Amnesty International demande instamment aux autorités macédoniennes et à la communauté albanaise de Macédoine de veiller au respect des droits humains après la mort de six hommes, tués par des policiers le 7 novembre dans le village de Brodec, dans la région de Shipkovica au nord de la ville de Tetovo, près de la frontière avec le Kosovo. «Compte tenu des tensions politiques au parlement entre Albanais de Macédoine et Macédoniens et des divisions au sein de ces communautés et de leurs partis tout au long de l’année dernière, notamment au sujet de l’application de l’accord Ohrid, les évènements du 7 novembre risquent de précipiter le pays dans une situation présentant des risques d’atteintes aux droits humains», a déclaré Nicola Duckworth, directrice du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International. De sources gouvernementales, six hommes ont été tués, parmi lesquels deux Albanais de souche qui s’étaient enfuis de la prison de Dubrava au Kosovo en août, ainsi que des Albanais de Macédoine qui auraient été membres d’un groupe armé d’opposition. Cinq personnes, dont un policier, auraient été blessées. L’opération Mountain Storm (Tempête en montagne) dont l’objectif était, semble-t-il, d’appréhender les fugitifs, avait commencé à l’aube du 7 novembre et s’est terminée aux alentours de midi. Plusieurs unités de police, appuyées par des renforts au sol, avaient été parachutées dans la région autour de Brodec. Les membres du groupe armé auraient ouvert le feu depuis une maison où ils se terraient. Selon le ministère de l’Intérieur, les policiers ont fait tous les efforts possibles pour protéger la population civile. De sources albanaises en Macédoine, toutefois, on précise que plusieurs civils auraient été tués ou blessés au cours de l’opération. L’Union démocratique pour l’intégration, parti albanais de Macédoine dans la coalition au pouvoir dans le précédent gouvernement, parle de recours disproportionné à la force. «Les autorités avaient le devoir de rattraper les fugitifs, tout en veillant à la sécurité de la population macédonienne. Cela aurait dû se faire sans le recours à une force disproportionnée et sans mettre en danger la vie de civils, a déclaré Nicola Duckworth. «Les autorités de Macédoine doivent ouvrir une enquête sur ces homicides, afin d’assurer à la population macédonienne que les forces de l’ordre ont agi conformément aux normes internationales.» Entre 13 et 15 Albanais de souche auraient été arrêtés, parmi lesquels des habitants de Brodec soupçonnés d’avoir apporter leur soutien – en fournissant des armes notamment – au groupe. D’autres Albanais de Macédoine ont été arrêtés à Skopje le 9 novembre, lors de raids de la police qui cherchait semble-t-il des armes à leur domicile. Amnesty International demande instamment aux autorités de veiller à ce que toutes les personnes arrêtées soient traitées conformément aux normes internationales et ne soient soumises ni à des actes de torture ni à de mauvais traitements ; l’organisation dispose en effet de témoignages montrant que lors d’opérations similaires précédentes visant la communauté albanaise de Macédoine, des dérapages se sont produits. «À un moment où les tensions dans le Kosovo voisin sont exacerbées par la possibilité d’un échec sur un accord pour l’avenir du pays, il est impératif que les autorités macédoniennes ne violent pas les droits humains en tentant de désamorcer la crise et d’assurer la stabilité et la sécurité du pays», a déclaré Nicola Duckworth. Complément d’information Sept hommes, tous inculpés d’infractions graves, se sont enfuis de la prison de Dubrava au Kosovo en août. Selon certaines rumeurs, ils se cachaient au nord de la ville de Tetovo depuis leur fuite. Deux avaient été repris et un troisième, Zhavit Morina, avait été abattu par balles le1er novembre ; un autre se serait suicidé en dégoupillant une grenade au cours du raid. Les autres, parmi lesquels Ljirim Jakupi, Albanais de Bujanovac, dans le sud de la Serbie, seraient toujours en cavale. Le conflit, qui a duré six mois en Macédoine en 2001, opposait les autorités macédoniennes à des groupes armés d’Albanais de souche. Il s’est terminé par l’accord-cadre d’Ohrind, signé le 13 août 2001. Cet accord entérinait l’adoption de lois accordant des droits accrus aux populations minoritaires dans le pays, aux Albanais de Macédoine notamment qui représentent un tiers de la population du pays ; il prévoyait également l’adoption d’une nouvelle constitution reconnaissant pour la première fois les Albanais, les Rom et d’autres groupes ethniques dans son préambule. L’échec de la coalition au pouvoir à faire appliquer les dispositions de l’accord d’Ohrid a provoqué des tensions de plus en plus grandes au parlement. Document public **************************************** Pour obtenir de plus amples informations, veuillez contacter le Service de presse d’Amnesty International à Londres, au +44 (0) 20 7413 5566 Amnesty International, 1 Easton St., Londres WC1X 0DW. web : https://www.amnesty.org