Zimbabwe. La première année de mandat d’Emmerson Mnangagwa marquée par une «répression brutale et systématique des droits humains»

Durant sa première année comme président du Zimbabwe, Emmerson Mnangagwa a dirigé une répression brutale et systématique des droits humains, notamment en réprimant les manifestations et en menant une chasse aux sorcières contre les personnes osant s’opposer à son gouvernement, a déclaré Amnesty International lundi 26 août.

De nombreux Zimbabwéens ont en outre vu leur situation socio-économique se dégrader au cours des 12 derniers mois. En raison de la mauvaise santé économique du pays, le prix des carburants est monté en flèche et la forte inflation a fait flamber les prix de denrées de base telles que le pain et amoindri les revenus des citoyens.

« Depuis que le président Emmerson Mnangagwa est au pouvoir, les droits humains sont attaqués impitoyablement au Zimbabwe, notamment le droit à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association, de plus en plus restreint et criminalisé, a déclaré Muleya Mwananyanda, directrice adjointe pour l’Afrique australe à Amnesty International.

« Les autorités affichent un mépris flagrant pour les libertés fondamentales et ont montré qu’il n’y a pas de place pour la dissidence dans la “nouvelle pratique” du pouvoir. Il est déjà arrivé qu’elles aient recours aux mêmes tactiques brutales que celles qui étaient employées par le prédécesseur d’Emmerson Mnangagwa, Robert Mugabe, pour réprimer l’exercice des droits humains. »

Répression des manifestations

Récemment, des policiers armés de matraques ont attaqué violemment des manifestants pacifiques qui s’étaient rassemblés à Harare en vue des manifestations nationales du 16 août contre la dégradation de la situation économique et sociale dans le pays. Cette attaque a fait de nombreux blessés. Jeudi 15 août, avant le rassemblement, la police zimbabwéenne avait annoncé l’interdiction des manifestations par le biais d’un communiqué de presse, en affirmant qu’elles seraient marquées par des violences. Après la manifestation avortée, 128 militants au moins ont été arrêtés et placés en détention. Des manifestations prévues ont également été interdites et des militants arrêtés dans quatre autres villes du pays.

En février 2019, Amnesty International a publié des informations faisant état de 15 homicides imputables à la police dès le début des manifestations contre la hausse du prix des carburants, qui ont commencé le 14 janvier. Les autorités ont procédé à des arrestations massives ; des centaines de personnes ont été placées en détention pour divers chefs d’accusation dont celui d’incitation à la violence publique. À la fin avril, près de 400 personnes avaient été condamnées par la justice, la plupart à l’issue de procès expéditifs.

Lors des manifestations, la police a eu recours à une force excessive et meurtrière, en utilisant notamment des gaz lacrymogènes, des matraques, des canons à eau et des balles réelles. Elle a également lancé une chasse aux sorcières visant les organisateurs des manifestations et d’autres éminents dirigeants et militants de la société civile. Certaines des personnes arrêtées – parmi lesquelles Evan Mawarire, pasteur et militant local bien connu, et le syndicaliste Peter Mutasa – font encore l’objet de poursuites fallacieuses pour trahison à la suite des manifestations. Le ministère public a inculpé un nombre record de 22 personnes pour tentative de déstabilisation d’un gouvernement constitutionnel dans le cadre de ce mouvement.

Les personnes soupçonnées d’être liées aux mouvements de protestation ont été pourchassées tout au long de l’année. En mai, sept défenseurs des droits humains ont été arrêtés à l’aéroport international Robert Mugabe alors qu’ils revenaient d’un atelier de renforcement des capacités sur les techniques de protestation non violentes organisé aux Maldives. Ces militants et militantes – Stabile Dewah, George Makoni, Tatenda Mombeyarara, Gamuchirai Mukura, Nyasha Mpahlo, Farirai Gumbonzvanda et Rita Nyamupinga – ont été accusés de « complot en vue de renverser le gouvernement du président Emmerson Mnangagwa » et attendent leur procès.

Des militants des droits humains continuent d’être victimes d’enlèvements et d’actes de torture visant à les empêcher de s’exprimer librement. Le 21 août, l’humoriste Samantha Kureya a été enlevée à son domicile par des hommes masqués et torturée après avoir publié un sketch sur la violence policière.

« Pendant sa première année de mandat, le gouvernement du président Emmerson Mnangagwa a montré peu de respect à l’égard des droits humains et de l’état de droit, dans la continuité de la tendance observée du temps où Robert Mugabe était au pouvoir, a déclaré Muleya Mwananyanda.

« Alors qu’il entame sa deuxième année d’exercice, le président a l’occasion de repartir sur de nouvelles bases en prenant immédiatement des mesures pour que son gouvernement mette fin aux attaques croissantes contre les droits humains et à l’impunité pour les violations des droits humains. Nous l’appelons à construire un Zimbabwe doté d’une culture du respect des droits humains de toutes les personnes. »

Complément d’information

Le président Emmerson Mnangagwa a pris ses fonctions le 26 août 2018 à la suite du scrutin remporté le 30 juillet 2018 par son parti, la ZANU-PF, qui associait élections présidentielles, législatives et locales.