Le champion olympique Nils van der Poel a montré l’exemple aux dirigeant·e·s du monde en donnant sa médaille d’or remportée aux Jeux olympiques de Pékin 2022, pour protester contre les atteintes aux droits humains en Chine.
L’athlète suédois a donné la médaille d’or qu’il a remportée au 10 000 mètres de patinage de vitesse aux Jeux olympiques de février 2022 à Angela Gui, dont le père, Gui Minhai, est un libraire emprisonné en Chine pour des accusations infondées d’« espionnage ».
« Nils van der Poel a été un champion sportif des Jeux olympiques, il est aujourd’hui devenu un champion des droits humains. Sa courageuse décision de prendre position contre la répression de la liberté d’expression menée par la Chine devrait pousser les gouvernements à prendre des mesures face à cette situation urgente », a déclaré Alkan Akad, chercheur sur la Chine pour Amnesty International.
« Alors que la Chine utilise les Jeux olympiques et paralympiques pour redorer son image à l’échelle mondiale, des millions de personnes souffrent des atteintes aux droits humains dont elle se rend responsable : les Ouïghours détenus dans des camps d’internement, les victimes de violences sexuelles prises pour cibles pour les avoir dénoncées, ou encore les personnes comme Gui Minhai emprisonnées pour avoir simplement défendu des points de vue que le gouvernement n’approuve pas. »
Gui Minhai était l’un des cinq éditeurs et libraires de Hong Kong qui avaient disparu en 2015 après avoir publié des livres critiquant le gouvernement chinois. Il a ensuite été condamné à 10 ans de prison au terme d’un procès inique entouré de secret.
Il fait partie des centaines d’auteur·e·s, d’avocat·e·s, de militant·e·s et d’universitaires qui ont été pris pour cible dans le cadre de la campagne que la Chine mène depuis longtemps en vue de réprimer toute forme de dissidence.
Nils van der Poel a fait don de sa médaille d’or, l’une des deux qu’il a remportées aux Jeux olympiques d’hiver, cinq jours après la cérémonie de clôture des Jeux olympiques et avant les Jeux paralympiques de Pékin 2022 qui commencent le 4 mars.
« Je ne représente pas tous les athlètes olympiques, mais mes ami·e·s et moi avons consacré nos vies à viser l’excellence dans le sport, et le gouvernement chinois a choisi d’utiliser nos rêves comme une arme politique pour légitimer son régime. J’en ai fait une question personnelle et je me suis senti exploité », a déclaré Nils van der Poel à Amnesty International.
« Je souhaite que la situation des droits humains en Chine s’améliore et que Gui Minhai soit libéré. C’est beaucoup demander, mais c’est la seule chose raisonnable à demander. »
Angela Gui est née en Suède après que son père avait quitté la Chine pour s’installer en Scandinavie après la répression de Tiananmen en juin 1989, avant d’obtenir plus tard la nationalité suédoise.
Elle fait campagne sans relâche pour la libération de son père et dit qu’elle a été victime d’actes d’intimidation de la part d’agents de l’État chinois visant à la réduire au silence.
« J’aurais bien entendu préféré que la situation ne rende pas cette action nécessaire. Mais il me semble important que cette médaille représente la solidarité avec les personnes emprisonnées pour raisons politiques comme mon père et les autres victimes des atteintes aux droits humains de Pékin », a déclaré Angela Gui à Amnesty International.
Qui est Gui Minhai ?
La librairie Causeway Bay Bookstore que dirigeait Gui Minhai était connue pour ses ouvrages sur les dirigeants chinois et les scandales politiques, interdits en Chine continentale mais remportant un vif succès auprès des touristes de Chine continentale visitant Hong Kong.
Porté disparu en Thaïlande en octobre 2015, il était réapparu à la télévision d’État chinoise en 2016, faisant devant la caméra des « aveux » semble-t-il forcés dans lesquels il reconnaissait un accident de la circulation avec délit de fuite plusieurs années auparavant.
Les gouvernements du monde entier devraient suivre l’exemple de Nils van der Poel en renforçant les efforts en vue d’amener le gouvernement chinois à rendre des comptes, non seulement pour les poursuites injustes contre Gui Minhai, mais également pour le traitement réservé aux nombreuses autres personnes emprisonnées pour avoir simplement exercé leurs droits
Alkan Akad, Amnesty International
Libéré en 2017, Gui Minhai a manifestement continué à faire l’objet d’une étroite surveillance policière et ne pouvait pas circuler librement. Il a été interpelé par des policiers en civil en janvier 2018, alors qu’il se rendait de Shanghai à Pékin pour raisons médicales en compagnie de deux diplomates suédois.
En février 2020, il a été condamné à 10 ans d’emprisonnement pour des accusations forgées de toutes pièces de « divulgation illégale de renseignements à des entités étrangères ».
« Le système de censure et de sanction appliqué par la Chine aura peut-être muselé le débat sur les droits humains pendant les Jeux olympiques, mais ce geste puissant envoie un message galvanisant faisant savoir que la persécution honteuse des voix critiques que mène la Chine ne sera pas tolérée », a déclaré Alkan Akad.
« Les gouvernements du monde entier devraient suivre l’exemple de Nils van der Poel en renforçant les efforts en vue d’amener le gouvernement chinois à rendre des comptes, non seulement pour les poursuites injustes contre Gui Minhai, mais également pour le traitement réservé aux nombreuses autres personnes emprisonnées pour avoir simplement exercé leurs droits. »
Complément d’information
En Chine, les dissident·e·s, notamment des auteur·e·s, des universitaires et des journalistes, sont systématiquement soumis à une surveillance, des actes de harcèlement et d’intimidation et des arrestations et détentions illégales. Parmi les personnes prises pour cible figurent cinq personnes représentées par la campagne d’Amnesty International menée pendant les Jeux olympiques de Pékin Libérez les cinq.
L’avocat spécialiste des droits humains Gao Zhisheng a disparu le 13 août 2017 après avoir publié des mémoires décrivant les actes de torture et les mauvais traitements dont il a été victime pendant qu’il était détenu entre 2009 et 2014.
L’avocate devenue journaliste Zhang Zhang est actuellement emprisonnée pour avoir « cherché à provoquer des conflits et troublé l’ordre public », après avoir publié des informations sur la pandémie de COVID-19 à Wuhan.
Le moine tibétain Rinchen Tsultrim a été condamné à quatre ans et six mois d’emprisonnement après avoir exprimé des opinions critiques des politiques du gouvernement.
L’universitaire ouïghour Ilham Tohti a été condamné à la réclusion à perpétuité pour avoir suggéré des approches constructives pour mettre fin au traitement inégal des groupes ethniques en Chine.
La militante féministe Li Qiaochu a été arrêtée pour avoir dénoncé les actes de torture commis par les autorités chinoises.