Le concert qui a fait bouger toute une génération

Alors qu’Amnesty International s’apprête à lancer une nouvelle tournée de concerts dans la lignée de Human Rights Now! pour une nouvelle génération, Paul Paz y Miño d’Amnesty International États-Unis se souvient des concerts qui l’ont incité à devenir militant.

Ayant reçu une éducation Quaker, j’ai toujours accordé une grande importance à la justice sociale, et c’est la musique qui m’a ouvert les portes d’Amnesty International. J’ai été membre actif d’Amnesty International États-Unis et responsable bénévole pendant plus de la moitié de ma vie, et tout a commencé par la tournée Human Rights Now! à Philadelphie, en 1988.

Déjà grand fan de Peter Gabriel et Genesis, il était impensable que je rate ce concert et j’attendais tout particulièrement son hymne aux droits humains, « Biko ». Ajoutons qu’avec à l’affiche Sting, Bruce Springsteen, Youssou N’Dour et Tracy Chapman – des artistes très engagés dans la défense des droits humains – ce spectacle promettait d’être différent de tout ce que j’avais pu voir auparavant.

Avant Live 8, avant 12-12-12, avant le Concert for New York City, Bruce Springsteen, Sting, Peter Gabriel, Tracy Chapman et Youssou N’Dour ont fait équipe avec Amnesty International pour éduquer et inciter toute une génération à militer. Même l’icône folk Joan Baez les a rejoints à Philadelphie. Cette soirée restera à jamais gravée dans ma mémoire. Ces artistes ont contribué à faire croître un mouvement mondial en faveur des droits humains et j’étais exalté d’en faire partie. Ce soir-là, je suis devenu membre à vie d’Amnesty International.

Ce soir-là, plus de 75 000 militants se pressaient dans l’ancien stade Robert F. Kennedy de Philadelphie, le plus grand stade qu’ait jamais eu la ville, et la foule était galvanisée, toute la nuit. Lorsque Peter Gabriel a joué son émouvant hommage au dirigeant du mouvement Black Consciousness (Conscience noire) en Afrique du Sud – Stephen Biko, assassiné en prison par la police sud-africaine – toute la foule a brandi son poing en l’air et l’on pouvait sentir la force de la solidarité et du mouvement populaire.

Être au milieu de cette foule de 75 000 personnes, c’est quelque chose que je n’oublierai jamais. Et je me suis vite rendu compte que nous n’étions pas là seulement pour la musique, nous étions là pour les centaines de milliers de personnes persécutées aux quatre coins du globe simplement en raison de leur identité ou de leurs opinions. Nous étions là pour amplifier un appel en faveur de la justice afin qu’il ne puisse être ignoré. Nous étions là pour inciter des millions de personnes à agir grâce au pouvoir de transformation de la musique.

Je me suis inscrit comme membre d’Amnesty directement à ce concert – comme les centaines de milliers de personnes qui ont rejoint l’organisation dans le sillage de cette tournée. Ce nombre ayant rapidement dépassé le million de membres dans le monde, le pouvoir d’Amnesty en tant que force de changement s’en est trouvé renforcé.

Lorsque Bruce Springsteen a joué l’ultime note de ce concert, la foule a exulté. Les lumières se sont rallumées et tous sont revenus sur la scène – Sting, Peter Gabriel, Tracy Chapman, Youssou N’Dour et Joan Baez. Chacun d’entre eux avait livré une performance incroyable et ils revenaient maintenant tous ensemble chanter sous la houlette du Boss une reprise de Chimes of Freedom de Bob Dylan. C’était un moment fort, très fort, lorsque nous avons tous repris en chœur ce morceau ; nous étions tous conscients que nous prenions l’engagement de faire entendre nos voix contre l’injustice. La promesse que j’ai faite cette nuit-là m’a accompagné tout au long de ma vie, et j’essaie aujourd’hui encore d’être à la hauteur de cet engagement.

Le concert Bringing Human Rights Home se déroulera à New York et en ligne. Y participeront notamment the Flaming Lips, Lauryn Hill, Tegan and Sara et Cold War Kids. Nadejda Tolokonnikova et Maria Alekhina des Pussy Riot seront également présentes.