Koweït. Les charges contre Musallam al Barrak doivent être abandonnées

Les autorités koweïtiennes doivent abandonner les charges retenues contre Musallam al Barrak, exposé à des poursuites judiciaires uniquement pour avoir usé de son droit à la liberté d’expression et émis des remarques considérées comme une atteinte portée à l’émir du Koweït, le cheikh Sabah al Ahmad al Jaber al Sabah, a déclaré Amnesty International. Musallam al Barrak a été inculpé, jeudi 1er novembre, pour avoir « porté atteinte au statut de l’émir » et encourt jusqu’à cinq ans de prison en raison de déclarations qu’il a faites lors d’une manifestation publique le 15 octobre. Cet ancien membre du parlement a été libéré après avoir passé quatre jours en détention et versé une caution dont le montant s’élevait à 10 000 dollars koweïtiens (environ 35 500 dollars américains). « L’arrestation de Musallam al Barrak et les poursuites engagées contre cet homme en raison des critiques pacifiques qu’il a émises à l’encontre de l’émir Sabah al Ahmad al Jaber al Sabah sont scandaleuses et ne sont qu’une nouvelle manifestation des restrictions de plus en plus nombreuses qui pèsent sur la liberté d’expression au Koweït », a affirmé Ann Harrison, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. « Cet homme n’a incité ni à la violence, ni à la haine, il n’a fait qu’exercer son droit à la liberté d’expression pacifique. Les autorités koweïtiennes doivent abandonner les charges retenues contre lui et contre toute autre personne sous le coup des mêmes accusations pour avoir exprimé pacifiquement son opinion. » Un certain nombre de manifestants ont été arrêtés dans la soirée du 31 octobre au cours de manifestations contre l’arrestation de Musallam al Barrak ; des dizaines d’autres personnes, dont des mineurs, ont été emmenées à l’hôpital après avoir inhalé du gaz lacrymogène. Musallam al Barrak a été arrêté le 29 octobre, après avoir fait une apparition le 15 octobre lors d’une manifestation au cours de laquelle il a lancé un avertissement contre la proposition du gouvernement de modifier la législation nationale en matière d’élections et soutenu que le Koweït risquait de devenir un État autocratique. Le gouvernement a appelé à ce qu’une élection législative se tienne le 1er décembre. Les candidatures sont ouvertes depuis le 31 octobre. L’arrestation de Musallam al Barrak a entraîné, le jour même, une manifestation qui a rassemblé environ 200 personnes devant le palais de justice central de Koweït et a été dispersée par la police et le service de sécurité. Mercredi 31 octobre, une autre manifestation, qui a rassemblé cette fois plus de 2 000 personnes réclamant la libération de Musallam al Barrak, a été dispersée par les forces de sécurité à l’aide de gaz lacrymogène et de grenades assourdissantes, d’après les déclarations d’un témoin à Amnesty International. « Les autorités koweïtiennes doivent veiller à ce que la population soit libre d’exprimer pacifiquement ses opinions, y compris à propos de la législation électorale, des élections ou de l’émir. Les forces de sécurité doivent respecter les normes internationales relatives au maintien de l’ordre et s’abstenir de recourir à la force illicite contre des manifestants pacifiques, comme l’exigent à la fois le droit international et la Constitution du Koweït », a rappelé Ann Harrison. Des manifestants pacifiques attaqués Le 21 octobre, les autorités ont invoqué une interdiction datant de 1979 et portant sur les rassemblements de plus de 20 personnes, après que la police antiémeute eut attaqué des manifestants pacifiques et que des militants politiques eurent été dispersés à l’aide de gaz lacrymogène et de grenades assourdissantes, lors d’une série de manifestations dans différents endroits de la ville de Koweït. Deux jours plus tard, les autorités ont indiqué qu’elles revenaient sur leur décision après que plusieurs États, y compris les États-Unis, les ont publiquement appelées à faire preuve de retenue et à respecter le droit de réunion pacifique. Cependant, des responsables du ministère de l’Intérieur auraient depuis annoncé qu’aucune manifestation rassemblant plus de 20 personnes ne serait tolérée ailleurs que sur la place Erada, à Koweït. L’ancien parlementaire Faisal al Muslim, une autre figure de l’opposition, a été convoqué pour un interrogatoire le 31 octobre et accusé d’avoir porté atteinte au statut de l’émir lors d’un entretien qu’il a accordé à la télévision en août. C’est le sixième ancien membre du parlement appartenant à l’opposition à être convoqué pour être interrogé après avoir émis des remarques concernant l’émir. Les tensions politiques se sont intensifiées au Koweït après que les autorités ont dissous le Parlement à deux reprises depuis juin 2012 et que les propositions visant à amender la législation électorale du pays ont été rendues publiques. Le recours croissant du gouvernement à l’usage illégal de la force pour les opérations de maintien de l’ordre lors de plusieurs manifestations successives, notamment celles organisées par des membres de la communauté bidun, apatride, est également critiqué.