- Une procédure d’infraction contre l’Italie bloquée au plus haut niveau de la Commission européenne.
- Des porte-parole d’Amnesty International sur place sont disponibles pour des entretiens.
Alors qu’il a été révélé le 6 avril que les dirigeants de l’Union européenne (UE) bloquent l’action contre l’Italie pour discrimination à l’égard des Roms, Amnesty International dénonce le fait que l’expulsion imminente des habitants roms du campement informel de Gianturco, à Naples, mettra à la rue des centaines de personnes, dont des enfants, des personnes âgées, malades et handicapées.
L’expulsion de plus de 1 000 personnes doit se dérouler en l’absence de véritable consultation et notification, et sans solution de relogement. Elle illustre la discrimination systémique dont sont victimes les Roms en Italie. Cette expulsion intervient alors que le Financial Times révèle le 6 avril que les tentatives visant à lancer une procédure d’infraction contre l’Italie ont été bloquées au plus haut niveau.
« Alors que les bulldozers sont prêts à intervenir, des centaines de Roms à Gianturco sont sur le point de perdre leur logement, mais aussi leurs moyens de subsistance, a déclaré Catrinel Motoc, chargée de campagne régionale à Amnesty International.
« Expulser de force des familles sans leur proposer de solution de relogement adaptée ni de soutien est un acte dénué de toute sensibilité qui bafoue les obligations internationales de l’Italie en termes de droits humains. Cela illustre la discrimination systémique à l’égard des Roms en Italie, et les manquements de la Commission européenne à son devoir qui est de la combattre. »
Jusqu’à 1 300 personnes vivent dans ce campement. Nombre des personnes devant être expulsées y vivent depuis parfois six ans. Elles ont été informées à plusieurs reprises tout au long de l’année dernière qu’elles allaient être déplacées, sans savoir où ni quand.
Où qu’ils se tournent, les Roms en Italie sont confrontés aux formes les plus virulentes de discrimination.
Catrinel Motoc, chargée de campagne régionale à Amnesty International
Si environ 200 personnes ont appris qu’elles allaient être relogées dans un nouveau camp de conteneurs, spécifiquement destiné aux Roms, des centaines d’autres ne savent toujours pas où elles iront.
Un habitant de Gianturco a déclaré à Amnesty International que la semaine dernière, la police leur a enjoint de « quitter les lieux avant le 10 avril, sinon nous vous chasserons ». Une autre femme a déclaré : « J’ai subi deux opérations il y a un mois. Où suis-je censée aller ? Mon fils aussi est malade. Il a des problèmes cardiaques et ma belle-fille souffre de diabète. On va nous mettre à la rue comme des chiens. »
Ces derniers mois, les habitants de Gianturco ont signalé des manœuvres de harcèlement de la police, notamment des perquisitions et des contrôles fréquents. Ce harcèlement se traduit par la saisie de réserves de nourriture, ainsi que de voitures, de scooters, de chariots et de caddies dont les familles se servent pour transporter des matériaux recyclables récupérés à travers la ville. Les moyens de subsistance des habitants de Gianturco sont considérablement réduits depuis que les autorités ont fermé un marché informel de biens d’occasion sur la place du campement.
L’expulsion forcée et le relogement de certains habitants dans un camp réservé aux Roms font ressortir l’incapacité des autorités italiennes à respecter les droits humains des Roms et à mettre en œuvre la Stratégie nationale d’intégration adoptée il y a plus de cinq ans.
Sont également mises en relief les conséquences du manque de détermination de la Commission européenne à agir face aux violations répétées de la législation européenne en matière de lutte contre la discrimination. Elle a ouvert une information préliminaire contre l’Italie pour discrimination à l’égard des Roms il y a près de cinq ans, mais n’a toujours pas lancé la procédure d’infraction. Le Financial Times a révélé que cette procédure est bloquée au plus haut niveau. Durant cette période, des milliers de Roms ont subi des expulsions forcées et d’autres violations de leur droit à l’accès au logement.
« L’expulsion de Gianturco n’est que la dernière d’une longue liste honteuse d’expulsions forcées visant des Roms à travers l’Italie. Où qu’ils se tournent, les Roms en Italie sont confrontés aux formes les plus virulentes de discrimination, a déclaré Catrinel Motoc.
« La Commission européenne a pleinement conscience de la ségrégation et de l’injustice généralisées que subissent les Roms en Italie. La révélation faite aujourd’hui montre qu’après cinq ans d’inaction, les blocages viennent du sommet. La Commission doit cesser de traîner les pieds et lancer une procédure d’infraction contre l’Italie pour avoir enfreint la législation européenne contre la discrimination. »