L’Italie empêche le jugement d’agents du renseignement pour la «restitution» d’Abu Omar

Amnesty International a appelé jeudi 16 décembre les autorités italiennes à cesser d’utiliser le « secret d’État » pour couvrir des hauts responsables. En effet, alors qu’une cour d’appel vient d’alourdir les peines de 23 fonctionnaires américains et de confirmer la culpabilité de deux Italiens dans l’affaire de la « restitution » d’un religieux égyptien, elle a de nouveau statué que de hauts responsables italiens ne pouvaient pas être poursuivis en justice pour cette opération. Les 22 agents de la CIA et un membre de l’armée américaine, respectivement condamnés dans un premier temps à cinq et huit ans d’emprisonnement, ont vu la Cour d’appel de Milan augmenter leur peine à sept et neuf ans pour leur rôle dans l’enlèvement d’Usama Mostafa Hassan Nasr, plus connu sous le nom d’Abu Omar. Les 23 Américains condamnés ont été jugés in absentia, le gouvernement italien n’ayant jamais demandé formellement leur extradition. Abu Omar avait été enlevé dans une rue de Milan en 2003 avant d’être transféré illégalement en Égypte où il a été détenu au secret et aurait été torturé. « La justice italienne a reconnu que l’enchaînement des événements ayant donné lieu à des violations des droits humains aussi graves ne pouvait pas rester sans réponse, a déclaré Julia Hall, spécialiste à Amnesty International du contre-terrorisme et des droits humains en Europe. « La reconnaissance par cette cour d’appel du fait qu’Abu Omar a été victime d’une grave injustice aux mains d’agents des services de renseignements américains et italiens constitue une étape dans l’établissement des responsabilités en Europe des violences commises dans le cadre des programmes de « restitutions » et de détentions secrètes de la CIA. « Cependant, le gouvernement italien et ses représentants ne devraient pas utiliser le « secret d’État » pour couvrir des violations des droits humains. »En novembre 2009, un tribunal de première instance de Milan avait reconnu 23 fonctionnaires américains et deux agents italiens coupables de participation à la « restitution » d’Abu Omar. Il s’agissait des premières et des seules reconnaissances de culpabilité en lien avec les « restitutions » et les détentions secrètes de la CIA. Toutefois, le même tribunal avait classé sans suite les affaires impliquant cinq hauts responsables italiens et trois fonctionnaires américains, sur la base du secret d’État et de l’immunité diplomatique.  « L’enlèvement est un crime, pas un secret d’État, a déclaré Julia Hall. Le gouvernement italien doit mener jusqu’au bout et de manière équitable le processus d’établissement des responsabilités, même si cela embarrasse certains de ses hauts responsables ou si cela les expose à des poursuites pénales. » La décision de justice en appel d’hier a également eu pour effet de réduire les peines prononcées contre les deux Italiens qui avaient été reconnus coupables en même temps que les agents américains en 2009. Leur peine d’emprisonnement est passée de trois ans à deux ans et huit mois . L’appel concernant les trois Américains ayant bénéficié de l’immunité diplomatique sera examiné séparément.