Faits et chiffres. Privées de protection en Équateur

Caractéristiques de la mobilité humaine vénézuélienne

Statistiques générales relatives à la violence fondée sur le genre en Équateur :

  • Selon les statistiques de l’Institut national de la statistique et du recensement (INEC), 65 femmes sur 100 en Équateur ont subi une forme ou une autre de violence au cours de leur vie.
  • Selon les informations communiquées à Amnesty International par le parquet général, entre juin et août 2022, l’Équateur a enregistré 19 359 plaintes concernant des violences infligées à des femmes.

Statistiques relatives aux violences fondées sur le genre subies par des femmes réfugiées vénézuéliennes :

  • 72 % des femmes vénézuéliennes interrogées par Plan International estiment que cette population est exposée à une forme ou une autre de violence liée au genre en Équateur.
    • Les formes de violence les plus fréquentes sont la violence psychologique dans l’espace public et privé (51 %), le harcèlement sexuel au travail (41 %), les agressions physiques au sein du foyer (32 %) et le contrôle des revenus (10 %).
  • Indices d’une sous-déclaration. Le parquet général équatorien a enregistré 64 cas de femmes vénézuéliennes victimes de violences physiques, 521 de violences psychologiques et quatre de violences sexuelles, entre juin et août 2022.
  • Lorsqu’elles sont en transit, en particulier dans les régions proches de la frontière avec la Colombie et le Pérou, les femmes vénézuéliennes risquent fortement d’être victimes de multiples formes de violence liée au genre, notamment de violences sexuelles et de la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle et par le travail. 
  • En raison de l’obligation faite aux personnes vénézuéliennes qui veulent entrer en Équateur d’être détentrices d’un visa depuis août 2019, et aussi de la fermeture des frontières en raison de la pandémie de COVID-19 entre 2020 et 2022, les personnes vénézuéliennes ont été contraintes d’entrer sur le territoire équatorien de façon irrégulière, dans la majeure partie des cas en recourant à des moyens dominés par des organisations criminelles agissant en toute impunité.

Manque d’accès aux documents migratoires

  • La plupart des femmes vénézuéliennes en Équateur se trouvent dans une situation migratoire irrégulière. Seuls 13,37 % de la population vénézuélienne sont en situation régulière (67 185 personnes).
  • Reconnaissance du statut de personne réfugiée
    • Entre 2018 et 2022, 27 889 personnes vénézuéliennes ont sollicité le statut de personne réfugiée en Équateur. Au cours de cette période, seules 1 100 personnes vénézuéliennes, dont 555 femmes, ont obtenu le statut de personne réfugiée, 18 934 demandes ont été rejetées, et 7 855 demandes sont en cours d’examen.
    • Sur les 1 100 personnes ayant obtenu le statut de personne réfugiée entre 2018 et 2022, 1 006 ont vu leur statut reconnu au titre de la définition de la Convention de 1951, 60 au titre de la Déclaration de Carthagène et 34 sans précision.
  • Autres possibilités de régularisation du statut migratoire : les visas VERHU et VIRTE
    • En août 2019, l’État a commencé à exiger un visa pour les personnes vénézuéliennes, et il a mis en place la possibilité d’octroyer un visa de résidence temporaire exceptionnel pour raisons humanitaires (VERHU).
      • Entre le 26 août 2019 et le 27 juillet 2022, l’État équatorien a accordé au total 58 425 visas VERHU à des personnes vénézuéliennes (29 867 à des femmes et 28 558 à des hommes).
    • En juin 2022, le gouvernement a annoncé la mise en place d’une nouvelle procédure de régularisation pour les personnes vénézuéliennes, avec l’octroi d’un visa de résidence temporaire exceptionnel pour les citoyens vénézuéliens (VIRTE).
      • Cette procédure exclut les personnes vénézuéliennes qui sont entrées dans le pays de façon irrégulière après le 26 août 2019 et requiert le versement de 50 dollars des États-Unis.

Obstacles entravant l’accès des femmes vénézuéliennes aux mécanismes de protection

  • Manque d’informations sur les mécanismes existants de plainte et de protection
    • Les initiatives institutionnelles de diffusion de l’information ne comprennent pas de démarche auprès des femmes réfugiées
    • La méconnaissance des moyens d’accéder aux services disponibles est particulièrement notable là où les services spécialisés dans la violence liée au genre sont moins présents, comme à la frontière sud du pays.
      • À Huaquillas, le Département de la violence familiale (DEVIF) de la police nationale ne dispose que de deux fonctionnaires pour plusieurs cantons, le Service de la défense du peuple ne dispose pas de personnel permanent sur ce territoire, et la Défense publique ne dispose pas de personnel spécialisé dans la violence liée au genre.
  • Craintes et méfiance à l’égard des autorités
    • Selon Plan International, pour 71 % des femmes vénézuéliennes en Équateur, les cas de violence à l’égard des femmes ne sont généralement pas dénoncés, et 29 % sont d’avis contraire ; 27 % des femmes interrogées ont indiqué que le manque de confiance à l’égard des institutions publiques représente la principale raison incitant à ne pas dénoncer ces violences.
    • Les femmes vénézuéliennes ont dit redouter de s’adresser aux institutions étatiques pour demander de l’aide ou dénoncer des violences, par crainte de se voir infliger une amende qu’elles ne peuvent pas payer, et aussi d’être expulsées du pays.
    • Comme elles n’ont pas été informées de leurs droits, de nombreuses femmes vénézuéliennes ignorent que la loi équatorienne leur permet de demander une protection ou de déposer une plainte auprès du parquet, même si elles n’ont pas de document d’identité.

Carences de la réponse étatique face à la violence fondée sur le genre

  • Carences des services qui se trouvent en première ligne pour l’identification des cas de violence fondée sur le genre et la mise en œuvre de mesures visant à y faire face, comme la police nationale et le système de santé :
    • préjugés sexistes et xénophobes de la part des fonctionnaires de l’État vis-à-vis des femmes vénézuéliennes ;
    • pratiques illégales, telles que des tentatives de médiation, en cas de violences ;
    • manque de ressources humaines et économiques ;
      • selon les normes internationales, l’Équateur devrait compter 1 700 maisons d’accueil pour sa population. Le Secrétariat aux droits humains a répertorié 12 maisons d’accueil gérées par la société civile, et quatre d’entre elles reçoivent actuellement une aide financière du gouvernement central. En 2022, le budget pour les maisons d’accueil a été réduit de 18,46 %, ce qui a entraîné la fermeture de certains de ces établissements et une réduction de personnel.
  • Carences du système judiciaire :
    • préjugés vis-à-vis des femmes vénézuéliennes ; 
    • manque de connaissance des normes applicables qui permettent à toutes les personnes étrangères de déposer une plainte sans restriction ;
    • une procédure judiciaire lente, revictimisante et coûteuse dans la pratique.