Murat Kurnaz a quitté Guantánamo!

“Dieu merci, je vais bien, mais seul Dieu qui nous a créés sait quand je reviendrai.”

Murat Kurnaz a écrit ces mots à sa famille depuis Guantánamo en mars 2002. Son rêve de rentrer chez lui, en Allemagne, vient seulement de se réaliser.

Il a été libéré de Guantánamo le 24 août 2006, après avoir été détenu pendant quatre ans et huit mois sans inculpation ni jugement. Le courrier, soumis à une censure sévère, était le seul contact qu’il ait pu avoir avec sa famille.

Son avocat allemand a fait la déclaration suivante: “Il a maintenant retrouvé les siens. Il est impossible de décrire la joie qu’ont éprouvée ses parents lorsqu’ils ont de nouveau pu étreindre le fils qu’ils avaient perdu.”

La mère de Murat, Rabiye Kurnaz, avait passé ces dernières années à faire campagne pour la libération de son fils aîné. En novembre 2005, elle avait par exemple assisté à une conférence internationale organisée par Amnesty International et par l’association Reprieve, au cours de laquelle elle avait parlé de son espoir de retrouver son fils. Désormais, cet espoir est devenu réalité.

Murat Kurnaz a la nationalité turque mais il est né en Allemagne en 1982. Sa détention prolongée à Guantánamo a été facilitée par son statut. Les autorités allemandes lui interdisaient en effet de revenir en Allemagne car il n’est pas ressortissant de ce pays. Quant aux autorités turques, elles n’ont manifesté quasiment aucun intérêt pour son cas.

C’est seulement à la suite des nombreuses démarches entreprises par sa famille, son avocat et les membres d’Amnesty International à travers le monde, notamment dans sa ville natale de Brême, que les pouvoirs publics allemands ont commencé à se pencher sur son dossier, ce qui a ouvert la voie à son retour.

Murat Kurnaz a été arrêté au Pakistan en novembre 2001. Peu après, il a été remis aux autorités américaines à Kandahar, en Afghanistan. Sa famille a appris en janvier 2002 qu’il était détenu à Guantánamo et elle a reçu sa première lettre deux mois plus tard. Murat Kurnaz affirme avoir été torturé et maltraité lorsqu’il se trouvait en détention sous la responsabilité des États-Unis.

Comme de nombreux autres détenus de Guantánamo, il a été privé de liberté pendant plusieurs années alors que presque aucun élément ne le reliait à des activités “terroristes”. Les services de renseignement américains et allemands reconnaissaient cet état de fait officieusement, mais il a fallu des années pour que Murat Kurnaz soit libéré. En janvier 2005, un juge fédéral américain a cité son cas pour illustrer l’iniquité et les profondes irrégularités inhérentes à la procédure d’examen administrative suivie par les autorités militaires à Guantánamo.

Murat Kurnaz a fini par retrouver sa famille, mais les séquelles de sa longue détention à Guantánamo ne disparaîtront pas. Si sa libération constitue une victoire pour les droits humains, elle ne doit toutefois pas nous faire oublier que plus de 400 hommes se trouvent toujours en détention. En vertu de la procédure d’examen administrative, environ 300 de ces détenus ne peuvent être ni libérés ni remis à un autre pays à l’heure actuelle.

Les membres d’Amnesty International à travers le monde continuent de demander aux autorités américaines de fermer Guantánamo et de libérer ou de juger équitablement tous les prisonniers. Amnesty International maintient ses pressions sur les gouvernements pour qu’ils défendent leurs résidents et ressortissants détenus à Guantánamo.