Bahreïn. Amnesty International demande aux autorités de lever l’interdiction de toutes les manifestations

L’interdiction par le gouvernement bahreïnite de toute manifestation et de tout rassemblement viole le droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique et doit être levée immédiatement, a déclaré Amnesty International. Le ministre de l’Intérieur a annoncé cette interdiction mardi 30 octobre, en invoquant le fait que les marches et rassemblements s’accompagnaient de violences, d’émeutes et de détériorations de biens publics et privés. Il a déclaré que l’interdiction serait en vigueur jusqu’à ce que la sécurité soit « assurée » et a suggéré que l’une de ses principales préoccupations était que les manifestants exprimaient leur opposition au gouvernement et à la famille royale. Des policiers ont été agressés lors de rassemblements récents. Le 19 octobre, les autorités ont indiqué qu’un policier était mort et qu’un autre avait été grièvement blessé lors d’une explosion dans le village d’el Eker où ils effectuaient une patrouille et qu’ils avaient été attaqués par des émeutiers. Une semaine plus tard, un deuxième policier est mort à l’hôpital après avoir été blessé lors d’une manifestation ayant eu lieu plus tôt dans l’année. « Des violences isolées et sporadiques lors d’un rassemblement ne peuvent justifier que les autorités interdisent toutes les manifestations, a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe d’Amnesty International pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. Une mesure aussi drastique revient à supprimer purement et simplement les droits à la liberté d’expression et à la liberté de réunion pacifique. » « Les responsables de l’application des lois doivent protéger les manifestants pacifiques plutôt que de prendre pour prétexte les violences commises par quelques personnes pour restreindre ou annuler les droits de tous. »  Avant l’interdiction actuelle, les personnes qui voulaient organiser une manifestation ou un rassemblement devaient en demander l’autorisation aux autorités, en application du Code sur les réunions publiques, les processions et les rassemblements. Le code impose des restrictions considérables qui sont contraires aux obligations de Bahreïn aux termes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Au moins trois organisateurs ayant un casier judiciaire vierge doivent déposer une demande d’autorisation en spécifiant le type, le thème, le lieu et les horaires de l’événement. Les organisateurs doivent en outre remplir certaines conditions ; ils doivent notamment résider dans la zone où le rassemblement doit avoir lieu. Lorsque l’autorisation n’était pas donnée, les rassemblements étaient considérés comme illégaux. Plusieurs rassemblements ont été interdits cette année au motif que le lieu ou l’horaire choisi pouvait perturber le trafic. Au cours des derniers mois, de très nombreuses personnes auraient été arrêtées pour avoir participé à un « rassemblement illégal », et Amnesty International a adopté plusieurs Bahreïnites incarcérés uniquement pour avoir exercé leur droit à la liberté de réunion pacifique. Lors de certains rassemblements, les forces de l’ordre ont eu recours à une force excessive et inutile. « Le gouvernement utilise la procédure fastidieuse à laquelle doivent se plier les personnes souhaitant organiser un rassemblement pour interdire des manifestations que le droit international autoriserait » a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui. « Les représentants de l’État ont l’obligation de ne pas restreindre indûment le droit de se réunir pacifiquement, et l’exercice de ce droit devrait être soumis à une simple procédure de notification. » Complément d’information Le 28 octobre, trois membres de la Société islamique el Wefaq et les organisateurs d’un rassemblement auraient été arrêtés après que le rassemblement, qui n’avait pas été autorisé par les autorités a eu lieu malgré tout. Ces personnes ont été libérées au bout de quelques heures, sans avoir été inculpées. Le ministre de l’Intérieur a annoncé le jour même que des poursuites allaient être engagées contre les organisateurs du rassemblement.