s’ils ne comptent aucun ressortissant parmi les suspects ou les victimes, de nombreux pays sont habilités à ouvrir des poursuites judiciaires contre des personnes accusées de certains crimes dans un autre pays, notamment en cas de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité, de torture, de génocide, d’actes de terrorisme ou encore de disparitions forcées.

Différents pays européens ont déjà mis en pratique ce principe, dit de « compétence universelle », pour enquêter sur des crimes de guerre commis en Syrie ou en Irak. Cependant, si nous voulons réellement que les victimes et leurs familles obtiennent la justice et les réparations auxquelles elles ont droit, davantage de pays doivent ouvrir des enquêtes et des poursuites judiciaires.

La diaspora syrienne, en Europe et ailleurs, joue un rôle clé dans le recueil de témoignages et l’identification de suspects, ce qui renforce la possibilité pour les États d’enquêter sur les crimes de guerre et d’engager des procédures devant leurs tribunaux nationaux.

Les pays pouvant exercer cette forme de juridiction sont l’Argentine, la France, le Royaume-Uni, les États-Unis, l’Australie, le Canada, l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, la Finlande, la Corée du Sud, le Mexique, la Suisse, la Suède, le Sénégal ou encore l’Uruguay.

Crimes de guerre commis en Syrie

Exécutions extrajudiciaires et sommaires
Torture et traitements cruels
Attaques délibérées contre des civils et des habitations, des installations médicales et d’autres biens à caractère civil
Attaques aveugles et disproportionnées
Utilisation d’armes interdites
Disparitions forcées, enlèvements et prises d’otages
Viols et esclavage sexuel
Utilisation de la famine contre les civils comme méthode de guerre