L’accord politique sur la Loi sur les services numériques (Digital Services Act, DSA) auquel sont parvenus les co-législateurs est un moment historique dans l’histoire de la réglementation d’Internet, a déclaré Amnesty International le 23 avril 2022.
La Loi sur les services numériques comprend de nouvelles règles qui obligeront les plateformes des géants technologiques – y compris Facebook et Instagram (détenu par Meta) et YouTube (détenu par Google) – à évaluer et gérer les risques systémiques posés par leurs services, tels que l’incitation à la haine et la diffusion de fausses informations.
Pour la première fois, les géants du numérique devront se soumettre à des audits annuels indépendants et donner aux régulateurs et aux chercheurs tiers, y compris la société civile, l’accès aux données des plateformes et un aperçu de leurs « boîtes noires » algorithmiques afin de permettre un examen plus approfondi et l’obligation de rendre des comptes.
Cet accord sur la Loi sur les services numériques (DSA) nous fait progresser vers un monde en ligne plus respectueux de nos droits humains, en freinant efficacement le pouvoir incontrôlé des géants technologiques
Claudia Prettner, conseillère juridique et politique à Amnesty Tech
« Cet accord sur la Loi sur les services numériques (DSA) marque un tournant décisif dans l’histoire de la régulation d’Internet. Il nous fait progresser vers un monde en ligne plus respectueux de nos droits humains, en freinant efficacement le pouvoir incontrôlé des géants technologiques, a déclaré Claudia Prettner, conseillère juridique et politique à Amnesty Tech.
« Depuis trop longtemps, nos données les plus intimes sont utilisées comme des armes pour saper notre droit à la vie privée, amplifier la désinformation, alimenter le racisme, voire influencer nos propres croyances et opinions. L’accord sur la Loi sur les services numériques protégera enfin les citoyen·ne·s de l’UE contre la collecte intrusive de données et les publicités qui utilisent des informations personnelles – croyances religieuses, opinions politiques ou préférences sexuelles – d’une manière que nous n’aurions jamais imaginée ni souhaitée.
« Toutefois, la DSA aurait pu aller plus loin et éliminer toutes les pratiques publicitaires intrusives basées sur la surveillance afin de vraiment défendre les droits des citoyennes et des citoyens à la vie privée, à la protection des données et à la non-discrimination.
« Il est désormais crucial qu’elle soit fermement appliquée pour ne pas être un simple bout de papier. Il est également vital que d’autres juridictions autour du monde prennent exemple et adoptent des lois strictes visant à mieux protéger les utilisateurs contre les préjudices causés par les modèles économiques fondés sur la surveillance des géants de la technologie. »
En adoptant une approche systémique pour lutter contre les abus, la DSA contribuera à protéger les valeurs humaines fondamentales – la dignité, l’autonomie et la vie privée – à l’ère numérique. Elle marque une première étape vers la refonte du modèle économique dominant de Big Tech, axé sur le profit et fondé sur la surveillance, en un modèle qui atténue enfin les risques relatifs aux droits humains.
Amnesty International se félicite que la DSA exige que les principales plateformes examinent la manière dont leurs systèmes algorithmiques, leurs modèles publicitaires et leurs pratiques liées aux données contribuent aux risques systémiques, et adaptent leurs systèmes et processus en conséquence lorsque des failles sont identifiées.
La Loi sur les services numériques permettra également aux utilisateurs de choisir la manière dont les contenus leur sont présentés dans leurs fils d’actualité : ils pourront par exemple choisir l’ordre chronologique au lieu du profilage algorithmique réglé pour maximiser et maintenir l’engagement.
Complément d’information
La Commission européenne a proposé La loi sur les services numériques le 15 décembre 2020 afin de mettre à jour les règles relatives aux services numériques au sein de l’UE. Amnesty International fait campagne et milite pour que la législation garantisse une protection adéquate des droits humains en ligne.
À la suite de débats et de mois de plaidoyer et de campagne de la société civile, les négociateurs du Parlement européen, de la présidence française du Conseil de l’UE et de la Commission européenne sont parvenus le 23 avril 2022 à un accord sur la Loi sur les services numériques.
Le texte final n’a pas encore été publié, mais l’accord comprend des dispositions clés défendues par la société civile, malgré les efforts de lobbying sans précédent déployés par les entreprises technologiques.
Dans un sondage publié par Amnesty International et Global Witness en janvier, les dirigeant·e·s de petites entreprises en France et en Allemagne ont déclaré appeler de leurs vœux des solutions alternatives à la publicité basée sur le suivi prédominante sur Facebook et Google.