Alors que le nombre de victimes civiles ne cesse d’augmenter dans la bande de Gaza avec la poursuite des attaques israéliennes, Amnesty International appelle à un embargo immédiat sur les armes afin que les combats ne puissent pas être alimentés par l’arrivée de davantage d’armes et d’autres équipements militaires étrangers.
De nouvelles munitions en provenance des États-Unis sont en route vers cette région alors qu’à ce jour au moins 900 Palestiniens ont été tués, dont plus d’un tiers – parmi lesquels 200 enfants – étaient des civils.
« Nous savons que le Wehr Elbe, cargo dont le propriétaire est une compagnie allemande, a quitté les États-Unis le 20 décembre 2008 avec une importante cargaison de 989 containeurs d’explosifs et d’autres munitions, a déclaré Malcolm Smart, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.
Loué, et désormais contrôlé d’un point de vue légal, par le commandement du transport maritime militaire des États-Unis, le cargo était en route vers le port israélien d’Ashdod ; il devait transiter par la Grèce mais son relevé de position indique que sa route a sans doute été modifiée. »
Des appels d’offres pour deux autres cargaisons d’armes totalisant 325 containeurs de munitions américaines ont été approuvés par le Pentagone le 31 décembre, quatre jours après le début des attaques israéliennes actuelles contre des cibles à Gaza.
Ces deux cargaisons devaient être transportées à Ashdod, en Israël, depuis Astakos, en Grèce, mais, selon des informations fournies à Amnesty International par le commandement du transport maritime militaire des États-Unis, cette commande a été annulée.
Les documents relatifs aux appels d’offre montrent que ces cargaisons incluent du phosphore blanc, connu pour sa capacité à provoquer de graves brûlures et pour constituer une arme non discriminante lorsqu’il est utilisé en explosion aérienne dans des zones densément peuplées, comme ce serait le cas actuellement à Gaza.
Le ministère de la Défense des États-Unis a indiqué qu’il était en train de chercher d’autres moyens pour livrer les munitions à destination d’une installation de stockage américaine située en Israël. Un accord israélo-américain autorise « en cas d’urgence » le transfert à l’armée israélienne de munitions américaines stockées en Israël.
« Les autorités américaines ne devraient pas poursuivre les livraisons d’armes à Israël, et le gouvernement grec ou tout autre gouvernement ne devrait pas autoriser l’utilisation de ses installations portuaires et autres pour l’acheminement d’armes à destination d’Israël ou de toute autre partie à ce conflit », a ajouté Malcolm Smart.
Amnesty International a, au vu de ses recherches, appelé le Conseil de sécurité de l’ONU à imposer à toutes les parties au conflit à Gaza un embargo sur les armes immédiat et complet. Cet appel est lancé alors qu’il est fait état d’un nombre croissant de victimes civiles et d’éléments montrant que des crimes de guerre ont été commis.
L’organisation estime qu’un embargo pourrait permettre d’obtenir que les responsables des crimes de guerre et des autres violations graves du droit international commis par les parties au conflit rendent pleinement compte de leurs actes.
Une telle mesure indiquerait également de manière claire à Israël et au Hamas que le Conseil de sécurité est déterminé à assurer la paix et la sécurité et à faire respecter le droit international.
« Le sort des civils à Gaza n’a cessé d’empirer depuis l’adoption quasi unanime, il y a six jours, par le Conseil de sécurité des Nations unies d’un appel au cessez-le-feu, resté sans effet, a souligné Malcolm Smart.
Les forces israéliennes continuent de procéder à des attaques illégales, y compris des attaques disproportionnées, et sont accusées d’utiliser des armes telles que le phosphore blanc, qui fait courir un risque inacceptable aux civils lorsqu’il est utilisé dans des zones densément peuplées.
Pendant ce temps, le Hamas et d’autres groupes palestiniens armés continuent les tirs aveugles de roquettes en direction de zones civiles en Israël. »
Amnesty International a reçu de personnes vivant à Gaza des informations indiquant que les civils ne sont nulle part en sécurité. La plupart des gens ont fui de chez eux et se sont réfugiés chez des proches qui vivent dans des secteurs considérés comme moins dangereux ou dans des écoles gérées par l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).
Un grand nombre n’ont plus l’électricité et n’ont plus ou quasiment plus accès à l’eau potable depuis le début de la crise. Il est difficile de trouver des vivres et les gens se nourrissent surtout de pain. Il est de plus dangereux de sortir pour aller chercher de quoi manger.
Said, titulaire d’un doctorat d’une université américaine, est chargé de cours à l’université. Il vit à Shajaya avec sa femme, six jeunes enfants et des parents âgés. Il a déclaré à Amnesty International : « Nous n’avons plus du tout d’électricité depuis dix-sept jours, et nous ne pouvons avoir de l’eau que de temps en temps. J’ai un petit générateur mais comme nous n’avons pas de carburant je ne peux pas l’utiliser.
« Les enfants sont terrifiés à cause des bombardements incessants, mais nous ne pouvons pas faire grand-chose pour les rassurer. Il y a tellement d’enfants qui ont été tués. Et il y a tellement de destructions partout. Je ne sais pas combien de temps on pourra encore tenir comme ça. »
Amnesty International a recensé au moins 17 États, en plus des États-Unis, ayant fourni des armes et du matériel connexe à Israël depuis 2001. Les États-Unis sont de loin le plus gros fournisseur mais d’importantes livraisons ont également été faites depuis l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Espagne, la République slovaque, la République tchèque, le Canada, la Slovénie, l’Australie, la Roumanie, l’Autriche, la Belgique, la Hongrie, la Serbie-et-Monténégro et la Bosnie-Herzégovine. Les Pays-Bas et la Grèce sont deux importants pays de transit vers Israël, en particulier pour les armes en provenance des États-Unis.
« Il est maintenant nécessaire qu’un embargo sur les armes complet, pas moins que cela, soit immédiatement instauré afin qu’il puisse être mis un terme aux souffrances des civils dues à ce conflit, ainsi qu’aux attaques manifestement abusives menées par chacune des parties au conflit, a ajouté Malcolm Smart.
Le Conseil de sécurité doit déclarer et faire respecter un embargo jusqu’à ce que des mécanismes efficaces soient mis en place pour empêcher que des armes, des munitions et d’autres équipements militaires ne soient utilisés pour attaquer des civils ou commettre d’autres graves violations du droit international. »