La condamnation de 13 militant·e·s du mouvement citoyen Lutte pour le changement (LUCHA) par un tribunal militaire, à Beni, est une manœuvre honteuse visant à faire taire les voix critiques, a déclaré Amnesty International le 1er avril 2022.
La condamnation de ces 13 militant·e·s au seul motif qu’ils ont exercé leur droit à la liberté de réunion pacifique est une nouvelle tentative scandaleuse et honteuse d’éradiquer la dissidence en RDC
Flavia Mwangovya, directrice adjointe pour l’Afrique de l’Est, la Corne de l’Afrique et la région des Grands Lacs à Amnesty International
Ces militant·e·s, déjà détenus arbitrairement depuis cinq mois, ont été condamnés à 12 mois de prison supplémentaires pour avoir participé à une manifestation pacifique en novembre dernier.
« La condamnation de ces 13 militant·e·s au seul motif qu’ils ont exercé leur droit à la liberté de réunion pacifique est une nouvelle tentative scandaleuse et honteuse d’éradiquer la dissidence en RDC, a déclaré Flavia Mwangovya, directrice adjointe pour l’Afrique de l’Est, la Corne de l’Afrique et la région des Grands Lacs à Amnesty International.
La sentence doit être annulée et ces militant·e·s doivent être libérés immédiatement et sans condition
Flavia Mwangovya
« La sentence doit être annulée et ces militant·e·s doivent être libérés immédiatement et sans condition. Les autorités congolaises devraient répondre à leurs revendications légitimes en faveur d’une protection efficace des civils dans le conflit, au lieu de chercher à les bâillonner.
« Le président Félix Tshisekedi doit lever les restrictions abusives imposées dans l’espace civique sous prétexte d’état de siège et révoquer complètement le pouvoir de juger des civils conféré aux tribunaux militaires, conformément aux normes internationales relatives aux droits humains. »
Complément d’information
Les 13 militant·e·s de LUCHA ont été arrêtés le 11 novembre 2021 à Beni lors d’une manifestation pacifique qui dénonçait l’incapacité des autorités à protéger les civils contre les attaques meurtrières des groupes armés, malgré l’état de siège.
Ils sont détenus arbitrairement depuis novembre 2021, et au moins trois d’entre eux sont tombés gravement malades en raison du traumatisme lié à leur arrestation violente et des mauvaises conditions carcérales. Ils ne reçoivent pas les soins médicaux appropriés. Tous sont accusés de « provocation à désobéir aux lois » et encourent trois ans de prison.
Le président Félix Tshisekedi a décrété l’« état de siège » dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri en mai 2021 dans le but déclaré de réduire les attaques contre les civils. Cependant, sa mise en œuvre a entraîné des violations flagrantes des droits humains, notamment le transfert des pouvoirs politiques et administratifs à l’armée et à la police, une interdiction générale des manifestations et le transfert de la compétence pénale sur les civils aux tribunaux militaires. Toutes ces mesures enfreignent la Constitution congolaise, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) auquel la RDC est partie.
Depuis mai 2021, Amnesty International a recensé des dizaines de cas d’arrestation arbitraire et de détention illégale de militant·e·s pacifiques, de journalistes et d’au moins trois députés des deux provinces.