Les grandes victoires pour les droits humains de cette année

Au cours de l’année écoulée, près de sept millions de sympathisants et sympathisantes d’Amnesty International se sont mobilisé·e·s – en manifestant, en écrivant, en signant des pétitions, etc. – pour défendre et faire mieux respecter les droits humains, partout dans le monde. Cela a eu un impact énorme : des personnes emprisonnées injustement ont été libérées, des lois ont été modifiées et des gens courageux à travers le monde se sont levés pour passer à l’action. Préparez-vous à être inspiré·e par notre résumé des grandes victoires pour les droits humains en 2018 !

Février

En février, Teodora del Carmen Vásquez a enfin été libérée de prison au Salvador, après qu’un tribunal a réduit la peine scandaleuse de 30 ans de réclusion prononcée à son encontre. Elle avait déjà passé 10 ans en prison après avoir accouché d’un enfant mort-né, ce qui lui a valu d’être inculpée et condamnée pour avortement, acte illégal au Salvador. De pétitions en manifestations, nous avons milité en sa faveur depuis 2015. Amnesty Norvège a même utilisé la radio pour envoyer un signal de détresse afin de sensibiliser les gens à cette affaire. Amnesty International continue de faire campagne pour la dépénalisation de l’avortement au Salvador en vue d’empêcher de nouvelles situations comme celle de Teodora, où les femmes sont punies au lieu de voir leurs droits reproductifs protégés.

Au Mexique, Sergio Sánchez a été libéré de prison après y avoir passé près de huit ans pour meurtre. Cet homme a été condamné sur la base d’éléments à charge faux et incohérents à l’issue d’un procès entaché d’irrégularités. Selon ses avocats, le travail des sympathisants et sympathisantes d’Amnesty, qui ont participé à des manifestations, a été fondamental dans sa libération.

Nous avons aussi appris la remise en liberté de plusieurs militants, journalistes et blogueurs détenus en Éthiopie, dont le prisonnier d’opinion adopté par Amnesty International Eskinder Nega. Des sympathisants et sympathisantes d’Amnesty lui ont envoyé de nombreux messages qui ne sont pas passés inaperçus. « Ma famille m’a remis des lettres de soutien d’Amnesty International. Elles m’ont aidé à garder le moral et ont redonné espoir à mes proches. » – Eskinder Nega

En Ukraine, le gouvernement a approuvé un nouveau programme de l’enseignement primaire, qui contient pour la première fois un volet consacré aux droits humains. Ce résultat couronne le plaidoyer sans relâche d’Amnesty Ukraine et sa participation au groupe de travail chargé de mettre au point ce programme.

Au Bénin, la condamnation à mort de 14 prisonniers a été commuée à l’issue d’un travail de plaidoyer global mené par Amnesty. Nous avons rendu visite à ces hommes en prison, nous avons rencontré le ministre de la Justice et le président de l’Assemblée nationale pour réclamer la commutation de cette peine, et nous avons diffusé une pétition en ligne et hors ligne. Plus tôt, des avancées ont été obtenues en Gambie, où un moratoire sur les exécutions a été annoncé.

Mars

En mars, nous avons constaté le pouvoir de la solidarité en Ukraine, après que la police a fermé les yeux sur les agissements de groupes qui ont menacé et agressé des manifestants et manifestantes en faveur des droits des femmes. Les autorités ont accusé à tort Olena Chevtchenko, l’une des organisatrices de cet événement, d’avoir enfreint les règles relatives aux rassemblements publics en raison d’une banderole « provocante » portée par certaines personnes qui défilaient. Amnesty Ukraine a envoyé un appel sur les réseaux sociaux qui a atteint des milliers de personnes. Le 15 mars, jour du procès, le tribunal était rempli de journalistes, de sympathisant·e·s et de représentant·e·s d’ambassades étrangères. Le tribunal a statué qu’Olena Chevtchenko n’avait commis aucune infraction et a classé l’affaire.

Avril

En avril, nous avons reçu de rares bonnes nouvelles du Myanmar, lorsque le nouveau président Win Myint a gracié 8 000 personnes, dont de nombreux prisonniers d’opinion. Parmi eux figurent les pasteurs kachins Dumdaw Nawng Lat et Langjaw Gam Seng, ainsi que Lahpai Gam, pour lesquels nous avions fait campagne afin d’obtenir leur libération.

Début avril, la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine a statué que les victimes civiles de la guerre, y compris les victimes de viol, ne devaient pas payer de frais de justice lorsque leurs demandes de réparation étaient rejetées. En collaboration avec TRIAL International, nous avons mené un long travail de plaidoyer en faveur de la suppression de ces frais. Cette décision pourrait encourager d’autres victimes à chercher à obtenir justice et réparation.

Mai

L’extraordinaire résultat du référendum irlandais, rejetant l’interdiction constitutionnelle de l’avortement, représente une grande victoire pour les droits des femmes. C’est le fruit d’années de travail acharné mené par des militants et militantes, y compris d’Amnesty International. En 2015, nous avons publié le rapport Ce n’est pas une criminelle. La loi sur l’avortement en Irlande et ses conséquences, dans lequel nous avons rassemblé des informations sur les obstacles et la stigmatisation liés à l’avortement, au travers de témoignages de femmes. En 2018, l’importance du pouvoir du peuple a été mise en avant une nouvelle fois tandis que des hommes et des femmes rentraient en Irlande pour voter et faire entendre leur voix. « C’est une campagne qui porte sur l’espoir, sur le fait de réaliser les droits des femmes à la santé et à la sécurité et d’en faire une priorité. C’est en soi un tournant incroyable. » – Catriona Graham, chargée de campagne irlandaise sur les droits des femmes

Nous nous réjouissons de la remise en liberté du dirigeant d’opposition et prisonnier d’opinion malaisien Anwar Ibrahim à l’issue du scrutin qui a vu Najib Razak battu par son mentor politique Mahathir Mohamad. Cet événement constitue un moment majeur pour les droits humains en Malaisie et offre un réel espoir de nouvelles réformes.

Fin mai, le parlement du Burkina Faso a adopté un nouveau code pénal qui abolit véritablement la peine de mort.

Le ministère moldave de l’Éducation a adopté un programme d’éducation aux droits humains élaboré par Amnesty Moldavie pour les écoles primaires et secondaires. Ce succès, pionnier dans la région, fait suite à une initiative pilote menée lors de l’année scolaire en cours, à laquelle ont participé près de 700 élèves de 22 écoles.

Juin

À la suite de notre travail de grande ampleur en Syrie, la coalition menée par les États-Unis a enfin annoncé qu’elle réexaminerait les affaires classées relatives aux victimes civiles. Cette coalition a d’abord nié et contesté nos conclusions sur les victimes civiles à Raqqa, avant que de nouveaux éléments soient apportés par nos enquêteurs et enquêtrices. Fin juillet, elle a reconnu 77 des 79 cas exposés dans notre rapport de juin, et revu à la hausse ses chiffres sur les pertes civiles à Raqqa (+300 %). Nous continuons de penser qu’il ne s’agit que de la partie émergée de l’iceberg. Nous avons lancé un nouveau projet des Décodeurs, appelé « Strike Tracker », et nous travaillerons en partenariat avec d’autres organisations – dont Airwars – afin de dresser un tableau plus complet des pertes civiles lors des attaques. Nous publierons nos conclusions début 2019.

Nous avons diffusé un rapport majeur sur la reddition de comptes pour les crimes contre l’humanité commis contre les Rohingyas au Myanmar. Ce document évoque certaines unités militaires et des forces de sécurité précises et cite 13 hauts fonctionnaires soupçonnés de crimes contre l’humanité. Deux jours avant la publication, l’UE a annoncé qu’elle prendrait des sanctions contre sept responsables des forces de sécurité, dont six apparaissent sur notre liste.

Juillet

L’artiste Liu Xia a enfin été autorisée à quitter la Chine pour se rendre en Allemagne, après presque huit ans d’assignation à résidence illégale. Elle était ainsi détenue depuis que le prix Nobel de la paix a été attribué à son époux Liu Xiaobo en 2010. Durant cette période, elle était étroitement surveillée par les agents de la sécurité de l’État et ne pouvait être contactée par téléphone que dans certaines circonstances. Plus tôt cette année, Amnesty International et PEN ont lancé une campagne réclamant la libération de Liu Xia, pendant laquelle un grand nombre d’écrivains connu·e·s ont lu des extraits des poèmes de cette femme.

La Palestinienne Ahed Tamimi, âgée de 17 ans, a été libérée 21 jours avant le terme de sa peine de huit mois de prison. Le tribunal militaire d’Ofer, en Cisjordanie occupée, l’a injustement condamnée au motif qu’elle avait représenté une menace pour des soldats, armés et portant un équipement de protection.

En Mauritanie, deux militants contre l’esclavage ont été libérés après avoir purgé les deux tiers de leur peine d’emprisonnement de trois ans. Abdallahi Matallah Seck et Moussa Biram se sont entretenus avec nous : « Votre soutien m’a donné le sentiment que nous ne sommes pas seuls dans notre combat pour la justice en Mauritanie. J’aimerais exprimer ma gratitude à chaque membre d’Amnesty. Merci pour votre travail remarquable en faveur de la libération de militants contre l’esclavage en Mauritanie. Merci de vous battre contre les injustices. Nous sommes fiers de votre travail. » – Moussa Biram

En Bosnie-Herzégovine, l’Assemblée nationale de la Republika Srpska a adopté la loi sur la protection des victimes de torture en temps de guerre, qui permettra enfin de reconnaître les victimes de violences sexuelles – y compris de viol – commises pendant le conflit, et de leur accorder réparation et soutien. Amnesty, avec ses partenaires locaux, milite depuis longtemps en faveur d’une telle loi afin de garantir à ces personnes l’accès à la justice et à la réparation.

Août

Après avoir passé 735 jours derrière les barreaux, Tep Vanny – militante bien connue qui se bat pour les droits fonciers et humains – a enfin été remise en liberté. Elle fait partie du grand nombre de défenseur·e·s des droits humains et de manifestant·e·s qui ont bénéficié d’une grâce royale au Cambodge. Condamnée alors qu’elle manifestait pacifiquement, cette femme a été libérée seulement six mois avant la fin de sa peine. Plus de 200 000 personnes à travers le globe ont participé à notre campagne en sa faveur.

« Je remercie toutes les personnes qui ont milité pour ma libération et pour me permettre de retrouver mes enfants et mes parents. Vous avez été d’un grand réconfort et grâce à vous, je ne me suis pas sentie seule. J’apprécie votre gentillesse et votre travail pour améliorer la situation des droits humains dans le monde. » – Tep Vanny

Septembre

Quelques jours après la diffusion d’une communication d’Amnesty International, 38 000 sympathisants et sympathisantes sont passé·e·s à l’action en ligne pour dénoncer le placement en détention d’un grand nombre d’Ouïghours, de Kazakhs et d’autres personnes issues de minorités ethniques majoritairement musulmanes dans le nord-ouest de la Chine. Nous nous sommes entretenus avec une Kazakhe à Almaty (Kazakhstan) qui est convaincue que la libération de sa fille de 13 ans est due à notre campagne en sa faveur. Aux Émirats arabes unis, un Ouïghour a été remis en liberté à l’issue de notre campagne contre son renvoi forcé en Chine.

Par ailleurs, la Cour suprême indienne a enfin dépénalisé les relations consensuelles entre personnes du même sexe, en ajoutant que toute discrimination sur la base de l’orientation sexuelle viole les droits fondamentaux garantis par la Constitution.

Le travail de recherche et de campagne mené par Amnesty pour dévoiler les atteintes courantes au droit du travail au Qatar constitue un effort continu. En septembre, les autorités ont annoncé la suppression du visa de sortie pour la plupart des travailleurs migrants. Ce document empêchait ces derniers de quitter le Qatar sans la permission de leur employeur. C’est l’une des premières grandes réformes mises en œuvre dans le cadre du partenariat du Qatar avec l’Organisation internationale du travail. Elle fait suite aux années de travail d’Amnesty, qui a notamment révélé des atteintes au droit du travail sur les sites liés à la Coupe du monde de football de 2022.

Le Parlement européen a rejoint les appels d’Amnesty et voté en faveur d’une résolution réclamant l’interdiction internationale des systèmes d’armement totalement autonomes, ou « robots tueurs ». Ce texte vise à empêcher le développement, la prolifération et l’usage de tels systèmes, qui peuvent choisir leurs propres cibles et tuer sans aucune intervention humaine.

Victoire Ingabire – cheffe de file de l’opposition rwandaise – et Kizito Mihigo – chanteur populaire – ont été libérés de prison après avoir été graciés par le président rwandais Paul Kagame. Bien qu’ils continuent de faire l’objet de restrictions, nous estimons qu’il s’agit d’un pas dans la bonne direction. Victoire Ingabire a été condamnée pour avoir exprimé ses opinions, ce qui bafouait sa liberté d’expression. Son droit à un procès équitable n’a pas non plus été respecté. Amnesty exprime des inquiétudes quant à l’affaire de cette femme depuis plusieurs années.

Octobre

À l’occasion de la Journée mondiale contre la peine de mort, le nouveau gouvernement malaisien a annoncé prévoir d’abolir pleinement la peine capitale. C’est le fruit d’années de plaidoyer dans ce pays, y compris auprès d’ancien membres de l’opposition, aujourd’hui au pouvoir. Dans les jours qui ont suivi, la peine de mort a été qualifiée d’anticonstitutionnelle dans l’État de Washington, qui devient le vingtième État abolitionniste des États-Unis.

La blogueuse « Mère Champignon » a été relâchée après plus de deux ans de prison au Viêt-Nam. Nguyễn Ngọc Như Quỳnh, plus connue sous son pseudonyme de blogueuse Mẹ Nấm (« Mère Champignon »), a été arrêtée le 10 octobre 2016, détenue au secret jusqu’au 20 juin 2017 puis condamnée à 10 ans de prison le 29 juin 2017.

« Cette bonne nouvelle, véritable soulagement après deux ans derrière les barreaux, ne doit pas faire oublier la tendance croissante à l’incarcération au Viêt-Nam, qui jette en prison quiconque critique le régime, a déclaré Nicholas Bequelin, d’Amnesty International.

Si Mère Champignon n’est plus incarcérée, la condition de sa libération est l’exil et plus de 100 personnes croupissent encore en prison parce qu’elles se sont exprimées sans violence – en public, sur des blogs ou sur Facebook. »

Novembre

Après des années de campagne, la Haute cour du Gauteng-Nord a décidé que le gouvernement sud-africain ne pouvait pas accorder de permis pour exploiter du titane dans la mine de Xolobeni sans l’accord des communautés indigènes. C’est une grande victoire pour la population de Xolobeni, qui se bat depuis longtemps pour avoir le droit d’être consultée et de donner ou non son accord quant à l’exploitation minière de ses terres ancestrales.

« Nous vivons dans une zone magnifique et en paix, où nous partageons tout, la nourriture, la terre et l’amour. Les élites ont découvert ce que nous avons et aimeraient nous le prendre, a déclaré Nonhle Mbuthuma, défenseure des droits humains issue de la communauté Amadiba. Certains de mes collègues ont été tués, et je sais que ça pourrait être mon tour. Mais je n’ai pas peur. »

La proposition de placer le droit suisse au-dessus du droit international a été rejetée lorsque les Suisses ont voté pour défendre le droit international lors d’un récent référendum. « Le peuple suisse a montré qu’il n’était pas tombé dans le piège de fausses promesses. Il a plutôt choisi les urnes pour clairement faire comprendre qu’il veut vivre dans une société où les droits humains s’appliquent à tous. » – Kumi Naidoo, secrétaire général d’Amnesty International

Décembre

Nous avons publié le rapport Notre impact… et ce qu’il reste à faire pour célébrer les accomplissements d’Amnesty l’année dernière et les personnes courageuses qui ont contribué à rendre cela possible. Mais surtout, nous avons saisi l’occasion pour nous interroger sur ce qu’il reste à faire et rendre hommage à ceux et celles qui continuent de se battre face aux injustices.

Nous avons lancé Écrire pour les droits, la plus grande campagne mondiale de rédaction de lettres. Cette année, Amnesty met en avant des femmes défenseures des droits humains jetées en prison, torturées, voire tuées en raison de leur travail. Nous voulons leur montrer qu’elles ne sont pas seules et que partout dans le monde, des gens sont inspirés par leur courage. Vous les avez soutenues en écrivant des milliers de lettres de soutien. Nous ne pouvons pas vous remercier assez pour votre appui, votre contribution à la campagne et vos lettres. Cela change véritablement des vies !