- Près des trois quarts (73 %) des personnes interrogées dans 15 pays soutiennent la proposition visant à ce que la FIFA utilise les recettes encaissées grâce à la Coupe du monde pour indemniser les travailleurs et travailleuses qui ont souffert lors de la préparation de ce tournoi
- Plus des deux tiers (67 %) veulent que leurs associations de football nationales s’expriment publiquement au sujet des problèmes en matière de droits humains liés à la Coupe du monde 2022 organisée au Qatar
- Il faut que la FIFA mette en place un programme de réparation avant le lancement de la Coupe du monde le 20 novembre 2022
Un sondage mondial commandé par Amnesty International révèle que près des trois quarts (73 %) des adultes interrogés dans les pays étudiés sont en faveur que la FIFA indemnise les travailleuses et travailleurs migrants qui ont souffert pendant la préparation de la Coupe du monde 2022 au Qatar. Le soutien est même encore plus marqué chez les personnes susceptibles de regarder au moins un match de ce tournoi (84 %).
Le sondage réalisé par YouGov, qui a interrogé plus de 17 000 adultes dans 15 pays, montre également qu’une grande majorité des personnes interrogées (67 %) veulent que leurs associations de football nationales s’expriment publiquement au sujet des problèmes en matière de droits humains liés à la Coupe du monde 2022 organisée au Qatar, y compris en s’exprimant en faveur d’une indemnisation des travailleuses et travailleurs migrants.
« Les résultats de ce sondage sont un message clair adressé aux dirigeant·e·s du football. Partout dans le monde, des personnes partagent le souhait de voir la FIFA agir en apportant réparation pour les souffrances endurées par les travailleuses et travailleurs migrants au Qatar. Elles veulent également que leurs associations nationales de football prennent position de façon beaucoup plus ferme, a déclaré Steve Cockburn, directeur du programme Justice économique et sociale d’Amnesty International.
« Comme il ne reste plus que 50 jours avant le début du tournoi, le temps presse. La FIFA a encore le temps de faire ce qu’il faut. Les supporteurs et supporteuses ne veulent pas d’une Coupe du monde marquée de manière indélébile par des atteintes aux droits humains. On ne peut pas changer le passé, mais un programme d’indemnisation serait un moyen clair et simple permettant à la FIFA et au Qatar d’apporter au moins quelques mesures de réparation pour les centaines de milliers de travailleurs et travailleuses qui ont rendu possible ce tournoi. »
Les résultats du sondage viennent appuyer la campagne #PayUpFIFA lancée par une coalition d’organisations de défense des droits humains — dont Amnesty International — d’associations de fans et de syndicats en mai 2022, pour demander à la FIFA de créer un fonds d’indemnisation des travailleurs et travailleuses et d’empêcher que d’autres abus ne soient commis. La coalition demande à la FIFA de créer un fonds d’au moins 440 millions de dollars des États-Unis – l’équivalent des prix en argent qu’elle verse lors de la Coupe du monde. La FIFA va selon les estimations engranger six milliards de dollars des États-Unis de recettes avec ce tournoi.
À la suite du lancement de la campagne, la FIFA a indiqué à Amnesty International qu’elle étudiait cette proposition, mais elle n’a jusqu’à présent pas répondu publiquement.
La campagne #PayUpFIFA attire en outre l’attention sur le fait que les associations nationales de football ont la responsabilité, au regard des normes internationales relatives aux droits humains, de soutenir les mesures de réparation pour les travailleuses et travailleurs migrants compte tenu de leur participation à la Coupe du monde. Cependant, si les associations de football belge, danoise, anglaise, allemande et norvégienne ont jusqu’à présent exprimé leur soutien en faveur du principe des réparations, quand des journalistes leur ont posé la question, aucune association de football n’a jusqu’à présent fait de déclaration publique officielle appelant précisément la FIFA à créer un tel programme de réparation.
Un soutien mondial
YouGov a interrogé 17 477 adultes en Argentine, en Belgique, au Danemark, en Espagne, aux États-Unis, en Finlande, en France, en Allemagne, au Kenya, au Mexique, au Maroc, en Norvège, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et en Suisse. Parmi les personnes interrogées, 54 % disent qu’elles sont susceptibles de regarder au moins un des matchs de la Coupe du monde.
Près des trois quarts (73 %) des personnes interrogées — et 84 % de celles qui sont susceptibles de regarder au moins un des matchs de la Coupe du monde — disent être en faveur de la proposition visant à ce que la FIFA utilise une partie des recettes générées par la Coupe du monde 2022 pour indemniser les travailleuses et travailleurs migrants qui ont souffert pendant la préparation de ce tournoi. Le plus fort soutien vient du Kenya, où 93 % des personnes interrogées sont en faveur d’une indemnisation. Des milliers de Kenyan·ne·s travaillent au Qatar, où Amnesty International a rassemblé des informations sur de nombreux abus, notamment sur des cas de travail forcé dans les secteurs de la sécurité, du bâtiment et des employé·e·s de maison.
Le soutien en faveur d’une indemnisation dépasse également les trois quarts au Mexique, un des pays hôtes de la Coupe du monde 2026, (86 %), en Espagne (83 %), en Argentine (82 %), en Suisse (81 %), en Finlande (79 %) et en Belgique (77 %), et le soutien parmi les personnes susceptibles de regarder la Coupe du monde est encore plus élevé : plus de 80 % dans 11 des 15 pays. Seuls 10 % des personnes interrogées disent s’opposer à ce que la FIFA fournisse une indemnisation, et les 17 % restants disent ne pas avoir d’opinion à ce sujet.
Plus des deux tiers (67 %) des personnes interrogées pensent aussi que leurs associations de football nationales devraient s’exprimer publiquement au sujet des problèmes en matière de droits humains liés à la Coupe du monde 2022 organisée au Qatar, notamment en appelant à une indemnisation des travailleuses et travailleurs migrants. Le soutien le plus fort vient du Kenya (93 %) et il est supérieur ou égal à 70 % en Espagne (74 %), en Finlande (71 %), au Mexique (71 %), en France (70 %), en Norvège (70 %), en Suisse (70 %) et au Royaume-Uni (70 %). Le soutien est là aussi plus marqué encore (71 %) chez les personnes susceptibles de regarder au moins un match de ce tournoi.
#PayUpFIFA
Depuis 2010, année où la FIFA a attribué la Coupe du monde 2022 au Qatar sans exiger aucune amélioration concernant la protection des travailleurs et travailleuses, des centaines de milliers de travailleuses et travailleurs migrants subissent des atteintes aux droits humains dans le cadre de leur travail de construction et de prestation de service pour les stades, les hôtels, les transports et les autres infrastructures nécessaires pour l’organisation de ce tournoi.
Amnesty International appelle la FIFA et le Qatar à mettre sur pied un programme de réparation avec la pleine et entière participation des travailleurs et travailleuses, des syndicats, de l’Organisation internationale du travail et de la société civile. Ce programme doit être établi et une première réunion des parties intéressées devra avoir lieu avant le lancement du tournoi, le 20 novembre 2022.
Outre la couverture de tout un ensemble de frais d’indemnisation, notamment le paiement des salaires qui n’ont pas été versés, des frais d’embauche exorbitants payés par des centaines de milliers de travailleurs et travailleuses, et les indemnités pour les blessures et les morts, le programme doit également soutenir les initiatives pour la protection à l’avenir des droits des travailleurs et travailleuses.
Informations complémentaires
Vous trouverez ici les résultats complets de ce sondage.
La réponse de la FIFA concernant le rapport d’Amnesty International sur les réparations de mai 2022 est annexée au rapport. Le rapport était accompagné d’une lettre ouverte adressée au président de la FIFA, Gianni Infantino, par Amnesty International et une coalition d’organisation de défense des droits humains, de syndicats et d’associations de fans.
En 2018, le Qatar a adopté une série de réformes importantes du droit du travail dans le but de mieux protéger les droits des travailleurs et travailleuses, mais comme ces réformes ne sont pas appliquées, les graves atteintes aux droits de ces personnes perdurent. En outre, le Comité suprême a adopté en 2014 des normes relatives au bien-être des travailleurs, améliorant ainsi le sort des personnes employées sur les sites officiels de la FIFA, comme les stades, mais elles ne sont pas universellement respectées et ne couvrent qu’une minorité des centaines de milliers de personnes employées sur les projets de la Coupe du monde.
En 2018, l’instance qatarienne chargée de l’organisation de la Coupe du monde, le Comité suprême, a pris une initiative positive comprenant un accord conclu avec les sous-traitants engagés sur les sites officiels de la Coupe du monde qui prévoit de rembourser les frais de recrutement de 48 000 travailleurs et travailleuses. Toutefois, cet accord ne concerne pas les centaines de milliers de travailleurs et travailleuses employés sur d’autres sites et infrastructures essentiels pour la Coupe du monde, comme les transports, les équipements collectifs et les hôtels.
Tous les chiffres, sauf indication contraire, proviennent de YouGov Plc. Taille totale de l’échantillon : 17 477 adultes. Le sondage a été réalisé entre le 16 août et le 6 septembre 2022. Ce sondage a été réalisé en ligne. Les chiffres ont été pondérés et sont représentatifs de l’ensemble des adultes (personnes âgées de plus de 18 ans) des pays inclus dans ce sondage.