République centrafricaine. La visite du pape doit permettre d’aborder le conflit causé par les tensions intercommunautaires

La République centrafricaine doit saisir l’occasion historique offerte par la visite de deux jours du pape François pour placer les droits humains et la justice au cœur des efforts de réconciliation nationale, a déclaré Amnesty International vendredi 27 novembre.  

Au moins 75 personnes, parmi lesquelles de nombreux civils, ont été tuées depuis le 26 septembre 2015 à Bangui, la capitale, dans le contexte d’une nouvelle vague de violences motivées par l’intolérance religieuse.

Le pape se voit donner une possibilité réelle d’appeler à la protection des civils de toutes les obédiences religieuses, et de mettre à profit sa grande autorité morale pour aider à apaiser les tensions ayant récemment dégénéré en violences meurtrières.

Ilaria Allegrozzi, spécialiste de l’Afrique centrale à Amnesty International

« Le pape se voit donner une possibilité réelle d’appeler à la protection des civils de toutes les obédiences religieuses, et de mettre à profit sa grande autorité morale pour aider à apaiser les tensions ayant récemment dégénéré en violences meurtrières », a déclaré Ilaria Allegrozzi, spécialiste de l’Afrique centrale à Amnesty International.

« La visite du pape offre une occasion rare de demander la fin de l’impunité dont continuent à bénéficier un trop grand nombre de responsables de graves violations des droits humains. L’impunité est un vecteur clé du conflit, et toutes les personnes soupçonnées d’avoir perpétré des crimes de droit international et d’autres atteintes aux droits humains doivent être traduites en justice dans le cadre de procédures équitables. »

Dans le contexte des violences perpétrées depuis deux ans, des milliers de personnes ont été tuées et au moins 900 000 déplacées. Les civils restent exposés à un risque élevé de violence et d’atteintes graves aux droits humains – homicides, agressions sexuelles et pillages, entre autres.

Les victimes de la vague de violence de septembre, parmi lesquelles ont figuré des femmes enceintes et des enfants, ont été abattues, tuées à l’arme blanche, poignardées, brulées vives, ou assassinées dans le cadre d’homicides ciblés. Les violences ont par ailleurs mené au déplacement de 40 000 personnes supplémentaires dans la seule ville de Bangui. La plupart se sont réfugiées dans des camps surpeuplés ou auprès de familles d’accueil ; elles restent vulnérables sur le plan financier et psychologique, et ne bénéficient guère de soutien extérieur.

Après ces troubles, Amnesty International a recueilli des informations sur l’augmentation des agressions verbales et physiques visant la minorité musulmane de la ville de Carnot, avec au moins un cas d’homicide ciblé.

La reprise des violences a révélé qu’il est probable que la force de maintien de la paix des Nations unies, qui ne dispose pas de suffisamment d’hommes ni de ressources, ne soit pas en mesure de protéger les civils contre les attaques organisées. Il faut en faire beaucoup plus pour anticiper, prévenir ou combattre les explosions de violence de grande ampleur causées par les groupes armés et les milices qui s’en prennent aux civils.  

La création par la République centrafricaine d’une Cour pénale spéciale, chargée d’enquêter sur les violations des droits humains commis depuis 2003 a constitué une avancée positive, mais cette instance requiert un financement adapté, stable et inconditionnel. À ce jour cependant, rares sont les donateurs qui se sont engagés à lui fournir des ressources.