Corée du Sud. La loi martiale ne doit pas être instrumentalisée pour restreindre les droits humains

En réaction à la déclaration de l’état d’urgence par le président sud-coréen Yoon Suk Yeol, Boram Jang, chercheuse sur l’Asie de l’Est à Amnesty International, a déclaré :

« L’état d’urgence décrété ce 3 décembre en Corée du Sud ne doit pas servir à justifier la répression des droits fondamentaux de la population.

« Le président Yoon Suk Yeol doit expliquer en détail les raisons pour lesquelles il a déclaré la loi martiale et veiller à ce que toute mesure restreignant les droits humains s’avère exceptionnelle, temporaire et limitée à ce qui est strictement requis par les exigences de la situation – tout cela devant faire l’objet d’un examen judiciaire.

« Si la déclaration de la loi martiale signifie le transfert des pouvoirs administratifs et judiciaires à l’armée, cela risque de réduire à néant des décennies de progrès durement acquis et pourrait avoir des effets dévastateurs sur les droits humains. Si ce n’est pas justifié, il s’agirait d’une violation flagrante du droit international relatif aux droits humains et des normes en la matière.

« Même lorsque l’état d’urgence est décrété, l’état de droit doit toujours prévaloir. La loi martiale ne peut et ne doit pas être instrumentalisée pour supprimer la dissidence ou restreindre les libertés fondamentales. Les actes du président Yoon Suk Yeol doivent se conformer aux normes internationales, au regard de la grave menace qui pèse sur l’état de droit et la protection des droits humains. »

Complément d’information

Le président sud-coréen Yoon Suk Yeol a décrété mardi 3 décembre la loi martiale lors d’une allocution improvisée en fin de soirée et retransmise en direct à la télévision.

Il a déclaré qu’il éradiquerait « les abjectes forces antiétatiques pro-nord-coréennes ». Selon les médias, l’armée a déclaré que les activités du Parlement et des partis politiques seraient interdites et que les médias et les éditeurs seraient placés sous le contrôle de la loi martiale. Tous les rassemblements et toutes les manifestations seraient également interdits.

En vertu de la loi sud-coréenne, la loi martiale ne peut être imposée que dans des situations de menaces extraordinaires pour la survie de la nation, telles que la guerre ou la rébellion armée. Il n’est pas certain que la justification apportée par le président Yoon Suk Yeol – une réponse à des activités subversives présumées et à une procédure de destitution – réponde aux critères juridiques et constitutionnels stricts énoncés à l’article 2 de la Loi martiale et à l’article 77 de la Constitution. En vertu du droit international relatif aux droits humains, de telles mesures doivent être exceptionnelles, strictement nécessaires, proportionnées et temporaires.

La loi martiale ne peut être déclarée qu’en raison d’un état d’urgence menaçant l’existence de la nation et doit respecter les garanties internationales qui protègent les droits fondamentaux. Le droit international relatif aux droits humains et les normes afférentes n’autorisent qu’un champ d’application limité pour des restrictions supplémentaires de l’exercice des droits humains au titre de la loi martiale au-delà de ce qui est autorisé en situation normale.