Brésil. Une condamnation de la Cour interaméricaine met en évidence de terribles antécédents de la police en matière de viols et d’homicides

Un arrêt accablant de la Cour interaméricaine des droits de l’homme jette une lumière crue sur de terribles antécédents de la police de Rio de Janeiro en matière de viols et d’homicides, les victimes étant pour la plupart jeunes, noires et pauvres, a déclaré Amnesty International aujourd’hui, le lundi 15 mai.

Les deux organisations qui ont saisi la Cour, le Centre pour la justice et le droit international (Cejil) et l’Institut d’études de la religion, tiendront une conférence de presse cet après-midi dans la ville de Rio de Janeiro.

« Cet arrêt jette un éclairage attendu de longue date sur des violations des droits humains révoltantes perpétrées par la police de Rio à l’encontre de personnes jeunes, pauvres et noires qui n’étaient pas armées », a déclaré Jurema Werneck, directrice exécutive d’Amnesty International Brésil.

« Fondamentalement, cet arrêt réaffirme également que les autorités brésiliennes ont pour responsabilité d’enquêter sur ces crimes et de veiller à ce que justice soit rendue aux victimes – qui font partie des personnes les plus marginalisées du pays.

« Cela fait 20 ans que les tueries de Nova Brasília ont eu lieu et, jusqu’à présent, personne n’a eu à rendre compte des homicides perpétrés, ni des violences sexuelles commises. Cette impunité contribue à la violence policière endémique dont nous sommes témoins aujourd’hui encore dans les rues de Rio. »

Cela fait 20 ans que les tueries de Nova Brasília ont eu lieu et, jusqu'à présent, personne n'a eu à rendre compte des homicides perpétrés, ni des violences sexuelles commises. Cette impunité contribue à la violence policière endémique dont nous sommes témoins aujourd'hui encore dans les rues de Rio.

Jurema Werneck, directrice exécutive d'Amnesty International Brésil

Le 12 mai, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a accusé le Brésil de ne pas avoir rendu justice aux victimes des tueries de « Nova Brasília », survenues il y a plus de 20 ans.

Au total, 26 personnes avaient été tuées et trois femmes – dont deux qui étaient mineures à l’époque – violées par des policiers lors de deux interventions, en octobre 1994 et mai 1995, dans le Complexo do Alemão, un ensemble de favelas situé à Rio de Janeiro.

La Cour a statué que les enquêtes sur les deux tueries devaient être rouvertes et que les victimes et leurs familles devaient bénéficier de réparations et d’une protection adéquates.

Les violences policières se poursuivent à un rythme soutenu

La Cour interaméricaine a également statué que le Brésil devait publier un rapport annuel présentant des données sur les décès résultant d’interventions policières dans tout le pays et établir des objectifs et des programmes en vue de réduire les violences et les homicides imputables à la police de Rio de Janeiro.

En 2015, selon le Forum brésilien de sécurité publique, les forces de sécurité ont été à l’origine d’au moins neuf décès par jour – on sait que ces chiffres, quoique officiels, sont en-deçà de la réalité. Dans la seule ville de Rio de Janeiro, le nombre de décès dus à des interventions policières est passé de 416 en 2013 à 920 en 2016. Depuis le début de l’année 2017, ces chiffres continuent à augmenter. Amnesty International a fait état d’une série d’exécutions extrajudiciaires commises par la police dans la ville de Rio de Janeiro dans le rapport (en anglais) intitulé “You killed my son”.

« Bien que les tueries de “Nova Brasília” soient survenues il y a plus de 20 ans, la violence policière reste une réalité dans les favelas et les zones marginalisées du Brésil. Nous espérons que cet arrêt contribuera à endiguer la terrible violence qui semble désormais faire partie intégrante des opérations de police au Brésil », a déclaré Jurema Werneck.