Philippines. Des policiers jouent à la «roulette de la torture» avec des détenus dans une cellule secrète

La découverte d’une cellule de torture secrète dans un local des services de renseignement de la police au Philippines, où des policiers maltraitaient physiquement des détenus pour s’amuser en jouant à un jeu de « roulette », met en évidence le manque de contrôle des autorités sur la police dans le pays, a déclaré Amnesty International lundi 27 janvier. L’organisation appelle le gouvernement Aquino à agir immédiatement pour mettre fin à la torture commise systématiquement sous son autorité. « L’usage de la torture par des policiers “pour s’amuser” est ignoble. Ce sont des actes odieux. Suspendre ces agents de leurs fonctions ne suffit pas. Les policiers dévoyés et leurs supérieurs doivent être amenés à rendre des comptes devant la justice, a déclaré Hazel Galang-Folli, chargée des recherches sur les Philippines au sein d’Amnesty International. « La torture est un acte criminel, et la direction de la Police nationale philippine doit faire cesser sa pratique dans ses rangs. Les autorités doivent veiller à ce que la torture et les autres formes de traitements cruels, inhumains et dégradants ne soient pas tolérées. » La Commission philippine des droits humains a découvert la table de « roulette de la torture » au cours d’une visite de routine des lieux. Les policiers avaient une liste de positions de torture, ou « conséquences de torture », choisies en faisant tourner une roulette. L’indication « 30 secondes chauve-souris », par exemple, signifiait que le détenu était suspendu la tête en bas pendant 30 secondes. Si la bille tombait sur « 20 secondes Manny Pacquiao », le détenu était roué de coups de poing pendant 20 secondes. La Commission philippine des droits humains a indiqué que 44 personnes détenues dans les locaux des services de renseignement provinciaux de la Police nationale philippine à Biñan, dans la province de Laguna, avaient accusé au moins 10 agents des forces de l’ordre de torture et d’extorsion. Des beuveries auxquelles se sont livrés des policiers ont également donné lieu à des cas de torture et d’autres mauvais traitements sur des personnes en garde à vue dans ces locaux de la police. Selon la Commission philippine des droits humains, la cellule de détention de ce local ne figurait pas dans la liste obligatoire de la Police nationale philippine recensant en temps réel tous ses sites de détention, ce qui en fait un lieu de détention secret de facto. La Commission a noté que les détenus, arrêtés pour la plupart pour des affaires de stupéfiants, s’étaient plaints d’avoir subi dès le jour de leur arrestation des actes de torture visant à leur extorquer des informations. À l’issue d’une enquête, dix policiers auraient été relevés de leurs fonctions. « Il est profondément inquiétant et inexcusable que, près de trois décennies après que les Philippines ont ratifié la Convention des Nations unies contre la torture et cinq ans après qu’elles ont promulgué la Loi contre la torture, le message d’interdiction absolue de la torture en toutes circonstances ne semble pas être parvenu à la police », a déclaré Hazel Galang-Folli.