En réaction à la condamnation de Tong Ying-kit par un tribunal hongkongais à neuf ans de prison pour « incitation à la sécession » et « actes de terrorisme » à l’issue du premier procès au titre de la Loi relative à la sécurité nationale adoptée par Hong Kong, la directrice régionale d’Amnesty International pour l’Asie et le Pacifique, Yamini Mishra, a déclaré :
« La condamnation de Tong Ying-kit à neuf ans de prison confirme les craintes que la Loi relative à la sécurité nationale n’est pas seulement un outil destiné à instiller la peur parmi les détracteurs du gouvernement, mais aussi une arme qui sert à les incarcérer.
« Ce jugement proscrit dans les faits un slogan populaire très répandu au sein du mouvement prodémocratie et pourrait permettre de condamner à l’avenir de nombreux autres manifestant·e·s qui l’ont utilisé. Ce seul point est un mauvais présage de ce que réserve la loi sur la sécurité nationale.
« Tong Ying-kit n’aurait jamais dû être inculpé d’une infraction passible d’une condamnation à la réclusion à perpétuité. Ce jugement s’appuie sur la décision inquiétante de l’inculper de chefs relatifs à la sécurité nationale au motif qu’il a brandi un drapeau sur lequel était inscrit un slogan de contestation couramment scandé – une mesure qui porte un coup fatal à la liberté d’expression.
« Chacun et chacune doit être libre d’exprimer ses opinions. Condamner et sanctionner Tong Ying-kit pour ” incitation à la sécession ” et ” actes de terrorisme ” en se basant sur le fait qu’il affiche un slogan politique est une violation du droit international relatif aux droits humains.
« Les autorités de Hong Kong doivent veiller à ce que toutes les dispositions juridiques destinées à protéger la sécurité nationale ou adoptées au nom de la lutte contre le terrorisme soient définies de manière claire et précise et que leur utilisation soit conforme au droit international relatif aux droits humains et aux normes connexes.
« Si la Loi relative à la sécurité nationale englobe une garantie générale concernant le respect des droits humains, elle ne comporte pas de clause d’exemption pour l’expression ou la contestation légitimes. Et comme le texte de loi s’attache plus à la sécurité nationale qu’aux droits et libertés des personnes, le jugement ne prend absolument pas en compte les droits à la liberté d’expression et de manifestation de Tong Ying-kit. »
Complément d’information
Le 1er juillet 2020, première journée complète après l’entrée en vigueur de la Loi relative à la sécurité nationale, Tong Ying-kit s’est dirigé sur une moto vers un petit groupe de policiers en brandissant un drapeau orné du slogan : « Libérez Hong Kong. Révolution de notre temps », couramment scandé lors des manifestations contre cette loi.
Le 30 juillet 2021, un tribunal de Hong Kong l’a déclaré coupable d’« incitation à la sécession » et d’« actes de terrorisme » au titre de la Loi relative à la sécurité nationale et l’a condamné à neuf ans de prison. Le parquet a affirmé que le slogan montrait une volonté de renverser le gouvernement et a considéré qu’il « suggérait la séparation entre Hong Kong et la Chine ». Les juges ont acquiescé, affirmant que ce slogan « pouvait en effet signifier le fait de séparer [Hong Kong] de la République populaire de Chine et pouvait inciter d’autres personnes à se rendre coupables de sécession ».
Tong Ying-kit, qui est maintenu en détention provisoire depuis le 6 juillet 2020, est la première personne condamnée au titre de la Loi relative à la sécurité nationale. Il a été privé du droit à un procès devant un jury – appliqué dans le système juridique de Hong Kong fondé sur la common law depuis 176 ans – après que la ministre de la Justice a déclaré qu’il existait un risque potentiel pour les jurés.
Selon le droit international relatif aux droits humains, l’affichage de slogans politiques est en principe protégé par la liberté d’expression.
La définition générale de la « sécurité nationale » par les autorités hongkongaises, calquée sur celle de la Chine continentale, est invoquée de manière arbitraire comme prétexte pour restreindre les droits fondamentaux à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association, à l’équité des procès et à la liberté, ainsi que pour réprimer la dissidence et l’opposition politique.
Entre le 1er juillet 2020 et le 29 juillet 2021, la police a arrêté ou ordonné l’arrestation d’au moins 138 personnes au titre de la Loi relative à la sécurité nationale. Au 29 juillet, 68 personnes ont été officiellement inculpées, dont 51 se trouvent actuellement en détention provisoire.
Selon le rapport publié le mois dernier par Amnesty International, la Loi relative à la sécurité nationale de Hong Kong a décimé les libertés dans la ville et façonné un paysage où les protections relatives aux droits humains se font de plus en plus rares.