Qatar. Le rejet par le ministre du Travail des appels de la campagne en faveur d’une indemnisation est « extrêmement décevant »

Réagissant aux déclarations du ministre du Travail du Qatar qualifiant de « coup de communication » la campagne d’Amnesty International appelant à l’indemnisation des travailleurs migrants pour les atteintes aux droits humains dont ils ont été victimes, Steve Cockburn, responsable du programme Justice sociale et économique à Amnesty International, a déclaré :  

 « Il est extrêmement décevant de voir les appels à une meilleure indemnisation rejetés. La grande majorité des travailleurs migrants qui sont maintenant rentrés chez eux dans des pays comme le Népal et le Bangladesh ne peuvent pas bénéficier du système actuel mis en place par le Qatar. Ces personnes n’obtiendront aucune indemnisation pour les salaires qui leur ont été volés ou pour les frais de recrutement illégaux, et les personnes ayant perdu leurs proches n’obtiendront aucune aide financière.  

 « Bien que les sommes versées cette année soient indéniablement importantes, le fait que le ministre du Qatar déclare que sa porte est ouverte aux travailleurs dont les droits ont été bafoués n’est pas suffisant et une approche beaucoup plus proactive est nécessaire pour que chacun puisse avoir accès à la justice. Le Qatar doit étendre ses fonds d’indemnisation existants ou en créer un nouveau. Personne ne prétend que cela est facile, mais avec la volonté suffisante, une solution permettant changer la vie de nombreux travailleurs pourrait être trouvée. »  

Complément d’information 

Le 2 novembre 2022, lors d’un entretien avec l’AFP, le ministre du Travail du Qatar Ali bin Samikh al Marri a qualifié de « coup de communication » la campagne d’Amnesty International appelant à l’indemnisation des travailleurs migrants pour les atteintes aux droits humains dont ils ont été victimes. Il a ajouté que la « porte [du ministère était] ouverte » et « si une personne ayant droit à une indemnisation ne l’a pas reçue, qu’elle se manifeste et nous l’aiderons. » 

En mai 2022, Amnesty et une coalition d’organisations ont lancé une campagne appelant le Qatar et la FIFA à mettre en place un programme global de réparation destiné à verser des indemnités aux travailleurs ayant été victimes d’atteintes à leurs droits dans le cadre de la préparation et la mise en place de la Coupe du monde 2022 au Qatar. Depuis, l’appel a été soutenu par de nombreuses fédérations de football et de nombreux sponsors de la Coupe du monde, et la direction mondiale de la FIFA a reconnu l’importance d’une indemnisation, bien que l’instance de football ne se soit, à ce jour, pas engagée publiquement à prendre des mesures en ce sens. 

Depuis 2018, les autorités qatariennes ont mis en place des mesures pour protéger les travailleurs des vols de salaires et améliorer leur accès à la justice, mais celles-ci ne couvrent pas tous les travailleurs, ni les atteintes commises avant la mise en place de ces systèmes. Et surtout, d’importantes failles subsistent quant à leur mise en œuvre. Par exemple, les travailleurs ayant déjà quitté le Qatar n’ont pas accès aux comités du travail ou au fonds mis en place pour les payer quand leurs salaires ne leur ont pas été versés par leurs employeurs.