Genève. L’ONU doit reconnaître le droit à un environnement sain

Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU doit reconnaître en tant que droit humain universel le fait de bénéficier d’un environnement sûr, propre et sain, a déclaré Amnesty International le 13 septembre. Alors que des millions de personnes souffrent de la faim et doivent se déplacer à cause des effets du changement climatique et de la dégradation de l’environnement, il est plus évident que jamais que la vie et la dignité humaines dépendent d’un environnement sain. 

Il est facile de ne pas faire grand cas de notre planète tant que l’on ne voit pas le coût humain de sa dégradation

Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International

La 48e session ordinaire du Conseil des droits de l’homme (CDH) débute aujourd’hui à Genève. Amnesty International se joint à plus de 1 100 organisations de la société civile et organisations de peuples autochtones pour demander aux États membres d’adopter une résolution visant à reconnaître formellement le droit à un environnement sain. Les États membres devraient également créer un nouveau mandat pour une procédure spéciale de l’ONU sur les droits humains et le changement climatique. 

« Les effets dramatiques du changement climatique mettent en évidence, de façon affreusement claire, le fait qu’un environnement sain est indispensable pour l’exercice de tous nos autres droits. Il est facile de ne pas faire grand cas de notre planète tant que l’on ne voit pas le coût humain de sa dégradation : faim, déplacement, chômage, privation de logement, maladies et mort, a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International.

« L’inaction des gouvernements face au changement climatique en dépit des preuves scientifiques pourrait constituer la plus grave violation intergénérationnelle des droits humains de toute l’histoire de l’humanité. En tant que principal organe international de défense des droits humains, le CDH se doit d’utiliser tous les outils dont il dispose pour contrer cette crise. Nous demandons à tous les États de soutenir la reconnaissance du droit à un environnement sain, à l’ONU et au niveau national. Ceux qui ne voudront pas le faire basculeront du mauvais côté de l’histoire et se positionneront contre l’avenir commun de l’humanité. »   

Un droit humain crucial

Le droit à un environnement sain est juridiquement reconnu dans plus de 80 % des États membres de l’ONU, par leur Constitution, leur législation, dans des décisions judiciaires ou dans des traités régionaux. Pour beaucoup, il est également implicitement contenu dans les traités internationaux relatifs aux droits humains, même s’il n’a pas été explicitement reconnu par les États au niveau des Nations unies. Un grand nombre d’entités de l’ONU et d’autres organes intergouvernementaux, ainsi que d’ONG, de syndicats et de groupes d’entreprises ont exprimé leur soutien en faveur de la reconnaissance mondiale du droit à un environnement sain.   

La reconnaissance de ce droit au niveau de l’ONU indiquerait clairement que les États ont l’obligation de protéger, respecter et appliquer ce droit.

Elle encouragerait les États qui ne le reconnaissent toujours pas dans leur législation nationale à le reconnaître enfin, et inciterait les autres à renforcer leur législation en la matière. Cela soutiendrait aussi le travail essentiel effectué par les défenseur·e·s des droits humains liés à l’environnement, en consolidant la légitimité de leurs initiatives et en intensifiant la pression exercée sur les États pour qu’ils les protègent contre les menaces et les attaques. 

Quand l’ONU a adopté en 2010 des résolutions reconnaissant les droits fondamentaux à l’eau potable et à l’assainissement, les investissements ont été accrus avec des milliards de dollars injectés dans les infrastructures nécessaires, ce qui a considérablement amélioré les conditions de vie de centaines de millions de personnes

Agnès Callamard

Avec la création d’une procédure spéciale sur le changement climatique et les droits humains, cette reconnaissance formelle permettrait également à l’ONU d’inciter plus facilement les États à améliorer leurs performances concernant les questions liées à l’environnement.

Actuellement, la participation des organes de défense des droits humains aux questions relatives à l’environnement dépend du lien existant entre les effets sur l’environnement et les autres droits. Par exemple, ils pourraient regarder si le droit à un logement convenable est violé en conséquence de la déforestation, ou si le droit à la santé est menacé par l’incapacité à remédier au problème de la pollution de l’air. 

La reconnaissance universelle du droit à un environnement sain permettrait aux organes de l’ONU chargés de la défense des droits humains d’examiner directement le respect par les États de leurs obligations en matière de droits humains liées à l’environnement, et d’apporter directement un soutien et une aide aux États pour encourager ce respect.

Les recherches montrent que la reconnaissance au niveau de l’État du droit à un environnement sain contribue à de meilleurs résultats quant à l’environnement, notamment avec un air plus propre, un accès accru à l’eau potable et une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Elle donne également aux communautés les moyens de défendre leurs droits face à des dégradations de l’environnement liées à la responsabilité de l’État ou d’entreprises.

« Comme l’a souligné le rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’environnement, quand l’ONU a adopté en 2010 des résolutions reconnaissant les droits fondamentaux à l’eau potable et à l’assainissement, cela a amené de nombreux États à inclure ces droits dans leur législation nationale. Et les investissements ont été accrus avec des milliards de dollars injectés dans les infrastructures nécessaires, ce qui a considérablement amélioré les conditions de vie de centaines de millions de personnes, a déclaré Agnès Callamard.

« La reconnaissance du droit à un environnement sain pourrait engendrer une transformation semblable en ce qui concerne l’attitude des États face au changement climatique. Nous demandons aux États membres du CDH de saisir cette occasion de renforcer le travail du CDH quant à la crise climatique, qui représente l’un des défis les plus redoutables et urgents en matière de droits humains de l’histoire de l’humanité. »