Thaïlande. Les arrestations de manifestants constituent un dangereux précédent

Le nouveau régime militaire thaïlandais a imposé de sévères restrictions à la liberté d’expression et de réunion qui doivent être abrogées immédiatement, a déclaré Amnesty International après la dispersion par l’armée d’une manifestation pacifique vendredi 23 mai 2014 et l’arrestation d’au moins trois personnes. L’organisation exhorte aussi le régime militaire à révéler immédiatement où se trouvent les dizaines de dirigeants politiques qui seraient détenus dans des lieux inconnus, et à leur permettre d’entrer en contact avec leurs avocats. Des centaines de personnes se sont rassemblées dans le centre de Bangkok vendredi 23 mai pour exiger le retour à un régime civil. Dans la soirée, après plusieurs heures de manifestation, les soldats sont intervenus pour disperser la foule. Au moins trois manifestants auraient été interpellés. « L’arrestation de manifestants pacifiques constitue un dangereux précédent – les gens ne doivent pas être inquiétés pour avoir simplement exprimé leurs opinions. Il est particulièrement crucial que l’armée fasse preuve de modération car les manifestations en faveur d’un retour à un régime civil risquent de s’intensifier », a déclaré Richard Bennett, directeur du programme Asie et Pacifique d’Amnesty International. « Le maintien de l’ordre public ne peut pas être une excuse pour bafouer les droits humains. » L’armée thaïlandaise a suspendu la Constitution du pays à l’exception des articles concernant la monarchie et a interdit les rassemblements de plus de cinq personnes et toute critique de l’armée et de la loi martiale – y compris dans les réseaux sociaux. Plus de 150 personnalités, dont des politiciens de premier plan, font l’objet d’une interdiction de quitter le territoire thaïlandais. Plusieurs dizaines de responsables politiques, dont le Premier ministre récemment destitué Yingluck Shinawatra, auraient été arrêtés ces deux derniers jours, sans que l’on sache où ils ont été emmenés. « Il est profondément inquiétant que l’armée ait pris la décision d’arrêter des dirigeants politiques. Le régime doit révéler immédiatement quels sont les fondements juridiques de ces arrestations et où se trouvent ces personnes. Nul ne doit être détenu en raison de son appartenance ou de ses opinions politiques pacifiques », a déclaré Richard Bennett. « Les personnes qui ont été arrêtées doivent être libérées ou bien inculpées d’infractions reconnues par la loi puis placées en détention provisoire par un tribunal civil indépendant. » Les autorités doivent interdire aux forces de sécurité de recourir à la torture et aux autres formes traitements cruels, inhumains ou dégradants, et leur faire clairement savoir que les auteurs présumés de tels agissements seront déférés à la justice.