Inde. Les promesses de Vedanta en matière des droits humains sont creuses et dénuées de sens

Amnesty International a accusé la compagnie minière Vedanta, société basée au Royaume-Uni et qui tient son assemblée générale annuelle ce mardi 28 août, à Londres, de feindre d’ignorer les critiques à l’égard de son bilan désastreux en matière de droits humains dans l’État de l’Orissa (dans l’est de l’Inde) en publiant un rapport creux et dénué de sens présentant sa propre version de ses activités. Amnesty International estime que le rapport, intitulé Vedanta’s Perspective, s’efforce en réalité de rassurer les investisseurs au sujet des activités controversées de Vedanta alors même que celle-ci cherche à les étendre. Amnesty International a répliqué avec son propre rapport, Vedanta’s Perspective Uncovered : Policies Cannot Mask Practices, dans lequel elle accuse la société minière de ne pas tenir compte des conséquences véritables de ses opérations sur les droits fondamentaux des populations locales de l’Orissa. Amnesty International rapporte par exemple que la compagnie a dissimulé aux populations locales certaines informations importantes comme les répercussions de la pollution due à ses activités, et qu’elle n’a pas organisé de consultations publiques dignes de ce nom. « Notre nouveau rapport fait état du décalage flagrant entre les affirmations de la compagnie et la réalité sur le terrain, a déclaré Polly Truscott, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International. « Les communautés vivant en Orissa ont fourni de nouveaux éléments qui montrent que les changements annoncés par Vedanta n’ont eu que peu d’effets positifs locaux sur leurs moyens de subsistance, leurs droits et leurs autres motifs de préoccupation. « Le bilan de Vedanta en matière de droits humains est loin de satisfaire aux normes internationales régissant les activités des entreprises. La compagnie refuse de consulter sérieusement les populations affectées par ses activités et ne tient pas compte des droits des peuples indigènes. « Son rapport prétend mettre de nouvelles informations sur ses activités à la disposition du public, mais feint d’ignorer la plupart de nos conclusions. Il omet en outre de prendre en compte des investigations menées par des organismes indiens de surveillance et des autorités comme la Commission nationale des droits humains, qui a enquêté sur les opérations de Vedanta en Orissa. » Amnesty International trouve en outre troublant que les personnes qui se sont opposées à la compagnie ont été inculpées d’infractions et incarcérées à partir de preuves forgées de toutes pièces, l’objectif étant de dissuader d’autres opposants d’exercer leur droit de protester pacifiquement et d’exprimer librement leurs opinions. Amnesty International est également préoccupée par certains éléments, dévoilés au cours d’une enquête que mène la Commission nationale des droits humains, qui montrent que des policiers ont cherché à promouvoir les intérêts de la compagnie aussi bien en créant de fausses preuves qu’en réprimant l’opposition. À deux occasions au moins, la police aurait utilisé comme prétexte la présence locale de maoïstes pour harceler des représentants de la presse et d’organisations de droits humains internationales et les convaincre de ne pas se rendre à Lanjigarh ni dans les collines de Niyamgiri. Amnesty International a examiné les changements opérés par Vedanta en se basant sur quatre critères établis à partir du cadre de référence et des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme [ONU] et elle est arrivée à la conclusion qu’aucun des quatre points n’a été entièrement respecté. « Les indicateurs les plus parlants et les plus significatifs des progrès éventuellement réalisés par Vedanta dans le domaine du respect des droits humains sont ceux qui se fondent sur qui se passe, ou non, sur place à Lanjigarh et Niyamgiri, a ajouté Polly Truscott. « D’après notre analyse détaillée, peu de choses ont changé. Peut-être la compagnie fait-elle des déclarations opportunes et a-t-elle opéré quelques changements, mais la réalité demeure que sa nouvelle approche est creuse et dépourvue de signification. Elle doit aller bien plus loin pour prouver à ceux qui les critiquent que son nouveau mode de fonctionnement fera la différence. Vedanta doit être confrontée à la réalité des droits humains, et la pression de ses investisseurs à cet égard pourrait se révéler très utile. » Alors que Vedanta pourrait, d’après certaines informations, être forcée à fermer temporairement sa raffinerie de Lanjigarh par manque de bauxite en provenance d’autres sources d’approvisionnement, Polly Truscott a dit : « Peut-être s’agit-il là d’un problème passager. Mais ici, il est vraiment question du bilan de Vedanta en matière de droits humains. » Complément d’information Au cours des cinq dernières années, la société minière Vedanta Resources plc, une des 100 entreprises de l’indice FTSE 100, a cherché à agrandir sa raffinerie de Lanjigarh et à obtenir l’autorisation de créer une co-entreprise pour l’extraction de bauxite dans la région voisine de Niyamgiri, habitée par la communauté autochtone des Dongrias Kondhs. Les études effectuées par Amnesty International ont montré que la raffinerie de Lanjigarh a créé de sérieux problèmes de contamination et que les systèmes d’exploitation actuels ne permettent pas d’éviter que cela se reproduise. Elle a porté atteinte aux droits fondamentaux des communautés locales adivasis et dalits des Majhis Kondhs, notamment à leur droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint, à un environnement sain, à un niveau de vie suffisant, à l’eau, à un emploi décent et à la nourriture. À plusieurs reprises Vedanta a été exposée aux critiques pour avoir omis d’informer les communautés locales du risque potentiel de ses activités et pour avoir fait la sourde oreille à leurs inquiétudes, au mépris des cadres de référence des systèmes de surveillance nationaux et de l’État. Elle a en outre omis d’adhérer aux normes et principes internationaux reconnus relatifs aux conséquences des activités des entreprises sur les droits humains. Les critiques d’Amnesty International ont conduit Vedanta à modifier sa gestion des risques et des conséquences de ses opérations sur sa réputation – toutes décrites dans le document Vedanta’s Perspective. Vedanta a ainsi nommé un directeur de la durabilité, commandé des études, établi un cadre de durabilité, adapté ses structures de gouvernance et élaboré un engagement explicite en matière de droits humains faisant partie intégrante de son Code de conduite. L’analyse d’Amnesty International sur les répercussions réelles de ces changements s’inspire fortement du cadre de référence et des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme adoptés par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU. À partir de ces Principes, Amnesty International a établi quatre critères de jugement des propositions de Vedanta. •    Les propositions doivent se fonder sur une compréhension adéquate des conditions requises pour satisfaire aux normes internationales en matière de droits humains.•    Elles devraient traiter de la nécessité de remédier aux atteintes actuelles aux droits humains•    Elles ne devraient pas faire l’objet de négociations en faveur d’autres priorités.•    Leur mise en œuvre doit s’accompagner d’une obligation de rendre des comptes.