Thaïlande. De la liberté d’expression à la protection des réfugiés, le prochain gouvernement doit entreprendre des réformes de fond

Le prochain gouvernement thaïlandais devra lever les restrictions injustifiées imposées à la liberté d’expression et limiter les pouvoirs arbitraires de l’exécutif, a déclaré Amnesty International en amont du scrutin prévu le 24 mars.

« Le nouveau gouvernement devra cesser de criminaliser la dissidence pacifique et de restreindre la liberté d’expression de manière arbitraire. Au cours de 10 années d’instabilité politique, les autorités thaïlandaises ont souvent invoqué la sécurité nationale pour réduire au silence les personnes considérées comme des détracteurs et les opposants politiques pacifiques, a déclaré Katherine Gerson, chargée de campagne sur la Thaïlande à Amnesty International.

« En outre, elles se sont servies de manière arbitraire des pouvoirs accordés au titre de l’état d’urgence pour contourner les garanties en matière de droits humains. Le prochain gouvernement devra respecter les droits fondamentaux même dans les situations d’urgence. Il devra renforcer les protections juridiques afin de prévenir les graves violations des droits humains qui se sont multipliées sous le régime militaire, en l’absence d’obligation de rendre des comptes. »

Lorsque l’armée royale de Thaïlande a pris le pouvoir à la faveur du coup d’État de mai 2014 et a décrété la loi martiale, les autorités militaires ont fortement restreint l’exercice des droits fondamentaux. Elles ont promis que les vastes restrictions mises en place étaient des mesures provisoires visant à préserver la paix et l’ordre et que des élections démocratiques allaient avoir lieu. Pourtant, elles n’ont cessé de reporter la levée de ces restrictions et la tenue des élections.

La commission électorale a validé la date prévue pour l’élection, fixée au 24 mars 2019, et le scrutin devrait donc avoir lieu.

Amnesty International propose un Programme pour les droits humains, qui met en avant neuf questions clés auxquelles les candidats parlementaires et les élus au sein du nouveau gouvernement doivent accorder la priorité. Il s’agit notamment du droit de ne pas être soumis à la torture ni aux disparitions forcées, des droits à la liberté d’expression, de réunion et d’association, et du droit à la vie privée dans le cadre de l’élaboration de mesures liées à la cybersécurité.

« Ce scrutin se déroule après plus de quatre années pendant lesquelles la liberté d’expression a été systématiquement réprimée, a déclaré Katherine Gerson. L’utilisation des pouvoirs judiciaires pour faire taire la dissidence a grandement sapé la confiance dans les institutions juridiques du pays. »

Le Programme pour les droits humains d’Amnesty international couvre également la mise en place de protections renforcées pour les réfugiés et les demandeurs d’asile, ainsi que la question de l’abolition de la peine de mort.

« Les affaires récentes concernant Rahaf Mohammed et Hakeem Ali al Araibi ont retenu l’attention de millions de personnes à travers le monde. Leur calvaire illustre les risques auxquels sont confrontés les réfugiés renvoyés de force dans des endroits où ils sont exposés à de graves périls, a déclaré Katherine Gerson. Le gouvernement thaïlandais doit honorer les engagements auxquels il a souscrits par le passé et améliorer la protection des réfugiés. Avec cette élection, il doit s’engager à inscrire dans la loi le respect de leurs droits. »