L’interdiction totale de l’avortement au Salvador : les faits

Comment peut-on considérer une fausse couche ou la naissance d’un enfant mort-né comme un crime ?

Au Salvador, les femmes qui font des fausses couches, accouchent d’un enfant mort-né ou souffrent d’autres complications liées à leur grossesse sont régulièrement soupçonnées d’avoir subi un « avortement », un acte interdit en toutes circonstances. Par la suite, elles sont souvent inculpées d’« homicide » ou d’« homicide avec au moins une circonstance aggravante ».

Que dit la loi sur l’avortement ?

Le Salvador dispose de l’une des législations sur l’avortement les plus draconiennes au monde, qui ne respecte pas les obligations internationales en matière de droits humains. L’avortement est illégal en toutes circonstances, même dans les cas de viol, d’inceste, lorsque la vie ou la santé de la femme est en danger ou en cas de malformation fœtale grave et mortelle. Le fait d’aider une femme ou une jeune fille à se faire avorter est également considéré comme une infraction pénale.

Quelles sont les peines encourues ?

Les sanctions sont lourdes, allant de deux à huit ans d’emprisonnement, pour les femmes comme pour les personnes qui les aident. Ces peines sont alourdies pour les professionnels de santé, qui encourent entre six et 12 ans de prison. Dans les cas les plus extrêmes, des femmes ont été incarcérées pour homicide avec au moins une circonstance aggravante, une infraction passible d’une peine maximale de 50 ans de prison. Une organisation locale travaille actuellement sur les cas d’au moins 18 femmes qui purgent des peines de prison en raison de complications liées à leur grossesse. Certaines d’entre elles sont emprisonnées depuis plus de 10 ans et elles sont pour la plupart condamnées à des peines d’au moins 30 ans. 

Les femmes continuent-elles de se faire avorter ?

Malgré l’interdiction, les avortements clandestins sont fréquents. Selon le ministère de la Santé, 19 290 avortements ont été pratiqués au Salvador entre 2005 et 2008, un chiffre probablement bien en deçà de la réalité. Pour mettre fin à leur grossesse, les femmes et les jeunes filles utilisent surtout des méthodes telles que l’ingestion de mort-aux-rats et d’autres pesticides, l’introduction d’aiguilles à tricoter, de bouts de bois et d’autres objets pointus dans le col de l’utérus, ou l’ingestion d’un médicament pour le traitement des ulcères de l’estomac. 

Quel impact cela a-t-il ?

Des femmes et des jeunes filles meurent à cause de l’interdiction totale de l’avortement. En 2011, l’OMS a indiqué que 11 % des femmes et des jeunes filles qui ont cherché à se faire avorter illégalement au Salvador en sont mortes. Lorsqu’elles souffrent de complications pendant leur grossesse, de nombreuses femmes ont peur de se faire soigner, ce qui entraîne inévitablement un certain nombre de décès qui auraient pu être évités. 

Quelle est l’opinion de la population salvadorienne sur l’avortement ?

Selon un sondage réalisé en 2013 par un journal, 74 % des personnes interrogées au Salvador étaient en faveur de l’avortement lorsque la vie de la femme est menacée. 

Des progrès ont-ils été réalisés ?   

En janvier 2015, Carmen Guadalupe Vasquez Aldana, qui avait 18 ans lorsqu’elle a été condamnée à 30 ans de prison à la suite d’une fausse couche, a finalement été graciée après avoir passé sept ans derrière les barreaux.