Liban. Les autorités doivent lever l’immunité et permettre d’interroger les députés au sujet de l’explosion survenue au port de Beyrouth

En réaction aux informations selon lesquelles deux membres du Parlement, Ghazi Zeaiter et Ali Hassan Khalil, qui avaient tous deux refusé de coopérer à l’enquête sur l’explosion au port de Beyrouth ont été élus à la Commission parlementaire pour l’administration et la justice, Diana Semaan, directrice adjointe par intérim pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International, a déclaré :

« Le juge d’instruction actuel n’est toujours pas en mesure d’interroger ni de poursuivre Ghazi Zeaiter et Ali Hassan Khalil, car ils jouissent tous deux de l’immunité parlementaire. Nous demandons une nouvelle fois aux autorités libanaises de lever immédiatement toutes les immunités accordées aux représentants de l’État, quels que soient leur rôle ou leur position, en vue de s’acquitter de leur obligation de garantir des réparations pour les violations du droit à la vie.

« Le Liban continue de manquer à ses obligations en termes de droits humains s’agissant d’amener à rendre des comptes les responsables de l’explosion du port de Beyrouth, qui a fait plus de 200 morts. Après des mois de blocage, d’inaction et de manque de volonté politique, il est évident qu’une mission d’enquête internationale, indépendante et impartiale, telle qu’une mission d’établissement des faits de l’ONU, est essentielle pour rendre justice aux victimes et aux familles de victimes. »

Le Liban continue de manquer à ses obligations en termes de droits humains s’agissant d’amener à rendre des comptes les responsables de l’explosion du port de Beyrouth, qui a fait plus de 200 morts

Diana Semaan, Amnesty International

Complement d’information

Les membres du Parlement et anciens ministres Ghazi Zeaiter et Ali Hassan Khalil n’ont cessé de bloquer et de refuser de coopérer à l’enquête sur l’affaire de l’explosion du port de Beyrouth en 2020. Ils ont été inculpés de « négligence » criminelle, mais ont contesté cette décision la qualifiant d’injuste et affirmant qu’elle était contraire à la Constitution. À ce jour, et après plusieurs plaintes qui ont conduit à la révocation de l’ancien juge Fadi Sawwan et à de nouveaux retards dans le travail de l’actuel juge Tarek Bitar, aucun des deux n’a assisté à une quelconque session de l’enquête. Le 7 juin, les deux hommes ont été élus à la Commission parlementaire pour l’administration et la justice.

Le Liban est partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), dont l’article 6 protège le droit à la vie. Le Comité des droits de l’homme, qui interprète le PIDCP, dispose : « L’obligation de protéger le droit à la vie par la loi exige également des États parties qu’ils […fassent] procéder à des enquêtes et des poursuites sur les cas présumés de privation illégale de la vie, en sanctionnant les responsables et en assurant une réparation intégrale ».  Les enquêtes sur les allégations de violation du droit à la vie doivent toujours être « indépendantes, impartiales, promptes, approfondies, efficaces, crédibles et transparentes » et doivent « évaluer la responsabilité juridique des supérieurs hiérarchiques à raison des violations du droit à la vie commises par leurs subordonnés ».

Amnesty International et une coalition de plus de 50 organisations libanaises et internationales ont adressé un courrier au Conseil des droits de l’homme en juin 2021 appelant à la tenue d’une enquête internationale sur l’explosion survenue au port de Beyrouth.