Eswatini

Amnesty International ne prend pas position sur les questions de souveraineté ou les conflits territoriaux. Les frontières apparaissant sur cette carte sont basées sur les données géospatiales des Nations unies.
Retour à Eswatini

Eswatini 2023

Les autorités responsables d’attaques contre des militant·e·s et des défenseur·e·s des droits humains sont demeurées impunies. Elles n’ont pas mené d’enquête sur l’homicide illégal de Thulani Maseko. Les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique ont été régulièrement bafoués. Les dissident·e·s et militant·e·s d’opposition étaient en butte à des procès inéquitables dans lesquels ils encouraient de lourdes peines. Le droit à la santé était limité. Des centaines de personnes risquaient d’être expulsées de force. Le gouvernement a refusé l’enregistrement en tant qu’organisation d’un groupe de défense des droits des personnes LGBTI, malgré une décision en ce sens de la Cour suprême.

Contexte

Des élections législatives ont eu lieu en août-septembre. Un décret de 1973 interdisant les partis politiques était toujours en vigueur ; de ce fait, seuls des candidat·e·s indépendants pouvaient se présenter aux élections. Le roi Mswati III exerçait l’autorité suprême sur tous les pouvoirs de l’État.

Attaques et homicides illégaux

Le militant et avocat spécialiste des droits humains Thulani Maseko a été assassiné chez lui en janvier. Malgré les condamnations de la communauté internationale et ses appels en faveur de la tenue d’une enquête transparente, indépendante et impartiale, les autorités n’ont rien fait pour amener les responsables présumés à rendre des comptes. Le meurtre a eu lieu quelques semaines après des attaques ayant visé l’avocat des droits humains Maxwell Nkambule et deux membres du Mouvement démocratique populaire uni (PUDEMO, parti d’opposition interdit), Penuel Malinga et Xolile Dlamini-Malinga. Les autorités n’ont pas mené d’enquêtes sur ces faits, et d’autres attaques et homicides illégaux ont eu lieu depuis que le gouvernement a engagé une répression brutale à la suite des manifestations de 2021 en faveur de la démocratie et contre les violences policières. De plus, les personnes soupçonnées d’avoir perpétré ces actes n’ont pas été déférées devant les tribunaux et les autorités n’ont pas fait en sorte que les victimes aient accès à la justice et à des recours effectifs.

Liberté d’expression, d’association et de réunion

Les autorités ont continué de persécuter des membres du Syndicat des ouvriers et travailleurs associés des transports et des communications du Swaziland (SWATCAWU) qui avaient organisé en 2022 des grèves nationales visant à obtenir de meilleures conditions de travail et des réformes politiques. Le SWATCAWU et deux autres syndicats ont été inculpés d’outrage à magistrat sur la base d’accusations fabriquées de toutes pièces. La police royale d’Eswatini a en outre lancé en janvier un mandat d’arrêt contre le secrétaire général du SWATCAWU, Sticks Nkambule. Face aux menaces constantes et aux actes d’intimidation et de harcèlement de la part des forces de sécurité, cet homme est entré dans la clandestinité.

La police est intervenue brutalement le 25 janvier lors d’une manifestation étudiante dans la ville de Manzini et a arrêté arbitrairement certains de ses meneurs. Deux militants ont été blessés deux jours plus tard lorsque des policiers ont tiré à balles réelles contre des manifestant·e·s qui déposaient une pétition au commissariat de Manzini.

Torture et autres mauvais traitements

La détention arbitraire a continué de faire partie intégrante de la stratégie de répression de l’État. Le 1er juin, les anciens députés Mthandeni Dube et Mduduzi Bacede Mabuza ont été déclarés coupables de terrorisme, sédition et meurtre en vertu de la Loi de 2008 relative à la répression du terrorisme. Ils avaient été arrêtés pour avoir publiquement réclamé des réformes politiques pendant les manifestations de 2021 et encouraient 20 ans d’emprisonnement. Lors de leur détention en 2022, ils ont été battus par des agents des services correctionnels, n’ont pas pu contacter leur avocat et ont été privés de soins.

Les forces de sécurité ont arbitrairement détenu et torturé des militants politiques et des défenseurs des droits des travailleurs. Brian Sihlongonyane, membre du PUDEMO, a par exemple été enlevé, torturé et abandonné dans une forêt par des soldats de l’armée eswatinienne après avoir pris la tête d’une initiative pacifique de remise d’une pétition à l’ONU le 12 avril.

Dans des affaires distinctes, la police a arrêté en juin et en juillet plusieurs membres du Parti communiste du Swaziland, les a frappés puis les a remis en liberté sans inculpation. Ces militants ont déclaré avoir été torturés et maltraités pendant qu’ils étaient aux mains de la police. Les autorités n’ont mené aucune enquête sur les allégations formulées contre les forces de sécurité.

Droit à la santé

Les services de santé publique pâtissaient toujours d’un manque systémique de moyens. Cela a donné lieu à des manifestations dans l’ensemble du pays en juin et en juillet. Des soignant·e·s et des patient·e·s ont manifesté contre l’incapacité du gouvernement à approvisionner les hôpitaux et centres de santé publics en médicaments, matériel médical, équipements, moyens de transport et carburant. La ministre de la Santé a reconnu le problème et annoncé dans un deuxième temps qu’une sous-commission instaurée par le gouvernement avait mis en place des stratégies visant à assurer la pérennité financière des services de santé et la délivrance des soins.

Expulsions forcées

Des centaines de personnes demeuraient sous la menace d’une expulsion forcée, le gouvernement n’ayant pas réformé le système de gouvernance foncière du pays, qui limitait le droit à la sécurité d’occupation. Des habitant·e·s des localités de Sigombeni et Malkerns avaient déposé des recours en justice contre ces expulsions.

Droits des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles, transgenres ou intersexes

Les relations sexuelles consenties entre personnes de même sexe constituaient toujours une infraction pénale et la discrimination à l’encontre des personnes et organisations LGBTI était répandue. En juillet, la Cour suprême a jugé inconstitutionnel le refus du Registre des sociétés d’inscrire en tant qu’organisation le groupe Minorités sexuelles et de genre d’Eswatini (ESGM). Le ministre du Commerce par intérim, invoquant le « droit romano-néerlandais », a refusé de prendre acte de la décision et ordonné aux services du Registre de rejeter la demande d’inscription d’ESGM.