Alors qu’Airbnb s’apprête à faire son entrée en bourse avec une offre publique initiale de plusieurs milliards de dollars des États-Unis, l’entreprise doit retirer les annonces de location pour des logements dans des propriétés construites dans les territoires palestiniens occupés (TPO), a déclaré Amnesty International le 9 décembre 2020.
L’entreprise de location en ligne de logements, dont le siège se trouve à San Francisco, propose environ 200 propriétés à la location dans des colonies israéliennes illégales qui jouent un rôle majeur dans les atteintes aux droits humains systématiques dont sont victimes les Palestinien·ne·s.
Ces colonies constituent des crimes de guerre au regard du droit international. Airbnb doit prendre la juste décision pour ses futurs investisseurs et arrêter de tirer profit de colonies illégales construites sur des terres volées aux Palestinien·ne·s dans les territoires palestiniens occupés.
Saleh Higazi
Il y a deux ans, Airbnb avait déclaré que les annonces pour des logements dans les colonies seraient retirées, mais l’entreprise était ensuite revenue sur sa décision.
Réagissant aux informations selon lesquelles Airbnb était en passe d’être cotée en bourse, l’entreprise ayant déposé des documents relatifs à l’entrée en bourse aux États-Unis, Saleh Higazi, directeur adjoint du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord à Amnesty International, a déclaré :
« Ces colonies constituent des crimes de guerre au regard du droit international. Airbnb doit prendre la juste décision pour ses futurs investisseurs et arrêter de tirer profit de colonies illégales construites sur des terres volées aux Palestinien·ne·s dans les territoires palestiniens occupés. »
Il est honteux qu’Airbnb fasse la promotion et tire profit d’une situation qui est une des principales sources des atteintes aux droits humains systématiques dont sont victimes quotidiennement des millions de Palestinien·ne·s.
Manque de transparence des documents d’entrée en bourse
Plus tôt cette année, Airbnb est apparue sur la liste d’une base de données des Nations unies regroupant plus de 100 entreprises du monde entier qui, par leurs activités commerciales, sont liées aux colonies israéliennes dans les TPO. Ces colonies sont illégales au regard du droit international.
Pourtant, la déclaration d’enregistrement qu’Airbnb a déposée auprès de la Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité américaine de contrôle des marchés, en amont de l’entrée en bourse ne mentionne aucune opération commerciale dans les colonies israéliennes, ni le fait que l’entreprise apparaît dans cette base de données de l’ONU. Ces informations sont absentes de la section « Facteurs de risques » des documents, qui informe les actionnaires des risques en matière juridique et en matière de réputation, entre autres, auxquels l’entreprise pourrait être exposée.
Les actions d’Airbnb seront vraisemblablement achetées par des fonds d’investissement et des fonds de pension du monde entier, ce qui implique que de nombreuses personnes pourraient indirectement détenir des parts d’Airbnb sans comprendre pleinement ce que cela implique.
Il est honteux qu’Airbnb fasse la promotion et tire profit d’une situation qui est une des principales sources des atteintes aux droits humains systématiques dont sont victimes quotidiennement des millions de Palestinien·ne·s.
Saleh Higazi
Les principales banques mandatées par Airbnb pour son entrée en bourse, notamment Goldman Sachs, Barclays Capital et Morgan Stanley, ont également la responsabilité de veiller à ce que ces informations fournies aux investisseurs soient exactes.
Le changement d’avis honteux d’Airbnb
Bien qu’Airbnb affirme faire don des bénéfices générés par ces annonces, le fait de continuer de les afficher permet de soutenir une plus vaste industrie touristique et de lui permettre de prospérer aux dépens des droits et des moyens de subsistance des Palestinien·ne·s.
En janvier 2019, Amnesty a publié un très important rapport intitulé Destination : occupation, démontrant qu’Airbnb, TripAdvisor, Expedia et Booking.com alimentaient les atteintes aux droits humains systématiques contre les Palestinien·ne·s en publiant des annonces pour des centaines de chambres et d’activités dans les colonies israéliennes sur des terres palestiniennes occupées, notamment Jérusalem-Est.
L’année précédente, Airbnb avait annoncé que l’entreprise allait retirer les annonces pour 200 logements en location dans les colonies israéliennes de Cisjordanie, à l’exception de celles à Jérusalem-Est, qui sont « au cœur du conflit entre Israéliens et Palestiniens ». L’entreprise avait déclaré que l’un des principes qu’elle avait appliqués pour prendre cette décision était d’« évaluer si l’existence de ces annonces contribuait aux souffrances humaines ».
Cependant, en avril 2019, Airbnb est revenue sur cette décision après plusieurs actions en justice, et a déclaré que l’entreprise permettrait la publication des annonces mais ne « tirerait pas profit de cette activité dans cette région ».
Craintes d’une expansion des colonies
On craint maintenant que les colonies israéliennes sur les terres palestiniennes se développent encore davantage, des milliers de nouveaux logements ayant été annoncés en 2020. Cette augmentation de la construction des colonies est considérée comme le reflet du vaste soutien politique que les autorités israéliennes ont reçu sous la présidence de Donald Trump.
En novembre, Mike Pompeo s’est rendu dans un vignoble de la colonie israélienne de Psagot. C’était la première fois qu’un secrétaire d’État américain en fonction se rendait dans une colonie israélienne. Cette visite fait suite à son annonce de novembre 2019 déclarant que les États-Unis ne considéraient plus les colonies israéliennes comme illégales au regard du droit international.
Aucune entreprise ne devrait contribuer à des atteintes aux droits humains et, tant qu’Airbnb ne met pas fin à ses relations commerciales avec les colonies israéliennes, l’entreprise s’expose gravement
Saleh Higazi
Les propositions d’expansion interviennent après plus de 50 années d’occupation militaire israélienne dans les TPO, pendant lesquelles plus de 50 000 logements et structures palestiniens ont été détruits. Des dizaines de milliers de Palestinien·ne·s ont été expulsés de force.
À leur place, plus de 600 000 Israélien·ne·s ont été autorisés à s’installer dans environ 250 colonies construites principalement dans ce but, dont plusieurs sont desservies par des routes réservées aux colons et gardées par des postes de contrôle militaires.
Environ 1 000 kilomètres carrés de terres palestiniennes ont été expropriés par des colons israéliens ces 50 dernières années.
Cela a eu des conséquences dévastatrices sur les droits des Palestinien·ne·s à un niveau de vie suffisant, au travail, au logement, à la santé et à l’éducation et grippe progressivement l’économie palestinienne.
« Aucune entreprise ne devrait contribuer à des atteintes aux droits humains et, tant qu’Airbnb ne met pas fin à ses relations commerciales avec les colonies israéliennes, l’entreprise s’expose gravement », a déclaré Saleh Higazi.