Nigeria. Une enquête de la CPI au Nigeria est désormais inévitable et tout report est une perte de temps

À la suite de la publication du rapport annuel de la procureure de la Cour pénale internationale (CPI) sur les activités en matière d’examen préliminaire, qui présente le travail réalisé par cette instance au cours de l’année écoulée sur plusieurs pays dans le monde où certains crimes pourraient avoir été commis afin de décider d’ouvrir des enquêtes, Netsanet Belay, directeur de la recherche et du plaidoyer pour l’Afrique à Amnesty International, a déclaré :

« Une enquête de la CPI sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis pendant le conflit dans le nord-est du Nigeria est désormais inévitable. La procureure a confirmé une nouvelle fois que les autorités nigérianes ne prennent pas de mesures pour que la justice soit rendue.

Les victimes attendent qu’on leur rende justice depuis plus de 10 ans.

Netsanet Belay, Amnesty International

« Elle a également confirmé qu’elle décidera en 2020 si une enquête doit être menée sur certains crimes. Si les autorités du Nigeria ne prennent pas des mesures concrètes pour remplir leurs obligations, elle n’aura d’autre choix que d’ouvrir une véritable enquête.

« Les victimes attendent qu’on leur rende justice depuis plus de 10 ans. Le Nigeria a déjà prouvé qu’il n’était pas prêt à enquêter sur les crimes odieux commis par toutes les parties au conflit dans le nord-est, ni à traduire leurs responsables présumés en justice.

« La CPI devrait déjà avoir ouvert une enquête, mais il ne fait aucun doute que le moment sera venu pour elle en 2020 d’assumer son rôle de juridiction intervenant en dernier ressort.

« Les États parties au Statut de Rome doivent fournir les ressources nécessaires à la Cour et renouveler leur coopération avec le Bureau du procureur pour permettre cette enquête sur la situation au Nigeria. »

Complément d’information

Depuis le début du conflit en juillet 2009, le groupe armé connu sous le nom de Boko Haram et les forces de sécurité nigérianes ont commis des crimes de guerre et d’autres graves violations du droit international humanitaire et relatif aux droits humains.

Le Bureau du procureur de la CPI mène un examen préliminaire de la situation au Nigeria depuis 2010. Jeudi 5 décembre, il a publié son rapport 2019 sur les activités en matière d’examen préliminaire. Vraisemblablement, le Bureau du procureur n’a pas encore déterminé s’il va ouvrir ou non une enquête sur la situation au Nigeria, près de dix ans après le lancement de l’examen préliminaire.

Cependant, il est évident que la procureure perd patience face au manque de détermination du Nigeria à enquêter sur les crimes visés par le Statut de Rome de la Cour pénale internationale et à traduire en justice leurs responsables présumés.

En décembre 2018, Amnesty International a publié son rapport intitulé Willingly Unable: ICC Preliminary Examination And Nigeria’s Failure To Address Impunity For International Crimes, dans lequel l’organisation évaluait de façon critique l’examen préliminaire du Bureau du procureur de la CPI au Nigeria, ainsi que la capacité et la volonté du gouvernement nigérian à garantir le respect de l’obligation de rendre des comptes pour les crimes commis par Boko Haram et par les forces de sécurité nigérianes.

Notre analyse a démontré que les autorités du Nigeria n’avaient délibérément pas ouvert d’enquêtes ni engagé de poursuites concernant les crimes commis par les deux parties au conflit. Sur la base de ses recherches et de son analyse, Amnesty International a appelé le Bureau du procureur à demander l’ouverture d’une enquête de la CPI au Nigeria.

Un an après ce rapport, l’organisation a renouvelé son appel en publiant le 2 décembre une série de recommandations actualisées à l’intention du Bureau du procureur et des autorités nigérianes.