Le Zimbabwe au bord de la crise

Au Zimfbabwe, la violence atteint un niveau tel que le pays se dirige vers une situation de crise. Des « vétérans » enrôlent de force des jeunes pour attaquer des personnes soupçonnées de soutenir l’opposition.

« Ceux qui refusent de se livrer à ces actes violents sont agressés par des “vétérans” qui les accusent d’être des sympathisants du Mouvement pour le changement démocratique (MDC) », a indiqué Simeon Mawanza, responsable des recherches sur le Zimbabwe à Amnesty International.

Des témoins ont signalé à Amnesty International qu’un grand nombre de sympathisants de l’Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (ZANU-PF) et de « vétérans » agressent des sympathisants supposés du MDC dans les districts de Mberengwa (province du Midlands) et de Mazowe (province du Mashonaland-Centre).

Dans le district de Mberengwa, une bande regroupant de nombreux sympathisants du ZANU-PF, dont la plupart sont des jeunes recrutés de force par des « vétérans », attaque les maisons des personnes soupçonnées d’avoir voté pour le MDC aux élections du 29 mars. Dans le district de Mazowe, un témoin a signalé la présence d’une autre bande de ce type dans la région de Chiweshe. La police ne semble pas vouloir mettre fin à la violence. Elle se contente d’arrêter des sympathisants du MDC soupçonnés d’avoir attaqué des sympathisants présumés du ZANU-PF.

« Nous sommes particulièrement préoccupés par la sécurité des personnes qui vivent dans des zones rurales reculées où la violence fait rage loin des caméras, a ajouté Simeon Mawanza. Les victimes de ces violences vivent un calvaire. Les organisations humanitaires et les organisations non gouvernementales (ONG) locales sont prises pour cibles lorsqu’elles veulent venir en aide à ces personnes, qui se retrouvent privées de toute aide médicale. »

Dans les zones rurales, les victimes d’agressions doivent parcourir de grandes distances à pied pour échapper à la violence, et elles cherchent de plus en plus refuge dans les villes. Certaines écoles à la campagne ont dû fermer parce que les enseignants, soupçonnés d’être des sympathisants du MDC, avaient fui cette violence cautionnée par l’État.

Amnesty International est préoccupée par la sécurité de Tonderai Ndira, un sympathisant du MDC qui aurait été enlevé à son domicile à Mabvuku, banlieue populaire de Harare, le 14 mai à l’aube. Selon certaines informations, neuf hommes armés en civil l’auraient agressé et emmené, nu, dans une camionnette Toyota blanche. On ne l’a pas revu depuis.

Tonderai Ndira fait partie des 32 membres du MDC qui ont été torturés pendant leur détention par des agents de l’État en 2007. Il a été détenu pendant plus de deux mois à la prison centrale d’Harare avant que les charges retenues contre lui ne soient finalement abandonnées.

Amnesty International a également reçu des informations selon lesquelles Sinoia Pfebve, âgé de soixante-dix-neuf ans, et son épouse Serena Pfebve, âgée de soixante-seize ans, ont été enlevés le 13 mai par des personnes qui seraient des « vétérans », dans le district de Mt. Darwin (province du Mashonaland-Centre). Ils auraient été emmenés dans l’école primaire de Nyakatondo, où sont basés les ravisseurs. La famille Pfebve a des liens politiques avec le MDC : le fils du couple s’est présenté comme candidat du MDC aux élections législatives de 2000 et lors d’une élection partielle en 2001.

Depuis les élections, 22 personnes au moins ont été tuées et plus de 900 blessées dans les violences. Plusieurs centaines d’entre elles ont dû être hospitalisées. Des centaines de familles ont dû fuir de chez elles, leurs maisons ayant été incendiées par des groupes de « vétérans » et de jeunes du ZANU-PF.

Amnesty International a appelé le gouvernement du Zimbabwe à dénoncer publiquement tous les actes de violence commis par des sympathisants du ZANU-PF, des « vétérans » et des soldats, ainsi que les violences commises par tout autre parti, et à collaborer avec les autres partis politiques pour mettre fin immédiatement à la violence politique.